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13/02/2008 | FRANCE | N°07-87458

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 13 février 2008, 07-87458


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :

-Z... André,
-Z... Thierry,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de NÎMES, en date du 3 octobre 2007, qui, dans l'information suivie contre eux pour vol et tentative de vol en bande organisée avec arme, recel de vol en bande organisée avec arme, vol aggravé, association de malfaiteurs, infractions à la législation sur les armes et les munitions en récidive, a rejeté une requête en annulation d'actes de la procédure ;

Vu l

'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 13 décembre 2007, jo...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :

-Z... André,
-Z... Thierry,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de NÎMES, en date du 3 octobre 2007, qui, dans l'information suivie contre eux pour vol et tentative de vol en bande organisée avec arme, recel de vol en bande organisée avec arme, vol aggravé, association de malfaiteurs, infractions à la législation sur les armes et les munitions en récidive, a rejeté une requête en annulation d'actes de la procédure ;

Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 13 décembre 2007, joignant les pourvois en raison de la connexité et prescrivant leur examen immédiat ;

Sur la recevabilité des pourvois formés le 12 octobre 2007 :

Attendu que les demandeurs, ayant épuisé, par l'exercice qu'ils en avaient fait le 8 octobre 2007, le droit de se pourvoir contre l'arrêt attaqué, étaient irrecevables à se pourvoir à nouveau contre la même décision ; que seul est recevable le pourvoi formé le 8 octobre 2007 ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme,151,152,171,591,593,706-96,706-97 et 802 du code de procédure pénale ;

" en ce que la chambre de l'instruction a rejeté la requête formée par André Z..., mis en examen des chefs d'association de malfaiteurs, de tentative de vol aggravé, de détention d'armes de la première à la quatrième catégories, de recel de vol aggravé, de vol aggravé et de vol avec arme, aux fins d'annulation des retranscriptions de conversations téléphoniques enregistrées à son domicile (cotées à la procédure sous les références D 2, D 10, D 13, D 17 et D 22) et de la décision (cotée D 24) du procureur de la République de prolonger une enquête de flagrance concernant un prétendu projet d'agression du domicile de la famille A..., enquête incidente à des éléments prétendument révélés par les retranscriptions de conversations susmentionnées et de la perquisition effectuée au domicile d'André Z... et de madame B... (cotée D 43) ;

" aux motifs que de l'information résulteraient les éléments suivants : le 9 février 2007, André Z... était mis en examen pour participation à une association de malfaiteurs en vue de commettre plusieurs vols à main armée notamment au préjudice des époux C... et A..., vol en bande organisée d'une cargaison de cigarettes, commis le 15 janvier 2007 au préjudice de la société Altadis, recel d'un véhicule Golf provenant d'un vol à main armée en bande organisée, vol avec effraction en réunion commis en décembre 2006 au préjudice de Stéphanie D... et détention illégale d'armes de première ou quatrième catégorie ; que, le 17 avril 2007, il faisait l'objet d'un réquisitoire supplétif pour un vol avec effraction commis à Anduze le 4 janvier 2007 au préjudice de la Sarl Le Barbare ; qu'il limitait ses aveux à certains faits, notamment deux cambriolages, minimisant sa participation au braquage des époux C... et A... à de simples repérages ou tentant d'éluder sa participation au braquage du camionneur d'Altadis en affirmant que ses aveux devant des tiers étaient des vantardises ; que, cependant, les écoutes téléphoniques réalisées dans le cadre d'une autre information avaient mis en évidence des indices d'une participation à une association de malfaiteurs ayant programmé la commission de plusieurs vols avec arme ; que notamment, lors de plusieurs conversations du 30 janvier 2007, il évoquait avec ses interlocuteurs successifs, divers équipements nécessaires tels que talkie-walkie, cagoules, gants et même " pompe " et calibre ; que, dans une conversation du 1er février, il évoquait avec ses co-auteurs une agression avec un canon scié ; que, confronté à ces éléments et à Georges E... et Christophe F... le 20 mars 2007, André Z... prétendait " ne plus se souvenir ", " être mythomane " ou s'être limité à de vagues projets délictueux, dont le braquage d'une bijouterie à l'aide de canons sciés ; qu'il se montrait en outre particulièrement virulent envers ses co-mis en examen ; qu'en ce qui concernait l'agression de madame C..., il était directement mis en cause par Anthony G..., co-mis en examen qui indiquait avoir reçu ses aveux en présence de Thierry Z... ; qu'Anthony G... ajoutait s'être renseigné sur la victime à sa demande et l'avoir accompagné pour plusieurs repérages de cambriolages, ainsi que lors du cambriolage de Saint-Ambroix ; que, de même, il précisait que les talkies-walkies, cagoules, cartouches, pistolet factice saisis à son domicile avaient été placés en dépôt par André Z... dont il avait peur ; que, de même, l'ADN d'André Z... était relevé sur un gant retrouvé à l'issue de l'attaque du camion de la société Altadis transportant des cigarettes ; que, par ailleurs, Geoffrey E... et Christophe F... reconnaissaient l'usage d'une Golf volée pour aller commettre un cambriolage chez les A..., avec André Z... et " deux autres individus venus se joindre à la bande ", contestant l'usage d'armes à l'exception, pour E..., " d'une arme factice " (arrêt, pp. 5 à 7) ; que la sonorisation de l'appartement d'André Z... avait été réalisée dans le cadre d'une procédure d'information distincte ouverte également au cabinet du juge d'instruction d'Alès contre X des chefs de participation à une association de malfaiteurs, vol en bande organisée avec arme, vol avec violence commis en bande organisée portant le n° 105 / 44 et visant notamment des faits commis au préjudice d'Huguette C... le 7 juin 2005 ; que plus précisément, le magistrat instructeur après avoir délivré, le 27 décembre 2005, une commission rogatoire relative auxdits faits et détaillé les procès-verbaux fondant sa saisine avait, ensuite et, par ordonnance du 25 janvier 2007 prise sur le fondement de l'article 706-96 du code de procédure pénale, ordonné la sonorisation pour une durée d'un mois du domicile d'André Z... sis... ; que, plus précisément, l'ordonnance du 25 janvier 2007 avait été prise sur réquisitions du procureur de la République et visait des crimes et délits entrant dans le champ d'application de l'article 706-73 et objets de la saisine du magistrat instructeur ; que ces deux actes qui en conséquence étaient réguliers avaient été annexés à la présente procédure (cote D 5) ; que, si dans les procès-verbaux cotés D 2, D 10, D 13, D 17 et D 22 il était fait référence à tort à une procédure d'information (105 / 29) cette référence numérique erronée, fût-elle répétée, relevait de l'erreur matérielle dès lors que les enquêteurs :-dans leur procès-verbal " initial " du 29 janvier 2005 (D 5) avaient rappelé le cadre juridique dans lequel s'inscrivaient les transcriptions des propos tenus à savoir " la commission rogatoire du 27 décembre 2005... suite à l'agression à son domicile d'Huguette C... ",-dans les procès-verbaux D 2, D 10, D 17 et D 22 avaient à nouveau mentionné " affaire Huguette C... " et fait, chaque fois référence à la commission rogatoire technique du 25 janvier 2007 ; que dès lors, le premier moyen de nullité n'était pas fondé (arrêt, pp. 8 et 9) ;

