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21/01/2009 | FRANCE | N°08-60400

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 21 janvier 2009, 08-60400


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu les articles 346 et 349 du code de procédure civile ;
Attendu, selon ce premier texte, que le juge, dès qu'il a communication de la demande, doit s'abstenir jusqu'à ce qu'il ait été statué sur la récusation ; que selon le second, si le juge s'oppose à la récusation ou ne répond pas, la demande de récusation est jugée sans délai par la cour d'appel ;
Attendu, selon le jugement attaqué et les pièces de la procédure, que par requête du 13 nove

mbre 2007, le syndicat général des transports du Vaucluse CFDT a contesté devant ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu les articles 346 et 349 du code de procédure civile ;
Attendu, selon ce premier texte, que le juge, dès qu'il a communication de la demande, doit s'abstenir jusqu'à ce qu'il ait été statué sur la récusation ; que selon le second, si le juge s'oppose à la récusation ou ne répond pas, la demande de récusation est jugée sans délai par la cour d'appel ;
Attendu, selon le jugement attaqué et les pièces de la procédure, que par requête du 13 novembre 2007, le syndicat général des transports du Vaucluse CFDT a contesté devant le tribunal d'instance d'Avignon (Greffe détaché de Cavaillon) la désignation le 9 novembre 2007, par le syndicat national des activités du transport et du transit (SNATT) CFE-CGC, de M. X... en qualité de délégué syndical central ; que par requête du 16 novembre 2007, la société Omnitrans a contesté cette même désignation devant le tribunal d'instance de Villeurbanne lequel, par jugement du 5 février 2008, a soulevé d'office la litispendance et s'est déclaré incompétent à connaître du litige au profit du tribunal d'instance d'Avignon (Greffe détaché de Cavaillon) ; qu'à l'audience du 28 mars 2008, M. X... et le SNATT CFE-CGC ont formé une demande de récusation à l'encontre du magistrat du tribunal d'instance d'Avignon en charge du dossier ;
Attendu que par jugement du 4 avril 2008, le tribunal a déclaré cette demande irrecevable ;
Qu'en statuant comme il a fait, alors que seule la cour d'appel avait qualité pour apprécier la recevabilité et le bien-fondé de la demande de récusation, le tribunal a violé le texte susvisé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu à renvoi, en application de l'article 627 du code de procédure civile, le tribunal d'instance d'Avignon (greffe détaché de Cavaillon) se trouvant dessaisi du litige par l'effet de l'arrêt de la cour d'appel de Lyon du 25 juillet 2008, devenu irrévocable, qui, statuant sur contredit, a infirmé le jugement du 5 février 2008 et dit que le tribunal d'instance de Villeurbanne était compétent à connaître du litige ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du premier moyen et sur les second et troisième moyens :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 4 avril 2008, entre les parties, par le tribunal d'instance d'Avignon, greffe détaché de Cavaillon ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
DIT que le tribunal a statué à tort sur la demande de récusation ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un janvier deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour le syndicat national des activités du transport et du Snatt CFE-CGC et M. X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF au jugement attaqué d'AVOIR déclaré irrecevable la demande de récusation présentée par Monsieur X... et le SNATT CFE-CGC et de les AVOIR condamné solidairement à payer une amende civile de 2.000 par application des dispositions de l'article 32-1 du Code de procédure civile, et d'AVOIR en conséquence, invalidé la désignation de Monsieur X... en qualité de délégué syndical central CFE-CGC et condamné solidairement Monsieur X... et le SNATT CFE-CGC à payer au syndicat général des transports du Vaucluse FGTE-CFDT, à Monsieur Y... et à la société OMNITRANS la somme de 1.000 chacun en application de l'article 700 du Code de procédure civile,
