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09/12/2008 | FRANCE | N°08-10938

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 09 décembre 2008, 08-10938


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu selon l'arrêt attaqué (Paris, 6 novembre 2007) que Mme X..., propriétaire d'un appartement dépendant d'un immeuble collectif, l'a donné à bail à Mme Y... ; qu'après délivrance d'un commandement de payer visant la clause résolutoire, elle a assigné la locataire en acquisition de cette clause et paiement d'un arriéré locatif incluant une somme au titre de la révision du loyer et une autre au titre de la régularisation des charges locatives ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé :



Attendu qu'ayant constaté que le contrat prévoyait une clause selon laquell...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu selon l'arrêt attaqué (Paris, 6 novembre 2007) que Mme X..., propriétaire d'un appartement dépendant d'un immeuble collectif, l'a donné à bail à Mme Y... ; qu'après délivrance d'un commandement de payer visant la clause résolutoire, elle a assigné la locataire en acquisition de cette clause et paiement d'un arriéré locatif incluant une somme au titre de la révision du loyer et une autre au titre de la régularisation des charges locatives ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

Attendu qu'ayant constaté que le contrat prévoyait une clause selon laquelle le loyer serait révisé chaque année sur la base de la moyenne de l'indice du coût de la construction sur quatre trimestres, relevé, à bon droit, qu'il importait peu que la date de révision ne fût pas complétée, que s'il était vrai que l'indice figurant au bail correspondait à la valeur de l'indice du troisième trimestre 1995 et non du quatrième, l'erreur commise ne pouvait affecter la validité de la clause de révision annuelle et que la circonstance que Mme X... n'ait pas appliqué cette clause jusqu'en juillet 2000 et ait délivré pour les mois d'août 1996 à juin 2000 des quittances de loyer ne pouvait valoir renonciation de sa part à se prévaloir du bénéfice de la clause litigieuse, la cour d'appel, qui en a exactement déduit que la bailleresse était fondée à appliquer la clause dans la limite de la prescription quinquennale, a pu retenir que le détail du calcul de la révision était conforme aux clauses du bail ;

Mais sur le deuxième moyen :

Vu l'article 23 de la loi du 6 juillet 1989 ;

Attendu que les charges locatives peuvent donner lieu au versement de provisions et doivent, en ce cas, faire l'objet d'une régularisation au moins annuelle ; qu'un mois avant cette régularisation, le bailleur en communique aux locataires le décompte par nature de charges ainsi que, dans les immeubles collectifs, le mode de répartition entre les locataires ;

Attendu que pour accueillir la demande au titre des charges locatives, l'arrêt retient que la régularisation annuelle de charges des années 2001 à 2004 figure sur le décompte récapitulatif du compte locataire, au crédit ou au débit selon le cas, que préalablement à cette régularisation la société Paul Rolland a communiqué à Mme Y... un décompte par nature de charges établi par ses soins, conforme aux dispositions de l'article 23 de la loi du 6 juillet 1989, qu'il importe peu que pour les années 2001, 2002 et 2003, le relevé de répartition des charges établi par le syndic de copropriété ne lui ait pas été fourni ;

Qu'en statuant ainsi, sans relever que la bailleresse avait communiqué à Mme Y... le mode de répartition des charges entre les locataires de l'immeuble pour les années 2001 à 2003, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le troisième moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE et ANNULE mais seulement en ce qu'il a condamné Mme Y... à payer à Mme X... les sommes de 23 816, 64 euros à titre d'arriéré locatif et de 1 574, 38 euros à titre de clause pénale, l'arrêt rendu le 6 novembre 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme X... à payer à Mme Y... la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de Mme X... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé à l'audience publique du neuf décembre deux mille huit par M. Peyrat, conseiller doyen faisant fonction de président, conformément à l'article 452 du code de procédure civile.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par Me Balat, avocat aux Conseils pour Mme Y....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné Madame Y... à payer à Madame X... la somme de 23. 816, 64 à titre d'arriéré locatif terme de janvier 2007 inclus et celle de 1. 574, 38 à titre de clause pénale et d'avoir par conséquent ordonné l'expulsion de Madame Z...- Y... des lieux loués ;