" alors que, d'une part, la chambre de l'instruction ne pouvait valablement retenir que l'indication, dans des procès-verbaux de retranscription de conversations, d'un numéro de procédure distinct de celui sous lequel le juge d'instruction conduisait une information, procèderait d'une erreur purement matérielle ne viciant pas la procédure, dès lors qu'en l'état du caractère substantiel de l'identification, par les officiers de police judiciaire enquêteurs, de la procédure dans laquelle ils interviennent sur commission rogatoire, et de la nécessité de bannir tout doute sur le lien entre les actes d'instruction effectués sur commission rogatoire et les faits entrant dans la saisine du juge d'instruction, cette erreur, qui ne pouvait être purement matérielle, portait nécessairement atteinte aux intérêts des mis en examen et devait entraîner l'annulation des actes concernés et de tous actes subséquents effectués sur leur fondement ;

" alors que, d'autre part, la réalisation d'opérations de sonorisation de certains lieux ou véhicules doit être précédée d'une ordonnance motivée du juge d'instruction et d'une commission rogatoire spéciale ; qu'en se référant seulement, d'une part, à une commission rogatoire globale du 27 décembre 2005, visant une information suivie contre personne non dénommée des chefs de participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un délit puni d'au moins cinq ans d'emprisonnement, de vol en bande organisée avec arme et de vol avec violence commis en bande organisée, et par laquelle les enquêteurs délégués étaient priés de « faire poursuivre l'enquête... à l'effet d'en préciser les circonstances et d'en identifier le ou les auteurs ; il conviendrait d'effectuer toutes auditions, réquisitions et investigations utiles en vue de l'identification et de l'interpellation des auteurs des faits », d'autre part, à une « ordonnance aux fins d'autorisation de mise en place d'un dispositif technique ayant pour objet la captation, l'enregistrement de paroles prononcées dans un lieu privé », rendue par le juge d'instruction le 25 janvier 2007, la chambre de l'instruction n'a pas fait apparaître l'existence d'une commission rogatoire spéciale visant les opérations concernées de sonorisation, et elle n'a donc pas légalement justifié sa décision ;

" alors qu'en tout état de cause, la chambre de l'instruction ne pouvait valablement se fonder, pour retenir la régularité de la procédure, sur la commission rogatoire précitée du 27 décembre 2005, dès lors que celle-ci était elle-même nulle, pour conférer aux services une délégation générale de pouvoirs concernant, non une infraction déterminée, mais une catégorie d'infractions dont les services étaient invités à préciser les circonstances, et que cette nullité s'étendait nécessairement à tous les actes accomplis pour son exécution " ;

