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30/01/2008 | FRANCE | N°06-45503

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 30 janvier 2008, 06-45503


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Atis aviation a mis en oeuvre en 2001 une procédure de licenciement collectif pour motif économique avec mise en place d'un plan social ; que M. X..., employé par cette société à compter du 27 août 1999, a été licencié le 4 février 2002 ; qu'invoquant la nullité du plan social à raison de son insuffisance et celle de son licenciement, il a saisi la juridiction prud'homale de demandes aux fins de réintégration et de paiement de dommages-intérêts ; que l'

arrêt a dit le plan social nul et le licenciement sans cause réelle et séri...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Atis aviation a mis en oeuvre en 2001 une procédure de licenciement collectif pour motif économique avec mise en place d'un plan social ; que M. X..., employé par cette société à compter du 27 août 1999, a été licencié le 4 février 2002 ; qu'invoquant la nullité du plan social à raison de son insuffisance et celle de son licenciement, il a saisi la juridiction prud'homale de demandes aux fins de réintégration et de paiement de dommages-intérêts ; que l'arrêt a dit le plan social nul et le licenciement sans cause réelle et sérieuse, alloué au salarié à ce titre des dommages-intérêts et ordonné le remboursement à l'Assedic des indemnités de chômage ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident de l'employeur, qui est préalable :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen :

1°/ que le juge doit apprécier la pertinence du plan de sauvegarde de l'emploi en fonction des moyens dont disposait effectivement l'entreprise pour maintenir les emplois ou faciliter le reclassement ; qu'il doit à ce titre prendre en considération l'ensemble des mesures prévues dans le plan en vue d'éviter les licenciements et sinon de faciliter le reclassement des salariés ; qu'en l'espèce, il ressortait des constatations mêmes des juges du fond qu'outre la cellule de reclassement interne, le plan prévoyait la création d'un espace info-accueil ; que les mentions expresses du plan révélaient que cet espace info-accueil, auquel devait être exclusivement affecté un salarié, avait notamment pour objet d'assurer l'interface avec la DRH pour l'aide aux mutations internes, comme telles destinées, dans les limites des possibilités de l'entreprise, à éviter les licenciements ; qu'était également prévue dans le plan de reclassement une « aide aux formations spécifiques » destinée à « permettre le maintien dans l'emploi des salariés menacés de licenciement en favorisant leur reconversion professionnelle » ; qu'en affirmant pourtant l'insuffisance du plan au seul prétexte que la cellule de reclassement par ailleurs prévue par le plan ne devait quant à elle fonctionner qu'après la notification des licenciements, sans aucunement prendre en considération les mesures précitées du plan, ni donc rechercher dans quelle mesure, au regard des moyens dont disposait l'entreprise, elles n'étaient pas suffisantes à justifier la pertinence du plan concernant l'objectif de maintien de l'emploi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 321-4-1 du code du travail ;

2°/ que le juge doit apprécier la pertinence du plan de sauvegarde de l'emploi en fonction des moyens dont dispose effectivement l'entreprise pour maintenir les emplois ou faciliter le reclassement ; que s'agissant de la mise en place d'une cellule de reclassement, le juge ne saurait donc inférer l'insuffisance du plan du seul fait que cette cellule est tournée vers le reclassement des salariés licenciés, et non pas vers la prévention des licenciements, sans rechercher dans quelle mesure les moyens de l'entreprise rendaient concrètement possible, à côté des autres mesures prévues par le plan en vue du maintien de l'emploi, le fonctionnement de la cellule de reclassement en vue d'éviter les licenciements ; qu'en l'espèce, en se bornant, pour retenir une prétendue insuffisance du plan de reclassement, à relever que la cellule de reclassement interne ne devait entrer en fonction qu'à compter de la notification des licenciements, et que toutes les démarches de cette cellule en direction de M. X... étaient postérieures à la notification de la rupture, sans aucunement rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, dans quelle mesure, au moment de l'élaboration du plan, eu égard à la faiblesse voire à l'inexistence des possibilités de reclassement de nature à éviter les licenciements, l'employeur, dont le plan avait par ailleurs prévu des mesures en vue du maintien de l'emploi, ne pouvait pas légitimement concentrer l'intervention de la cellule de reclassement sur les salariés qui auraient fait l'objet d'un licenciement, la cour d'appel a derechef privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 321-4-1 du code du travail ;

