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03/06/2008 | FRANCE | N°06-16119

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 03 juin 2008, 06-16119


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la SCP Fau-Simon géomètres experts et associés et Bet VRD que sur le pourvoi provoqué et incident relevé par M. X..., ès qualités ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 17 mars 2006), que la SCP Fau-Simon géomètres experts et associés et Bet VRD (la SCP Fau-Simon) a confié à la société d'expertise comptable Chaussumier, Dagan et associés (la société d'expertise comptable), aux droits de laquelle vient la société Akelis, une mission de

présentation de ses comptes annuels ; qu'à la suite de détournements de sommes d'a...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la SCP Fau-Simon géomètres experts et associés et Bet VRD que sur le pourvoi provoqué et incident relevé par M. X..., ès qualités ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 17 mars 2006), que la SCP Fau-Simon géomètres experts et associés et Bet VRD (la SCP Fau-Simon) a confié à la société d'expertise comptable Chaussumier, Dagan et associés (la société d'expertise comptable), aux droits de laquelle vient la société Akelis, une mission de présentation de ses comptes annuels ; qu'à la suite de détournements de sommes d'argent commis à son préjudice de 1994 à 2000 par sa comptable, Mme X..., la SCP Fau-Simon a assigné la société d'expertise comptable et M. X..., en sa qualité d'héritier unique de sa mère, devant le tribunal aux fins d'obtenir leur condamnation in solidum à lui payer une certaine somme en réparation du préjudice subi ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal et sur le moyen unique du pourvoi provoqué, rédigés en des termes identiques, réunis :

Attendu que la SCP Fau-Simon et M. X... font grief à l'arrêt d'avoir écarté la responsabilité de la société d'expertise comptable à l'occasion des détournements commis, alors, selon le moyen :

1°/ que l'expert comptable est tenu à une vigilance particulière en sa qualité de professionnel soumis à des règles et des normes éthiques spécifiques lui imposant un examen nécessairement plus que "sommaire" de la comptabilité soumis à son contrôle, quelle que soit l'étendue de sa mission ; que la cour d'appel qui a cru pouvoir exclure toute responsabilité de la société Chaussumier Dagan et associés au motif que les détournements effectués par la comptable de la société cliente de l'expert "n'apparaissaient pas à un examen sommaire de la comptabilité" et au motif encore que les discordances du compte fournisseur ne représentaient que 0,05 % des charges annuelles d'exploitation payées par la SCP Fau-Simon, n'a pas légalement justifié son arrêt au regard de l'article 1147 du code civil, ensemble les normes professionnelles régissant l'activité des experts comptables ;

2°/ qu'un expert doit examiner les comptes internes de l'entreprise dès lors qu'il soupçonne une anomalie ou une irrégularité de quelque nature qu'elle soit ; que la cour d'appel qui a stigmatisé l'existence d'anomalies sur un des comptes de la comptabilité de la SCP Fau-Simon soumis à son contrôle qui n'avaient pu échapper au contrôle de l'expert, ce qui aurait dû amener ce dernier à plus de vigilance dans son contrôle de l'ensemble de la comptabilité de son client, ne pouvait, sans violer l'article 1147 du code civil, ensemble les règles et normes professionnelles applicables en la matière, écarter la responsabilité de l'expert au motif que les anomalies relevées portaient sur un compte qui n'avait pas été l'objet des détournement litigieux ;

Mais attendu, d'une part, qu'après avoir relevé que la mission confiée à la société d'expertise comptable, limitée à l'établissement du bilan annuel, était exclusive de tout audit et ne comportait qu'une simple vérification de la cohérence et de la vraisemblance des comptes annuels, ce dont il résultait que les vérifications auxquelles cette société était tenue pour l'établissement de ce document comptable et pour la certification des comptes ne portaient que sur leur conformité formelle et ne pouvaient s'effectuer que par sondages, l'arrêt retient, d'un côté, que si le montant total des détournements commis au cours de chacune des années 1998 et 1999 correspondait au double de celui des détournements commis en 1997, le nombre de chèques détournés avait été sensiblement identique, de sorte qu'en procédant à des vérifications par sondages, la société d'expertise comptable ne pouvait mettre en évidence ces infractions, de l'autre, que Mme X... veillait, par la passation d'écritures comptables, à ce que les détournements qu'elle commettait n'apparaissent pas à un examen sommaire de la comptabilité, enfin, que l'attention de la société d'expertise-comptable n'avait pu être attirée par des discordances globales importantes du compte fournisseur d'une année sur l'autre, dans la mesure où leur montant annuel cumulé ne représentait qu'un pourcentage de l'ordre de 0,05 % des charges annuelles d'exploitation payées par la SCP Fau-Simon et 2 % du montant des créances figurant au bilan de l'exercice 1999, et les dettes et créances apparaissaient équilibrées au bilan ; qu'en l'état de ces constatations et énonciations relevant de son appréciation souveraine, la cour d'appel a pu en déduire que la responsabilité de la société d'expertise comptable n'était pas engagée ;

