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10/12/2008 | FRANCE | N°07-43284

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 10 décembre 2008, 07-43284


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 14 mai 2007), que Mme X..., engagée en qualité de vendeuse-caissière le 5 octobre 1992 par la société Gémo services, aux droits de laquelle vient la société Vêtir, a été promue adjointe au directeur du magasin de Grasse à compter de juin 1997, poste occupé par son mari ; qu'elle a été convoquée le 26 mai 2005 pour recueillir ses explications sur des accusations de « harcèlement moral envers les employées et de discriminati

on raciale à l'égard de la clientèle » portées par plusieurs employées ou ancienn...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 14 mai 2007), que Mme X..., engagée en qualité de vendeuse-caissière le 5 octobre 1992 par la société Gémo services, aux droits de laquelle vient la société Vêtir, a été promue adjointe au directeur du magasin de Grasse à compter de juin 1997, poste occupé par son mari ; qu'elle a été convoquée le 26 mai 2005 pour recueillir ses explications sur des accusations de « harcèlement moral envers les employées et de discrimination raciale à l'égard de la clientèle » portées par plusieurs employées ou anciennes employées du magasin Gémo de Grasse à son encontre ; que, soulignant la mauvaise gestion du personnel, l'employeur a informé la salariée par courrier recommandé du 2 juin 2005 de sa mutation au magasin Gémo de Cosne-sur-Loire à compter du 8 août 2005 en application de la clause de mobilité géographique prévue à son contrat de travail ; que, suite à son refus de mutation le 10 juin 2005, la salariée a fait l'objet d'un licenciement pour faute grave le 1er juillet 2005 ; que, contestant le bien-fondé de la mesure prise à son encontre et réclamant le paiement d'indemnités de rupture et de congés payés, la salariée a saisi la juridiction prud'homale ;

Attendu que la société Vêtir fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à la salariée un rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire et une indemnité compensatrice de préavis outre les congés payés afférents, une indemnité conventionnelle de licenciement et une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse , alors, selon le moyen :

1°/ qu'aux termes d'un courrier du 2 juin 2005, elle décidait de muter sa salariée, adjointe de direction, ayant fait le constat de quatorze démissions en dix-huit mois caractérisant une gestion défaillante du personnel, d'une part, de problèmes relationnels rencontrés avec le directeur régional, d'autre part, le tout faisant suite à des accusations, déniées par l'intéressée mais effectivement portées contre elle, de harcèlement et de discrimination ; qu'elle précisait que la salariée deviendrait adjointe de direction d'un autre magasin dont le chiffre d'affaires était plus élevé, dont la baisse d'activité était moins importante et qui ne connaissait aucun problème de personnel ; qu'il en résultait qu'elle avait muté sa salariée dans l'intérêt de l'entreprise en l'état de difficultés relationnelles rencontrées avec le personnel et entravant le bon fonctionnement du magasin dont elle était adjointe de direction ; qu'en affirmant qu'il résultait des raisons de la mutation invoquées dans la lettre du 2 juin 2005, qu'elle aurait « sanctionné » la salariée et, partant, fait une utilisation abusive de la clause de mobilité géographique sans respect de la procédure disciplinaire, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;

2°/ que la mutation décidée en application d'une clause de mobilité n'est pas abusive du seul fait qu'elle a été décidée pour un motif disciplinaire ; qu'il appartient au juge, le cas échéant, de vérifier si le comportement reproché au salarié lui était ou non imputable et justifiait son déplacement ; qu'en déduisant l'usage abusif de la clause de mobilité de ce qu'elle aurait imposé à la salariée une mutation venant la sanctionner, sans constater que les problèmes de personnel rencontrés par la salariée (démissions nombreuses, accusations diverses, mésentente) n'étaient pas de son fait, la cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil et L. 122-43 du code du travail ;

3°/ que le non-respect de la procédure disciplinaire constitue, le cas échéant, une irrégularité de procédure mais ne rend pas la mutation abusive ; qu'en déduisant l'usage abusif de la clause de mobilité de ce que l'employeur aurait muté la salariée sans respecter la procédure disciplinaire, la cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil et L. 122-43 du code du travail ;

Mais attendu qu'après avoir relevé que la mutation de la salariée avait été décidée par l'employeur pour mauvaise gestion par la salariée du personnel faisant suite à des accusations de harcèlement moral envers ses employés et de discrimination raciale à l'égard de la clientèle, faisant ainsi ressortir un comportement du salarié relevant d'une sanction disciplinaire, la cour d'appel a pu en déduire que l'employeur avait fait un usage abusif de la clause de mobilité et que le refus de la salariée de sa mutation qui n'était pas fautif rendait son licenciement dénué de cause réelle et sérieuse ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Vêtir aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Vêtir à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix décembre deux mille huit.

Moyen annexé au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccin, avocat aux Conseils pour la société Vêtir, venant aux droits de la société Gémo services.

