LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à la société Doré Doré 1819 et Mme X..., ès qualités, de leur désistement partiel à l'égard de M. Y... et à la SELARL Philippe Z... Cabooter, ès qualités ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. A... a été engagé le 1er octobre 2000 en qualité de directeur commercial export par la société Doré Doré, laquelle a fait l'objet d'un redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Paris du 24 octobre 2002 ; qu'il a été licencié pour motif économique par les administrateurs judiciaires de la société par lettre du 16 mai 2003 visant le jugement du 6 mai 2003 arrêtant le plan de cession de la société et autorisant le licenciement des salariés non repris ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de paiement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que d'une indemnité pour non-respect de la priorité de réembauchage ;
Sur la recevabilité du pourvoi de Mme X..., en sa qualité de représentant des créanciers de la société Doré Doré :
Attendu que la seule condamnation critiquée par le pourvoi relative à l'indemnité pour non-respect de la priorité de réembauchage n'a été prononcée qu'à l'encontre de la société Doré Doré 1819 ; que cette indemnité n'ayant pas été fixée au passif de la société Doré Doré, son représentant des créanciers n'a pas d'intérêt au pourvoi au sens de l'article 609 du code de procédure civile comme le soulève le mémoire en défense ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 321-14 devenu L. 1233-45 du code du travail ;
Attendu que pour condamner la société cessionnaire Doré Doré 1819 au paiement d'une indemnité pour non-respect de la priorité de réembauchage, l'arrêt énonce que l'obligation concerne tout emploi correspondant à la qualification du salarié licencié devenu disponible pendant la période d'un an à compter de la date de la rupture et que contrevient à cette obligation l'embauche, le 15 septembre 2004, de M. Stefano B... au poste de directeur commercial France/export, dont atteste le registre du personnel de la société Doré Doré 1819, qui n'a pas préalablement proposé le poste à M. A... et ne peut sérieusement prétendre qu'il ne correspondait pas à sa qualification ;
Qu'en statuant ainsi, sans préciser à quelle date était intervenue la fin du préavis du salarié licencié qui faisait partir le délai d'application de sa priorité de réembauchage, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle ;
PAR CES MOTIFS :
DECLARE IRRECEVABLE le pourvoi de Mme X... en sa qualité de représentant des créanciers de la société Doré Doré ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a alloué à M. A... une indemnité pour non-respect de la priorité de réembauchage, l'arrêt rendu le 2 mai 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Condamne M. A... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois décembre deux mille huit.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils pour la société Doré Doré 1819 et Mme X..., ès qualités
II est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la Société DORE DORE 1819 à payer à Monsieur Alain A... la somme de 22.000 à titre d'indemnité pour non respect de la priorité de réembauchage, ainsi que la somme de 2.000 sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
AUX MOTIFS QU' «en vertu de l'article L.321-14 du Code du Travail, le salarié licencié pour motif économique bénéficie d'une priorité de réembauchage durant un délai d'un an à compter de la date de rupture de son contrat de travail s'il manifeste le désir d'user de cette priorité au cours de cette année, l'employeur l'informant dans ce cas de tout emploi devenu disponible et compatible avec sa qualification ; qu'en l'espèce, Monsieur Alain A... a fait connaître son intention de bénéficier de la priorité de réembauchage par lettre adressée à la société DORE DORE 1819 le 23 septembre 2003 ; que par lettre du 6 janvier 2004, la société lui a proposé un poste de commercial pour la région Est de la France moyennant une rémunération fixe, un pourcentage sur chiffre d'affaires et une prime sur objectif pour un montant global approchant 40.000 euros par an ; qu'il a refusé ce poste au motif qu'il ne correspondait pas à sa qualification et s'est déclaré ouvert à toute proposition pour un poste plus proche de celui qu'il occupait; qu'à l'appui de sa demande, Monsieur A... soutient que le repreneur a recruté, en ayant recours à des postes de consultants, pour des emplois tels que responsable marketing ou directeur général qui aurait pu lui convenir et ne lui ont pas été proposés; que la société DORE DORE 1819 réplique que le licenciement ayant été prononcé par les administrateurs judiciaires de la SA DORE DORE, aucun grief ne peut être dirigé contre elle de ce chef et qu'ayant refusé un poste de commercial correspondant à sa qualification, Monsieur A... est mal venu à exciper d'un non respect de la priorité de réembauchage ; que la priorité de réembauchage s'exerce à l'égard de l'entreprise et subsiste après le licenciement en cas de modification de la situation juridique de l'employeur, de sorte que la société DORE DORE 1819 est mal fondée à solliciter sa mise hors de cause au motif que le licenciement a été prononcé par les administrateurs de la société DORE DORE; que l'obligation concerne tout emploi correspondant à la qualification du salarié licencié devenu disponible pendant la période d'un an à compter de la date de la rupture et que la circonstance que le salarié ait refusé un poste de commercial qui lui avait été proposé ne dispensait pas l'employeur de lui proposer les autres postes compatibles avec sa qualification devenant disponibles dans le délai prévu par la loi ; que dès lors, contrevient à cette obligation l'embauche, le 15 septembre 2004, de Monsieur Stefano B... au poste de directeur commercial France/Export, dont atteste le registre du personnel de la société DORE DORE 1819, qui n'a pas préalablement proposé le poste à Monsieur Alain A... et ne peut sérieusement prétendre qu'il ne correspondait pas à sa qualification ; que conformément au dernier alinéa de l'article L.122-14-4 du Code du Travail, il sera en conséquence alloué de ce chef au salarié, une somme de 22.000 » ;
ALORS, D'UNE PART, QU' il ne résulte ni du rappel des prétentions de l'arrêt attaqué, ni des conclusions de Monsieur A... que ce dernier ait entendu déduire une violation de la priorité de réembauchage de l'embauche de Monsieur Stéphano B... au poste de directeur commercial France/export ; que cette circonstance s'explique par le fait que cette embauche était intervenue le 15 septembre 2004, soit plus d'une année après l'expiration du délai de préavis de Monsieur A... de telle sorte qu'elle n'avait normalement pas vocation à être prise en compte pour apprécier le respect de l'obligation prioritaire de réembauchage qui pesait sur la Société DORE DORE 1819 ; qu'en déduisant de sa propre initiative la violation de cette obligation de l'embauche de Monsieur B..., sans provoquer les explications des parties sur ce point, la cour d'appel a violé les articles 4 et 16 du Code de Procédure Civile ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE la priorité de réembauchage instituée par l'article L.321-14 du Code du Travail bénéficie au salarié licencié pour motif économique «durant un délai d'un an à compter de la date de rupture de son contrat» ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de l'arrêt attaqué qu'à la date de l'embauche du directeur commercial (M. B...) le 15 septembre 2004, le contrat de travail de Monsieur A..., dont le préavis avait expiré le 31 août 2003, était rompu depuis plus d'un an ; qu'en reprochant néanmoins à la Société DORE DORE 1819 de ne pas avoir respecté son obligation de priorité de réembauchage en recrutant Monsieur B... le 15 septembre 2004, la cour d'appel a violé le texte susvisé, ensemble l'article L.122-14-4 dernier alinéa du Code du Travail ;
ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QU' en ne faisant pas ressortir si les conditions de l'article L.321-14 du Code du travail étaient remplies, c'est-à-dire en ne recherchant pas si l'embauche de Monsieur B... était intervenue dans l'année du licenciement de Monsieur A..., la cour d'appel n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure d'exercer son contrôle et, partant, a privé sa décision de base légale au regard de ce même texte.