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04/06/2008 | FRANCE | N°07-88090

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 04 juin 2008, 07-88090


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Thierry,
contre l'arrêt de la cour d'appel de LYON, 4e chambre, en date du 16 octobre 2007, qui, pour agressions sexuelles aggravées et corruption de mineurs, l'a condamné à trois ans d'emprisonnement, dix ans de suivi socio-judiciaire et cinq ans d'interdiction des droits civiques, civils et de famille, et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l'article

préliminaire du code de procédure pénale et de l'article 6 § 1 de la ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Thierry,
contre l'arrêt de la cour d'appel de LYON, 4e chambre, en date du 16 octobre 2007, qui, pour agressions sexuelles aggravées et corruption de mineurs, l'a condamné à trois ans d'emprisonnement, dix ans de suivi socio-judiciaire et cinq ans d'interdiction des droits civiques, civils et de famille, et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l'article préliminaire du code de procédure pénale et de l'article 6 § 1 de la Convention des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Thierry X... coupable de faits d'agressions sexuelles sur mineurs de quinze ans et de corruption de mineurs de 15 ans, l'a condamné en répression à une peine de trois ans d'emprisonnement ainsi qu'à une mesure de suivi socio-judiciaire, outre à payer diverses sommes aux parties civiles ;
"aux motifs que « Thierry X..., appelant et intimé, assisté de son avocat, demande à la Cour de constater que la durée de la procédure excède le délai raisonnable fixé par l'article préliminaire et l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de lui donner acte de sa protestation et de ses réserves (…) ; que la cour constate, au préalable, que l'appréciation du prévenu quant à la durée de la procédure n'est susceptible d'entraîner aucune conséquence particulière quant à la régularité de celle-ci (…) » (arrêt, p. 9, dernier § et p. 10, § 1er) ;
"alors que toute personne accusée ou prévenue a droit à ce que sa cause soit jugée dans un délai raisonnable ; qu'au cas d'espèce, le prévenu faisait valoir (conclusions du 18 septembre 2007 visées par le président et le greffier, p. 3-4) qu'une période de plus de sept ans s'était écoulée entre sa mise en examen (en date du 7 janvier 1999) et le jugement rendu par le tribunal correctionnel de Belley (18 mai 2006) sans qu'aucune cause particulière ne justifie un délai aussi long ; qu'en refusant par principe de se prononcer sur le caractère raisonnable du délai de jugement, avant d'entrer en voie de condamnation, les juges du second degré ont violé les textes susvisés" ;
Attendu qu'il ne saurait être fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir refusé de faire droit à la demande du prévenu tendant à faire constater que la durée de la procédure était excessive, dès lors que les juges ont retenu, à juste titre, qu'une telle demande ne remettait pas en cause la régularité de la poursuite;
D'où il suit que le moyen doit être écarté;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 222-22, 222-27, 222-29 et 222-30 du code pénal, ensemble les articles 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Thierry X... coupable des délits d'agressions sexuelles sur mineurs de 15 ans commises sur les personnes de Julien Y..., Mathieu Y... et Yohann Y..., et d'agressions sexuelles sur mineurs de quinze ans par personne ayant autorité commises sur les personnes de Laëtitia X... et de Jonathan Z... ;
"aux motifs qu'« il ressort des pièces du dossier que Julien Y..., âgé de 9 ans, et Mathieu Y..., âgé de 5 ans, ont toujours maintenu leurs accusations précises et circonstanciées tout au long de l'enquête et au cours de l'information, tant auprès de leur assistante maternelle et de leurs éducateurs que devant les gendarmes, les psychologues et le juge d'instruction, sans y apporter de modifications susceptibles de remettre en cause la crédibilité de leurs propos, laquelle a été confirmée par la psychologue de l'AVEMA ayant assisté les enquêteurs lors de l'audition des mineurs et ayant noté, outre l'absence dans leurs discours de signes d'affabulation, la révélation de détails chargés d'émotion, et par l'expert psychologue commis ayant examiné Mathieu Y... et relevé l'existence d'un traumatisme psychique ; qu'en dépit des difficultés inhérentes à l'audition de jeunes enfants répugnant à se remémorer des faits pour le moins traumatisants, ils ont pu décrire, en particulier devant le magistrat instructeur, par des paroles dénuées d'ambiguïté, les attouchements sexuels, les masturbations et les fellations