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03/07/2008 | FRANCE | N°06-11920

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 03 juillet 2008, 06-11920


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Champagne Bricout et Koch (le tiré) ayant remis à la société Champagne Gremillet (le bénéficiaire) une lettre de change acceptée d'un montant de 151 500 euros, la Banque Sanpaolo (la banque), devenue ultérieurement la Banque Palatine, a rejeté l'effet que le tiré avait domicilié dans ses livres, au motif qu'il était "sans provision" ; qu'après la mise en redressement judiciaire du tiré, le bénéficiaire a poursuivi la banque en paiement de cet ef

fet; que sa demande ayant été déclarée irrecevable par le tribunal devant l...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Champagne Bricout et Koch (le tiré) ayant remis à la société Champagne Gremillet (le bénéficiaire) une lettre de change acceptée d'un montant de 151 500 euros, la Banque Sanpaolo (la banque), devenue ultérieurement la Banque Palatine, a rejeté l'effet que le tiré avait domicilié dans ses livres, au motif qu'il était "sans provision" ; qu'après la mise en redressement judiciaire du tiré, le bénéficiaire a poursuivi la banque en paiement de cet effet; que sa demande ayant été déclarée irrecevable par le tribunal devant lequel il avait indiqué exercer l'action oblique, il a interjeté appel en soutenant que la responsabilité de la banque était directement engagée à son égard ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la banque fait grief à l'arrêt de déclarer recevables les demandes du bénéficiaire, alors, selon le moyen :

1°/ que constitue une prétention nouvelle et irrecevable en appel celle qui diffère de la prétention soumise aux premiers juges par ses fins ; qu'en admettant la recevabilité de l'action en responsabilité quasi délictuelle exercée contre la banque par le bénéficiaire, après avoir pourtant constaté qu'en première instance, celui-ci avait agi, contre la banque, par voie d'action oblique, ce dont il résultait nécessairement qu'une telle action, exercée aux lieu et place du tiré pour faire entrer, dans son patrimoine, des valeurs dont le produit était appelé à être partagé avec les autres créanciers, se distinguait, par ses fins, de l'action en responsabilité désormais exercée par le bénéficiaire en vue d'obtenir la réparation d'un préjudice personnel, la cour d'appel n'a pas tiré de ses propres constatations les conséquences légales qui s'en évinçaient et violé les articles 564 et 565 du code de procédure civile ;

2°/ que sauf à n'être qu'une autre forme d'exercice du droit exercé devant les premiers juges, constitue une prétention nouvelle et irrecevable lorsqu'elle est formulée pour la première fois en appel celle dont l'objet consiste à substituer un droit différent de celui dont son auteur s'est prévalu en première instance ; qu'en l'espèce, il résultait des énonciations du jugement entrepris que, devant les premiers juges, l'action oblique engagée par le bénéficiaire tendait à obtenir, aux lieu et place du tiré, l'exécution forcée, au profit de celui-ci, d'une ouverture de crédit prétendument consentie par la banque et que cette action n'avait « pas été engagée par le bénéficiaire en raison, d'un préjudice subi par la Banque populaire (...), destinataire de l'avis de sort concerné, ou par le bénéficiaire lui-même » consécutivement à « la correction d'avis de sort faite par la banque» ; qu'en admettant, dans ces conditions, la recevabilité de l'action en responsabilité quasi délictuelle exercée pour la première fois en appel à l'encontre de la banque, la cour d'appel a violé les articles 564 et 565 du code de procédure civile ;

3°/ qu'une prétention étant nouvelle en appel lorsqu'une partie la formule en une qualité différente de celle en laquelle elle avait procédé en première instance, une partie ayant exercé, en première instance, par la voie de l'action oblique, les droits de son débiteur contre le propre débiteur de ce dernier, ne saurait se prétendre personnellement créancière en appel ; qu'en refusant d'admettre que l'action en responsabilité quasi délictuelle exercée pour la première fois en appel par le bénéficiaire constituait une demande nouvelle, et à ce titre irrecevable, après avoir pourtant constaté qu'en première instance, celui-ci avait agi, contre la banque, par voie oblique, sur le fondement de l'article 1166 du code civil, ce dont il résultait que le demandeur se prévalait, en appel, d'une qualité de créancier personnel de la banque qui n'avait jamais été alléguée en première instance, la cour d'appel n'a pas tiré de ses propres constatations les conséquences légales qui s'en évinçaient et une nouvelle fois violé les articles 564 et 565 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant relevé que le bénéficiaire réclamait devant le tribunal de commerce paiement à son profit de la somme de 151 500 euros au titre de l'effet accepté et qu'il demandait cette même somme devant elle, la cour d'appel retient exactement que la demande, qui tendait aux mêmes fins, n'était pas nouvelle ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le second moyen, pris en sa quatrième branche :

Vu les articles 1382 du code civil et L. 313-12 du code monétaire et financier ;

Attendu que pour condamner la banque à payer au bénéficiaire la somme de 151 500 euros à titre de dommages-intérêts avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt et capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil, l'arrêt retient qu'hormis le relevé de compte, le seul document produit par la banque Palatine pour démontrer la limitation du découvert autorisé du tiré est sa lettre recommandée avec accusé de réception en date du 7 mars 2003, postérieure au rejet litigieux et que le relevé de compte produit aux débats confirme les analyses du bénéficiaire, que l'arrêt retient encore que la banque a payé le 11 février 2003 un chèque de 440 376 euros tandis que le solde du compte était débiteur de plus de 450 000 euros et que le solde au 25 février 2003, soit trois jours avant l'échéance de la lettre de change, était débiteur de 646 452,12 euros et que ces montants démontrent que le compte fonctionnait avec une autorisation de découvert supérieure à 450 000 euros ; que l'arrêt retient enfin que le rejet de l'effet, non justifié par le montant du découvert, est fautif et que le bénéficiaire était en droit d'attendre de la banque de son débiteur qu'elle paye l'effet à sa date d'échéance d'autant plus que la banque avait répondu positivement à l'avis de sort émis la veille de cette échéance ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi sans rechercher le montant du découvert consenti par la banque et vérifier si le paiement de cet effet n'a pas entraîné un dépassement de ce découvert, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du second moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la Banque Palatine à payer à la société Champagne Gremillet, la somme de 151 500 euros à titre de dommages-intérêts avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt et capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil, l'arrêt rendu le 2 décembre 2005, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette toutes les demandes présentées de ce chef ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois juillet deux mille huit.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 06-11920
Date de la décision : 03/07/2008
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 02 décembre 2005


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 03 jui. 2008, pourvoi n°06-11920


Composition du Tribunal
Président : M. Gillet (président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, SCP de Chaisemartin et Courjon

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:06.11920
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