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27/03/2008 | FRANCE | N°08-80134

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 27 mars 2008, 08-80134


-X... Michel,-A... Carole,-A... André,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de BORDEAUX, en date du 13 novembre 2007, qui, dans l'information suivie contre eux pour destruction volontaire par incendie, escroquerie en bande organisée, recel d'escroqueries, abus de biens sociaux et abus de confiance, a prononcé sur leurs demandes d'annulation de pièces de la procédure ;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 1er février 2008, joignant les pourvois en raison de la connexité et prescrivant leur examen immédiat ;
Vu le

mémoire produit, commun aux trois demandeurs ;
Attendu qu'il résult...

-X... Michel,-A... Carole,-A... André,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de BORDEAUX, en date du 13 novembre 2007, qui, dans l'information suivie contre eux pour destruction volontaire par incendie, escroquerie en bande organisée, recel d'escroqueries, abus de biens sociaux et abus de confiance, a prononcé sur leurs demandes d'annulation de pièces de la procédure ;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 1er février 2008, joignant les pourvois en raison de la connexité et prescrivant leur examen immédiat ;
Vu le mémoire produit, commun aux trois demandeurs ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure qu'une information a été ouverte le 18 août 2005 à la suite d'un incendie ayant détruit, la veille, les locaux de la Société Nouvelle Laurent (SNL) ; que la poursuite des investigations a fait apparaître que cet incendie pouvait avoir été provoqué volontairement par les dirigeants de l'entreprise dans le but de toucher une indemnité d'assurance susceptible, par ailleurs, d'avoir donné lieu à diverses malversations ; qu'André A..., gérant de fait de la SNC, mis en examen des chefs de destruction volontaire par incendie, escroquerie en bande organisée, recel d'escroqueries, abus de biens sociaux et abus de confiance, a présenté une requête en annulation de pièces de la procédure à laquelle se sont associés deux autres mis en examen, Michel X... et Carole A... ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 152, 156, 158, 161, 171, 174, 802, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que la chambre de l'instruction a rejeté le moyen d'annulation tenant à l'assistance de l'expert B... à certaines auditions et a déclaré la procédure régulière ;
" aux motifs que, par ordonnance du 15 septembre 2006, le juge d'instruction a donné à l'expert judiciaire inscrit B... la mission, outre d'examiner les conditions de fonctionnement et de gestion de la SARL Société Nouvelle Laurent, et les bilans, de relever les anomalies, soit une mission d'expertise comptable classique, celle de " prêter en tant que de besoin assistance aux enquêteurs y compris dans leurs opérations de perquisition et lors des interrogatoires " (D. 616) ; qu'il ressort du rapport de cet expert (D. 617) qu'en vue d'aider les enquêteurs lors de l'audition prévisible de l'expert comptable, il a établi une liste de questions susceptibles d'être posées par les enquêteurs à cette occasion (annexe 4) ; que le 18 octobre 2006, il s'est rendu à la gendarmerie d'Angoulême pour assister le cas échéant les enquêteurs dans leurs auditions, qu'il est arrivé à 14 heures et qu'il pense être reparti très approximativement à 17 heures ; que M. C... et Mme D..., expert comptable et comptable, étaient présents sur les lieux, qu'il a examiné durant ce laps de temps les dossiers de travail de M. C... qui se trouvaient sur les lieux, enfin qu'il a posé quelques questions, en présence de l'enquêteur F... tant à M. C... qu'à Mme D..., lesdites questions et réponses étant détaillées dans le rapport de l'expert et en relation avec la mission d'expertise elle-même ; qu'aux termes des procès-verbaux établis, les enquêteurs ont pour leur part utilisé la liste des questions de l'annexe 4 au cours de la garde à vue ; qu'antérieurement au dépôt du rapport d'expertise, l'ordonnance de désignation de l'expert figurait parmi les actes en cours et n'avait pas à être versée au dossier de la procédure ; que non seulement l'expert pouvait, aux termes de l'article 164 du code de procédure pénale, recevoir à titre de simples renseignements et pour l'accomplissement de sa mission les déclarations de toutes personnes autres que la personne mise en examen, le témoin assisté ou la partie civile mais encore, en l'espèce, il était expressément autorisé par le magistrat instructeur à prêter en tant que de besoin assistance aux enquêteurs y compris dans leurs opérations de perquisition et lors des interrogatoires ; que la désignation de M. B... s'explique par la technicité de la matière, que même si les procès-verbaux d'audition ne font pas état de sa présence, l'intervention de l'expert est parfaitement retranscrite dans son rapport et qu'ainsi la Cour est en mesure de s'assurer des conditions exactes de son intervention ; que la notification du rapport de l'expert permettra que celui-ci soit soumis à l'examen contradictoire des parties ; que le recours à l'intervention de l'expert, justifié par la technicité de la matière, ne constitue nullement un moyen de pression supplémentaire sur les personnes entendues elles-mêmes professionnelles de la comptabilité ; qu'aucun élément du dossier ne permet de retenir qu'il y ait eu stratégie ou déloyauté et un quelconque grief ;