réciproques qu'ils ont subis de la part du prévenu ; que de plus, les déclarations de l'un corroborent celles de l'autre, tous deux faisant état, notamment, de scènes collectives se déroulant à leur domicile en l'absence de leurs parents ; que si les propos de Yohann Y..., âgé de 3 ans, n'ont pu être retranscrits, il n'en demeure pas moins que le jeune enfant a déclaré spontanément à la psychologue et à sa mère avoir subi également des attouchements sur le sexe et que son frère Julien a affirmé avoir surpris Thierry X... appeler Yohann, entièrement nu, pour le rejoindre dans un lit ; que Julien Y... a aussi relaté une scène au cours de laquelle Thierry X... leur avait, chacun à leur tour, introduit son sexe dans la bouche en leur demandant de le sucer, ses frères Mathieu et Yohann lui disant, peu après, que Thierry avait « mauvais goût dans le zizi » et l'un d'eux précisant qu'il avait recraché un « liquide jaune » ; qu'enfin, Julien et Mathieu Y... ont également évoqué des tentatives de pénétration anale, Julien ajoutant que Thierry X... avait, auparavant, frotté son sexe contre ses fesses et lui avait demandé de garder le silence ; que Jonathan Z..., âgé de 9 ans, et Laëtitia X..., âgée de 5 ans, enfants du prévenu, ont de même dénoncé leur père pour avoir pratiqué des attouchements à caractère sexuel sur eux ; qu'ainsi, Laëtitia X... a d'abord déclaré avoir vu son père toucher le « zizi » de Mathieu et de Yohann Y... et se masturber, puis elle a indiqué que celui-ci lui avait touché avec le doigt et léché le sexe, mimant, lors de son audition, des rapports sexuels avec deux poupées ; qu'elle a réitéré ses accusations devant le juge des enfants de Bourg-en-Bresse qui a recueilli, aussi, les confidences de Jonathan Z..., lequel déclarait que son père les avait, lui et sa soeur, « touchés de partout » et lui avait baissé le pantalon pour le caresser sur les cuisses, les fesses et le bas-ventre ; que leurs propos, non seulement sont confortés par les déclarations de Julien Y... disant avoir vu Thierry X... faire des « cochonneries » sur eux et les « sucer », mais ont été, de plus, retenus comme crédibles par les experts psychologues, leurs observations permettant de conclure que Laëtitia X... a donné des éléments de sensation qui ne s'inventaient pas et que Jonathan Z... a minimisé une réalité traumatique qu'il n'a, en aucun cas, exagérée ; qu'à l'audience de la cour, Laëtitia X... et Jonathan Z... sont revenus sur leurs déclarations, prétendant qu'ils n'ont jamais porté d'accusations contre leur père devant leurs différents interlocuteurs et que celui-ci ne leur a rien fait ; que, cependant, ces dernières allégations, faites en présence de leur père, prévenu comparant, apparaissant plus de circonstance que véridiques alors que tous deux ont dénoncé avec une grande constance, devant diverses autorités et pendant plusieurs années, les attouchements sexuels pratiqués sur eux par celui-ci, ce revirement ne peut être admis (…) ; qu'en présence de ces déclarations et de ces constatations, Thierry X... se borne à maintenir qu'il ne s'est livré à aucun attouchement à caractère sexuel sur les frères Y... et sur ses deux enfants, sans apporter la moindre explication à l'appui de ses affirmations, à l'exception de soins prodigués à sa fille pour le traitement d'une irritation au niveau du sexe, laquelle l'aurait aussi surpris, une fois, en train d'uriner ; que les dires du prévenu sont caractérisés par une extrême faiblesse et que son état d'esprit ne peut que laisser perplexe ; qu'en effet, Thierry X... soutient que les enfants ont vraisemblablement subi des agressions sexuelles mais qu'il n'en est pas l'auteur, et qu'il est victime d'un complot ourdi à la fois par les frères Y..., ayant estimé son séjour à leur domicile familial intempestif, par ses enfants lui reprochant de les avoir abandonnés et par Véronique A..., divorcée Y..., n'ayant pas accepté qu'il repousse ses avances ; qu'il ne saurait davantage tirer argument des rétractations tardives, voire suspectes, de ses enfants pour se disculper ; qu'au contraire, il est bien établi que Thierry X... n'a pas hésité à profiter de la naïveté des jeunes victimes pour leur imposer des contacts sexuels caractérisés, agissant ainsi par surprise ou les contraignant à se soumettre à ses exigences auxquelles, en raison de leur jeune âge, elles n'étaient pas en mesure de résister et dont elles ne pouvaient mesurer la gravité (…) » (arrêt, p. 10, § 2, 3 et 4 et p. 11, § 1, 2, 4, 5 et 6) ;
