LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 13 octobre 2006), que par acte notarié du 8 juillet 1993, les sociétés Immobail SICOMI, devenue Immocrédit et Coframi, aux droits desquelles se présentent les sociétés Affine et SPSO ont donné en crédit-bail à la société Desquenne et Giral des immeubles à usage d'ateliers et de bureaux, le contrat étant placé sous le régime des sociétés immobilières pour le commerce et l'industrie (SICOMI) ; que la société Desquenne et Giral ayant, le 25 mars 2003, sous-loué la totalité des locaux à la société Loxam, les sociétés Affine et SPSO lui ont délivré une sommation, visant la clause résolutoire du contrat, d'avoir à se conformer à l'article 21 du contrat de crédit-bail interdisant expressément toute sous-location ; que le crédit-preneur les a alors assignées en nullité tant de cette clause que du commandement en invoquant le bénéfice des instructions de la direction générale des impôts en date des 23 octobre et 4 novembre 1996 modifiant le régime fiscal applicable au crédit-bail immobilier conclu avec une SICOMI ;
Attendu que la société Desquenne et Giral fait grief à l'arrêt de rejeter cette demande alors, selon le moyen :
1°/ que les conventions doivent être exécutées de bonne foi ; que de l'application de ce principe naît l'obligation pour le cocontractant de renégocier le contrat en cas de modifications législatives favorables à la partie faible du contrat ; qu'en l'espèce, le crédit-bailleur ne pouvait, sans porter préjudice au crédit-preneur, omettre de lui proposer la soumission du contrat au nouveau régime fiscal par voie d'avenant à la suite de l'entrée en vigueur le 1er janvier 1996 des nouvelles dispositions, ce régime étant plus favorable pour chacune des parties au contrat de crédit-bail et plus spécifiquement pour le crédit-preneur ; qu'en estimant que la proposition de soumettre le contrat de crédit-bail au nouveau régime issu de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 et de l'instruction n° 4 H-4-96 I de la direction générale des impôts en date du 23 octobre 1996, pris pour son application n'était qu'une faculté offerte au crédit-bailleur et qu'il n'appartenait pas à ce dernier de proposer la soumission du contrat de crédit-bail au nouveau régime par voie d'avenant, le déchargeant ainsi de toute obligation de négociation au cours de l'exécution du contrat, la cour d'appel a violé les articles 1134, alinéa 3, et 1147 du code civil ;
2°/ que le professionnel en matière de crédit-bail immobilier est tenu d'informer le crédit-preneur d'une modification substantielle du régime applicable aux relations contractuelles, lorsque cette modification législative, prise en faveur du crédit-preneur, est susceptible de modifier l'une des clauses essentielles du contrat et de l'informer de la suite qu'il compte lui donner ; qu'en estimant que les sociétés de crédit-bail n'avaient à leur charge aucune obligation d'information relative aux nouvelles dispositions applicables aux SICOMI à raison de l'instruction de la direction générale des impôts du 23 octobre 1996 prise en application de la loi n° 95-115 du 4 février 1995, supprimant les aspects contraignants réglementant la sous-location du bien objet du bail et autorisant l'application de ce nouveau régime aux opérations conclues antérieurement au 1er janvier 1996 par voie d'avenant préalablement à l'autorisation de sous-location partielle ou totale, la cour d'appel a violé les articles 1134, alinéa 3, et 1147 du code civil ;
3°/ qu'il résulte des constatations de l'arrêt qu'en 1995 le crédit-bailleur avait autorisé la sous-location partielle de l'immeuble objet du bail à la société Loxam avec l'accord du crédit-bailleur et qu'en 2001 et 2003, cette sous-location a été étendue à la totalité des locaux ; qu'en ne recherchant pas si le crédit-bailleur, qui avait accepté en 1995 le principe de la sous-location à ladite société Loxam, n'agissait pas de mauvaise foi en sanctionnant par la résiliation du contrat une opération de sous-location qu'il avait autorisée en 1995, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134, alinéa 3, du code civil ;
Mais attendu, d'une part, qu'il résulte de l'arrêt que la société Desquenne et Giral ne s'est jamais prévalue de l'obligation pour les crédit-bailleurs de renégocier le contrat, mais a toujours soutenu que la nouvelle réglementation fiscale lui était applicable immédiatement et sans formalité ; que le moyen est, de ce chef, contraire à ses précédentes écritures ;
Attendu, d'autre part, qu'ayant constaté que l'instruction de la direction générale des impôts du 23 octobre 1996 précisait que les SICOMI étaient concernées par les nouvelles dispositions uniquement à dater du 1er janvier 1996 et que les opérations conclues antérieurement restaient régies par le régime de l'instruction du 28 mai 1970, sauf pour les parties à accepter de se soumettre au nouveau régime fiscal par voie d'avenant, préalablement à l'autorisation de sous-location, la cour d'appel, qui a retenu à bon droit qu'il s'agissait d'une faculté ouverte aux parties et non d'une obligation, et qui n'était pas tenue d'effectuer une recherche sur la mauvaise foi du crédit-bailleur que ses constatations rendaient inopérante, a pu en déduire, abstraction faite d'un motif erroné mais surabondant relatif à la durée de l'obligation de conseil, que la société Desquenne et Giral n'ayant pas demandé au crédit-bailleur de bénéficier de ces dispositions nouvelles, et ayant sous-loué l'immeuble sans l'aviser, ne pouvait lui imputer la violation d'une obligation de conseil qui n'avait pas vocation à s'exercer devant le fait accompli de la violation des clauses essentielles du contrat ;
D'où il suit que le moyen, pour partie irrecevable, n'est pas fondé pour le surplus ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le second moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Desquenne et Giral aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Desquenne et Giral ; condamne la société Desquenne et Giral à payer aux sociétés Affine et SPSO, ensemble, la somme de 2 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept février deux mille huit.