" 1°) alors que l'article 152 du code de procédure pénale autorise le juge d'instruction à déléguer, dans les limites qu'il fixe, ses pouvoirs d'instruction à des magistrats ou à des officiers de police judiciaire ; qu'en revanche, les articles 156 et 158 du code de procédure pénale n'autorisent le juge d'instruction à désigner un expert que pour résoudre des questions d'ordre technique ; qu'il résulte, des énonciations de l'arrêt attaqué, que l'ordonnance de désignation de l'expert B..., en date du 15 septembre 2006, (qui n'a été jointe au dossier de la Cour que le 8 juin 2007 c'est-à-dire postérieurement aux débats sur la requête en annulation), autorisait celui-ci à " prêter en tant que de besoin assistance aux enquêteurs y compris dans leurs opérations de perquisition et lors des interrogatoires " impliquant une assimilation des pouvoirs de l'expert à ceux des officiers de police judiciaire agissant sur commission rogatoire eux-mêmes en sorte que cette ordonnance, qui a servi de base à l'intervention active de l'expert au cours des auditions, méconnaît les textes susvisés ;
" 2°) alors qu'il appartenait aux enquêteurs de limiter le rôle de l'expert à une assistance purement technique et qu'en validant des procès-verbaux d'interrogatoires réalisés à la suite de questions déterminées par l'expert, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés ;
" 3°) alors que dans la mesure où la mission d'expertise telle que résultant de la rédaction de l'ordonnance susvisée comportait une délégation par le juge d'instruction de ses pouvoirs d'instruction à l'expert dépassant le seul domaine technique, le motif de l'arrêt affirmant que les questions (rédigées par l'expert) et réponses des personnes entendues étaient " en relation avec la mission d'expertise elle-même " ne permet aucunement de constater la régularité de la participation de l'expert B... aux auditions incriminées et par voie de conséquence ne permet pas de justifier le refus d'annulation des procès-verbaux incriminés et de la procédure subséquente ;
" 4°) alors que le principe de loyauté s'impose dans la recherche des preuves ; que, dans leurs mémoires régulièrement déposés, les demandeurs faisaient valoir qu'en ne mentionnant pas, dans les procès-verbaux de garde à vue de la comptable et de l'expert comptable l'intervention de l'expert B..., les enquêteurs avaient méconnu le principe de loyauté et qu'en se bornant à faire état de ce qu'aucun élément du dossier ne permet de retenir qu'il y ait eu stratagème ou déloyauté sans s'expliquer sur cette argumentation péremptoire, la chambre de l'instruction n'a pas donné de base légale à sa décision ;
" 5°) alors que la juridiction d'instruction doit être mise en mesure d'exercer son contrôle sur les opérations de l'expert dans les conditions prévues par les articles 156 et 161 du code de procédure pénale et que la dissimulation par les enquêteurs, dans les procès-verbaux, de la présence de l'expert B..., ne peut dès lors que constituer un stratagème destiné à faire échec au contrôle du juridiction d'instruction ;
" 6°) alors que le contrôle de la régularité d'un procès-verbal ne peut être effectué qu'à partir des propres énonciations de celui-ci, et qu'en affirmant qu'elle était en mesure de s'assurer des conditions exactes de l'intervention de l'expert B... lors des auditions de l'expert comptable et de la comptable à partir des seules énonciations du rapport de cet expert, la cour d'appel a méconnu le principe susvisé et, ce faisant, ses pouvoirs ;
" 7°) alors que l'intervention, lors des auditions en garde à vue d'un expert investi de véritables pouvoirs d'instruction, orientant à ce titre les interrogatoires des enquêteurs et échappant au contrôle du juge d'instruction, méconnaît, derechef, les textes susvisés, un expert ne pouvant être également désigné pour exercer une mission dévolue aux enquêteurs et, en conséquence, porte atteinte aux droits de la défense dans la mesure où les auditions incriminées ont pu servir de base au placement en garde à vue et à la mise en examen des demandeurs " ;
Attendu que, par ordonnance du 15 septembre 2006, le juge d'instruction a désigné Christian B..., expert, aux fins, notamment, d'examiner les conditions de fonctionnement et de gestion de la SNC, en lui prescrivant de " prêter en tant que de besoin assistance aux enquêteurs y compris dans leurs opérations de perquisition et lors des interrogatoires " ; que l'expert ainsi commis a établi une liste de questions susceptibles d'être posées à l'expert-comptable ou aux comptables de la société ; qu'il ressort des auditions de ces personnes sur commission rogatoire que les enquêteurs ont utilisé la liste de questions ainsi établie, l'expert désigné par le juge d'instruction ayant, par ailleurs, personnellement entendu les mêmes personnes pour l'exécution de sa mission ;
