LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Patrick,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 7ème chambre, en date du 1er avril 2008, qui, pour infraction au code de l'urbanisme, l'a condamné à 7 000 euros d'amende, a ordonné, sous astreinte, la remise en état des lieux et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 7 de la Convention européenne des droits de l'homme, 121-1 du code pénal, L. 480-4, L. 480-5 du code de l'urbanisme, préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Patrick X... coupable de non respect des prescriptions du permis de construire et l'a condamné à une amende de 7 000 euros outre à la remise en état des lieux et au paiement de diverses sommes aux parties civiles à titre de dommages-intérêts ;
" aux motifs qu'il ressort de la procédure et des débats que par arrêté du 3 mars 1995, le maire de Tourves a approuvé le lotissement « Les Terrasses du château » ; que la société Cofidim, dont le gérant est le prévenu, a conclu divers contrats de construction de maisons individuelles, la maîtrise d'oeuvre étant confiée à la société ADM au sein de laquelle Gérard Y... s'est dit être conducteur de travaux ; que le 25 septembre 1998, Pierre Z... est allé déposer plainte auprès des gendarmes en signalant qu'il n'avait pu obtenir le certificat de conformité pour sa villa, le permis qui lui avait été délivré imposant, après avis en ce sens de l'architecte des Bâtiments de France, des tuiles de type « canal » à l'exclusion des tuiles « romanes », lesquelles avaient été apposées ; que les gendarmes identifiaient les autres propriétaires visés à la prévention qui, contrairement à ce qu'a pu soutenir la défense, se trouvaient dans la même situation et qui ont déposé plainte ; que pour prétendre à sa relaxe, le prévenu fait valoir qu'il avait confié à la société ADM une maîtrise d'oeuvre complète, qu'il résulte d'une attestation de Jean Luc A... qu'il a fourni à celle-ci tous les documents nécessaires à l'obtention des permis et notamment le règlement du lotissement qui avait été accepté sans aucune restriction et qu'il lui a demandé de respecter scrupuleusement ; que dans le contrat, il était précisé « le maître d'ouvrage s'interdit de donner directement des ordres aux entreprises ou d'imposer des choix de technique ou de matériaux ; que deux architectes coordonnateurs sont également intervenus, que seuls certains permis ont été accordés en précisant « tuiles canal », d'autres au contraire prescrivant des tuiles « romanes » d'autres sans prescription particulière, que le cahier des charges acceptait les tuiles romanes vieillies, que la société Cogidim ayant été placée en liquidation judiciaire, il est dans l'impossibilité absolue d'exécuter la sanction prononcée à son encontre ; que, cependant, le prévenu, en sa qualité de gérant du groupe Cofidim, promoteur, a été bénéficiaire des travaux ; qu'il lui appartenait en tant que professionnel de s'assurer que les constructions réalisées étaient conformes aux permis délivrés dont les prescriptions devaient impérativement être respectées ; que le moyen tiré du fait que d'autres permis délivrés pour la construction d'autres villas dans le même lotissement n'auraient pas exigé de tuiles « canal » est inopérant ; qu'à l'époque des faits, la responsabilité des personnes morales n'était pas prévue en matière d'infraction au permis de construire ; qu'en tout état de cause, le législateur lorsqu'il a introduit la responsabilité des personnes morales a expressément prévu que celle-ci n'exclut pas celle des personnes physiques ; que le prévenu ne peut valablement invoquer le fait que le groupe Cofidim ait été placé en liquidation judiciaire pour faire échec à une mesure de restitution, une telle mesure incombant au bénéficiaire des travaux au moment des faits ;
" alors que, d'une part, nul n'est responsable pénalement que de son propre fait ; que Patrick X... avait fait valoir qu'il avait expressément chargé un architecte de s'assurer de la conformité de la construction aux prescriptions des permis de construire et du cahier des charges du lotissement et qu'il lui avait demandé de régler le problème concernant la couverture des maisons en tuiles « romanes » et « canal » ; qu'en retenant la responsabilité de Patrick X... en tant que bénéficiaire des travaux aux motifs qu'il lui appartenait de s'assurer que les constructions réalisées étaient conformes au permis de construire sans répondre à ce moyen pertinent, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
" alors que, d'autre part, nul ne peut être puni pour un crime ou un délit dont les éléments ne sont pas clairement définis par la loi ; que Patrick X... avait fait valoir que le cahier des charges du lotissement au sein duquel étaient construites les maisons individuelles autorisait les tuiles romanes vieillies et imposaient un aspect extérieur uniforme pour toutes les habitations ; que Patrick X... faisait encore valoir que certains permis de construire de plusieurs villas du lotissement prévoyaient expressément la pose de tuiles romanes et qu'il avait été décidé dans le respect du cahier des charges du lotissement d'équiper toutes les villas de tuiles romanes ; qu'en déclarant Patrick X... coupable de non respect des prescriptions du permis de construire sans rechercher si celles-ci ne se trouvaient pas en contradiction avec le cahier des charges rendant ambiguës les obligations imparties au bénéficiaire des travaux et entachant en conséquence la loi pénale d'imprécision, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard des textes susvisés " ;
Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que la société Groupe Cogidim, promoteur immobilier, a, en 1998, fait édifier et commercialiser vingt-deux maisons individuelles, toutes couvertes de tuiles " romanes " ; que Patrick X..., gérant de cette société, qui a, depuis lors, fait l'objet d'une procédure collective, a été poursuivi devant le tribunal correctionnel pour exécution de travaux en méconnaissance des prescriptions des permis de construire, imposant, pour dix de ces constructions, la mise en oeuvre de " tuiles canal " ;
Attendu que, pour écarter l'argumentation de Patrick X..., qui invoquait le cahier des charges autorisant la pose de tuiles romanes ainsi que la convention par laquelle la société dont il était le dirigeant avait confié la maîtrise d'oeuvre à une entreprise tierce en s'interdisant d'imposer des choix de matériaux, et le déclarer coupable, l'arrêt retient qu'en sa qualité de gérant du groupe Cofidim, promoteur, le prévenu a été le bénéficiaire des travaux et qu'il lui appartenait, en tant que professionnel, de s'assurer que les constructions respectaient les prescriptions impératives des permis délivrés ;
Attendu qu'en cet état, il est vainement fait grief à la cour d'appel, qui a répondu sans insuffisance aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie, de n'avoir pas caractérisé l'élément intentionnel des faits relevés à la charge du prévenu ;
Qu'en effet, la seule constatation de la violation en connaissance de cause d'une prescription légale ou réglementaire implique, de la part de son auteur, l'intention coupable exigée par l'article L. 121-3, alinéa 1er, du code pénal ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles, L. 480-4, L. 480-5 L. 480-7 du code de l'urbanisme, L. 223-22 du code commerce, préliminaire, 591, 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a condamné Patrick X... à la remise en état des lieux et au paiement de diverses sommes aux parties civiles à titre de dommages-intérêts ;
" aux motifs que le prévenu ne peut valablement invoquer le fait que le groupe Cofidim ait été placé en liquidation judiciaire pour faire échec à une mesure de restitution, une telle mesure incombant au bénéficiaire des travaux au moment des faits ;
" alors que les mesures de restitution ne constituent pas des sanctions pénales mais des mesures à caractère réel ; qu'elles ne sauraient peser sur le gérant d'une société pris à titre personnel dès lors qu'il n'est pas établi que celui-ci a commis une faute détachable de ses fonctions de gérant ; que Patrick X... faisait valoir qu'il n'était que le gérant de la société Cofidim qui seule pouvait être considérée comme bénéficiaire des travaux au moment des faits ; qu ‘ en condamnant Patrick X..., poursuivi en qualité de gérant de la société Cofidim, à supporter personnellement les mesures de restitution au seul motif qu'une telle mesure incombait au bénéficiaire des travaux au moment des faits, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard des textes susvisés " ;
Attendu que le demandeur fait vainement grief à l'arrêt d'avoir ordonné à sa charge la démolition de la construction irrégulièrement édifiée, dès lors que cette mesure, prévue par l'article L. 480-5 du code de l'urbanisme, incombe au bénéficiaire des travaux à la date des faits ;
Qu'ainsi, le moyen ne peut être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1- 1du code de procédure pénale : M. Farge conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, Mme Radenne conseiller rapporteur, Blondet conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Souchon ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;