AUX MOTIFS QUE, sur la révision annuelle du loyer, le contrat prévoit une clause selon laquelle le loyer sera révisé chaque année sur la base de la moyenne de l'indice du coût de la construction sur quatre trimestres, la moyenne de référence étant celle du 1er trimestre 1996, avec cette mention " valeur 4e T 95 : 1019, 25 " ; que la circonstance que Madame X... n'a pas appliqué cette clause jusqu'en juillet 2000 et a délivré, pour les mois d'août 1996 à juin 2000, des quittances de loyers, lesquelles ne sont libératoires que jusqu'à concurrence de la somme qui y est portée, ne saurait, comme le soutient Madame Y..., valoir renonciation de Madame X... à se prévaloir du bénéfice de la clause litigieuse ; que selon l'article 17 d), alinéa 1er, de la loi du 6 juillet 1989 dans sa rédaction alors applicable, lorsque le contrat de location prévoit la révision du loyer, celle-ci intervient chaque année à la date convenue entre les parties ou, à défaut, au terme de chaque année du contrat ; qu'il importe dès lors peu que la date de révision ne soit pas complétée sur l'exemplaire du bail de Madame Y..., la révision intervenant en tout état de cause par l'effet de l'article susvisé, au terme de chaque année du contrat, soit en l'espèce pour la première fois le 1er juillet 1997 ; que l'indice du coût de la construction du 1er trimestre 1996 ayant été publié le 12 juillet 1996, soit postérieurement à la conclusion du bail, celui-ci ne pouvait mentionner que la moyenne de l'indice du 4e trimestre 1995, alors seul connu ; que s'il est vrai que l'indice 1019, 25 figurant au bail correspond à la valeur de la moyenne de l'indice du 3e trimestre 1995 et non du 4e trimestre, cette erreur est cependant dénuée de portée et ne saurait affecter la validité de la clause de révision annuelle que Madame X... était par conséquent fondée à appliquer, dans la limite de la prescription quinquennale ; que le détail du calcul de la révision, tel qu'il a été précisé à Madame Y... notamment dans les courriers de la Société PAUL ROLLAND, administrateur de biens, de juillet 2000 et du 13 septembre 2002, non sérieusement critiqué, est conforme aux clauses du bail ; que le montant du loyer en principal est par conséquent justifié, de sorte que le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Madame Y... de sa demande tendant à ce que la revalorisation du loyer soit déclarée irrégulière et que le loyer demeure fixé au montant initial figurant dans le bail, soit 1. 374, 02 ;

ALORS QUE lorsque le contrat de location prévoit la révision du loyer, celle-ci intervient chaque année à la date convenue entre les parties ou, à défaut, au terme de chaque année de contrat ; que la révision doit être plafonnée en fonction de l'indice de référence publié par l'INSEE ; qu'en affirmant que le loyer devait être révisé selon l'indice en vigueur, tout en constatant que la bailleresse n'avait pas procédé à cette révision pendant quatre ans, que la date de la révision n'était pas complétée sur l'exemplaire du bail de la locataire et que l'indice du coût de la construction du 1er trimestre 1996 visé dans le bail était erroné, puisqu'il n'était pas connu au jour de la signature du contrat de location (arrêt attaqué, p. 3 in fine et p. 4 § 3), ce dont il résultait qu'aucune clause de révision de bail ne pouvait plus être mise en oeuvre a posteriori au détriment de la locataire, sur la base d'un indice de révision à l'origine erroné, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 17 d) de la loi du 6 juillet 1989.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné Madame Y... à payer à Madame X... la somme de 23. 816, 64 à titre d'arriéré locatif terme de janvier 2007 inclus et celle de 1. 574, 38 à titre de clause pénale et d'avoir débouté Madame Y... de sa demande tendant à la condamnation de Madame X... à lui rembourser les provisions sur charges non justifiées ;

AUX MOTIFS QUE, sur les charges locatives, il résulte de l'article 23 de la loi du 6 juillet 1989 que, lorsque les charges locatives donnent lieu au versement d'une provision, elles doivent faire l'objet d'une régularisation annuelle, les demandes de provision étant justifiées par la communication de résultats antérieurs arrêtés lors de la précédente régularisation et, lorsque l'immeuble est soumis au statut de la copropriété ou lorsque le bailleur est une personnel morale, par le budget prévisionnel ; qu'il est prévu qu'un mois avant cette régularisation, le bailleur en communique au locataire le décompte par nature de charges ainsi que, dans les immeubles collectifs, le mode de répartition entre locataires ; que durant un mois à compter de l'envoi de ce décompte, les pièces justificatives sont tenues à la disposition des locataires ; que Madame Y..., dont le bail prévoit le versement d'une provision mensuelle sur charges, soutient ne pas avoir reçu de décompte de régularisation annuelle de 1997 à 2000, conteste celui produit pour les années 2001 à 2003 et invoque un défaut de justification des charges, à l'exception de l'année 2004, en dépit de ses demandes réitérées ; qu'en ce qui concerne les années 1996 à 2000, les courriers produits par Madame Y... (30 juillet 2000, 13 avril 2001, 7 octobre 2003) démontrent qu'elle a effectivement demandé à plusieurs reprises à la Société PAUL ROLLAND la communication des décomptes de charges pour les années 1996 à 1999, manifestement sans succès, ces pièces n'ayant pas été versées aux débats ; que la production de ces décomptes apparaît cependant désormais dénuée d'intérêt compte tenu de l'ancienneté des périodes visées ; qu'il y a lieu d'admettre que le décompte de l'année 2000 que la Société PAUL ROLLAND indiquait annexer à son courrier du 13 septembre 2002, a effectivement été adressé à Madame Y..., bien qu'il ne soit pas versé aux débats, puisque celle-ci ne le réclamait pas dans sa lettre du 7 octobre 2003 ; que sa demande de production de décomptes pour les années en cause a donc été à juste titre rejetée par le tribunal ; qu'en ce qui concerne les années 2001 à 2004, la régularisation annuelle de charges des années en cause figure sur le décompte récapitulatif du compte locataire, au crédit ou au débit selon le cas ; que préalablement à cette régularisation, la Société PAUL ROLLAND a communiqué à Madame Y... un décompte par nature de charges établi par ses soins, conforme aux dispositions de l'article 23 de la loi du 6 juillet 1989 ; qu'il était alors loisible à la locataire de demander à consulter les pièces justificatives dans le délai d'un mois, ce qu'elle n'a pas fait ; qu'il importe dès lors peu que pour les années 2001, 2002 et 2003, le relevé de répartition de charges établi par le syndic de copropriété ne lui ait pas été fourni ; que le décompte du syndic établi pour l'année 2004 démontre d'ailleurs que le décompte établi par la Société PAUL ROLLAND ne reprend que les charges récupérables ; que le jugement sera donc également confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de production de pièces pour les années susvisées ; qu'en ce qui concerne l'année 2005, la régularisation de charges figure sur le dernier relevé de compte locatif, celui-ci ayant été crédité d'une somme de 78, 29 en faveur de Madame Y... le 1er octobre 2006, mais que le décompte correspondant n'est pas versé aux débats, de sorte qu'il convient d'enjoindre à Madame X... de le communiquer à l'intéressé afin qu'elle puisse vérifier le bien fondé de la régularisation intervenue ;

ALORS QUE le bailleur, pour pouvoir procéder à une régularisation des charges, doit communiquer au locataire non seulement le décompte justifié par nature de charges, mais aussi, dans les immeubles collectifs, le mode de répartition des charges entre les locataires ; qu'en estimant que les régularisation de charges opérées par Madame X..., bailleresse, étaient opposables à Madame Y..., locataire, tout en constatant que, pour les années 1996 à 2000, cette dernière n'avait pas reçu communication des décomptes de charges et que, pour les années 2001, 2002 et 2003 le relevé de répartition de charges établi par le syndic ne lui avait pas été fourni, pas plus que celui de l'année 2005 (arrêt attaqué, p. 4 § 7 et p. 5 § 1 et 5), ce dont il résultait qu'aucun règlement de charges n'aurait dû être réclamé à Madame Y..., la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 23 de la loi du 6 juillet 1989.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir constaté l'acquisition de la clause résolutoire contenue au bail et d'avoir ordonné l'expulsion de Madame Y... des locaux loués ;

AUX MOTIFS QUE s'il est vrai que Madame X... n'a pas délivré avant juillet 2000 à sa locataire les quittances afférentes à la période antérieure, puis ne lui a pas remis régulièrement les quittances pour les loyers réglés, voire ne les a pas toutes remises, les documents produits par Madame Y... sont cependant insuffisants à établir, d'une part, qu'elle aurait été privée du bénéfice de l'allocation de logement à caractère social pour ce motif, d'autre part, qu'elle aurait été dans l'impossibilité de renouveler sa demande de logement social ; que la circonstance que Madame Y... a dû écrire à plusieurs reprises à la bailleresse pour contester des décomptes dont certains comprenaient des erreurs, sans obtenir de réponse, ne saurait caractériser la mauvaise foi de la bailleresse dans la mise en oeuvre de la clause résolutoire, d'autant que la différence entre la somme réclamée dans le commandement et celle effectivement due à cette date était limitée et que le commandement restait valable pour la partie non contestable de la dette que Madame Y... était en mesure de solder dans le délai du commandement compte tenu du montant du solde créditeur figurant sur son compte lors de la première saisie-conservatoire ; que la clause résolutoire a par conséquent été acquise le 11 février 2005 ; que la situation de Madame Y..., qui persiste depuis juillet 2005 à régler le loyer fixé dans le bail, sans revalorisation, de sorte que le montant de sa dette a augmenté, ne justifie pas l'octroi de délais et la suspension des effets de la clause résolutoire ;

ALORS QUE la clause résolutoire doit être invoquée de bonne foi par le bailleur ; qu'est nécessairement de mauvaise foi le bailleur qui, tout en réclamant le paiement d'arriérés de loyers au soutien de sa demande d'expulsion du locataire, s'obstine à ne communiquer à celui-ci aucun justificatif de charges et aucune quittance, les seuls relevés fournis au locataire étant entachés d'erreur ; qu'en constatant l'acquisition de la clause résolutoire et en ordonnant l'expulsion de Madame Y... des lieux loués, tout en relevant, d'une part, que Madame X... n'avait pas délivré à la locataire de quittances de loyer jusqu'en 2000, puis qu'elle l'avait fait de manière irrégulière ensuite (arrêt attaqué, p. 7 § 3), d'autre part, que Madame Y... n'avait pas reçu les décomptes de charge à l'exception de l'année 2004 (arrêt attaqué, p. 4 § 7 et p. 5 § 1 et 5), et enfin que la somme indiquée dans le commandement de payer visant la clause résolutoire était erronée (arrêt attaqué, p. 7 § 4), ce dont s'évinçait nécessairement la mauvaise foi de la bailleresse, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 1134, alinéa 3, du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 08-10938
Date de la décision : 09/12/2008
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 06 novembre 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 09 déc. 2008, pourvoi n°08-10938


Composition du Tribunal
Président : M. Peyrat (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Thomas-Raquin et Bénabent

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:08.10938
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