"alors que, premièrement, l'agression sexuelle suppose une atteinte sexuelle commise avec violence, contrainte, menace ou surprise ; qu'au cas d'espèce, en se bornant à énoncer lapidairement que le prévenu n'avait pas hésité à profiter de la naïveté des jeunes victimes, agissant ainsi par surprise, ou alternativement en les contraignant à se soumettre à ses exigences auxquelles elles ne pouvaient résister à raison de leur jeune âge, les juges du second degré, qui ont statué par des motifs d'ordre général sans caractériser de manière concrète la contrainte ou la surprise ni distinguer entre les cinq victimes concernées, n'ont pas donné de base légale à leur décision au regard des textes susvisés ;
"alors que, deuxièmement et en tout cas, à supposer, pour les besoins du raisonnement, que le jeune âge de la victime puisse suffire à faire présumer la contrainte ou la surprise, au cas d'espèce, faute d'avoir distingué entre les différents enfants sur lesquels le prévenu aurait commis des agressions sexuelles, quand l'âge de ces derniers au moment des faits reprochés variait de trois à dix ans, les juges du second degré n'ont pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle et ont, à cet égard également, privé leur décision de base légale au regard des textes susvisés ;
"et alors que, troisièmement, en ce qui concerne Laëtitia X... et Jonathan Z..., enfants du prévenu, en se bornant, après avoir constaté qu'ils étaient revenus sur leurs déclarations incriminant leur père au cours de l'audience, à énoncer que ces rétractations n'étaient que « de circonstance », sans expliquer concrètement en quoi ces rétractations émanant de deux adolescents de 17 et 14 ans devaient être considérées comme ayant moins de valeur que des déclarations précédemment faites au cours de l'instruction par de jeunes enfants dans un contexte de nature à les impressionner, quand le prévenu avait toujours nié les faits qui lui étaient reprochés, les juges du second degré ont, à cet égard encore, privé leur décision de base légale au regard des textes susvisés" ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation de l'article 227-22 du code pénal, ensemble les articles 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Thierry X... coupable du délit de corruption de mineurs commis sur les personnes de Julien, Mathieu et Yohann Y... ;
"aux motifs que « par ailleurs, Mathieu Y... a, à plusieurs reprises, y compris devant le juge d'instruction, expliqué que Thierry X... et sa concubine, Sylvie Z..., qui s'était déshabillée devant lui, l'avaient retenu dans la chambre pour assister à leurs ébats sexuels ; que ces dires étaient corroborés par son frère Julien Y... qui ajoutait qu'outre le fait qu'il se masturbait devant lui et ses frères, Thierry X... l'avait contraint à lui pratiquer une fellation en présence de Sylvie Z... qui les regardait, allongée sur le lit (...) ; que de même, en se mettant nu, en se masturbant et en se livrant à des ébats sexuels avec sa concubine devant les frères Y..., créant ainsi un climat de débauche, en vue de les pervertir, il a favorisé la corruption de jeunes garçons dont il avait connaissance, à l'évidence, de la minorité (…) » (arrêt, p. 11, § 3 et 6) ;
"alors que le délit de corruption de mineur suppose la caractérisation chez le prévenu de la volonté de pervertir la jeunesse ; qu'au cas d'espèce, en se bornant à énoncer que Thierry X... avait créé un climat de débauche en vue de pervertir les enfants Y..., sans donner aucune explication à l'appui de cette affirmation, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des textes susvisés" ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu'intentionnel, les délits d'agressions sexuelles aggravées et de corruption de mineurs dont elle a déclaré le prévenu coupable, et a ainsi justifié l'allocation, au profit des parties civiles, de l'indemnité propre à réparer le préjudice en découlant ;
D'où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
FIXE à 2 000 euros la somme que Thierry X... devra payer à la société civile professionnelle Thouin-Palat et Boucard au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale, sur le fondement de l'article 2 de l'ordonnance du 8 décembre 2005 ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Le Gall conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Arnould conseiller rapporteur, Mme Chanet conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Souchon ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 07-88090
Date de la décision : 04/06/2008
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 16 octobre 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 04 jui. 2008, pourvoi n°07-88090


Composition du Tribunal
Président : M. Le Gall (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Foussard, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:07.88090
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