LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- X... Dominique,- Y... Jean-Marc,
contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, 9e chambre, en date du 6 décembre 2007, qui, sur renvoi après cassation, dans la procédure suivie contre le premier, du chef de complicité d'abus de biens sociaux, et contre le second, du chef de recel d'abus de biens sociaux, a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 3 décembre 2008 où étaient présents : M. Pelletier président, Mme Ract-Madoux conseiller rapporteur, M. Dulin, Mme Desgrange, M. Rognon, Mme Nocquet, M. Bayet conseillers de la chambre, Mmes Slove, Leprieur, Labrousse conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Di Guardia ;
Greffier de chambre : Mme Lambert ;
Sur le rapport de Mme le conseiller RACT-MADOUX, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIÉ, de Me BOUTHORS, de la société civile professionnelle GASCHIGNARD et de la société civile professionnelle GATINEAU et FATTACCINI, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DI GUARDIA ;
Les avocats des demandeurs ont à nouveau été entendus en leurs observations ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure qu'en exécution d'un protocole du 14 mars 1991, Diane A..., épouse X..., décédée le 18 mai 2001 en cours d'instruction, a cédé, pour la somme de 458 millions de francs, à la Compagnie immobilière Phoenix (CIP), dirigée par Jean-Marc Y..., une partie des actions qu'elle détenait dans la Société fermière du casino municipal de Cannes (SFCMC), dont elle était le président du conseil d'administration, ainsi que dans les sociétés Majestic et Cannes Balnéaire ; que la CIP a, en contrepartie, vendu à la SFCMC, la totalité des actions de la société Gray d'Albion, exploitant l'hôtel du même nom, pour 570 millions de francs ; qu'estimant ces cessions surévaluées au bénéfice de Diane A... et au préjudice de la SFCMC, des actionnaires de cette dernière ont porté plainte en se constituant partie civile, le 26 octobre 1994 ; que Dominique X... et Jean-Marc Y... ont été renvoyés devant le tribunal correctionnel par ordonnance du 19 mars 2002, le premier pour complicité d'abus de biens sociaux commis par Diane A... et le second pour recel ;
En cet état ;
Sur le deuxième moyen de cassation proposé par la société civile professionnelle Piwnica et Molinié pour Dominique X... et pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, L. 223-23 et L. 242-6 3° du code de commerce, 8, 388, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception tirée de la prescription de l'action publique ;
" aux motifs que, sur la prescription alléguée de cette infraction, qu'il n'est pas contesté que, lors de l'assemblée générale de la SFCMC du 19 avril 1991, les actionnaires ont été informés de l'acquisition des titres de la société Gray d'Albion et du prix de cette acquisition ; qu'ils ont également eu connaissance de la prise de participation de la CIP dans le capital de la SFCMC à hauteur de 20 millions de francs ; qu'en revanche, et alors qu'un article de la presse spécialisée du 18 avril 1991 faisait état d'une valorisation de la participation de CIP dans la SFCMC sur la base d'un prix de l'action de 4 850 francs, il n'apparaît pas, le procès-verbal de cette assemblée générale n'en faisant en tout cas pas mention, que le prix effectif de la cession intervenue ait été révélé ; qu'au contraire, selon Philippe C..., Diane A... aurait, durant ladite assemblée, refusé de répondre à sa demande sur ce point, au motif qu'il s'agissait d'une affaire de famille, et que cette question ne regardait pas les actionnaires ; que, lors de l'assemblée générale de la SFCMC du 29 octobre suivant, un autre actionnaire, M. D..., s'est vu répondre que le prix des actions Majestic et Fermière ne serait pas révélé, « les opérations entrant dans le cadre d'une opération complexe telle que définie par la SBF » ; que la convention litigieuse est restée secrète jusqu'à sa saisie, le 4 avril 1995, lors d'une perquisition en l'étude de Dominique X... ; que le contenu du protocole n'a été communiqué ni aux administrateurs ni aux commissaires aux comptes ni aux actionnaires lors de la tenue des assemblées générales, l'expert désigné en référé par le tribunal de commerce pour rechercher si « les conditions d'acquisition par la CIP d'une partie du capital de la SFCMC étaient ou non équitables et justifiées » n'en étant lui-même informé que le 11 mai 1995 ; que c'est à l'occasion de l'approbation des comptes de l'exercice 1991 de la CIP, soit le 30 juin 1992, que les actionnaires ont pu avoir connaissance des conditions financières de toutes les opérations contenues dans l'accord du 14 mars 1991 ; que ce n'est donc qu'à compter de cette date que le délit est apparu et a pu être constaté dans des conditions permettant l'exercice de l'action publique ; que les constitutions de parties civiles de Jean-Marie E... et de la société Maison Antoine Baud, et d'Alain F... qui ont mis en mouvement l'action publique ont été déposées moins de trois ans plus tard ;
" 1°) alors que, comme le soutenait Dominique X... dans ses conclusions régulièrement déposées et comme la Cour de cassation est en mesure de s'en assurer par l'examen de la procédure, la plainte déposée le 26 octobre 1994 par les actionnaires agissant à titre personnel et non « ut singuli », Jean-Marie E... et la société Maison Antoine Baud du chef d'abus de biens sociaux constituait une simple dénonciation, insusceptible en tant que telle d'interrompre la prescription de l'action publique (ce qui a été également le cas de la plainte déposée à titre personnel du chef d'abus de biens sociaux par Alain F... le 29 décembre 1994) ; qu'il en résulte que le premier acte de poursuite était constitué par le réquisitoire introductif daté du 21 novembre 1994, ce qui amènera la Cour de cassation à constater que l'action publique était prescrite à la date de cet acte ;
" 2°) alors que la prescription de l'action publique du chef d'abus de biens sociaux court à compter de l'assemblée générale par laquelle celle-ci est informée de l'opération susceptible de caractériser ce délit ; que l'abus de biens sociaux commis au détriment de la société fermière du casino municipal de Cannes par Diane A..., épouse X..., tel que visé par la prévention, consiste en un surcoût du prix d'acquisition de la société Gray d'Albion et qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que dès l'assemblée générale du 18 avril 1991, les actionnaires de la SFCMC ont été en mesure de s'assurer de l'existence et de l'importance de ce surcoût puisqu'ils ont non seulement été informés de l'acquisition des titres de la société Gray d'Albion mais également du prix de cette acquisition et de la participation de la CIP dans le capital de la SFCMC à hauteur de 20 % en sorte qu'en refusant de constater la prescription de l'action publique à la date où ont été initiées les poursuites, la cour d'appel a méconnu le principe susvisé ;
" 3°) alors que la constatation par les juges du fond de la dissimulation de nature à entraîner le report du point de départ de la prescription ne doit pas procéder de motifs contradictoires ou erronés et que la cour de renvoi, qui relevait expressément dans sa décision que les actionnaires avaient, au cours des deux assemblées générales successives des 18 avril 1991 et 29 octobre 1991 de la société Fermière du casino municipal de Cannes, formulé de façon récurrente une demande précise d'explication concernant le prix de cession par Diane A..., épouse X... à la société CIP des actions Majestic et Fermière lui appartenant en propre, ce qui indique clairement, d'une part, qu'ils savaient que cette cession constituait la contrepartie de l'opération de cession par la société CIP à la société SFCMC de la société Gray d'Albion (opération croisée) et, d'autre part, qu'ils suspectaient l'existence d'un intérêt personnel de la dirigeante de la SFCMC dans l'opération, ne pouvait, sans se contredire, refuser de fixer le point de départ de la prescription à la date du 18 avril 1991 et, en tout cas, au plus tard à la date du 29 octobre 1991, dates auxquelles les actionnaires étaient en mesure de déclencher l'action publique et constater par voie de conséquence la prescription de cette action ;