Vu l'article 706-96 du code de procédure pénale ;

Attendu qu'il résulte de ce texte que le juge d'instruction qui décide de faire procéder à la mise en place d'un dispositif technique aux fins de captation, fixation, transmission et enregistrement, sans le consentement des intéressés, de paroles prononcées par une ou plusieurs personnes à titre privé ou confidentiel ou de l'usage d'une ou plusieurs personnes se trouvant dans un lieu privé, est tenu, d'une part, d'autoriser par ordonnance motivée les officiers de police judiciaire à mettre en place le dispositif technique destiné à cette opération, d'autre part de leur délivrer une commission rogatoire spéciale en vue de l'exécution de ladite ordonnance ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que les policiers, au cours d'une opération de sonorisation du domicile d'André Z..., autorisée, en application de l'article 706-96 du code de procédure pénale, par ordonnance motivée, en date du 25 janvier 2007, d'un juge d'instruction informant sur des faits de vols en bande organisée avec arme, ont enregistré, à partir du 28 janvier 2007, des conversations révélant la préparation d'un autre vol en bande organisée avec arme, faits dont le magistrat n'était pas saisi ; qu'une enquête de flagrance a alors été ouverte sur ces faits nouveaux, l'ordonnance précitée autorisant la sonorisation, les procès-verbaux de transcription des conversations enregistrées ainsi qu'une commission rogatoire du 27 décembre 2005 étant versés dans cette procédure qui a été suivie de l'ouverture d'une nouvelle information dans laquelle André Z... et Thierry Z... ont été mis en examen ;

Attendu que, pour rejeter le moyen d'annulation proposé par André Z..., pris de l'irrégularité des opérations de sonorisation effectuées dans l'information distincte, en raison de l'absence de commission rogatoire, l'arrêt attaqué relève que les officiers de police judiciaire ont régulièrement accompli ces actes en exécution d'une commission rogatoire du 27 décembre 2005 ;

Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors que ladite commission rogatoire, à laquelle l'opération de sonorisation du domicile d'André Z... était étrangère, ne répondait pas aux conditions fixées par l'article 706-96 du code de procédure pénale, qui impose au juge d'instruction non seulement de rendre une ordonnance motivée autorisant la sonorisation mais également de délivrer aux officiers de police judiciaire qu'il désigne une commission rogatoire spéciale, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision ;

D'où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs et sans qu'il soit besoin d'examiner le second moyen de cassation proposé :

I-Sur les pourvois formés le 12 octobre 2007 :

Les DÉCLARE IRRECEVABLES ;

II-Sur le pourvoi formé le 8 octobre 2007 :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Nîmes en date du 3 octobre 2007, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,

RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Nîmes, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Cotte président, Mme Caron conseiller rapporteur, M. Le Gall, Mme Chanet, M. Pelletier, Mme Ponroy, M. Arnould, Mme Koering-Joulin, MM. Corneloup, Pometan, Mme Canivet-Beuzit, M. Finidori, conseillers de la chambre ;

Avocat général : M. Salvat ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 07-87458
Date de la décision : 13/02/2008
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

CRIMINALITE ORGANISEE - Procédure - Sonorisations et fixations d'images de certains lieux ou véhicules - Régularité - Conditions - Détermination

INSTRUCTION - Commission rogatoire - Criminalité organisée - Procédure - Sonorisations et fixations d'images de certains lieux ou véhicules - Régularité - Conditions - Détermination

Il résulte des articles 706-96 et suivants du code de procédure pénale que le juge d'instruction qui décide de faire procéder à la mise en place d'un dispositif technique ayant pour objet, sans le consentement des intéressés, la captation, fixation, transmission et enregistrement de paroles prononcées par une ou plusieurs personnes, à titre privé ou confidentiel, ou de l'image de personnes se trouvant dans un lieu privé, doit, non seulement rendre une ordonnance motivée autorisant ces opérations, mais également délivrer une commission rogatoire spéciale aux officiers de police judiciaire qu'il désigne pour y procéder


Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Nîmes, 03 octobre 2007

Sur les conditions de régularité de la procédure prévue aux articles 706-96 et suivants du code de procédure pénale, à rapprocher : Crim., 27 février 2008, pourvoi n° 07-88275, Bull. crim. 2008, n° 53 (cassation).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 13 fév. 2008, pourvoi n°07-87458, Bull. crim. criminel 2008 N° 40 p. 149
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2008 N° 40 p. 149

Composition du Tribunal
Président : M. Cotte
Avocat général : M. Salvat
Rapporteur ?: Mme Caron
Avocat(s) : SCP Vier, Barthélemy et Matuchansky

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:07.87458
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