LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 18 septembre 2006), que les époux X..., maîtres de l'ouvrage, assurés en police dommages ouvrage par la société Sagena, ont, par contrat de construction de maison individuelle avec fourniture de plan du 9 mars 2000 prévoyant notamment un prix forfaitaire, une durée totale de travaux de huit mois à compter de la déclaration d'ouverture du chantier fixée au 14 janvier 2001, et des pénalités de retard égales à 1/3000 e du prix, chargé la société Midi Provence service de l'édification d'une maison ; que la Compagnie européenne de garanties immobilières - Caisse de garantie immobilière de la fédération française du bâtiment (CGI-FFB) a accordé une garantie de livraison aux prix et délais convenus dans les termes de l'article L. 231-6 du code de la construction et de l'habitation ; qu'un litige portant sur le règlement du cinquième appel de fonds et l'existence de malfaçons a opposé les époux X... au constructeur qui a quitté le chantier le 5 septembre 2001 ; que les maîtres de l'ouvrage ont obtenu en référé la désignation d'un expert qui a déposé son rapport le 17 octobre 2002 ; que la liquidation judiciaire de la société Midi Provence service, placée en redressement le 18 octobre 2002, ayant été prononcée par jugement du 15 novembre 2002, les époux X... ont, le 24 novembre 2002, sollicité la garantie de la CGI-FFB avant de l'assigner, ainsi que le mandataire liquidateur de l'entrepreneur et la société Sagena, par acte du 17 novembre 2004, aux fins notamment d'obtenir l'autorisation de faire procéder à l'achèvement des travaux, et la condamnation du garant au paiement des travaux de réfection et des pénalités de retard ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société CGI-FFB fait grief à l'arrêt d'autoriser les époux X... à exécuter ou faire exécuter par l'entreprise de leur choix les travaux nécessaires à l'achèvement de l'ouvrage et à la reprise des malfaçons, de dire qu'elle sera tenue de prendre en charge le coût des dépassements du prix convenu, et de la débouter de sa demande en paiement du solde de ce prix, alors, selon le moyen :
1° / que la garantie de livraison prévue au K de l'article L. 231-2 du code de la construction et de l'habitation couvre le maître de l'ouvrage, à compter de la date d'ouverture du chantier, contre les risques d'inexécution ou de mauvaise exécution des travaux prévus au contrat, à prix et délais convenus ; qu'en l'espèce dès lors qu'il est constant d'une part que les époux X... ont constaté, dès le 5 septembre 2001, l'existence des malfaçons et l'abandon du chantier par la société Midi Provence service quant celui-ci devait contractuellement être achevé à la date du 14 septembre 2001, la cour d'appel ne pouvait, pour débouter la société CGI-FFB de ses demandes, affirmer que l'expertise judiciaire, ordonnée par décision du 24 mai 2002, avait été diligentée avant que la défaillance du constructeur ait été effectivement constatée ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article L. 231-6 du code de la construction et de l'habitation ;
2°/ que selon l'article L. 231-6 III du code de la construction et de l'habitation, le garant doit désigner, sous sa responsabilité, la personne qui terminera les travaux et il est en droit d'exiger de percevoir directement les sommes correspondant aux travaux qu'il fait effectuer, sauf la possibilité, si l'immeuble est hors d'eau, de proposer au maître de l'ouvrage de conclure lui-même des marchés de travaux avec des entreprises qui se chargeront de l'achèvement ; qu'en l'espèce, en autorisant les époux X... à faire achever l'ouvrage et à reprendre les malfaçons aux lieu et place de la société CGI-FFB par l'entrepreneur de leur choix et en précisant que celle-ci sera tenue de prendre en charge le dépassement des coûts du prix convenu sauf pour elle à démontrer que la prise en charge des travaux par le maître de l'ouvrage a conduit à un accroissement de ses charges, quand le garant s'opposait expressément à toute désignation directe de l'entrepreneur par les époux X..., la cour d'appel a violé l'article L. 231-6 du code de la construction et de l'habitation ;
3°/ que lorsqu'il condamne le garant au titre de la mise en oeuvre de la garantie de livraison à prendre en charge le coût des dépassements du prix convenu par les travaux nécessaires à l'achèvement de la construction, le juge doit, s'il autorise le maître de l'ouvrage à faire directement exécuter les travaux par l'entreprise de son choix, ordonner une expertise, à la demande du garant, afin de déterminer contradictoirement entre les parties, le coût des travaux nécessaires qui entrent dans la prise en charge de la garantie ; qu'en l'espèce, en refusant d'ordonner une expertise contradictoire afin de déterminer, avant le commencement des travaux de reprise, le coût de travaux nécessaires à l'achèvement de la construction qu'elle autorisait les époux X... à faire exécuter par l'entreprise de leur choix et dont la société CGI-FFB devait garantir le paiement, au seul motif que l'organisation d'une mesure d'expertise ne ferait que retarder inutilement l'issue du litige, sans rechercher si, du fait de la reprise directe des travaux par les maîtres de l'ouvrage, la société CGI-FFB ne serait pas, à posteriori, dans l'incapacité de rapporter la preuve d'une éventuelle aggravation des charges du seul fait du maître de l'ouvrage, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard des articles 146 du nouveau code de procédure civile et L. 231-6 du code de la construction et de l'habitation ;