" 4°) alors que la cour de renvoi, qui constatait expressément qu'à la demande d'explication des actionnaires avait été publiquement opposé lors des deux assemblées générales un refus, ne pouvait, sans se contredire, user de la notion juridique de dissimulation pour reculer artificiellement le point de départ de la prescription, ce refus étant suffisamment éloquent par lui-même pour révéler aux actionnaires l'éventualité d'un abus de biens sociaux commis par la dirigeante au profit de la société Fermière du casino municipal de Cannes ;
Sur le premier moyen de cassation proposé par Me Bouthors pour Jean-Marc Y... et pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 1382 du code civil, L. 225-38, L. 225-40 et L. 242-6 du code de commerce, 121-6 et 121-7 du code pénal, 2, 8, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de prescription opposée aux parties civiles ;
" aux motifs que, l'infraction d'abus de biens sociaux et de pouvoirs étant caractérisée à l'encontre de Diane A..., épouse X..., en tous ses éléments, la prescription alléguée des faits constitutifs de ces infractions n'était pas acquise ; qu'il n'est pas contesté que, lors de l'assemblée générale de la SFCMC du 19 avril 1991, les actionnaires ont été informés de l'acquisition des titres de la société Gray d'Albion et du prix de cette acquisition ; qu'ils ont également eu connaissance de la prise de participation de la CIP dans le capital de la SFCMC à hauteur de 20 % ; qu'en revanche, et alors qu'un article de la presse spécialisée du 18 avril 1991 faisait état d'une valorisation de la participation de CIP dans la SFCMC sur la base d'un prix de l'action de 4 850 francs, il n'apparaît pas, le procès-verbal de cette assemblée générale n'en faisant en tout cas pas mention, que le prix effectif de la cession intervenue ait été révélé ; qu'au contraire, selon Philippe C..., Diane A..., épouse X..., aurait, durant ladite assemblée, refusé de répondre à sa demande sur ce point, au motif qu'il s'agissait d'une affaire de famille, et que cette question ne regardait pas les actionnaires ; que, lors de l'assemblée générale de la SFCMC du 29 octobre suivant, un autre actionnaire, M. D..., s'est vu répondre que le prix des actions Majestic et Fermière ne serait pas révélé, « les opérations entrant dans le cadre d'une opération complexe telle que définie par la SBF » ; que la convention litigieuse est restée secrète jusqu'à sa saisie, le 14 avril 1995, lors d'une perquisition en l'étude de Dominique X... ; que le contenu du protocole n'a été communiqué ni aux administrateurs, ni aux commissaires aux comptes, ni aux actionnaires, lors de la tenue des assemblées générales, l'expert désigné en référé par le tribunal de commerce pour rechercher si « les conditions d'acquisition par la CIP d'une partie du capital de la SFCMC étaient ou non équitables et justifiées » n'en étant lui-même informé que le 11 mai 1995 ; que c'est à l'occasion de l'approbation des comptes de l'exercice 1991 de la CIP, soit le 30 juin 1992, que les actionnaires ont pu avoir connaissance des conditions financières de toutes les opérations contenues dans l'accord du 14 mars 1991 ; que ce n'est donc qu'à compter de cette date que le délit est apparu et a pu être constaté dans des conditions permettant l'exercice de l'action publique ; que, les constitutions de partie civile de Jean-Marie E... et de la société Maison Antoine Baud, et d'Alain F..., qui ont mis en mouvement l'action publique, ont été déposées moins de trois ans plus tard (arrêt p. 9 et 10) ;
" 1°) alors que, d'une part, les seules plaintes respectivement déposées le 26 octobre 1994 (Jean-Marie E... et société Maison Antoine Baud) et le 29 décembre 1994 (Alain F...) émanant d'associés agissant à titre personnel ne peuvent être réputées avoir interrompu la prescription de l'action publique ; qu'en faisant dès lors produire aux plaintes initiales un effet dont elles ne pouvaient être légalement pourvues, la cour d'appel a violé les règles et principes gouvernant la prescription de l'action publique ;
" 2°) alors que, d'autre part, le point de départ de la prescription en matière d'abus de biens sociaux et de pouvoirs doit être univoque ; qu'en se bornant à énoncer que c'est à l'occasion de l'approbation des comptes de l'exercice 1991 de la CIP, soit le 30 juin 1992, que les actionnaires de la SFCMC ont pu avoir connaissance des conditions financières de toutes les opérations contenues dans l'accord du 14 mai 1991, sans autrement rechercher si et en quoi lesdits actionnaires n'avaient pas reçu alors, dans le cadre de la SFCMC, notamment au cours des assemblées générales successives des 18 avril et 29 octobre 1991, une information suffisante et utile sur l'opération litigieuse, la cour a privé sa décision de toute base légale au regard des règles et principes gouvernant la prescription de l'action publique ;
" 3°) alors que, de troisième part, la dissimulation de nature à différer le point de départ de la prescription doit s'entendre des seules informations ou documents dont la communication est obligatoire ou nécessaire dans le cadre de la société dont l'intérêt social est au centre de l'action dite « ut singuli » ; qu'en ne s'expliquant pas mieux qu'elle ne l'a fait sur l'obligation de communication aux associés de la SFCMC du protocole du 14 mars 1991, lequel avait en outre, pour Diane A..., épouse X... un caractère privé, la cour a confondu l'information légitimement due aux associés – en l'espèce donnée sans équivoque – et la production d'un instrumentum qui ne s'imposait pas, violant ainsi derechef les règles et principes gouvernant la prescription de l'action publique " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que, pour écarter la prescription des faits d'abus de biens sociaux, l'arrêt énonce que la convention litigieuse du 14 mars 1991 est restée secrète jusqu'à sa saisie, le 4 avril 1995, lors d'une perquisition effectuée à l'étude notariale de Dominique X... ; que son contenu n'a été communiqué ni aux administrateurs ni aux commissaires aux comptes ni aux actionnaires, lors de la tenue des assemblées générales ; que ce n'est que le 30 juin 1992 que ces derniers ont pu avoir connaissance des conditions financières de toutes les opérations contenues dans cet accord ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations qui caractérisent la dissimulation et d'où il résulte que la prescription n'était pas acquise lorsque le procureur de la République a requis l'ouverture d'une information, le 21 novembre 1994, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que les moyens doivent être écartés ;
Sur le troisième moyen de cassation proposé par la société civile professionnelle Piwnica et Molinié pour Dominique X..., et pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, L. 242-6 3° du code de commerce, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré établie l'infraction principale d'abus de biens sociaux ;