AUX MOTIFS QUE Monsieur Bernard X... et le SNATT CFE-CGC soutiennent que le Juge Ghani BOUGUERRA doit se dessaisir par application des dispositions de l'article 341-6° du nouveau Code de procédure civile ; que cependant, si un tel moyen de procédure peut légitimement être utilisé par tout justiciable qui l'estime fondé, encore faut-il ne pas faire une lecture sélective des dispositions du Code de Procédure Civile et faire en sorte d'appliquer avec précision et loyauté les règles procédurales que l'on prétend vouloir faire respecter ; qu'ainsi, aux termes de l'article 342 du Code de Procédure Civile : "La partie qui veut récuser un juge doit, à peine d'irrecevabilité, le faire dés qu'elle a connaissance de la cause de récusation." ; qu'or, Monsieur Bernard X... et le SNATT CFE-CGC, dont le Conseil a avisé le Tribunal de sa constitution dés le 5 décembre 2007, n'ignoraient nullement la composition du tribunal, qui n'a pas varié lors des audiences des 7 décembre 2007,11 janvier, 22 février et 28 mars 2008 auxquelles l'affaire a été appelée, et se sont abstenus de faire connaître à la juridiction leur demande de récusation ; que de même, la demande de récusation doit être formée par acte remis au secrétariat de la juridiction à laquelle appartient le juge ou par déclaration consignée dans un procès-verbal, contre récépissé, conformément aux dispositions de l'article 344 du Code de Procédure Civile ; que Monsieur Bernard X... et le SNATT CFE-CGC n'ont respecté aucune des dispositions prescrites et se sont contentés de faire soutenir leurs conclusions de récusation, sans les remettre préalablement à la juridiction, ce qui démontre une particulière déloyauté dans la manière d'agir ; qu'en tout état de cause, leur demande est irrecevable par application des dispositions des textes susvisés ; qu'elle témoigne, par ailleurs, d'une manoeuvre manifestement dilatoire révélant une volonté d'empêcher que le litige soit enfin tranché ; que cette attitude, abusive, doit être sanctionnée par la condamnation solidaire de Monsieur Bernard X... et du SNATT CFECGC à une amende civile d'un montant de 2 000 par application des dispositions de l'article 353 du Code de Procédure Civile ;
1. ALORS QU'aux termes de l'article 346 du Code de procédure civile, le juge, dès qu'il a communication d'une demande de récusation formée à son encontre, doit s'abstenir jusqu'à ce qu'il ait été statué sur la récusation ; qu'en outre, selon l'article 349 du même Code, la demande de récusation est jugée par la cour d'appel ; que le juge contre lequel est dirigé la demande de récusation ne peut donc statuer lui-même sur cette demande ; qu'en déclarant lui-même irrecevable la demande de récusation formée à son encontre, le juge d'instance a violé les articles 346 et 349 du Code de procédure civile, ensemble l'article 6, § 1 de la Convention européenne des droits de l'Homme ;
2. ALORS subsidiairement QUE la demande de récusation est formée par acte remis au secrétariat de la juridiction à laquelle appartient le juge ou par une déclaration qui est consignée par le secrétaire dans un procès-verbal ; qu'elle peut notamment être faite à l'audience, par dépôt de conclusions écrites de récusation ou par voie de déclaration, dont le secrétaire-greffier doit alors dresser procès-verbal ; qu'en jugeant que la demande de récusation présentée par Monsieur X... et le SNATT CFE-CGC était irrecevable faute de respecter le formalisme nécessaire, quand ceux-ci avaient déposé à l'audience des conclusions écrites de récusation et les avaient soutenu oralement, le tribunal d'instance a violé l'article 344 du Code de procédure civile ;
3. ALORS tout aussi subsidiairement QUE les exposants fondaient leur demande de récusation sur la décision rendue par la Cour de cassation le 12 mars 2008 ; qu'en jugeant irrecevable comme tardive la demande de récusation au prétexte inopérant que les demandeurs n'ignoraient nullement la composition du tribunal qui n'avait pas varié lors des audiences des 7 décembre 2007, 11 janvier et 22 février 2008 et se sont abstenus de faire connaître à la juridiction leur demande de récusation, quand ils n'avaient pas connaissance du fondement de leur demande lors des audiences précédentes, le tribunal d'instance a violé l'article 342 du Code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)

IL EST FAIT GRIEF au jugement attaqué d'AVOIR rejeté l'exception d'incompétence soulevée par Monsieur X... et le SNATT CFE-CGC, et en conséquence, invalidé la désignation de Monsieur X... en qualité de délégué syndical central CFE-CGC, et condamné solidairement Monsieur X... et le SNATT CFE-CGC à payer au syndicat général des transports du Vaucluse FGTE-CFDT, à Monsieur Y... et à la société OMNITRANS la somme de 1.000 chacun en application de l'article 700 du Code de procédure civile,
AUX MOTIFS QU'aux termes de l'article 42 du Code de Procédure Civile : "La juridiction compétente est, sauf disposition contraire, celle du lieu où demeure le défendeur. S'il y a plusieurs défendeurs, le demandeur saisit, à son choix, la juridiction du lieu où demeure l'un d'eux." ; que ce texte, d'une portée générale et qui n'est contredit par aucune disposition contraire ou spécifique à la matière, doit recevoir pleine application en l'espèce ; que par ailleurs, il résulte des pièces versées aux débats par le requérant que Monsieur Bernard X... exerce les fonctions de Directeur de l'Agence de Cavaillon de la Société OMNITRANS, ce que celui-ci ne conteste d'ailleurs pas ; que l'évidence conduit à constater que la fonction de délégué syndical central a vocation à s'exercer sur l'ensemble des sites de l'entreprise, y compris sur celui de Cavaillon dans lequel Monsieur Bernard X... dispose des pouvoirs de direction ; qu'enfin, il convient de relever que le Tribunal de Villeurbanne, également saisi du même litige, s'est dessaisi au profit de la présente juridiction par jugement du 5 février 2008 après avoir soulevé d'office l'exception de litispendance ; qu'or, l'article 105 du Code de Procédure Civile rappelle que la décision rendue dans ce cadre s'impose à la juridiction de renvoi ; que le dessaisissement du tribunal d'instance d'Avignon-Greffe Détaché de Cavaillon aboutirait à priver les demandeurs d'une juridiction à même de pouvoir trancher le litige et constituerait un déni de justice au sens de l'article 4 du Code Civil ; que la juridiction de céans est, dés lors, pleinement compétente pour statuer sur la requête qui lui est soumise ;
1. ALORS QU'en cas de contestation sur la désignation d'un délégué syndical central, le tribunal d'Instance territorialement compétent est celui du siège social de l'entreprise ; qu'en l'espèce, Monsieur X... ayant été désigné par le SNATT CFE-CGC, en qualité de délégué syndical central au sein de la société OMNITRANS, seul le tribunal d'Instance du lieu du siège social de cette société était compétent ; qu'en décidant le contraire, le tribunal d'instance a violé les articles L. 412-12 et L. 412-15 du code du travail ;
2. ALORS QUE les exposants soulignaient que la décision du tribunal d'instance de Villeurbanne du 5 février 2008 avait été frappée de contredit et de pourvoi, et que le greffe du tribunal d'instance de Villeurbanne n'avait donc pu transmettre le dossier initié par la société OMNITRANS au tribunal d'instance de Cavaillon ; qu'en se fondant cependant sur cette décision pour retenir sa propre compétence, le tribunal d'instance a violé les articles 97 et 104 du Code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(ENCORE PLUS SUBSIDIAIRE)
IL EST FAIT GRIEF au jugement attaqué d'AVOIR invalidé la désignation de Monsieur X... en qualité de délégué syndical central, et condamné solidairement Monsieur X... et le SNATT CFE-CGC à payer au syndicat général des transports du Vaucluse FGTECFDT, à Monsieur Y... et à la société OMNITRANS la somme de 1.000 chacun en application de l'article 700 du Code de procédure civile,
AUX MOTIFS QU'iI convient, à ce stade, de noter que Monsieur Bernard X... et le SNATT CFE-CGC ont indiqué ne pas vouloir aborder le fond du litige malgré la demande, qui ne nécessite aucun formalisme particulier, qui leur en a été faite à l'audience ; qu'en agissant ainsi, ils ont fait choix d'une stratégie de défense dont ils ne peuvent imposer les effets, purement dilatoires, ni au tribunal ni à leurs contradicteurs ; que malgré la pétition de principe qu'ils ont entendu soutenir, ils ont formulé des observations sur le fond (ce qui a été dûment consigné sur le plumitif d'audience) en soutenant que la délégation de pouvoir est caduque, ce que conteste la société OMNITRANS ; que Monsieur Bernard X... ne conteste pas, par ailleurs, exercer les fonctions de Directeur d'Agence au sein de l'entreprise OMNITRANS et, à ce titre, disposer des pouvoirs d'autorité, de direction et de contrôle sur les salariés de ladite agence ; qu'il apparaît que Monsieur Bernard X... figure sur l'organigramme de direction de l'entreprise OMNITRANS et détient le pouvoir de signer les contrats de travail et les notes de service et de délivrer les sanctions et avertissements, comme cela résulte sans équivoque des pièces versées aux débats tant par les requérants que par la société OMNITRANS ; que Monsieur Bernard X... dispose, ainsi, de la plénitude des pouvoirs habituellement dévolus à l'employeur et, au surplus, conférés par une délégation particulière d'autorité établie par écrit, lui permettant d'être assimilé au chef d'entreprise ; que ses fonctions de direction au sein de l'entreprise OMNITRANS, amplement démontrées, et la délégation particulière d'autorité dont ils dispose sont incompatibles avec l'exercice du mandat de délégué syndical central ; qu'il y a lieu, en conséquence, d'invalider sa désignation tant en qualité de délégué syndical central pour le syndicat SNATT CFE-CGC de l'entreprise OMNITRANS ;
ALORS QUE le juge saisi d'une exception d'incompétence ne peut statuer sur le fond du litige qu'après avoir pris une décision mettant en demeure les parties de conclure sur le fond ; qu'en statuant au fond, sans avoir pris une décision mettant en demeure les exposants de conclure sur le fond, le tribunal d'instance a violé l'article 76 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-60400
Date de la décision : 21/01/2009
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Analyses

RECUSATION - Compétence - Cour d'appel - Appréciation de la recevabilité de la demande - Portée

En vertu des articles 346 et 349 du code de procédure civile, le juge qui s'oppose à sa récusation par une partie doit s'abstenir jusqu'à ce que la cour d'appel, qui seule a qualité pour apprécier la recevabilité et le bien-fondé de la demande de récusation, ait statué. Doit dès lors être cassé le jugement qui déclare une telle demande irrecevable et statue sur le fond du litige


Références :

articles 346 et 349 du code de procédure civile

Décision attaquée : Greffe détaché de Cavaillon, 04 avril 2008

Dans le même sens que : Soc., 24 septembre 1997, pourvoi n° 97-42811, Bull. 1997, V, n° 237 (cassation)


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 21 jan. 2009, pourvoi n°08-60400, Bull. civ. 2009, V, n° 20
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2009, V, n° 20

Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp
Avocat général : M. Foerst
Rapporteur ?: Mme Darret-Courgeon
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.60400
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