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12/11/2008 | FRANCE | N°07-43242;07-43243;07-43244

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 12 novembre 2008, 07-43242 et suivants


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° X 07-43.242, Y 07-42.343 et Z 07-42.344 ;

Attendu, selon les arrêts attaqués, qu'à la suite de l'ouverture le 27 mai 2002 d'une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société Janjac, La Griffe de l'image (Janjac), l'administrateur judiciaire a réuni et consulté le comité d'entreprise, les 17, 21 et 27 juin 2002, sur un projet de réduction des effectifs, sur des mesures sociales d'accompagnement et sur les critères d'ordre des licenciements ; q

ue par ordonnance du 18 juillet 2002, le juge-commissaire a autorisé le lic...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° X 07-43.242, Y 07-42.343 et Z 07-42.344 ;

Attendu, selon les arrêts attaqués, qu'à la suite de l'ouverture le 27 mai 2002 d'une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société Janjac, La Griffe de l'image (Janjac), l'administrateur judiciaire a réuni et consulté le comité d'entreprise, les 17, 21 et 27 juin 2002, sur un projet de réduction des effectifs, sur des mesures sociales d'accompagnement et sur les critères d'ordre des licenciements ; que par ordonnance du 18 juillet 2002, le juge-commissaire a autorisé le licenciement de soixante et un salariés, en application de l'article L. 621-37 du code de commerce ; que MM. X..., Y... et Z... ont été licenciés le 29 juillet suivant pour motif économique, les lettres de licenciement faisant état de la suppression d'un poste de travail correspondant à leur catégorie d'emploi, de l'autorisation du juge-commissaire et du refus par les intéressés d'une proposition de reclassement interne ; qu'invoquant la nullité de leur licenciement, l'absence de cause réelle et sérieuse, l'irrégularité de la procédure de licenciement et une méconnaissance de l'ordre des licenciements, ces salariés ont saisi le juge prud'homal de demandes indemnitaires ;

Sur le premier moyen :

Attendu que les salariés font grief aux arrêts d'avoir rejeté leurs demandes indemnitaires fondées sur la nullité des licenciements alors, selon le moyen :

1°/ que la cour d'appel a écarté les contestations des salariés portant sur le non-respect des dispositions des articles 5, 8 et 9 de la convention collective au motif que « les licenciements collectifs procédant d'une autorisation du juge-commissaire qui les avait jugés urgents, inévitables et indispensables au sens de l'article L. 621-37 du code du commerce, les délais visés à l'article 8 de la convention collective n'avaient pas à s'appliquer comme le précise expressément cet article » ; qu'en statuant comme elle l'a fait, alors que si l'article 8 de la convention collective des industries chimiques impose le respect de délais, à l'exception des cas de force majeure ou d'urgence, les articles 5 et 9 de la convention collective ne souffrent aucune exception ; que dès lors, la cour d'appel a violé les articles 5 et 9 de la convention collective des industries chimiques ;

2°/ que les dispositions de la convention collective susvisée prévoient diverses obligations imposées à l'employeur en matière d'information et de consultation du comité d'entreprise, dont le respect avait en l'espèce été contesté, et non pas seulement en matière de délais ; qu'en affirmant que le non-respect des délais n'était pas sanctionné, sans rechercher si l'employeur avait respecté les autres obligations auxquelles il était tenu en application de la convention collective, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des 5 et 9 de la convention collective des industries chimiques ;

3°/ que la validité du plan de sauvegarde de l'emploi est appréciée au regard des moyens dont dispose l'entreprise ou, le cas échéant, l'unité économique ou sociale ou le groupe ; que les exposants avaient souligné que le plan ne donnait aucune information et ne comportait aucune mesure concernant les sociétés du groupe auquel appartenait la société ; qu'en ne recherchant pas si le plan satisfaisait aux obligations légales compte tenu de l'appartenance de la société Janjac à un groupe, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article L. 321-4-1 devenu L. 1235-10 du code du travail ;

Mais attendu, d'abord, que seule l'absence de plan de sauvegarde de l'emploi ou l'insuffisance de celui-ci entraîne la nullité de la procédure de licenciement pour motif économique ; que l'irrégularité de la procédure consultative permet seulement d'obtenir la suspension de la procédure de licenciement, tant qu'elle n'est pas achevée par la notification des licenciements ou, à défaut, la réparation du préjudice subi à ce titre, dans les termes de l'article L. 1235-12 du code du travail ; qu'il en résulte que la nullité de la procédure de licenciement n'est pas encourue à ce titre lorsque, comme en l'espèce, sa suspension n'a pas été demandée avant son achèvement ;

Attendu, ensuite, qu'appréciant les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel a retenu qu'il n'existait aucun emploi disponible pour un reclassement dans les deux autres sociétés du groupe auquel appartenait l'employeur ;