" aux motifs qu'au début de l'année 1990, la CIP avait acquis, pour le prix de 263, 6 millions de francs, les titres de la société Gray d'Albion ; que la revente de ces titres est intervenue un an plus tard, au double de ce prix (570 millions de francs) ; que les actions détenues par Diane A..., épouse X..., dans SFCMC (société cotée sur un compartiment du marché boursier), ont été vendues, hors bourse, au prix moyen de 23 766, 47 francs (7 742 titres cédés pour 184 millions de francs) ; que les titres Majestic l'ont été pour un prix moyen de 23 832, 30 francs, alors qu'au cours du trimestre suivant, CIP a acheté en bourse des actions SFCMC au prix moyen de 4 841, 62 francs, et a acquis auprès d'autres actionnaires de la société Majestic (MM. G... et H... et Mme J...), des titres au prix moyen de 7 360 francs ; que les experts commis par le magistrat instructeur ont, pour leur part, estimé que la valeur intrinsèque des actions SFCMC était de l'ordre de 11 922 à 11 975 francs au jour de la cession (voire de 8 960 à 9 000 francs en tenant compte des « parts bénéficiaires ») et que celles des actions Majestic était de 13 647 francs ; que le prix réglé par CIP pour ces titres était donc également de près du double de leur valeur ; qu'il résulte, d'autre part, des termes du protocole litigieux, que les deux opérations étaient « indissociables » et qu'elles devaient intervenir « simultanément » au plus tard le 14 mars 1991, « le respect de cette date étant une condition déterminante du consentement de Diane A..., épouse X..., qui devait régler, avant le 17 mars 1991, les droits de succession du chef du décès de son père » (survenu en septembre 1990) ; qu'il apparaît ainsi, et a d'ailleurs été reconnu par Dominique X... qui a précisé que son épouse ne disposait que de 75 MF pour régler les 161 millions de francs dus au Trésor public, que c'est afin de se procurer des fonds pour cette échéance fiscale que Diane A..., épouse X..., a obtenu de Jean-Marc Y..., ès qualités de représentant de CIP, l'acquisition au prix fort de ses titres dans les sociétés du groupe A..., et que la valeur de ceux qu'elle faisait acheter, en contrepartie, par la SFCMC, a été « calquée » sur ce prix ; que c'est en vain que les prévenus invoquent, pour affirmer que ces opérations n'ont pas affecté l'intérêt social, le profit que la SFCMC aurait tiré de l'opération, celle-ci lui ayant permis, selon leurs dires, de retrouver sa position de « leader » sur le marché de l'hôtellerie cannoise, d'éviter, en cédant sa participation dans la société Cannes Hôtelière comme le prévoyait, par ailleurs, le protocole du 14 mars 1991, un « dépôt du bilan » de cette filiale, et de nouer une alliance durable avec la Compagnie générale des eaux, dont la CIP était une filiale ; qu'il demeure que le prix payé à CIP pour les titres Gray d'Albion n'a pas été fixé en fonction de ces objectifs, mais pour satisfaire les intérêts de la dirigeante de la SFCMC, au détriment de ceux de cette société ; qu'aucun audit comptable, aucune étude prévisionnelle chiffrée n'ont, au demeurant, été effectués préalablement à la conclusion du protocole pour établir la valeur des titres Gray d'Albion vendus à la SFCMC et évaluer les conséquences de la prétendue synergie qui devait se développer entre les deux groupes de sociétés ; que c'est également en vain que les prévenus arguent des multiples avis d'experts qu'ils ont recueillis en cours de procédure, pour soutenir que la surévaluation des titres Gray d'Albion n'est pas démontrée ; que les experts judiciaires, dont la prétendue partialité n'est aucunement démontrée, ont constaté que l'un de ces avis ne tenait pas compte de certaines données (remise en cause possible de certains avantages fiscaux, omission du montant de l'impôt sur les sociétés et plafonnement à 75 millions de francs du montant des intérêts payés sur le prêt participatif …), que la valeur obtenue par un autre expert suivant une méthode classique ne pouvait qu'être biaisée, qu'un troisième ne proposait pas d'évaluation des fonds de commerce en cause, que l'évaluation, par un quatrième, d'un boni de liquidation était critiquable et que cet expert utilisait des références postérieures à celles connues en mars 1991, que les conclusions d'un cinquième étaient peu crédibles, en raison d'un manque d'homogénéité dans le traitement des références utilisées, qu'un sixième citait des références sans grand intérêt et que sa méthode, d'utilisation directe, ne pouvait donner que des ordres de grandeur ; que, surtout, ils ont pertinemment relevé que si un prix, qu'il soit très élevé ou très faible, reste un prix de marché, quand bien même il n'a pas d'explication précise, il en va différemment si ce niveau faible ou élevé résulte d'une circonstance extérieure au marché ; qu'en l'espèce, et ainsi qu'il résulte de la rédaction même du protocole du 14 mars 1991, les valeurs des cessions réalisées ont été fixées pour résoudre un problème personnel à Diane A... et ne se rattachaient à aucune donnée économique ou financière particulière ; que c'est à des fins personnelles et au mépris de l'intérêt de la SFCMC, qui acquérait des titres Gray d'Albion à un coût excessif, tandis qu'elle-même tirait un avantage anormal de la vente de ses titres dans la SFCMC et ses filiales, que Diane A... a conclu la convention litigieuse, s'abstenant par ailleurs de toute information préalable des organes des sociétés concernées, enfreignant les dispositions de leurs statuts relatives aux pouvoirs du dirigeant d'engager ces sociétés, et négligeant aussi d'informer les actionnaires des opérations d'emprunt conclues au mois de mars 1991 ; qu'en conséquence, et quand bien même le conseil des bourses de valeur a, pour sa part, estimé que l'opération, « telle qu'elle lui avait été présentée », ne légitimait pas une offre publique de retrait, et que l'administration des impôts a abandonné le redressement fiscal projeté de la SFCMC, l'infraction des abus de biens sociaux et de pouvoirs est caractérisée à l'encontre de Diane A..., épouse X..., en tous ses éléments ;
" 1°) alors que les juges correctionnels ont l'obligation de répondre aux chefs péremptoires des conclusions dont ils sont régulièrement saisis ; que le délit d'abus de biens sociaux poursuivi nécessite pour être constitué que la société fermière du casino municipal de Cannes ait subi un préjudice ce qui implique qu'elle ait acquis de la société CIP les titres Gray d'Albion à un coût excessif et qu'elle ait fait une mauvaise opération économique ; qu'il est constant que ces titres représentent la valeur de l'hôtel Gray d'Albion situé à 50 mètres de la Croisette à Cannes ; que, dans ses conclusions régulièrement déposées, Dominique X... discutait les conclusions des experts en faisant valoir que le prix d'acquisition de cet hôtel (570 millions de francs) n'était pas anormal dès lors que : 1°) à la date de la signature du protocole le prix de l'immobilier se situait incontestablement à son plus haut niveau, 2°) que l'acquisition du Gray d'Albion représentait une opportunité exceptionnelle pour le groupe A... compte tenu de sa proximité avec le Majestic et le casino municipal, 3°) que le prix était cohérent par rapport à des transactions comparables – notamment celle du Relais de la Reine – d'une superficie voisine de celle du Gray d'Albion situé sur la Croisette dans un périmètre proche de ce dernier vendu aux enchères le 18 juin 1992, 580 millions de francs TTC (soit à une date où le marché immobilier avait amorcé sa décrue), 4°) que l'administration fiscale avait évalué le Gray d'Albion à la somme de 520 millions de francs compte non tenu des avantages du prêt participatif de 190 millions de francs et admis que cette valeur pouvait être encore supérieure en prenant en compte l'intérêt de cette acquisition au regard de la stratégie d'implantation de la société fermière et avait pour cette raison considéré la transaction comme normale, 5°) que le conseil des bourses de valeurs (devenu l'AMF) avait reconnu que le projet envisagé garantissait suffisamment les intérêts des actionnaires minoritaires et avait donné son aval aux termes du protocole du 14 mars 1991 et qu'en ne s'expliquant pas sur ces chefs péremptoires de conclusions, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
" 2°) alors qu'en matière d'abus de biens sociaux, l'exception de groupe constitue une exception péremptoire ; que, dans ses conclusions régulièrement déposées devant la cour de renvoi, Dominique X... invoquait l'intérêt de l'opération d'acquisition de l'hôtel Gray d'Albion pour le groupe A... qui nouait ainsi une alliance durable avec la Générale des eaux et mettait ainsi un terme au partenariat défaillant à Cannes avec le Groupe Accor conclu auparavant par Lucien A... et mettant à l'abri le Groupe A... dont faisait partie la société fermière du casino municipal de Cannes de la convoitise annoncée par des concurrents français et étrangers et qu'en ne s'expliquant pas, fût-ce succinctement sur cette exception, la cour d'appel a méconnu ses pouvoirs " ;