Attendu que, pour écarter l'argumentation des requérants, qui soutenaient que l'expert, en procédant ainsi, avait exercé des pressions sur les personnes entendues et usé d'un stratagème ayant vicié la recherche et l'établissement de la vérité, l'arrêt attaqué retient que l'expert n'a pas excédé les limites de la mission d'ordre technique qui lui avait été confiée par le juge d'instruction ; que les juges ajoutent qu'ils sont en mesure de s'assurer des conditions exactes de l'intervention du même expert, lequel a retranscrit la totalité de ses diligences dans son rapport, soumis à la contradiction ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, la chambre de l'instruction a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 171, 174, 802, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a refusé d'annuler les placements en garde à vue des auditions, les procès-verbaux de première comparution et la mise en examen d'André A... et Michel X... et de Carole A... ;
" aux motifs qu'il résulte de ce qui précède que la nullité des placements en garde à vue, celle des perquisitions pour la partie réalisée en l'absence d'André A... qui a été amené à son domicile et qui a assisté à l'ouverture du coffre et à la saisie des documents, sommes et bons contenus et signé le procès-verbal (D. 117, feuillets 3 et 4) jusqu'à 4 / D4 et de 15 / D4 à 32 / D4, et saisies opérées hors la présence d'André A..., celle des auditions de Brigitte X... et Patrice E..., et autres actes réalisés au cours de la garde à vue, doit être prononcée (cote D. 117 feuillets 1-2 et 3 jusqu'à scellé 4 / D4 et feuillet 5 à D. 121 jusqu'à 4 / D4 et de 15 / D4 à 32 / 4 en ce qui concerne Brigitte X..., cote D. 124 après " interpellons sans incident Patrice E... " à D. 139 en ce qui concerne Patrice E...) ; qu'il en est de même en ce qui concerne l'interrogatoire de première comparution de Brigitte X... (cote D. 598), étant précisé que Patrice E... n'a pas été entendu par le magistrat instructeur ; que, par contre, s'agissant des placements en garde à vue, des auditions, de la première comparution et de la mise en examen ou de la notification du statut de témoin assisté des autres parties, la nullité n'est pas encourue dès lors que les placements en garde à vue, la mise en examen ou la notification du statut de témoin assisté résultent d'une multitude d'autres éléments, à savoir des pièces comptables, des constatations matérielles, des auditions de salariés, des écoutes téléphoniques, de pièces provenant des assureurs … pièces autres que les actes annulés concernant la seule Brigitte X... et le seul Patrice E... ; que les pièces annulées ne sont pas le support nécessaire des actes concernant les autres personnes en cause ; que seule est encourue l'annulation par voie de cancellation des interrogatoires pour les passages faisant référence aux actes annulés ;
" alors que, sont nuls, par voie de conséquence, les actes d'instruction qui procèdent d'actes dont l'annulation a été prononcée dans la même procédure et que dans la mesure où il résulte, ainsi que la Cour de cassation est en mesure de s'en assurer, de la procédure que les placements en garde à vue, les auditions, la première comparution et la mise en examen d'André A... et Michel X... et de Carole A... procèdent des actes annulés auxquels ils font expressément référence (ce qui est notamment le cas de l'audition de Michel X... du 7 décembre 2006 et de l'audition d'André A... du 12 décembre 2006 selon le dispositif de l'arrêt attaqué), la cour d'appel ne pouvait, sans se contredire et ce faisant méconnaître ses pouvoirs, refuser de prononcer leur nullité et se borner à ordonner de simples cancellations " ;
Attendu que, pour refuser d'étendre, par voie de conséquence, à la totalité des actes concernant les requérants l'annulation des actes relatifs à deux autres personnes, l'arrêt attaqué retient que ces derniers actes ne sont pas le support exclusif des premiers ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la chambre de l'instruction a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Cotte président, M. Arnould conseiller rapporteur, M. Le Gall conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Lambert ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 08-80134
Date de la décision : 27/03/2008
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Bordeaux, 13 novembre 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 27 mar. 2008, pourvoi n°08-80134


Composition du Tribunal
Président : M. Cotte (président)
Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:08.80134
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