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16/12/2008 | FRANCE | N°07-44103

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 16 décembre 2008, 07-44103


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 4 juillet 2007), que Mme
X...
, engagée par l'Ambassade du Koweït en France en qualité de chargée de la "recherche politique" suivant décision d'embauche du 5 janvier 1988, a été licenciée le 1er juin 2001 sans préavis ni indemnité de rupture pour le motif suivant : "perte de confiance et manque de respect des instructions qui vous sont données, faits mettant en cause la sécurité de l'Ambassade" ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il est fait grief à l'a

rrêt d'avoir rejeté la fin-recevoir tirée de l'immunité de juridiction opposée par...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 4 juillet 2007), que Mme
X...
, engagée par l'Ambassade du Koweït en France en qualité de chargée de la "recherche politique" suivant décision d'embauche du 5 janvier 1988, a été licenciée le 1er juin 2001 sans préavis ni indemnité de rupture pour le motif suivant : "perte de confiance et manque de respect des instructions qui vous sont données, faits mettant en cause la sécurité de l'Ambassade" ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté la fin-recevoir tirée de l'immunité de juridiction opposée par l'Etat du Koweït, alors, selon le moyen, que la fin de non-recevoir tirée de l'immunité de juridiction doit être accueillie lorsqu'il est établi que le salarié licencié d'une ambassade exerçait une responsabilité particulière en rapport avec la mission du service public diplomatique ; qu'en l'espèce, la cour d'appel qui juge que Mme

X...
n'exerçait pas une telle responsabilité tout en constatant que la salariée avait pour mission - du propre aveu de cette dernière- la tenue d'agendas de diplomates de l'ambassade du Koweït en France qui emportait nécessairement connaissance des différentes personnes en relation avec les diplomates, des jours et des lieux de leurs rencontres ainsi que des contacts directs avec ces personnes extérieures, de telle sorte que la salariée exécutait bien des actes dans l'intérêt du service public de l'Etat du Koweït, ne tire pas de ses constatations les conséquences légales qui s'imposaient en violation du principe de droit international public d'immunité de juridiction ;
Mais attendu que, appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel, qui a retenu que l'activité exercée par l'intéressée n'était pas en rapport avec la mission de service public et que la salariée ne détenait aucune information de caractère confidentiel à partir des agendas et du courrier qu'elle traitait, en a dès lors exactement déduit que Mme

X...
n'avait aucune responsabilité particulière dans l'exercice du service public diplomatique de sorte que son licenciement constituait un acte de gestion ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne l'Etat du Koweit, pris en la personne de son ambassadeur en France, aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, le condamne à payer à Mme

X...
la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize décembre deux mille huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Thomas-Raquin et Bénabent, avocat aux Conseils pour l'Etat du Koweit, pris en la personne de son ambassadeur en France,
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté l'exception d'irrecevabilité tirée de l'immunité de juridiction opposée par l'Etat du KOWEIT ;
AUX MOTIFS QUE «Sur l'immunité de juridiction Qu'à l'appui du moyen d'irrecevabilité des demandes tiré de l'immunité de juridiction des Etats étrangers, l'Etat du KOWEIT soutient que du fait de ses fonctions de chargée de la recherche politique au sein du département politique de l'Ambassade l'amenant à connaître les agendas de diplomates et leur courrier hautement confidentiel et à numéroter le courrier de la valise diplomatique, Mme

X...
licenciée en droit/sciences politiques exerçait des responsabilités particulières dans l'entreprise par l'Ambassade de sa mission de service public diplomatique ;
Que Mme

X...
rétorque qu'elle effectuait en réalité un travail de secrétariat purement administratif ne relevant pas du service public et que l'Etat du KOWEIT ne démontre pas son implication dans des actes relevant de la puissance publique ;
Que si le Conseil de prud'hommes s'est référé à tort à la Convention de VIENNE qui n'a vocation à s'appliquer qu'aux actes passés par les agents diplomatiques et consulaires, il a rappelé à raison l'immunité de juridiction des Etats étrangers qui constitue une fin de non recevoir et s'attache quant à la nature de l'activité exercée aux actes de puissance publique et à ceux appliqués dans l'intérêt du Service public, dès lors que la personne en cause se voit conférer des responsabilités particulières dans l'exercice de ce service public, et non aux simples actes de gestion ;
Qu'en l'espèce, la dénomination du poste « chargée de la recherche politique » figurant sur la décision d'embauche, au demeurant contredite par la désignation de la salariée en qualité de « secrétaire » sur son certificat de travail et ses bulletins de salaire, et encore d' « assistante de direction » sur une attestation de travail délivrée par l'employeur, ne peut prévaloir sur la réalité de l'emploi occupé par Mme

X...
;
Qu'en l'absence de définition de fonctions, les tâches effectuées par Mme

X...
au sein du Département politique de l'Ambassade et consistant selon la salariée à effectuer des déclarations au Ministère des Affaires Etrangères, demander des cartes d'immatriculation des véhicules, demander des cartes diplomatiques, demander des franchises douanières, prendre des rendez-vous pour les patients koweïtiens pris en charge par le Ministère de la Santé du KOWEIT, effectuer un filtrage téléphonique, la tenue d'agendas sauf celui de l'Ambassadeur, la saisie de textes de presse et la saisie de courrier administratif sans rapport avec la mission de service public ;
Qu'en effet l'Etat du KOWEIT qui ne peut se constituer à lui-même une preuve, est mal venu à soutenir que Mme

X...
était amenée dans l'exercice de ses fonctions à avoir nécessairement connaissance d'informations confidentielles concernant les relations entre la France et l'Etat du KOWEIT en sa qualité de traductrice français/arabe en tapant des correspondances hautement confidentielles des diplomates, à avoir accès à la valise diplomatique qu'elle numérotait et avoir connaissance de l'itinéraire des hommes d'Etat du KOWEIT en visite en FRANCE, dans la mesure où ses assertions ne reposent que sur l'attestation inopérante établie par l'Ambassade de l'Etat du KOWEIT sans précision de l'identité de son auteur ;
Que force est de constater que l'Etat du KOWEIT ne produit aux débats aucune pièce de nature à décrire l'activité exercée par Mme

X...
en rapport avec la mission de service public et ne justifie pas du caractère confidentiel des informations auxquelles la salariée, au demeurant non tenue contractuellement par une obligation de confidentialité, aurait été amenée à avoir accès à partir des agendas parmi lesquels ne figurait pas celui de l'Ambassadeur et du courrier passant entre ses mains ;
Que la possession avérée de diplôme de haut niveau par la salariée ne peut suffire en soi à établir qu'elle exerçait une responsabilité particulière en rapport avec la mission de service public ;
Qu'il en va de même de l'avertissement du 16 février 2000 reçu par Mme

X...
en raison de négligences fautives qui « nuisent à l'image de l'Ambassade et à ses relations avec le Ministre des Affaires étrangères », sans faire état du manquement à des obligations pesant sur la salariée en raison de la mission de service public exercée par l'Ambassade ;
Qu'il s'ensuit que Mme

X...
n'avait aucune part dans les décisions prises par l'Etat du KOWEIT et que les fonctions qu'elle exerçait ne lui conféraient aucune responsabilité particulière dans l'exercice par l'Ambassade de sa mission de service public, de sorte que son licenciement constituait un acte de gestion ;
Qu'il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté l'exception d'irrecevabilité tirée de l'immunité de juridiction »ALORS QUE la fin de non-recevoir tirée de l'immunité de juridiction doit être accueillie lorsqu'il est établi que le salarié licencié d'une ambassade exerçait une responsabilité particulière en rapport avec la mission du service public diplomatique ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel qui juge que Madame

X...
n'exerçait pas une telle responsabilité tout en constatant que la salariée avait pour mission - du propre aveu de cette dernière - la tenue d'agendas de diplomates de l'ambassade du Koweït en France qui emportait nécessairement connaissance des différentes personnes en relation avec les diplomates, des jours et des lieux de leurs rencontres ainsi que des contacts directs avec ces personnes extérieures, de telle sorte que la salariée exécutait bien des actes dans l'intérêt du service public de l'Etat du KOWEIT, ne tire pas de ses constatations les conséquences légales qui s'imposaient en violation du principe de droit international public d'immunité de juridiction.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)
Il est fait grief à l'arrêt partiellement infirmatif attaqué d'avoir condamné l'Etat du KOWEIT à payer à Madame

X...
diverses indemnités au titre de son licenciement disciplinaire pour défaut de cause réelle et sérieuse de celui-ci ;
AUX MOTIFS QUE «Sur le licenciement Que si la perte de confiance ne peut jamais constituer en tant que telle un motif de licenciement et doit reposer sur des éléments objectifs, la lettre de licenciement, sans s'arrêter à sa rédaction maladroite, énonce un manque de respect des instructions qui constitue un motif précis et matériellement vérifiable, de sorte que, contrairement à ce qu'a retenu la Conseil de prud'hommes, elle est suffisamment motivée ;
Qu'à l'appui de sa décision de licenciement, sans préavis ni indemnité de rupture, l'Etat du KOWEIT qui invoque ainsi la faute grave dont la preuve de l'existence lui incombe, ne produit aux débats que le second avertissement du 30 avril 2001 pour absence pour cause de maladie, et se prévaut du premier avertissement du 16 février 2000 pour courrier négligé, irrespect envers les diplomates, désobéissance aux ordres des supérieurs dans ses fonctions, utilisation à des fins personnelles des outils de travail et arrivée en retard le matin, qu'il prétend que la sécurité a été mise en cause par la divulgation de l'hôtel du Prince de Galles comme lieu d'accueil du Ministre des Affaires Etrangères Koweïtien et que des démonstrations de licenciés ont eu lieu au sein de cet hôtel, mais ne justifie ni de la réalité des faits dont il se prévaut ni de leur imputabilité à Mme

X...
personnellement ;
Qu'ainsi en l'absence de fait nouveau imputable à la salariée permettant le rappel par l'employeur de faits déjà sanctionnés à l'appui d'une nouvelle sanction, le licenciement de Mme

X...
est sans cause réelle et sérieuse ;
Que sur le fondement de l'article L. 122-14-4 du Code du travail dont les conditions d'application sont réunies, et eu égard à son ancienneté et à sa prise en charge par l'ASSEDIC justifiée jusqu'en mars 2004, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a alloué à Mme

X...
la somme de 15 000 euros qui suffit à assurer la réparation de son entier préjudice (…) ;
Qu'il y a lieu en application de l'alinéa 2 de ce texte d'ordonner le remboursement des indemnités de chômage servies à Mme

X...
dans la limite de 6 mois ;
Que compte tenu de la solution donnée au litige, Mme

X...
a droit à l'indemnité compensatrice de préavis, aux congés payés incidents et à l'indemnité de licenciement dont les montants exactement calculés par l'intéressée ne sont pas contestés, le jugement étant confirmé de ces chefs ;
ALORS QUE D'UNE PART constituent une faute grave les absences et retards renouvelés du salarié perturbant le fonctionnement normal du service ;qu'en l'espèce, les absences et les retards répétés de Madame

X...
malgré les nombreux avertissements de son employeur étaient avérés ; que le fait que ces manquements aient été sanctionnés à plusieurs reprises n'excluait pas la poursuite du comportement fautif que la salariée avait d'ailleurs reconnu au moins à deux reprises ; que le comportement de Madame
X...
qui avait pour conséquence non seulement de perturber le service de l'ambassade de l'Etat du KOWEIT mais également de compromettre la sécurité de la délégation était par conséquent constitutif d'une faute grave ; qu'en écartant néanmoins cette qualification en raison de l'absence de fait nouveau imputable à la salariée permettant le rappel par l'employeur de faits déjà sanctionnées à l'appui d'une nouvelle sanction, la Cour d'appel a violé les articles L. 122-6 et L. 122-8 du Code du travail ;
ET AUX MOTIFS QUE Sur le licenciement vexatoire Qu'à l'appui de sa demande de dommages-intérêts distincte à ce titre Mme

X...
invoque le licenciement pour faute grave sans fondement et précédé d'une mise à pied conservatoire injustifiée et rapporte la preuve par l'attestation précise et circonstanciée d'une collègue de travail Mme
Y...
que le 31 mai 2001, à l'issue de cette mesure infligée jusqu'au 29 mai, l'employeur lui a interdit l'accès aux bureaux ;
Qu'en réparation du préjudice distinct de celui résultant de la perte de son emploi et imputable à l'employeur, il convient, infirmant le jugement, de lui allouer la somme de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts pour les conditions vexatoires ayant entouré son licenciement ;
ALORS QUE D'AUTRE PART le cumul entre les dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et l'indemnité pour préjudice distinct est subordonné à la preuve de l'existence d'un préjudice spécifique résultant de procédés vexatoires dans la mise en oeuvre ou les circonstances du licenciement ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a accordé à Madame

X...
des dommages-intérêts en réparation du préjudice prétendument subi à la suite de l'interdiction d'accéder aux bureaux qui lui aurait été opposée en se fondant uniquement sur une attestation dont l'exposant contestait pourtant la crédibilité de manière circonstanciée en soulignant qu'elle émanait de la collègue ayant assisté Madame
X...
lors de l'entretien préalable et qui, de surcroît, avait été licenciée le même jour ; qu'en ne s'expliquant pas sur la crédibilité qui pouvait être accordée à l'unique attestation produite par la salariée à l'appui de sa demande et, par voie de conséquence, sur la réalité du comportement fautif reproché à l'employeur, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 07-44103
Date de la décision : 16/12/2008
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 04 juillet 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 16 déc. 2008, pourvoi n°07-44103


Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Delaporte, Briard et Trichet, SCP Thomas-Raquin et Bénabent

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:07.44103
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