Attendu que, pour déclarer réunis à l'encontre de Diane A... les éléments constitutifs du délit d'abus de biens sociaux au préjudice de la SFCMC, l'arrêt énonce que les prix pratiqués pour les deux opérations, indissociables selon les termes du protocole, avaient été surévalués de près du double et ne se rattachaient à aucune donnée économique ou financière ; que les juges ajoutent que ces prix avaient été fixés sans information préalable des organes des sociétés concernées et sans audit destiné à évaluer la prétendue synergie qui devait se développer entre les deux groupes de sociétés ; qu'ils relèvent, encore, que ces valeurs de cession ont été fixées, au mépris de l'intérêt de la SFCMC, au seul profit de Diane A... ; qu'ils retiennent, enfin, qu'il n'importe que le conseil des bourses de valeur et l'administration des impôts n'aient pas critiqué ces opérations ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, procédant de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel, qui a répondu comme elle le devait, aux arguments péremptoires des conclusions dont elle était saisie, a caractérisé, sans insuffisance ni contradiction, les éléments constitutifs du délit d'abus de biens sociaux ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le quatrième moyen de cassation proposé par la société civile professionnelle Piwnica et Molinié pour Dominique X... et pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 121-6 et 121-7 du code pénal, L. 242-6 3° du code de commerce, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré l'infraction de complicité d'abus de biens sociaux établie à l'encontre de Dominique X... et a fait droit aux demandes des associés agissant ut singuli dirigées à son encontre ;
" aux motifs que, sur les faits de complicité reprochés à Dominique X..., qu'il est avéré qu'après son mariage avec Diane A..., épouse X..., Dominique X..., qui exerçait la profession de notaire, est devenu le conseiller de la famille A..., son beau-père le plaçant progressivement dans les conseils d'administration des diverses sociétés du groupe ; que, selon ses propres dires, « étant l'intermédiaire entre sa femme et CIP (Jean-Marc Y...) », il a « participé aux négociations qui ont abouti à la signature du protocole » à laquelle il a assisté en l'étude de Me K... ; qu'il a confirmé, le 4 avril 1995, que « ce document se trouvait à son étude, car il était juriste et que son épouse lui demandait conseil » ; que Jean-Marc Y... a lui-même déclaré, à deux reprises, avoir « rencontré Dominique X..., fin 1990, à l'hôtel Majestic » et avoir évoqué avec celui-ci un certain nombre de projets, précisant que, pour lui, Dominique X... était le représentant du groupe A..., et que les négociations menées pour la signature du protocole du 14 mars 1991 avaient eu lieu avec les époux X... et leurs avocats ; que Gérard L..., secrétaire général du groupe CIP, a déclaré avoir eu affaire à Dominique X..., représentant la SFCMC, pour discuter des modalités du financement du rachat des actions du Gray d'Albion ; que Jacques G... a expliqué que c'est Dominique X... qui l'avait informé de ce que la CIP était intéressée à lui racheter les vingt-neuf titres qu'il détenait dans les sociétés FCMC, Majestic et Golf club de Cannes ; que c'est Dominique X..., qui, lors de l'assemblée générale du 29 octobre 1991 s'est refusé à communiquer le prix des cessions des titres de Diane A... à M. D... ; qu'enfin, c'est Dominique X... qui a participé à toutes les réunions organisées par l'expert N..., ce dernier indiquant que, « visiblement, il connaissait bien les opérations en question » ; que ces éléments démontrent que c'est en parfaite connaissance de la finalité des opérations litigieuses que Dominique X... a apporté aide et assistance à Diane A... pour la commission de l'infraction imputée à celle-ci ; que la complicité de cette infraction est caractérisée ;
" 1°) alors que la cour d'appel, qui n'a pas constaté que Dominique X... ait eu connaissance de l'existence du caractère prétendument surévalué des actions de la société Gray d'Albion acquises par la société Fermière du casino municipal de Cannes et qui s'est bornée à faire état de sa « connaissance de la finalité des opérations litigieuses » c'est-à-dire de la connaissance qu'il avait de ce que la vente par Diane A..., épouse X..., des titres lui appartenant personnellement aurait, selon la cour d'appel, été prétendument destinée au règlement de la succession de son père Lucien A..., n'a pas, par ce seul motif, caractérisé à l'encontre de Dominique X... l'élément intentionnel du délit de complicité d'abus de biens sociaux ;
" 2°) alors que les motifs retenus par la cour d'appel sont impropres à caractériser la complicité ; qu'en effet, les constatations de la cour d'appel ne sont pas de nature à établir que Dominique X... aurait, par aide ou assistance, facilité la préparation ou la consommation d'un délit, les éléments relevés étant, à les supposer exacts, soit inopérants, soit postérieurs à l'acte reproché ;
" 3°) alors que Dominique X... faisait valoir, dans ses conclusions, ainsi délaissées l'absence d'actes matériels de complicité ; qu'il observait, notamment, qu'il n'avait exercé aucune fonction sociale ou de direction au sein de la société Fermière et que les décisions stratégiques la concernant étaient prises par Diane A..., épouse X..., ainsi que l'avaient déclaré tant Mme I... que M. O... (conclusions p. 12) ; que, s'agissant de l'élaboration du protocole du 14 mars 1991, il faisait encore valoir que sa rencontre, en 1990, avec Jean-Marc Y... ne pouvait caractériser un quelconque acte de complicité ; qu'en ce qui concerne la négociation du protocole, il rappelait que seule la question du prix devait être examinée au regard de l'incrimination et qu'il fallait donc déterminer en quoi il avait pu participer à cette fixation et qu'il rappelait, à cet égard, que Jean-Marc Y... lui-même avait discuté avec Diane Diane A..., épouse X..., et que son avocat était en relation avec ceux de Diane A..., épouse X... ; que Dominique X... rappelait, encore, dans ses conclusions que l'organisation générale du protocole avait été réalisée par Me P..., notaire ; qu'en s'abstenant, ainsi, de répondre à ces articulations essentielles des conclusions de Dominique X... de nature à établir qu'aucun acte positif de complicité ne pouvait être retenu à son encontre, la cour d'appel a, derechef, méconnu les textes susvisés " ;
Sur le troisième moyen de cassation proposé par Me Bouthors pour Jean-Marc Y..., et pris de la violation des articles 6 et 13 de la Convention européenne des droits de l'homme, de l'article 4 du protocole additionnel n° 7 à ladite convention, 1382 du code civil, L. 225-38, L. 225-40 et L. 242-6 du code de commerce, 121-6 et 121-7 du code pénal, 2, 8, 202 et 203, 480-1, 591 et 593 du code de procédure pénale, ensemble violation de la chose jugée, de la présomption d'innocence et des droits de la défense ;
" en ce que, l'arrêt infirmatif a condamné solidairement Jean-Marc Y... à payer une somme de 67 millions d'euros à titre de dommages et intérêts à la SFCMC à raison de faits de recel, du délit de complicité d'abus de biens sociaux et de pouvoirs par ailleurs déclarés constitués à l'encontre de Dominique X... ;
