La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/12/2007 | FRANCE | N°07-80177

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 12 décembre 2007, 07-80177


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

-

X... Gaston,

contre l'arrêt de la cour d'appel de TOULOUSE, chambre correctionnelle, en date du 6 décembre 2006, qui, pour atteinte à la liberté d'accès et à l'égalité des candidats dans les marchés publics, l'a condamné à 5 000 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 121-3,122-3 et 432-14 du code pénal,254 et 298 anciens du

code des marchés publics, L. 1411-1 du code général des collectivités territoriales,591 et 593 du...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

-

X... Gaston,

contre l'arrêt de la cour d'appel de TOULOUSE, chambre correctionnelle, en date du 6 décembre 2006, qui, pour atteinte à la liberté d'accès et à l'égalité des candidats dans les marchés publics, l'a condamné à 5 000 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 121-3,122-3 et 432-14 du code pénal,254 et 298 anciens du code des marchés publics, L. 1411-1 du code général des collectivités territoriales,591 et 593 du code de procédure pénale ;

" en ce que la cour d'appel de Toulouse a déclaré Gaston X... coupable d'atteinte à la liberté d'accès ou à l'égalité des candidats dans les marchés publics ;

" aux motifs propres que contrairement à ce que soutient Gaston X..., le choix de l'entreprise IPSI a bien été effectué par la commission d'appel d'offres ; qu'en effet que l'article 298 du code des marchés publics en vigueur au moment des faits (et jusqu'au 9 septembre 2001) énonçait : « dès que la commission a fait son choix ; l'autorité habilitée à passer le marché avise tous les autres candidats du rejet de leurs offres. Cette autorité communique à tout candidat qui en fait la demande par écrit les motifs du rejet de son offre. Elle peut, en accord avec l'entreprise retenue, procéder à une mise au point du marché sans que les modifications entraînées puissent remettre en cause les conditions de l'appel à la concurrence ayant pu avoir un effet sur les offres. La commission déclare l'appel d'offres infructueux si elle n'a pas obtenu de propositions qui lui paraissent acceptables.L'appel d'offres est alors déclaré infructueux et l'autorité mentionnée au premier alinéa en avise tous les candidats. Il est alors procédé soit à un nouvel appel d'offres, soit à un marché négocié, en application du 2° du I de l'article 104. La collectivité ou l'établissement concerné peut aussi ne pas donner suite à l'appel d'offres pour des motifs d'intérêt général. Le rapport de la commission est transmis au représentant de l'État en même temps que les pièces nécessaires à l'exercice de son contrôle » ; que la procédure créée par ce texte indique clairement que le choix de la commission est considéré comme effectué avant que les candidats soient avisés et que le rapport de la commission soit transmis au représentant de l'État et non après ; que tel est d'ailleurs encore le cas dans l'article 59 du nouveau code des marchés publics qui est le texte aujourd'hui en vigueur ; qu'en l'espèce, le choix de l'entreprise IPSI a bien été fait lors de la réunion de la commission du 15 mai 2000 et il importe peu à cet égard que ce choix n'ait pas été porté à la connaissance des candidats ni transmis au préfet ; qu'il est vrai que, en son aliéna trois, l'article 298 susvisé prévoit la possibilité de ne pas donner suite à l'appel d'offre « pour des motifs d'intérêt général » ; que la rédaction de cet article ouvre trois possibilités à la commission qui sont, soit de choisir un candidat, soit de déclarer l'appel d'offre infructueux, soit de ne pas y donner suite pour des motifs d'intérêt général ; que cette troisième option qui n'est qu'une alternative aux deux premières n'est plus ouverte lorsque le choix a été fait ; qu'il en va différemment aujourd'hui puisque l'article 59 du nouveau code des marchés publics élargit la période de temps au cours de laquelle il peut ne pas être donné suite en énonçant « à tout moment, la procédure peut être déclarée sans suite pour des motifs d'intérêt général » ; que, même si l'on avait considéré que l'article 298 en vigueur au moment des faits permettait, lui aussi, de déclarer la procédure sans suite à tout moment l'infraction serait néanmoins constituée ; qu'en effet le motif d'intérêt général qui serait susceptible d'ouvrir la faculté de ne pas donner suite doit avoir un caractère sérieux ce qui n'est pas le cas en l'espèce ; en l'espèce qu'après avoir recueilli verbalement des réserves sur la fiabilité de l'entreprise IPSI, la mairie de Cazères a sollicité des avis écrits ; que les renseignements recueillis verbalement ne peuvent ici être pris en compte faute de preuve ; que les courriers sur lesquels s'appuie Gaston X... pour tenter de justifier la décision de ne pas donner suite ne font état que de critiques mineures sur l'entreprise IPSI (…) ; que ces critiques ne peuvent être considérées comme ayant un caractère de gravité suffisant pour revenir sur un choix déjà réalisé alors que Gérard Y... produit aux débats plusieurs attestations de satisfaction de clients adressées soit à lui-même soit à l'entreprise IPSI ; qu'il a été établi dans la procédure que, dans le nouvel appel d'offre lancé au mois d'octobre, il a été inclus une nouvelle condition tenant à des références relatives à la réalisation d'une salle d'au moins 200 places et que cette condition n'avait d'autre but que d'écarter l'entreprise IPSI ; qu'en conséquence, en décidant de ne pas donner suite à l'appel d'offre en dehors des conditions prévues par la loi et en lançant un nouvel appel d'offres destiné à écarter une entreprise au profit d'une autre, Gaston X... s'est rendu coupable de l'infraction qui lui est reprochée ;

" et aux motifs adoptés que Gaston X... a contesté dans ses premières déclarations le fait que l'entreprise IPSI ait été choisie le 15 mai par la commission ; que les enquêteurs ont dû lui présenter le procès-verbal de la réunion du mai 2000 qu'il avait lui-même signé pour qu'il admette que l'entrepris IPSI avait bien été retenue par la commission ; que de plus, Gaston X... a signé le 22 mai 2000 l'acte d'engagement de la commune ; qu'il a dû concéder à l'audience que ce document saisi dans le dossier se trouvant à la sous-préfecture avait donc bien été expédié ; que cet acte d'engagement signé du maire et de Gérard Y... est un document contractuel qui engageait les parties ; que Gaston X... a reconnu que s'il ne s'était pas rendu au conseil général le 15 mai 2000 ou s'il n'avait pas rencontré M.Z... il n'aurait jamais demandé à Jean-Pierre A... de faire des investigations complémentaires et le choix de IPSI n'aurait pas été remis en cause ; qu'il résulte de la procédure que Gaston X... a postérieurement à la décision de la commission et même postérieurement à la signature de l'acte d'engagement recherché des témoignages de personnes ayant travaillé avec l'entreprise IPSI et n'étant pas satisfait des ses services afin de convaincre les membres de la commission de revenir sur leur choix ; que les membres de la commission reconnaissent que le but était d'écarter la société IPSI ; que Gaston X... a pris la décision de revenir sur le choix de la société IPSI en pleine connaissance de cause ; qu'en effet M. B... de la DGCCRF l'a informé de l'impossibilité de revenir sur la décision prise, sauf à renoncer à l'intégralité du marché, ce qui, en l'espèce, au vu de l'avancée des travaux, était inconcevable ; que bien que parfaitement renseigné Gaston X... a persévéré dans ses intentions d'écarter l'entreprise IPSI ; qu'il sera donc déclaré coupable des faits qui lui sont reprochés ;

" alors que, d'une part, il résulte des articles 254 et 298 anciens du code des marchés publics que l'autorité compétente de la collectivité territoriale n'a pas l'obligation, mais simplement la faculté, de donner suite à l'appel d'offres tant que l'acte d'engagement n'a pas été signé et notifié au soumissionnaire retenu par la commission ; qu'en affirmant que Gaston X... avait commis un acte contraire aux dispositions législatives et règlementaires relatives à l'accès aux marchés publics en ne donnant pas suite à l'appel d'offres, lorsqu'elle constatait que le choix n'avait pas été porté à la connaissance de la société IPSI, candidat retenu, ni à celle des autres candidats, la cour d'appel s'est prononcée au prix de motifs contradictoires ;

" alors que, d'autre part, la continuité du service public relève de l'intérêt général ; qu'en application de l'article 298 ancien du code des marchés publics, applicable au moment des faits, Gaston X... faisait valoir les risques que la société IPSI, dont les insuffisances étaient largement démontrées, ne puisse assurer cette continuité ; qu'en affirmant cependant que ce motif ne relevait pas de l'intérêt général, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée du principe susvisé ;

" alors qu'enfin, l'erreur invincible sur le droit peut résulter de l'information erronée donnée par l'administration au prévenu ; qu'ainsi, la cour d'appel ne pouvait déclarer Gaston X... coupable de l'infraction reprochée sans répondre au moyen péremptoire de défense qu'il développait et de nature à l'exonérer de sa responsabilité pénale, selon lequel la décision de ne pas donner suite à l'appel d'offres pour des motifs d'intérêt général n'avait été prise qu'après avis de la direction départementale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes " ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que, le 15 mai 2000, la commission d'appel d'offres de la commune de Cazères, dont Gaston X... était le maire, a attribué le marché d'équipement scénique d'une salle communale à l'entreprise IPSI, choisie parmi d'autres candidats dont la société Decipro ; qu'avant notification dudit marché, dont l'acte d'engagement était signé le 22 mai 2000, le conseil municipal de cette localité a décidé de ne pas donner suite à cette procédure, " pour des motifs d'intérêt général ", dont Gaston X... justifiait, sur demande du préfet, par la production de lettres datées du 19 juin 2000 émanant de clients de la société IPSI exprimant leur mécontentement des prestations de cette dernière ; qu'après annulation d'une seconde procédure d'appel d'offres, le marché a été attribué à la société Decipro, à l'issue d'un troisième appel d'offres, dont le règlement de la consultation était modifié ;

Attendu que, pour déclarer Gaston X... coupable de favoritisme, l'arrêt énonce notamment que les lettres sur lesquelles s'appuie le prévenu pour justifier la décision de ne pas donner suite à la première procédure d'appel d'offres ne font état que de critiques mineures sur l'entreprise IPSI ; que les juges ajoutent que la modification du règlement de la consultation n'avait d'autre but que d'écarter cette entreprise ; qu'ils en concluent que le prévenu, en décidant de ne pas donner suite à l'appel d'offre initial en dehors des conditions prévues par la loi et en lançant un nouvel appel d'offres destiné à écarter une entreprise au profit d'une autre, s'est rendu coupable de favoritisme ;

Attendu qu'en l'état de ces seules énonciations, procédant de son pouvoir souverain d'appréciation, la cour d'appel a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen, qui, pris en sa troisième branche, est nouveau et mélangé de fait et comme tel, irrecevable, doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Cotte président, Mme Labrousse conseiller rapporteur, M. Dulin conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Randouin ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 07-80177
Date de la décision : 12/12/2007
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 06 décembre 2006


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 12 déc. 2007, pourvoi n°07-80177


Composition du Tribunal
Président : M. Cotte (président)
Avocat(s) : Me Spinosi

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2007:07.80177
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award