Et attendu, d'autre part, que la cour d'appel n'a pas relevé d'anomalies ou d'irrégularités dont aurait eu connaissance la société d'expertise comptable, mais seulement le fait que les attestations de certification délivrées par cette dernière pour les exercices 1998 et 1999 comportaient des réserves sur "l'état des travaux en cours" et des "clients factures à établir", dans la mesure où la SCP Fau-Simon avait tardé à communiquer les éléments demandés ;

D'où il suit que le moyen, non fondé en sa première branche, manque en fait pour le surplus ;

Et, sur le moyen unique du pourvoi incident :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer à la SCP Fau-Simon une certaine somme à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant des détournements commis, alors, selon le moyen :

1°/ que si les successeurs universels ou à titre universel sont en principe tenus d'une obligation indéfinie aux dettes de la succession, ils ne le sont qu'à raison des seules dettes de la succession, de sorte que sont nécessairement exclues du passif successoral les dettes civiles non encore certaines au jour de la succession, ou, à tout le moins, les dettes extra contractuelles n'ayant donné lieu à aucune demande ni à aucune action antérieurement à l'acceptation de la succession ; qu'en décidant cependant, en l'espèce, que M. X..., qui avait accepté la succession de sa mère, était tenu au remboursement de dettes tirées de prétendus détournements imputables à celle-ci et n'ayant jamais fait l'objet d'aucune demande de la part du créancier, avant l'acceptation de la succession, la cour d'appel a violé les articles 723 et 1382 et 1384 du code civil ;

2°/ qu'en toute hypothèse, l'acceptation d'une succession est entachée d'erreur sur la substance même de celle-ci, si l'héritier croit à tort accepter une succession comportant un actif supérieur à son passif, sans que l'héritier ait eu, au moment de l'acceptation de la succession, aucun moyen de douter légitimement de ce que la succession acceptée présentait un actif net ; qu'en ce cas, l'héritier est en droit d'être déchargé des dettes successorales qui excèdent l'actif de la succession et obèrent gravement son propre patrimoine ; qu'en l'espèce, M. X... avait clairement souligné devant les juges du fond la disproportion manifeste, de nature à obérer son patrimoine, entre l'actif net apparent au moment de l'acceptation de la succession, et le montant des condamnations mises à sa charge en qualité d'héritier, qu'il avait des motifs légitimes d'ignorer au moment de l'acceptation de la succession de sa mère ; qu'il avait en conséquence demandé à la cour d'appel de le décharger des condamnations lui faisant ainsi grief ; qu'en condamnant cependant M. X..., au seul motif qu'il avait accepté la succession de sa mère, sans aucunement rechercher si cette acceptation n'était pas entachée d'erreur sur la substance, et si M. X... ne devait pas être déchargé des condamnations qu'il ne pouvait légitimement connaître au moment de l'acceptation de la succession, et de nature à obérer gravement son patrimoine, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 783 et suivants et 1110 du code civil ;

Mais attendu que le moyen nouveau et, mélangé de fait et de droit, est irrecevable ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE tant le pourvoi principal que le pourvoi provoqué et incident ;

Condamne la SCP Fau-Simon géomètres experts associés et Bet VRD aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à la société Akelis, venant aux droits de la société d'expertise comptable Chaussumier Dagan et associés, la somme de 2 500 euros ; rejette les autres demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trois juin deux mille huit.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 06-16119
Date de la décision : 03/06/2008
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 17 mars 2006


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 03 jui. 2008, pourvoi n°06-16119


Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:06.16119
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