" aux motifs que, les motifs soutenant la décision de relaxe, désormais définitive, prononcée par l'arrêt du 6 avril 2005 en faveur de Jean-Marc Y..., du chef de présentation de bilan inexact, n'ont pas autorité de la chose jugée sur les infractions encore en cause, l'exception de prescription soulevée sera rejetée (…) ; que, référence étant faite au jugement déféré, il suffit de rappeler que, suivant protocole du 14 mars 1991, Diane A..., épouse X..., (décédée le 18 mai 2001) a cédé, pour la somme de 458 millions de francs, une partie des actions qu'elle détenait, directement ou indirectement dans les sociétés Majestic, Cannes balnéaire et Fermière du casino municipal de Cannes (SFCMC), à la Compagnie immobilière Phoenix (CIP), dirigée par Jean-Marc Y..., laquelle a promis, en contrepartie, de vendre à SFCMC, pour le prix de 570 millions de francs, la totalité des actions de la société Gray d'Albion, exploitant l'hôtel du même nom, le financement de cette acquisition étant assuré par des prêts bancaires et un prêt participatif de 190 millions de francs consenti par CIP ; que les prix de ces cessions de titres leur étant apparus surévalués, au bénéfice de Diane A..., épouse X... et au détriment de SFCMC, Jean-Marie E... et la société Maison Antoine Baud, d'une part, agissant en qualité d'actionnaires et porteurs de parts des sociétés CIP et SFCMC, Alain F..., d'autre part, lui aussi actionnaire à la fois de la CIP et de la SFCMC, ont déposé plainte avec constitution de partie civile les 26 octobre 1994 et 29 décembre 1994 ; que Dominique X... et Jean-Marc Y..., auxquels il est reproché, à l'issue des informations ouvertes les 21 novembre 1994 et 26 janvier 1995 et jointes par ordonnance du 13 juin 1996, de s'être rendus respectivement complice et receleur de l'abus de biens sociaux et de pouvoirs imputé à Diane A..., épouse X..., en sa qualité de présidente directrice générale de SFCMC, soutiennent que les parties civiles sont irrecevables en leur action, que l'infraction est prescrite, qu'en tout état de cause elle n'est pas caractérisée, la preuve n'étant pas rapportée d'une surévaluation du prix versé pour l'acquisition du Gray d'Albion, ni d'une intention délictueuse et d'un intérêt personnel de Diane A..., que les actes de complicité et de recel ne sont pas démontrés, que le préjudice n'est pas avéré, mais, qu'au début de l'année 1990, la CIP avait acquis, pour le prix de 263, 6 millions de francs, les titres de la société Gray d'Albion ; que la revente de ces titres est intervenue un an plus tard, au double de ce prix (570 millions de francs) ; que les actions détenues par Diane A..., épouse X... dans SFCMC (société cotée sur un compartiment du marché boursier), ont été vendues, hors bourse, au prix moyen de 23 766, 47 francs (7 742 titres cédés pour 184 millions de francs) ; que les titres Majestic l'ont été pour un prix moyen de 23 832, 30 francs, alors qu'au cours du trimestre suivant, CIP a acheté en bourse des actions SFCMC au prix moyen de 4 841, 62 francs, et a acquis auprès d'autres actionnaires de la société Majestic, (MM. G... et H... et Mme J...), des titres au prix moyen de 7 360 francs ; que les experts commis par le magistrat instructeur ont, pour leur part, estimé que la valeur intrinsèque des actions SFCMC était de l'ordre de 11 922 à 11 975 francs au jour de la cession (voire de 8 960 à 9 000 francs en tenant compte des « parts bénéficiaires ») et que celle des actions Majestic était de 13 647 francs ; que le prix réglé par CIP pour ces titres était donc également de près du double de leur valeur ; que, d'autre part, il résulte des termes du protocole litigieux, que les deux opérations étaient « indissociables » et qu'elles devaient intervenir « simultanément » au plus tard le 14 mars 1991, « le respect de cette date étant une condition déterminante du consentement de Diane A..., épouse X..., qui devait régler, avant le 17 mars 1991, les droits de succession du chef du décès de son père » (survenu en septembre 1990) ; qu'il apparaît ainsi, et a d'ailleurs été reconnu par Dominique X... qui a précisé que son épouse ne disposait que de 75 millions de francs pour régler les 161 millions de francs dus au Trésor public, que c'est afin de se procurer des fonds pour cette échéance fiscale que Diane A..., épouse X... a obtenu de Jean-Marc Y..., ès qualités de représentant de la CIP, l'acquisition au prix fort de ses titres dans les sociétés du groupe A..., et que la valeur de ceux qu'elle faisait acheter, en contrepartie, par la SFCMC, a été « calquée » sur ce prix ; que c'est en vain que les prévenus invoquent, pour affirmer que ces opérations n'ont pas affecté l'intérêt social, le profit que la SFCMC aurait tiré de l'opération, celle-ci ayant permis, selon leurs dires, de retrouver sa position de « leader » sur le marché de l'hôtellerie cannoise, d'éviter, en cédant sa participation dans la société Cannes Hôtelière comme le prévoyait, par ailleurs, le protocole du 14 mars 1991, un « dépôt de bilan » de cette filiale, et de nouer une alliance durable avec la Compagnie générale des eaux, dont la CIP était une filiale ; qu'il demeure que le prix payé à la CIP pour les titres Gray d'Albion n'a pas été fixé en fonction de ces objectifs, mais pour satisfaire les intérêts de la dirigeante de la SFCMC, au détriment de ceux de cette société ; qu'aucun audit comptable, aucune étude prévisionnelle chiffrée n'ont, au demeurant, été effectués préalablement à la conclusion du protocole pour établir la valeur des titres Gray d'Albion vendus à la SFCMC et évaluer les conséquences de la prétendue synergie qui devait se développer entre les deux groupes de sociétés ; que c'est également en vain que les prévenus arguent des multiples avis d'experts qu'ils ont recueillis en cours de procédure, pour soutenir que la surévaluation des titres Gray d'Albion n'est pas démontrée ; que les experts judiciaires, dont la prétendue partialité n'est aucunement démontrée, ont constaté que l'un de ces avis ne tenait pas compte de certaines données (remise en cause possible de certains avantages fiscaux, omission du montant de l'impôt sur les sociétés et plafonnement à 75 millions de francs du montant des intérêts payés sur le prêt participatif …), que la valeur obtenue par un autre expert suivant une méthode classique ne pouvait qu'être biaisée, qu'un troisième ne proposait pas d'évaluation des fonds de commerce en cause, que l'évaluation, par un quatrième, d'un boni de liquidation était critiquable et que cet expert utilisait des références postérieures à celles connues en mars 1991, que les conclusions d'un cinquième étaient peu crédibles, en raison d'un manque d'homogénéité dans le traitement des références utilisées, qu'un sixième citait des références sans grand intérêt et que sa méthode, d'utilisation délicate, ne pouvait donner que des ordres de grandeur ; que, surtout, ils ont pertinemment relevé que si un prix, qu'il soit très élevé ou très faible, reste un prix de marché, quand bien même il n'a pas d'explication précise, il en va différemment si ce niveau faible ou élevé résulte d'une circonstance extérieure au marché ; qu'en l'espèce, et ainsi qu'il résulte de la rédaction même du protocole du 14 mars 1991, les valeurs des cessions réalisées ont été fixées pour résoudre un problème personnel à Diane A..., épouse X... et ne se rattachaient à aucune donnée économique ou financière particulière ; que c'est à des fins personnelles et au mépris de l'intérêt de la SFCMC, qui acquérait des titres Gray d'Albion à un coût excessif, tandis qu'elle-même tirait un avantage anormal de la vente de ses titres dans la SFCMC et ses filiales, que Diane A..., épouse X... a conclu la convention litigieuse, s'abstenant par ailleurs de toute information préalable des organes des sociétés concernées, enfreignant les dispositions de leurs statuts relatives aux pouvoirs du dirigeant d'engager ces sociétés, et négligeant aussi d'informer les actionnaires des opérations d'emprunt conclues au mois de mars 1991 ; qu'en conséquence, et quand bien même le conseil des bourses de valeur a, pour sa part, estimé que l'opération, « telle qu'elle lui avait été présentée », ne légitimait pas une offre publique de retrait, et que l'administration des Impôts a abandonné le redressement fiscal projeté de la SFCMC, l'infraction d'abus de biens sociaux et de pouvoirs est caractérisée à