MOYEN UNIQUE DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société VETIR à payer à la salariée un rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire et les congés payés afférents, une indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents, une indemnité conventionnelle de licenciement, une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, une somme au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, et d'AVOIR ordonné la remise par l'employeur du bulletin de salaire de juin 2005 rectifié, de bulletins de salaire correspondant aux trois mois de préavis, du certificat de travail et de l'attestation ASSEDIC rectifiés en conformité avec l'arrêt,

AUX MOTIFS QUE la SARL GEMO SERVICES a entendu Madame Pascale X... le 26 mai 2005 sur « certaines accusations graves portées contre (lui et son épouse) susceptibles de revêtir la qualification de harcèlement moral envers les employées et de discrimination raciale à l'égard de la clientèle », après lui avoir indiqué dans son courrier de convocation du 19 mai 2005 qu'elle « pourrait être conduite à engager une procédure de licenciement à l'issue de l'entretien » ; que l'employeur a notifié, par lettre recommandée du 2 juin 2005, a la salariée sa mutation à Cosne sur Loire après lui avoir rappelé le déroulement de l'entretien du 26 mai 2005 : demande d'explications sur les courriers reçus du personnel du magasin GEMO de Grasse « relatant des comportements qualifiables de harcèlement moral envers ce personnel et de discrimination raciale à l'égard de la clientèle », négation par la salariée des faits décrits dans ces courriers, explications de la salariée rapportées par l'employeur, celle-ci aurait notamment expliqué « avoir été contrainte par Monsieur Y..., directeur régional, d'adopter une attitude plus exigeante envers le personnel » ; que l'employeur a par ailleurs souligné dans le même courrier qu' « au-delà des problèmes relationnels invoqués par Monsieur Y..., il ne pouvait plus tolérer le turn-over de personnel anormalement élevé sur les 18 mois… illustration d'une évidente mauvaise gestion de personnel » ; que la SARL GEMO SERVICES a elle-même précisé que « pour toutes ces raisons… », elle a décidé de la mutation de la salariée ; que l'employeur a donc imposé à la salariée une mutation venant sanctionner sa « mauvaise gestion du personnel » et faisant suite à des accusations de harcèlement moral, et ce sans respecter la procédure disciplinaire ; qu'il s'agit là d'une utilisation abusive de la clause de mobilité géographique, de sorte que le refus de mutation de la salariée n'est pas fautif ; qu'il y a donc lieu d'infirmer le jugement et de dire le licenciement de Madame Pascale X... dénué de cause réelle et sérieuse ;

1. ALORS QU'aux termes d'un courrier du 2 juin 2005, l'employeur décidait de muter sa salariée, adjointe de direction, ayant fait le constat de 14 démissions en 18 mois caractérisant une gestion défaillante du personnel, de problèmes relationnels rencontrés avec le directeur régional d'autre part, le tout faisant suite à des accusations, déniées par l'intéressée mais effectivement portées contre elle, de harcèlement et de discrimination ; que l'employeur précisait que la salariée deviendrait adjointe de direction d'un autre magasin dont le chiffre d'affaires était plus élevé, dont la baisse d'activité était moins importante et qui ne connaissait aucun problème de personnel ; qu'il en résultait que l'employeur avait muté sa salariée dans l'intérêt de l'entreprise en l'état de difficultés relationnelles rencontrées avec le personnel et entravant le bon fonctionnement du magasin dont elle était adjointe de direction ; qu'en affirmant qu'il résultait des raisons de la mutation invoquées dans la lettre du 2 juin 2005 que l'employeur aurait « sanctionné » la salariée et, partant, fait une utilisation abusive de la clause de mobilité géographique sans respect de la procédure disciplinaire, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil.

2. ALORS subsidiairement QUE la mutation décidée en application d'une clause de mobilité n'est pas abusive du seul fait qu'elle a été décidée pour un motif disciplinaire ; qu'il appartient au juge, le cas échéant, de vérifier si le comportement reproché au salarié lui était ou non imputable et justifiait son déplacement ; qu'en déduisant l'usage abusif de la clause de mobilité de ce que l'employeur aurait imposé à la salariée une mutation venant la sanctionner, sans constater que les problèmes de personnel rencontrés par la salariée (démissions nombreuses, accusations diverses, mésentente) n'étaient pas de son fait, la cour d'appel a violé les articles 1134 du Code civil et L 122-43 du Code du travail.

3. ET ALORS en outre QUE le non-respect de la procédure disciplinaire constitue, le cas échéant, une irrégularité de procédure mais ne rend pas la mutation abusive ; qu'en déduisant l'usage abusif de la clause de mobilité de ce que l'employeur aurait muté la salariée sans respecter la procédure disciplinaire, la Cour d'appel a violé les articles 1134 du Code civil et L 122-43 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 07-43284
Date de la décision : 10/12/2008
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 14 mai 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 10 déc. 2008, pourvoi n°07-43284


Composition du Tribunal
Président : Mme Quenson (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:07.43284
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