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04/11/2008 | FRANCE | N°08-80668

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 04 novembre 2008, 08-80668


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Patrick,
- B... Karnik,
- Y... Sandrine, parties civiles,

contre l'arrêt de la cour d'appel de POITIERS, chambre correctionnelle, en date du 31 mai 2007, qui, sur renvoi après cassation, dans la procédure suivie contre Gilbert Z... et Gilbert A... pour infractions au code de la construction et de l'habitation et complicité, a prononcé sur les intérêts civils ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

I-Sur le pourvoi de P

atrick X... :

Attendu qu'aucun moyen n'est produit ;

II-Sur les pourvois de Karnik B... e...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Patrick,
- B... Karnik,
- Y... Sandrine, parties civiles,

contre l'arrêt de la cour d'appel de POITIERS, chambre correctionnelle, en date du 31 mai 2007, qui, sur renvoi après cassation, dans la procédure suivie contre Gilbert Z... et Gilbert A... pour infractions au code de la construction et de l'habitation et complicité, a prononcé sur les intérêts civils ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

I-Sur le pourvoi de Patrick X... :

Attendu qu'aucun moyen n'est produit ;

II-Sur les pourvois de Karnik B... et Sandrine Y... :

Vu le mémoire et les observations complémentaires produits en demande ainsi que le mémoire en défense ;

Sur le moyen unique de cassation proposé pour Karnik B..., pris de la violation des articles L. 231-1, L. 231-4- II, L. 241-1 du code de la construction et de l'habitation, 1382 du code civil, 2, 3 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motif et manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a limité à la somme de 7. 563, 07 euros " toutes causes de préjudice confondues " la condamnation prononcée à l'encontre de Gilbert Z... au profit de Karnik B... ;

" aux motifs que le préjudice résultant des infractions reprochées aux prévenus doit être réparé dans son intégralité, sans perte ni profit pour les parties civiles ; qu'il convient en conséquence de vérifier si le surcoût des travaux payés par ces derniers est bien la conséquence de la perception anticipée des acomptes qu'ils ont dû verser aux prévenus Gilbert Z... et Gilbert A... ; que les prévenus ont fait valoir devant les instances successives que les infractions qui leur étaient reprochées n'étaient pas caractérisées au motif que la mise en place de chalets en " kit " constituait des constructions rapides de même que les maisons préfabriquées, et qu'en raison de la rapidité de la construction par rapport aux réalisations traditionnelles, l'échéancier des règlements prévu contractuellement dans le " contrat d'entreprise " par la Société nouvelle Chalets Europa ne désavantagerait pas le client par rapport aux dispositions légales du contrat " de construction de maison individuelle " ; qu'il convient de relever que les six parties civiles encore en cause ont toutes passé contrat avec la Société nouvelle Chalets Europa et versé les premiers acomptes entre 14 et 18 mois avant la liquidation judiciaire de l'entreprise prononcée le 23 mai 2002 par le tribunal de commerce de Tulle ; que durant ces délais qui s'approchent de ceux de la construction individuelle traditionnelle, les prévenus ont perçu des acomptes anticipés sans accomplir les travaux correspondant dans les délais " rapides " auxquels ils s'étaient engagés auprès des parties civiles ni offrir à ces mêmes clients les garanties d'un contrat de construction individuelle ; qu'ils ne peuvent aujourd'hui sérieusement prétendre que les préjudices allégués par chaque partie civile ne résultent pas directement des infractions commises mais seulement d'une nouvelle liquidation judiciaire de la Société nouvelle Chalets Europa qui s'avère, en l'espèce, être la troisième liquidation judiciaire de la Société nouvelle Chalets Europa ; qu'au vu des pièces transmises par les parties, Karnik B... a signé le contrat avec la Société nouvelle Chalets Europa le 28 mars 2001 plus d'un an avant la liquidation judiciaire de la société et a versé trois acomptes d'un montant équivalent à 70 % du prix ; que le non respect des prescriptions du code de la construction et de l'habitation a eu pour conséquence qu'il a payé plus qu'il n'aurait dû sans bénéficier de la garantie de livraison prévue par l'article L. 231-6 du code de la construction et de l'habitation, sous forme de caution solidaire d'un établissement de crédit ou d'une entreprise d'assurance ; que la cour de céans considère qu'elle dispose d'éléments suffisants, notamment au regard des prestations effectuées par la société nouvelle Chalets Europa et de l'expertise privée détaillée, pour fixer le préjudice certain subi par Karnik B... résultant directement des faits visés à la prévention à 7. 563, 07 euros toutes causes de préjudice confondues ;

