LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique pris en sa première branche :
Vu l'article 117 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que dans un litige opposant M. X... à son employeur, la société le Crédit du Nord, un appel a été formé au nom du salarié par un courrier établi sur du papier à en-tête d'une société civile professionnelle d'avocats ;
Attendu que pour déclarer l'appel irrecevable, la cour d'appel énonce que la signature de l'appelant qui l'identifie constitue une condition d'existence de la déclaration d'appel, et que l'identité et la qualité du signataire doivent être déterminées par les seules mentions de cette déclaration, que la mention " pour ordre " figurant avant la signature apposée sur un feuillet à l'en-tête de la SCP " Jean-Pierre Y..., J. C Y..., Régine Z... " exclut que la personne au nom de laquelle l'acte est rédigé en soit le signataire, que les mentions de la déclaration d'appel elle-même, quelles que soient les indications du papier à en-tête sur lequel elle est rédigée, et quelle que soit la lisibilité de la signature apposée, ne permettent pas sans recherche extérieure à cette déclaration, de déterminer l'identité et la qualité du signataire ;
Attendu, cependant, que quelle que soit la gravité des irrégularités alléguées, seules affectent la validité d'un acte de procédure, soit les vices de forme faisant grief, soit les irrégularités de fond limitativement énumérées à l'article 117 du code de procédure civile ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors que l'absence de précision de l'acte sur l'identité et la qualité de son auteur ne constituait pas à elle seule une cause de nullité de la déclaration d'appel et que l'appelant devait être admis à établir que le signataire avait, à la date à laquelle le recours avait été formé, le pouvoir de le faire, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 juillet 2006, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société Crédit du Nord aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Crédit du Nord à payer la somme de 2 500 euros à M. X... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du deux décembre deux mille huit.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour M. X....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré l'appel interjeté par M. X... irrecevable et de l'avoir condamné aux dépens.
AUX MOTIFS QUE « le conseil de Monsieur Antoine X... fait valoir que la déclaration d'appel porte une signature lisible identifiant clairement la signataire, Maître B..., que celle-ci a la qualité d'avocat et figure en entête en tant qu'avocate collaboratrice de la Société Civile Professionnelle dont fait partie Maître B... ; qu'il est donc possible de vérifier la régularité de cette déclaration sans vérification extrinsèque ; mais considérant que la signature de l'appelant, qui l'identifie, constitue une condition d'existence de la déclaration d'appel, et que l'identité et la qualité du signataire doivent être déterminées par les seules mentions de cette déclaration ; qu'en l'occurrence la signature apposée sur l'acte d'appel, qui est effectué sur un feuillet à l'en-tête de Jean-Claude Y..., de la SCP « Jean-Pierre Y..., Jean-Claude Y..., Régine Z... », l'est avec la mention « P / O » qui signifie « pour ordre » ou « par ordre de », ce qui exclut que la personne au nom duquel l'acte a été rédigé en soit le signataire ; que les mentions de la déclaration d'appel elle-même, quelles que soient les indications du papier à en-tête sur lequel elle est rédigée et quelle que soit la lisibilité de la signature apposée, ne permettent pas, sans recherche extérieure à cette déclaration, de déterminer l'identité et la qualité du signataire ; que l'acte est dès lors inexistant, et l'appel doit être déclaré irrecevable ; que les dépens doivent être mis à la charge de M. X... ».
1. ALORS QU'aux termes de l'article 931 du Nouveau Code de procédure civile, l'avocat ou l'avoué qui représente l'appelant n'a pas à justifier d'un pouvoir spécial, d'où il résulte que le mandat de représentation de l'avocat ou de l'avoué se déduit de la seule qualité de ce dernier et que l'acte d'appel signé lisiblement par un avocat ou un avoué dont la qualité résulte des mentions figurant dans ledit acte est régulier ; que dès lors, en considérant que l'acte d'appel était inexistant au seul motif que la signature qui y figurait était précédée de la mention « pour ordre », et qu'il était indifférent que la signature, lisible, émane d'un avocat dont la qualité, incontestée, était mentionnée sur l'acte d'appel, la Cour d'appel a violé les articles 931 et 416 du Nouveau Code de procédure civile ensemble les articles R. 517-7 et R. 517-9 du Code du Travail ;
2. ET ALORS QU'en opposant à l'appelant une irrecevabilité tirée de ce que la signature de l'acte d'appel avait été précédée de la mention « pour ordre », la Cour d'appel, qui a apporté au droit d'accès à un tribunal, composante du droit au procès équitable, une restriction qui n'était justifiée par aucun intérêt légitime et qui en tout état de cause ne pouvait qu'être disproportionnée à l'objectif poursuivi, la Cour d'appel a violé l'article 6, § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme.