LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant tant sur le pourvoi principal formé parla société Tessi que sur le pourvoi incident relevé par la société Rocamat pierres naturelles ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Rocamat pierres Naturelles (Rocamat), a confié à la société Tessi informatique (Tessi), l'élaboration et la fourniture d'un système informatique permettant sa gestion commerciale et sa gestion de production ainsi que la maintenance ; que le module de gestion commerciale n'ayant jamais pu être livré tandis que le logiciel de production présentait des temps de réponse estimés inacceptables par un expert désigné en référé, la société Rocamat a assigné la société Tessi en résolution du contrat et en paiement de dommages-intérêts ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal :
Attendu que la société Tessi fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à la société Rocamat la somme de 854 842,51 euros, correspondant au montant du contrat d'intégration hors taxes et la somme de 309 580,05 euros, correspondant au coût des travaux engagés pour la mise en place du logiciel, alors, selon le moyen :
1°/ que la résolution judiciaire, qui remet les choses au même état que si le contrat n'avait pas existé, oblige les parties à la restitution intégrale des choses ou prestations échangées ; qu'en condamnant la société Tessi, au titre des restitutions consécutives à la résolution judiciaire du contrat d'intégration, à rembourser à la société Rocamat le coût d'acquisition du logiciel tessi-pro et celui des travaux engagés pour sa mise en place, sans tenir compte de l'obligation pour la société Rocamat de restituer le logiciel et les matériels mis à sa disposition par la société Tessi, la cour d'appel, qui n'a pas remis les parties dans l'état où elles se trouvaient avant le contrat d'intégration, a violé les articles 1183 et 1184 du code civil ;
2°/ qu' ayant constaté que le module de gestion de production, mis en place sur six des sites de production de la société Rocamat, avait pu être utilisé pendant trois ans en dépit des temps de réponse excessifs du système, ce dont il se déduisait que le contrat d'intégration avait été en partie exécuté, la cour d'appel, qui a condamné la société Tessi à rembourser à la société Rocamat le coût d'acquisition du logiciel tessi-pro et celui des travaux engagés pour sa mise en place, sans tenir compte de l'obligation de restitution pesant sur la société Rocamat au titre de la prestation partiellement exécutée par la société Tessi, a de nouveau violé les articles 1183 et 1184 du code civil ;
Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel n'a pas omis de statuer sur une demande de restitution que la société Tessi n'avait pas formée ;
Attendu, d'autre part, qu'en se prononçant sur le remboursement à l'acquéreur du prix du système informatique et des travaux nécessaires à son installation, consécutivement à la résolution du contrat, la cour d'appel n'était pas tenue de prendre en compte l'obligation corrélative et distincte de la société Rocamat de restituer au fournisseur le logiciel et les matériels qui auraient été mis à sa disposition, ni une prétendue obligation de restitution au titre d'une prestation partielle de la part de la société Tessi n'existant pas ;
D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en sa première branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi incident, pris en ses deux premières branches :
Vu l'article 1184 du code civil ;
Attendu que la partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté a le choix ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible, ou d'en demander la résolution avec dommages-intérêts ;
Attendu que pour rejeter la demande en dommages-intérêts de la société Rocamat, l'arrêt retient qu'ayant choisi de demander la résolution du contrat, celle-ci ne peut revendiquer l'indemnisation d'un préjudice résultant de sa remise dans la situation antérieure à ce contrat ;
Attendu qu'en statuant ainsi, après avoir constaté que le module de gestion de production avait un temps de réponse excessif ce qui constituait un défaut ayant affecté son efficacité et caractérisait une défaillance grave de la société Tessi, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales des ses constatations et a violé le texte susvisé ;
Et sur la troisième branche du moyen :
Vu l'article 4 du code civil ;
Attendu que le juge ne peut refuser de statuer en se fondant sur l'insuffisance de preuves qui lui sont fournies par les parties ;
Attendu que, pour rejeter la demande en dommages-intérêts formée à l'encontre de la société Tessi au titre de pertes de productivité, l'arrêt, après avoir constaté l'existence du dommage subi par la société Rocamat résultant du défaut lié à la lenteur du temps de réponse ayant affecté l'efficacité du module de gestion de production, depuis sa mise en service jusqu'à la résolution du contrat , retient que la société Rocamat n'est pas en mesure de chiffrer le montant de son préjudice réclamé à concurrence de 790 000 euros ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté la demande en dommages-intérêts de la société Rocamat pierres naturelles,
l'arrêt rendu le 22 mars 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée ;
Condamne la société Tessi informatique aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Tessi informatique à payer à la société Rocamat pierres naturelles la somme de 2 500 euros et rejette sa demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du sept octobre deux mille huit.