" alors, d'une part, que l'infraction consistant pour un constructeur à percevoir de manière anticipée et illégale des acomptes de son client engendre pour ce dernier un préjudice direct et certain, lorsque les acomptes versés se révèlent sans contrepartie dans le cas où la construction se trouve prématurément interrompue, outre le préjudice résultant du surcoût lié à la nécessité de faire achever la construction par un tiers ; que dans son arrêt du 12 septembre 2006, la chambre criminelle de la Cour de cassation invitait donc la cour de renvoi à " s'expliquer sur l'affectation qui avait été réservée aux acomptes versés " par les parties civiles et à " rechercher si le surcoût des travaux était la conséquence de la perception anticipée de ces acomptes " ; qu'en affirmant que, " statuant dans les limites de la cassation prononcée ", il lui revenait de " vérifier si le surcoût des travaux payés par les parties civiles est bien la conséquence de la perception anticipée des acomptes qu'ils ont dû verser aux prévenus Gilbert Z... et Gilbert A... " (arrêt attaqué, p. 6 § 3 et 4), la cour d'appel, qui n'a pas recherché comme elle y était tenue si les sommes versées par les parties civiles au titre des acomptes avaient été, ou non, affectées à la construction, n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes visés au moyen ;

" alors, d'autre part, que les arrêts et jugements rendus en dernier ressort sont nuls s'ils ne contiennent pas de motifs ou si leurs motifs sont insuffisants et ne permettent pas à la Cour de cassation d'exercer son contrôle et de reconnaître si la loi a été respectée dans le dispositif ; qu'en se bornant, pour justifier le montant des sommes allouées à Karnik B..., à indiquer " qu'elle dispose d'éléments suffisants, notamment au regard des prestations effectuées par la société Nouvelle Chalets Europa et de l'expertise privée détaillée, pour fixer le préjudice certain subi par Karnik B... résultant directement des faits visés à la prévention à 7563, 07 euros toutes causes de préjudice confondues " (arrêt attaqué, p. 7 § 3), sans qu'il soit possible de déterminer, à la lecture de la décision attaquée, la nature du " préjudice certain " ayant été indemnisé, qu'il s'agisse des acomptes versés sans contrepartie ou de l'éventuel " surcoût ", la cour d'appel a privé sa décision de motivation et violé ce faisant l'article 593 du code de procédure pénale ;

" alors, enfin, que dans ses conclusions d'appel (notamment p. 7), Karnik B... précisait la consistance de son préjudice en rappelant notamment le montant des acomptes versés à la société nouvelle Chalets Europa et les sommes qu'il avait dû verser à nouveau pour achever l'ouvrage que cette entreprise avait abandonné ; qu'en laissant sans réponse ces conclusions, qui se trouvaient étayées par toutes les pièces justificatives utiles, la cour d'appel a violé derechef l'article 593 du code de procédure pénale » ;

Sur le moyen unique de cassation proposé pour Sandrine Y..., pris de la violation des articles L. 231-1, L. 231-4- II, L. 241-1 du code de la construction et de l'habitation, 1382 du code civil, 2, 3 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motif et manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a limité à la somme de 6. 169, 25 euros " toutes causes de préjudice confondues " la condamnation prononcée à l'encontre de Gilbert Z... et Gilbert A... au profit de Sandrine Y... ;

" aux motifs que le préjudice résultant des infractions reprochées aux prévenus doit être réparé dans son intégralité, sans perte ni profit pour les parties civiles ; qu'il convient en conséquence de vérifier si le surcoût des travaux payés par ces derniers est bien la conséquence de la perception anticipée des acomptes qu'ils ont dû verser aux prévenus Gilbert Z... et Gilbert A... ; que les prévenus ont fait valoir devant les instances successives que les infractions qui leur étaient reprochées n'étaient pas caractérisées au motif que la mise en place de chalets en " kit " constituait des constructions rapides de même que les maisons préfabriquées, et qu'en raison de la rapidité de la construction par rapport aux réalisations traditionnelles, l'échéancier des règlements prévu contractuellement dans le " contrat d'entreprise " par la société nouvelle Chalets Europa ne désavantagerait pas le client par rapport aux dispositions légales du contrat " de construction de maison individuelle " ; qu'il convient de relever que les six parties civiles encore en cause ont toutes passé contrat avec la société nouvelle Chalets Europa et versé les premiers acomptes entre 14 et 18 mois avant la liquidation judiciaire de l'entreprise prononcée le 23 mai 2002 par le tribunal de commerce de Tulle ; que durant ces délais qui s'approchent de ceux de la construction individuelle traditionnelle, les prévenus ont perçu des acomptes anticipés sans accomplir les travaux correspondant dans les délais " rapides " auxquels ils s'étaient engagés auprès des parties civiles ni offrir à ces mêmes clients les garanties d'un contrat de construction individuelle ; qu'ils ne peuvent aujourd'hui sérieusement prétendre que les préjudices allégués par chaque partie civile ne résultent pas directement des infractions commises mais seulement d'une nouvelle liquidation judiciaire de la société nouvelle Chalets Europa qui s'avère, en l'espèce, être la troisième liquidation judiciaire de la société nouvelle Chalets Europa ; qu'au vu des pièces transmises par les parties, Sandrine Y... a signé le contrat avec Gilbert A... le 16 mai 2001, plus d'un an avant la liquidation judiciaire de la société et versé plusieurs acomptes d'un montant équivalent à 70 % du prix ; que le non respect des prescriptions du code de la construction et de l'habitation a eu pour conséquence qu'elle a payé plus qu'elle n'aurait dû sans bénéficier de la garantie de livraison prévue par l'article L. 231-6 du code de la construction et de l'habitation, sous forme de caution solidaire d'un établissement de crédit ou d'une entreprise d'assurance ; que la cour de céans considère qu'elle dispose d'éléments suffisants, notamment au regard des prestations effectuées par la société nouvelle Chalets Europa, pour fixer le préjudice certain subi par Sandrine Y... résultant directement des faits visés à la prévention à 6. 169, 25 euros toutes causes de préjudice confondues ;