3°/ que le juge doit apprécier la pertinence du plan de sauvegarde de l'emploi en fonction des moyens dont dispose effectivement et concrètement l'entreprise, notamment en fonction des possibilités qui auraient réellement existé au sein du groupe ; qu'à cet égard, le périmètre dans lequel des mesures de reclassement doivent être prévues est limité aux entreprises dont l'activité, l'organisation ou le lieu d'exploitation leur permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel ; qu'en l'espèce, (la société) avait souligné devant les juges du fond qu'aucun reclassement n'était envisageable au sein des autres entreprises du groupe Penauille, assumant une activité de nettoyage, et n'ayant aucunement les mêmes activités de maintenance et de services techniques que la société exposante ; qu'en se bornant à relever, de manière inopérante, d'une part, que le plan ne contenait pas l'indication des entreprises du groupe susceptibles d'entrer dans le périmètre du reclassement, d'autre part, qu'un seul salarié, en l'occurrence M. X..., avait été mis à disposition, en 2000, au sein d'une seule société, la société GSA, quand ces éléments n'étaient pas susceptibles de caractériser une prétendue permutabilité du personnel au sein de l'ensemble de la branche aéroportuaire du groupe Penauille, ni donc une insuffisance du plan à ce titre, la cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 321-4-1 du code du travail ;

4°/ que, s'agissant de la société GSA, (la société Atis Aviation) avait mis en avant le fait que tout reclassement était rigoureusement impossible en son sein, cette entreprise connaissant elle-même des difficultés économiques aussi lourdes que celles ayant amené l'exposante à mettre en place un plan social ; qu'en se bornant cependant, pour retenir à tort la prétendue insuffisance du plan de reclassement, à relever que M. X... avait été mis à disposition de la société GSA en 2000, ce qui aurait démontré les possibilités de permutation du personnel au sein de la branche aéroportuaire du groupe Penauille, sans caractériser ni même rechercher dans quelle mesure un reclassement dans cette entreprise, y compris du salarié mis à sa disposition, n'était pas impossible au moment de l'élaboration du plan, la cour d'appel a une fois encore privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 321-4-1 du code du travail ;

Mais attendu que l'employeur, tenu de mettre en oeuvre dans le plan social présenté au comité d'entreprise toutes les mesures possibles appréciées en fonction des moyens dont dispose l'entreprise ou le groupe auquel elle est intégrée, pour maintenir les emplois et faciliter le reclassement du personnel dont le licenciement ne pourrait être évité, doit rechercher les possibilités de reclassement tant dans l'entreprise concernée que dans le groupe dont elle fait partie parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel ;

Et attendu que la cour d'appel, appréciant souverainement les éléments de preuve qui lui étaient soumis, a retenu que le plan social ne contenait pas l'indication des entreprises du groupe susceptibles d'entrer dans le périmètre de reclassement interne et qu'il existait des possibilités de permutation du personnel au sein de la branche aéroportuaire du groupe ; qu'en l'état de ces constatations, elle a pu décider que ce plan ne satisfaisait pas aux exigences de l'article L. 321-4-1 du code du travail ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le moyen unique du pourvoi principal du salarié :

Vu les articles L.122-14-4, alinéa 2, et L. 321-4-1, alinéa 5, du code du travail, dans leur rédaction issue de la loi du 17 janvier 2002 ;

Attendu que pour débouter le salarié de sa demande de réintégration, l'arrêt retient qu'il résulte de la décision du Conseil constitutionnel du 12 janvier 2002 que la nullité d'un licenciement consécutif à un plan de sauvegarde de l'emploi n'est encourue que dans l'hypothèse d'une absence de plan ;

Qu'en statuant ainsi, en faisant une interprétation erronée de la décision du Conseil constitutionnel, alors que l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi au regard des exigences de l'article L. 321-4-1 du code du travail entraîne la nullité de la procédure de licenciement et des licenciements prononcés par l'employeur, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, excepté en ses dispositions relatives au rappel de salaire, l'arrêt rendu le 15 septembre 2006, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, sur les autres points restant en litige, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;

Condamne la société Atis Aviation aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, condamne la société Atis Aviation à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente janvier deux mille huit.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 06-45503
Date de la décision : 30/01/2008
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 15 septembre 2006


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 30 jan. 2008, pourvoi n°06-45503


Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp (président)
Avocat(s) : Me Blondel, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:06.45503
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