Que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que les salariés font encore grief aux arrêts de les débouter de leur demande indemnitaire pour licenciement sans cause réelle et sérieuse alors, selon le moyen :

1°/ que les salariés avaient fait valoir que la convention collective des industries chimiques faisait obligation à l'employeur d'envisager, avant tout licenciement, une réduction du temps de travail et de solliciter, dans le cadre de son obligation de reclassement, les chambres syndicales patronales régionales ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si le représentant de l'employeur avait satisfait aux obligations prévues par la convention collective en matière de reclassement, la cour d'appel a entaché sa décision d‘un manque de base légale au regard de l'article L. 321-1 devenu L. 1233-4 du code du travail et de l'article 21 de la convention collective des industries chimiques ;

2°/ que le respect de l'obligation de reclassement suppose qu'il soit justifié que l'employeur a procédé à des recherches actives, effectives et concrètes et à un examen individuel des possibilités de reclassement des salariés dont le licenciement était envisagé ; qu'une proposition de modification du contrat de travail, que le salarié peut refuser, ne dispense pas l'employeur de son obligation de reclassement ; que les exposants avaient soutenu que l'employeur ne justifiait pas avoir procédé à de telles recherches et que les propositions de modification des contrats de travail ne dispensaient pas l'employeur de son obligation de reclassement ; qu'il ne résulte pas des constatations des juges du fond que l'employeur ait procédé à des recherches actives, effectives et concrètes et à un examen individuel des possibilités de reclassement des salariés, que ce soit dans l'entreprise elle-même ou dans le groupe à laquelle elle appartient ; qu'il ne résulte pas non plus de leurs constatations que les propositions de modification faites aux salariés satisfaisaient aux obligations légales de reclassement ; qu'en rejetant néanmoins les contestations des exposants, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles L. 321-1-2 devenu L. 1222-6 et L. 321-1 devenu L. 1233-4 du code du travail ;

3°/ qu'un licenciement pour motif économique ne peut intervenir que lorsque le représentant de l'employeur justifie avoir envisagé toutes les solutions alternatives aux licenciements et justifie de l'impossibilité de procéder au reclassement du salarié ; qu'il ne résulte pas des motifs de l'arrêt attaqué que tout reclassement ou toute autre solution alternative au licenciement ait été impossible à la date où les licenciements ont été prononcés, que ce soit dans l'entreprise elle-même ou dans le groupe à laquelle elle appartient ; qu'en considérant néanmoins que le grief tiré du non respect de l'obligation de reclassement n'était pas fondé, la cour d'appel a violé l'article L. 321-1 devenu L. 1233-4 du code du travail ;

Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel a constaté que l'employeur avait envisagé, pour limiter les licenciements, un passage à temps partiel entraînant une réduction des heures de travail ;

Attendu, ensuite, que le paragraphe 6 de l'article 21 de la convention collective nationale des industries chimiques et connexes n'édicte pas d'obligation particulière à la charge de l'employeur ;

Attendu, enfin, que, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel a retenu que l'employeur a recherché toutes les mesures de reclassement possibles dans la société et qu'il n'existait pas d'emploi disponible dans les autres sociétés du groupe au moment des licenciements ;

Que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le troisième moyen :

Vu les articles 5 et 9 des annexes IV et V « emploi » de l'accord du 15 janvier 1991, ensemble l'article L. 1235-12 du code du travail ;

Attendu que, pour rejeter la demande indemnitaire des salariés fondée sur l'irrégularité de la procédure consultative, la cour d'appel a retenu que les délais prévus par l'article 8 de cet accord n'étaient pas applicables, que la procédure de consultation du comité d'entreprise avait été respectée et qu'aucune disposition du code du travail n'exige que le plan de sauvegarde de l'emploi soit formalisé dans un document particulier ;

Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les informations et documents soumis au comité d'entreprise répondaient aux prescriptions des articles 5 et 9 de l'accord, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'ils ont rejeté la demande des salariés en réparation d'un préjudice lié à l'irrégularité de la procédure consultative préalable aux licenciements, les arrêts rendus le 24 avril 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la société Janjac La Griffe de l'image, Mme Laurence A..., ès qualités, M. Jean-Claude B..., ès qualités, aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Janjac La Griffe de l'image, Mme Laurence A..., ès qualités et M. Jean-Claude B..., ès qualités, à payer à MM. X..., Y... et Z..., la somme globale de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts partiellement cassés ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze novembre deux mille huit.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 07-43242;07-43243;07-43244
Date de la décision : 12/11/2008
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 24 avril 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 12 nov. 2008, pourvoi n°07-43242;07-43243;07-43244


Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen et Thouvenin, SCP Yves et Blaise Capron

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:07.43242
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