" alors, d'une part, que l'infraction consistant pour un constructeur à percevoir de manière anticipée et illégale des acomptes de son client engendre pour ce dernier un préjudice direct et certain, lorsque les acomptes versés se révèlent sans contrepartie dans le cas où la construction se trouve prématurément interrompue, outre le préjudice résultant du surcoût lié à la nécessité de faire achever la construction par un tiers ; que dans son arrêt du 12 septembre 2006, la chambre criminelle de la Cour de cassation invitait donc la cour de renvoi à " s'expliquer sur l'affectation qui avait été réservée aux acomptes versés " par les parties civiles et à " rechercher si le surcoût des travaux était la conséquence de la perception anticipée de ces acomptes " ; qu'en affirmant que, " statuant dans les limites de la cassation prononcée ", il lui revenait de " vérifier si le surcoût des travaux payés par les parties civiles est bien la conséquence de la perception anticipée des acomptes qu'ils ont dû verser aux prévenus Gilbert Z... et Gilbert A... " (arrêt attaqué, p. 6 § 3 et 4), la cour d'appel, qui n'a pas recherché comme elle y était tenue si les sommes versées par les parties civiles au titre des acomptes avaient été, ou non, affectées à la construction, n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes visés au moyen ;

" alors, d'autre part, que les arrêts et jugements rendus en dernier ressort sont nuls s'ils ne contiennent pas de motifs ou si leurs motifs sont insuffisants et ne permettent pas à la Cour de cassation d'exercer son contrôle et de reconnaître si la loi a été respectée dans le dispositif ; qu'en se bornant, pour justifier le montant des sommes allouées à Sandrine Y..., à indiquer " qu'elle dispose d'éléments suffisants, notamment au regard des prestations effectuées par la Société Nouvelle Chalets Europa, pour fixer le préjudice certain subi par Sandrine Y... résultant directement des faits visés à la prévention à 6169, 25 euros toutes causes de préjudice confondues " (arrêt attaqué, p. 8 § 2), sans qu'il soit possible de déterminer, à la lecture de la décision attaquée, la nature du " préjudice certain " ayant été indemnisé, qu'il s'agisse des acomptes versés sans contrepartie ou de l'éventuel " surcoût ", la cour d'appel a privé sa décision de motivation et violé ce faisant l'article 593 du code de procédure pénale ;

" alors, enfin, que dans ses écritures déposées devant la cour d'appel, Sandrine Y... précisait, dans un exposé particulièrement clair, la consistance de son préjudice en rappelant notamment le montant des acomptes versés à la Société nouvelle Chalets Europa et les sommes qu'elle avait dû verser à nouveau pour achever l'ouvrage que cette entreprise avait abandonné ; qu'en laissant sans réponse ces écritures, qui se trouvaient étayées par toutes les pièces justificatives utiles, la cour d'appel a violé derechef l'article 593 du code de procédure pénale » ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que Gilbert Z..., dirigeant d'une société construisant des chalets d'habitation, et Gilbert A..., directeur commercial de ladite société, ont été définitivement condamnés, le premier pour avoir exigé de divers clients le versement d'acomptes avant la signature d'un contrat de construction d'une maison individuelle, le second pour complicité de ces délits, infractions prévues et punies par les articles L. 231-4- II et L. 241-1 du code de la construction et de l'habitation ;

Attendu que, statuant sur la réparation du préjudice subi par Karnik B... et Sandrine Y..., l'arrêt relève que les prévenus ont perçu des acomptes sans accomplir les travaux de construction correspondants ni offrir à leurs clients les garanties dont l'article L. 231-6 assortit le contrat de construction d'une maison individuelle ; que les juges en déduisent, après les avoir rappelés, que les différents chefs de préjudices dont les parties civiles demandent respectivement réparation découlent de l'infraction commise ; que, se fondant sur les prestations effectuées par la société et les éléments fournis par une expertise, ils déterminent la somme réparant, toutes causes confondues, le préjudice subi par chacune des parties civiles ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la Cour de cassation est en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et justifié l'allocation, au profit de chaque partie civile, de l'indemnité propre à réparer le préjudice découlant de l'infraction poursuivie ;

D'où il suit que les moyens ne sauraient être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE les pourvois ;

DIT n'y avoir lieu à application, au profit de Sandrine Y... et de Karnik B..., de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Farge conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, Mme Agostini conseiller rapporteur, M. Blondet conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : M. Souchon ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 08-80668
Date de la décision : 04/11/2008
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 31 mai 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 04 nov. 2008, pourvoi n°08-80668


Composition du Tribunal
Président : M. Farge (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Richard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:08.80668
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