l'encontre de Diane A..., en tous ses éléments (…) ; que, sur les faits de complicité reprochés à Dominique X..., il est avéré qu'après son mariage avec Diane A..., l'intéressé, qui exerçait la profession de notaire, est devenu l'avocat de la famille A..., son beau-père le plaçant progressivement dans les conseils d'administration des diverses sociétés du groupe ; que, selon ses propres dires, « étant l'intermédiaire entre sa femme et la CIP (Jean-Marc Y...) », il a « participé aux négociations qui ont abouti à la signature du protocole », à laquelle il a assisté en l'étude de Me K... ; qu'il a confirmé, le 4 avril 1995, que « document se trouvait à son étude, car il était juriste et que son épouse lui demandait conseil » ; que Jean-Marc Y... a lui-même déclaré, à deux reprises, avoir « rencontré Dominique X..., fin 1990, à l'hôtel Majestic » et avoir évoqué avec celui-ci un certain nombre de projets, précisant que, pour lui, Dominique X... était le représentant du groupe A..., et que les négociations menées pour la signature du protocole du 14 mars 1991 avaient eu lieu avec les époux X... et leurs conseils ; que Gérard L..., secrétaire général du groupe CIP, a déclaré avoir eu affaire à Dominique X..., représentant la SFCMC, pour discuter des modalités du financement du rachat des actions du Gray d'Albion ; que Jacques G... a expliqué que c'est Dominique X... qui l'avait informé de ce que la CIP était intéressée à lui racheter les vingt-neuf titres qu'il détenait dans les sociétés SFCMC, Majestic et Golf club de Cannes ; que c'est Dominique X..., qui, lors de l'assemblée générale du 29 octobre 1991 s'est refusé à communiquer le prix des cessions des titres de Diane A..., épouse X..., à M. D... ; qu'enfin, c'est Dominique X... qui a participé à toutes les réunions organisées par l'expert N..., ce dernier indiquant que, « visiblement, il connaissait bien les opérations en question » ; que ces éléments démontrent que c'est en parfaite connaissance de la finalité des opérations litigieuses que Dominique X... a apporté aide et assistance à Diane A... pour la commission de l'infraction imputée à celle-ci ; que la complicité de cette infraction est caractérisée ; que, sur le recel reproché à Jean-Marc Y..., ce dernier a bénéficié en sa qualité de dirigeant de la CIP, du produit de l'infraction d'abus de biens sociaux et de pouvoirs ; qu'il avait nécessairement conscience de la surévaluation, au préjudice de la SFCMC, du prix des titres Gray d'Albion qu'elle acquérait ; que l'infraction, qui n'est pas non plus prescrite, est caractérisée ; que, sur le préjudice, seul peut être indemnisé celui qui découle directement de l'infraction ; que ce préjudice est équivalent au surcoût de l'acquisition, soit environ 240, 6 millions de francs, déduction étant faite de l'avantage résultant du prêt participatif consenti par la CIP ; que ce surcoût étant approximativement de 42 % du prix d'acquisition des titres, il convient d'y ajouter, à proportion, le coût des intérêts des emprunts qui ont été engagés pour assurer le financement de l'opération ; que, suivant les pièces communiquées aux experts, ces intérêts sont d'environ 463 millions de francs sur quinze ans, soit un surcoût d'environ 200 millions de francs ; que toutes causes confondues, il sera alloué à la SFCMC la somme de 67 millions d'euros (environ 440 millions de francs) à titre de dommages-intérêts ; que les intérêts au taux légal courront sur cette somme à compter du présent arrêt ;
" 1°) alors que, d'une part, la relaxe définitive du demandeur du chef de passation d'écritures inexactes portant sur la surévaluation prétendue du prix des actions litigieuses était de nature à justifier de plus fort sa relaxe à raison des mêmes faits poursuivis sous l'angle du recel ; que l'indivisibilité des faits ainsi que la présomption d'innocence du requérant devaient ici entraîner une relaxe nécessaire du chef de recel ;
" 2°) alors que, d'autre part, le recel étant un délit de conséquence, la cassation à intervenir sur le pourvoi du co-prévenu poursuivi en qualité de complice d'un abus reproché à sa défunte épouse, entraînera par voie de conséquence l'annulation de la condamnation du demandeur au titre d'un recel inexistant ;
" 3°) alors que, de troisième part, l'intention délictuelle propre au recel doit être caractérisée au moment du recelé ; que la surévaluation prétendue du prix des actions litigieuses formant ici la substance de la prévention, la cour ne pouvait faire directement accueil aux conclusions contestées d'une expertise non contradictoire et arguée de partialité sans s'expliquer mieux qu'elle ne l'a fait sur les éléments d'appréciation régulièrement produits en défense, qui tendaient à établir que les valeurs retenues en leur temps avec l'aval des autorités de contrôle n'étaient pas reprochables ; qu'en se déterminant comme elle l'a fait, la cour a violé le principe d'égalité et a privé sa décision de toute base légale ;
" 4°) alors que, de quatrième part, en prononçant une condamnation solidaire, la cour a étendu le champ d'application de la solidarité pénale en dehors des strictes prévisions de l'article 480-1 du code de procédure pénale ; qu'en l'absence en effet de déclaration de culpabilité de la dirigeante de la SFCMC, décédée le 18 mai 2001 avant l'ordonnance de renvoi, les faits de la prévention subsistante dirigée contre son ayant cause et le requérant n'étaient ni indivisibles ni connexes au sens du texte précité " ;
Sur le premier moyen de cassation proposé par la société civile professionnelle Piwnica et Molinié, pour Dominique X... et pris de la violation et fausse application des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, L. 225-251 et suivants du code de commerce, 201 du décret du 23 mars 1967, 2, 3, 6, 459, 480-1, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, excès de pouvoir ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré recevable l'action ut singuli dirigée par Jean-Marie E... et la société Maison Antoine Baud ainsi qu'Alain F... à l'encontre de Dominique X... et a condamné ce dernier à verser à la société Fermière du casino municipal de Cannes (SFCMC) la somme de 67 000 000 euros, faisant en outre droit aux demandes de Jean-Marie E... et de la société Antoine Baud et d'Alain F... présentées sur le fondement de l'article 475-1 du code de procédure pénale ;
" aux motifs que, d'une part, sur les moyens soulevés à l'appui de l'exception d'irrecevabilité des actions exercées par Jean-Marie E... et la société Maison Antoine Baud, et par Alain F... : que, par conclusions déposées le 2 avril 2004 devant le tribunal correctionnel, la société Maison Antoine Baud et Alain F..., qui avaient d'abord agi à titre personnel pour mettre en mouvement l'action publique, se sont constitués parties civiles, ès qualités d'actionnaires exerçant l'action « ut singuli » au profit de la SFCMC, sur le fondement de l'article 225-252 du code de commerce ; que, quand bien même ces parties civiles ont par ailleurs conclu en première instance, sur l'exception d'irrecevabilité qui leur était opposée, que, l'action « ut singuli » ne leur paraissant pas ouverte contre les prévenus, qui n'étaient ni administrateurs ni dirigeants de la SFCMC, elles faisaient en conséquence désigner un mandataire ad hoc pour assurer les intérêts de celle-ci dans la présente procédure, elles ne se sont pas néanmoins désisté de leur constitution, mais ont sollicité le sursis à statuer, dans l'attente de cette désignation – qui leur a en définitive été refusée-, et elles ont, subsidiairement, maintenu leurs demandes contre les prévenus ; que l'erreur de droit ainsi provisoirement commise, qualifiée à tort d'aveu judiciaire par Jean-Marc Y..., est sans incidence sur la validité de l'action de ces parties civiles ; qu'à la date de l'exercice de ces actions, la prescription de trois ans de l'article L. 225-54 du code de commerce, n'était pas acquise, dès lors qu'ainsi qu'il a été dit, l'action publique n'était pas elle-même prescrite ; que le principe « electa una via » est vainement invoqué, l'action en cours devant la juridiction civile étant dirigée contre Dominique X... non pas à titre personnel, mais ès qualités d'héritier (usufruitier) de Diane A..., épouse X..., et d'administrateur légal de ses enfants mineurs, pris en leur qualité d'héritiers de leur mère Diane A..., épouse X... ; que, contrairement à ce que soutient Jean-Marc Y..., aucune disposition légale n'oblige les actionnaires, qui disposent chacun d'un droit propre à agir, de se regrouper pour exercer collectivement l'action sociale ; que l'article L. 225-252 du code de commerce prévoit au contraire que « les actionnaires peuvent, soit individuellement, soit par une association répondant aux conditions fixées à l'article L. 225-120, soit en se groupant dans les conditions fixées par décret en conseil d'Etat, intenter l'action sociale … » ; qu'en dépit des affirmations contraires des prévenus et de la SFCMC, l'action est recevable à l'encontre des complices et receleurs de l'infraction commise par les dirigeants ou administrateurs de la société, à raison de la solidarité instituée par l'article 480-1 du code de procédure pénale entre ces complices et receleurs et l'auteur principal ; qu'il n'importe, à cet égard, que l'action publique soit éteinte à l'encontre de Diane A..., épouse X..., la culpabilité du complice ou du receleur étant indépendante de celle de l'auteur principal ;
" aux motifs que, d'autre part, sur le préjudice, seul peut être indemnisé celui qui découle directement de l'infraction ; que ce préjudice est équivalent au surcoût de l'acquisition, soit environ 240, 6 millions de francs, déduction étant faite de l'avantage résultant du prêt participatif consenti par la CIP ; que ce surcoût étant approximativement de 42 % du prix d'acquisition des titres, il convient d'y ajouter, à proportion, le coût des intérêts des emprunts qui ont été engagés pour assurer le financement de l'opération ; que, suivant les pièces communiquées aux experts, ces intérêts sont d'environ 463 millions de francs sur quinze ans, soit un surcoût d'environ 200 millions de francs ; que toutes causes confondues, il sera alloué à la SFCMC la somme de 67 millions d'euros (environ 440 millions de francs) à titre de dommages-intérêts ; que les intérêts au taux légal courront sur cette somme à compter du présent arrêt ;
" 1°) alors que l'action ut singuli ayant pour objet la mise en cause par les associés d'une société anonyme de la responsabilité de ses administrateurs et directeurs généraux, sa recevabilité devant la juridiction correctionnelle à l'encontre des complices des dirigeants n'ayant exercé aucune fonction à l'intérieur de la société, est subordonnée à sa recevabilité contre ces mêmes dirigeants ou leurs héritiers ; qu'il s'ensuit que lorsque la juridiction correctionnelle n'a été saisie de l'action ut singuli dirigée contre le seul prétendu complice d'abus de biens sociaux n'ayant exercé aucune fonction à l'intérieur de la société que postérieurement à l'extinction de l'action publique concernant le dirigeant auteur principal, elle est incompétente pour connaître de cette action ; qu'en l'espèce il résulte tant des constatations de l'arrêt attaqué que de la procédure que l'action ut singuli a été engagée par Jean-Marie E... et la société Antoine Baud ainsi que par Alain F... devant la juridiction correctionnelle à l'encontre du seul Dominique X... poursuivi comme complice d'abus de biens sociaux, lequel n'a jamais eu la qualité d'administrateur ni de directeur général et est un tiers par rapport à la société fermière du casino municipal de Cannes, postérieurement au décès, intervenu avant l'ordonnance de renvoi de la dirigeante Diane A..., épouse X..., auteur principal, et que, dès lors, en déclaration recevable cette action, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des textes susvisés ;
" 2°) alors que l'action civile exercée à titre personnel par les associés du chef d'abus de biens sociaux étant irrecevable, elle ne vaut que comme simple dénonciation et est insusceptible de mettre en mouvement l'action publique et de sauvegarder leurs droits ultérieurs à exercer l'action ut singuli et qu'en fondant l'ensemble de son raisonnement relatif à la recevabilité de l'action ut singuli dirigée devant la juridiction correctionnelle contre Dominique X... sur la prémisse inexacte qu'en agissant à titre personnel les associés avaient agi « pour mettre en mouvement l'action publique »,- suggérant ainsi qu'ils avaient eux-mêmes mis en mouvement l'action publique dès avant le décès de l'auteur principal-, circonstance supposée rendre l'exercice de leur action ut singuli postérieure à ce décès recevable contre Dominique X..., la cour d'appel a méconnu le principe susvisé ;
" 3°) alors que si le décès de l'auteur principal ne fait pas obstacle aux poursuites pénales contre le complice, la solidarité édictée par l'article 480-1 du code de procédure pénale n'existe en revanche qu'entre les prévenus condamnés pour un même délit ou déclarés coupables de différentes infractions rattachées entre elles par des liens d'indivisibilité ou de connexité et que Diane A..., épouse X..., mise en examen du chef d'abus de biens sociaux étant décédée le 18 mai 2001 – c'est-à-dire antérieurement à l'ordonnance de renvoi ayant saisi la juridiction de jugement – la cour d'appel ne pouvait, sans méconnaître les dispositions du texte susvisé, faire état de la prétendue solidarité entre les complices (Dominique X... et les administrateurs Diane A..., épouse X...) de la société pour faire droit aux demandes figurant dans les conclusions des associés précités exerçant l'action ut singuli exigée entre eux et Dominique X... ;
" 4°) alors que, en tout état de cause, il résulte a contrario des dispositions de l'article L. 225-253 du code de commerce que lorsque la personne poursuivie comme complice d'un abus de biens sociaux n'a exercé ni les fonctions d'administrateur ni les fonctions de directeur général au sein de la société concernée, ladite société mise en cause par des associés déclarant agir ut singuli a le droit de renoncer à solliciter la condamnation de cette personne à lui verser des dommages-intérêts dès lors que celle-ci est seule poursuivie et que dans ce cas, la juridiction de jugement saisie a le devoir de faire droit à ses conclusions ; que tel est le cas en l'espèce, la société fermière du casino municipal de Cannes (SFCMC) ayant conclu à une absence de préjudice du fait des agissements prêtés à Dominique X... seul poursuivi en sorte qu'en lui allouant 67 000 000 d'euros à titre de dommages-intérêts, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé et, ce faisant, a excédé ses pouvoirs " ;
Sur le deuxième moyen de cassation proposé par Me Bouthors pour Jean-Marc Y... et pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 1382 du code civil, L. 225-38, L. 225-40, L. 225-552 et L. 242-6 du code de commerce, 201 du décret du 28 mars 1967, 121-6 et 121-7 du code pénal, 2, 8, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que, la cour a rejeté l'exception d'irrecevabilité des actions exercées par les parties civiles, Jean-Marie E... et la société Maison Antoine Baud, et par Alain F... ;
" aux motifs que, par conclusions déposées le 2 avril 2004 devant le tribunal correctionnel, la société Maison Antoine Baud et Alain F..., qui avaient d'abord agi à titre personnel pour mettre en mouvement l'action publique, se sont constitués parties civiles, es qualités d'actionnaires exerçant l'action « ut singuli » au profit de la SFCMC, sur le fondement de l'article L. 225-252 du code de commerce ; que, quand bien même ces parties civiles ont par ailleurs conclu en première instance, sur l'exception d'irrecevabilité qui leur était opposée, que, l'action « ut singuli » ne leur paraissant pas ouverte contre les prévenus, qui n'étaient ni administrateurs ni dirigeants de la SFCMC, elles faisaient en conséquence désigner un mandataire ad hoc pour assurer les intérêts de celle-ci dans la présente procédure, elles ne se sont pas néanmoins désistés de leur constitution, mais ont sollicité le sursis à statuer, dans l'attente de cette désignation-qui leur a en définitive été refusée-, et elles ont, subsidiairement, maintenu leurs demandes contre les prévenus ; que, l'erreur de droit ainsi provisoirement commise, qualifiée à tort d'aveu judiciaire par Jean-Marc Y..., est sans incidence sur la validité de l'action de ces parties civiles ; qu'à la date de l'exercice de ces actions, la prescription de 3 ans de l'article L. 225-54 du code de commerce, n'était pas acquise, dès lors qu'ainsi qu'il a été dit, l'action publique n'était pas elle-même prescrite ; que, le principe « electa una via » est vainement invoqué, l'action en cours devant la juridiction civile étant dirigée contre Dominique X... et non pas à titre personnel, mais es qualités d'héritier (usufruitier) de Diane A..., épouse X... et d'administrateur légal de ses enfants mineurs, pris en leur qualité d'héritiers de leur mère Diane A..., épouse X... ; que, contrairement à ce que soutient Jean-Marc Y..., aucune disposition légale n'oblige les actionnaires, qui disposent chacun d'un droit propre à agir, de se regrouper pour exercer collectivement l'action sociale ; que l'article L. 225-252 du code de commerce prévoit, au contraire, que « les actionnaires peuvent, soit individuellement, soit par une association répondant aux conditions fixées à l'article L. 225-120, soit en se groupant dans les conditions fixées par décret en conseil d'Etat, intenter l'action sociale » ; qu'en dépit des affirmations contraires des prévenus et de la SFCMC, l'action est recevable à l'encontre des complices et receleurs de l'infraction commise par les dirigeants ou administrateurs de la société, à raison de la solidarité instituée par l'article 480-1 du code de procédure pénale entre ces complices et receleurs et l'auteur principal ; qu'il n'importe, à cet égard, que l'action publique soit éteinte à l'encontre de Diane A..., épouse X..., la culpabilité du complice ou du receleur étant indépendante de celle de l'auteur principal ; que, par citation du 19 mars 2003, et conformément aux prescriptions de l'article 201 du décret du 28 mars 1967 sur les sociétés anonymes, les parties civiles susnommées ont appelé en la cause la SFCMC ; qu'en application de l'article 509 du code de procédure pénale, l'affaire a été entièrement dévolue à la cour sur les intérêts civils, par les appels interjetés par ces parties civiles à l'encontre des deux prévenus ; que, l'erreur matérielle de la citation à comparaître délivrée en cause d'appel à la SFCMC en qualité de « civilement responsable », est sans incidence sur la régularité de la procédure ; que la société SFCMC ne saurait se prévaloir de cette erreur, qui ne porte aucune atteinte à ses droits, et n'a pas pour effet de modifier la qualité en laquelle elle est attraite dans la procédure par les parties civiles ; que les moyens soulevés seront écartés et l'exception rejetée (arrêt p. 10 et 11) ;
" 1°) alors que, d'une part, l'exercice de l'action sociale devant la juridiction correctionnelle est interdite aux associés qui ne se sont pas constitués en association conformément aux exigences de l'article L. 225-252 du code de commerce ; que l'exercice « individuel » de l'action sociale par une pluralité simple de parties, dont le nombre a d'ailleurs varié, suffisait en l'espèce à rendre irrecevable l'action ainsi conduite ;
" 2°) alors que, d'autre part, l'action sociale n'est pas non plus recevable quand la société dans l'intérêt de laquelle elle est censée être exercée n'a pas été régulièrement mise en cause par l'intermédiaire de ses représentants légaux ; que, pareille condition faisant en l'espèce défaut, la cour ne pouvait retenir la recevabilité – contestée – de l'action dont s'agit ;
" 3°) alors que, de troisième part, l'action dite « ut singuli », qu'il est loisible aux intéressés de diriger devant le juge civil, n'est pas conservée dans l'ordre répressif au profit des parties qui n'ont pas ab initio réservé utilement cette action dans le cadre des poursuites pénales d'ailleurs ouvertes en l'espèce par le parquet après l'expiration du délai de prescription ; que, pour cette raison encore, la cour ne pouvait recevoir l'action des plaignants sans violer les règles et principes visés au moyen ;
" 4°) alors que, de quatrième part, le cercle des sujets passifs de l'action sociale est nécessairement limité par l'objet de l'action dite « ut singuli » et ne peut dès lors être étendu aux personnes demeurées étrangères à l'administration de la société ; que la solution contraire retenue par la cour à l'égard du mari de la dirigeante décédée, et, par voie de conséquence, à l'égard du requérant, viole derechef les textes et principes visés au moyen ;
" 5°) alors que, enfin, la cour n'a pu se déterminer comme elle l'a fait en l'état des conclusions de la société fermière du casino municipal de Cannes (SFCMC) qui est intervenue en appel pour conclure à l'absence de préjudice résultant pour elle des faits de la prévention ; que l'intérêt social ne se divisant pas, la cour avait le devoir d'exclure toute équivoque dans son arrêt – ce qu'elle n'a pas fait – exposant de plus fort sa décision à la censure " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que, pour dire établis les faits de complicité d'abus de biens sociaux à l'encontre de Dominique X... et de recel à l'encontre de Jean-Marc Y..., l'arrêt prononce par les motifs repris aux moyens et énonce, notamment, que, le premier, conseiller de la famille A..., a, en parfaite connaissance de la finalité des opérations litigieuses, participé à toutes les négociations, apportant ainsi aide et assistance à Diane A..., et que, le second, qui avait conscience de la surévaluation, au préjudice de la SFCMC, du prix des titres Gray d'Albion que cette société acquérait, a bénéficié en sa qualité de dirigeant de la CIP du produit de l'infraction ;
Attendu, que, pour déclarer recevables les demandes de Jean-Marie E..., de la société Maison Antoine Baud et d'Antoine F..., agissant ès qualités d'actionnaires de la SFCMC et condamner Dominique X... et Jean-Marc Y..., en leur qualité de complice et de receleur, à verser solidairement à cette société la somme de 67 millions d'euros, l'arrêt énonce que les parties civiles ont exercé l'action ut singuli, devant le tribunal correctionnel, par conclusions déposées le 2 avril 2004, alors que l'action publique n'était pas prescrite ; que les juges retiennent qu'aux termes de l'article L. 225-252 du code de commerce, les actionnaires peuvent agir individuellement ; qu'ils relèvent que la société a été mise en cause conformément aux dispositions de l'article 201 du décret du 28 mars 1967 ; qu'ils ajoutent qu'en vertu de l'article 480-1 du code de procédure pénale, une telle action est recevable à l'encontre des complices et receleurs de l'infraction commise par l'auteur principal, même si, comme en l'espèce, l'action publique est éteinte à son égard ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel a répondu, comme elle le devait, aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie, a caractérisé en tous leurs éléments tant matériels qu'intentionnel, les délits de complicité d'abus de biens sociaux et de recel imputés aux prévenus, et a justifié leur condamnation à réparer le préjudice en découlant pour la SFCMC, peu important que cette dernière ait conclu à l'absence de préjudice ;
Qu'ainsi, les moyens doivent être écartés ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois ;
FIXE à 1 000 euros la somme que Dominique X... et Jean-Jacques Y... devront, respectivement, chacun, verser à Alain F..., la société Maison Antoine Baud et Jean-Marie E..., sur le fondement de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quatorze janvier deux mille neuf ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.