4°/ que le principe du contradictoire s'impose aux parties comme au juge ; qu'en l'espèce, la cour d'appel qui a condamné la société CGI-FFB à garantir le paiement des travaux nécessaires à l'achèvement de la construction et qui a autorisé les époux X... à les faire exécuter par l'entreprise de leur choix, et sous leur seul contrôle, ne pouvait refuser au garant le droit de faire fixer contradictoirement par dire d'expert, avant la reprise du chantier, le coût des dits travaux, sans violer l'article 16 du nouveau code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant constaté, d'une part, par un motif non critiqué, que, pour l'exécution de son obligation de garantir l'achèvement de l'ouvrage, la société CGI-FFB avait mandaté la société Capibat pour faire procéder aux reprises des malfaçons et aux finitions en communiquant à cet entrepreneur le rapport d'expertise judiciaire dont elle avait eu connaissance et dont elle n'avait pas discuté la pertinence, d'autre part, que les rapports constatant l'état d'avancement des travaux établis par M. Y..., professionnel du bâtiment, les 27 juillet et 1er décembre 2005, en présence du gérant de la société Capibat, établissaient que les malfaçons dénoncées à cet entrepreneur subsistaient, que d'autres étaient apparues et que l'ouvrage n'était pas achevé, et relevé, pour décider que l'expertise demandée n'était pas nécessaire, que le procès-verbal de constat du 19 octobre 2005 produit par le garant, qui ne fournissait aucun élément sur les inexécutions et malfaçons dénoncées par les époux X..., dont la persistance était encore attestée par un procès-verbal de constat du 6 juin 2006, n'était pas de nature à combattre utilement les constatations de M. Y..., dans des documents régulièrement communiqués, qui avaient pu être librement discutés par la société CGI-FFB et dont il résultait que devaient être réalisés les travaux visés aux points 1 à 14 du rapport établi le 1er décembre 2005, à l'exception du point n° 4, étranger aux relations entre les maîtres de l'ouvrage et le garant, la cour d'appel, qui, abstraction faite d'un motif surabondant relatif à la date de la constatation de la défaillance du constructeur, n'avait pas a procédé à la recherche prétendument omise sur l'opportunité d'ordonner une expertise, et qui n'a pas violé le principe de la contradiction, a retenu à bon droit que la garantie de livraison, édictée par l'article L. 231-6 du code de la construction et de l'habitation pour protéger le maître de l'ouvrage, ne créait aucune obligation à sa charge et que ce dernier pouvait effectuer lui-même ou faire effectuer les travaux, en dispensant le garant de son obligation de rechercher un entrepreneur pour terminer le chantier, sans perdre son droit d'obtenir de lui le financement des travaux nécessaires, sauf preuve rapportée par le garant de l'aggravation de ses propres charges du fait de l'initiative du propriétaire du bien ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que la société CGI-FFB fait grief à l'arrêt de la condamner à payer aux époux X... une certaine somme au titre des pénalités forfaitaires de retard, alors, selon le moyen :
1°/ que le juge ne peut, pour motiver sa décision, se borner à se référer à une décision antérieure intervenue dans une autre cause, entre d'autres parties, qu'en l'espèce, pour retenir la date du 14 septembre 2001 comme point de départ des pénalités de retard et retenir que l'abandon du chantier incombait depuis cette date au seul constructeur, la cour d'appel s'est référée à une décision rendue dans le cadre de la fixation de la créance des époux X... contre la société Midi Provence service ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau code de procédure civile ;
2°/ que les conventions devant être exécutées de bonne foi, en matière de garantie de livraison, il appartient au maître de l'ouvrage, qui entend bénéficier de la garantie, d'informer sans délai le garant de la défaillance de l'entrepreneur ; qu'en l'espèce, pour dire que le montant des pénalités de retard courrait à partir du 14 septembre 2001, date contractuelle d'achèvement du chantier, la cour d'appel a simplement énoncé que les maîtres de l'ouvrage avaient sollicité la garantie de la société CGI-FFB à dater du 19 novembre 2002, sans caractériser ni rechercher si la société CGI-FFB avait été informée avant cette date de la défaillance de l'entrepreneur, et si elle avait été mise en mesure d'intervenir sur le chantier; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles 1134 du code civil et L. 231-6 du code de la construction et de l'habitation ;
Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel, qui a décidé, dans l'instance d'appel qui lui était dévolue, qu'aucune responsabilité ne pouvait être imputée aux maîtres de l'ouvrage à l'origine de l'abandon du chantier par la société Midi Provence service, et qui a fixé le point de départ des pénalités contractuelles de retard à compter du 14 septembre 2001, date à laquelle les travaux devaient être achevés, ayant relevé que les argumentations du liquidateur, s'agissant de la fixation de la créance des époux X... à l'encontre du constructeur au titre des pénalités forfaitaires prévues au contrat en cas de retard, et de la garantie due à ce titre par société CGI-FFB étaient identiques, le moyen manque en fait ;
Attendu, d'autre part, que la possibilité pour le maître de l'ouvrage d'informer le garant du retard du chantier n'étant pas, aux termes de l'article L. 231-6 II du code de la construction et de l'habitation, une condition de son droit à percevoir les pénalités, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche inopérante, a légalement justifié sa décision de ce chef ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
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Condamne la société CGI FFB aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société CGI FFB ; la condamne à payer aux époux X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé à l'audience publique du sept mai deux mille huit, par M. Z.... conseiller le plus ancien faisant fonction de président, conformément à l'article 452 du nouveau code de procédure civile.