Vu leur connexité joint les pourvois 05-44.337 et 05-44.743 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la chambre de commerce et d'industrie du Var (CCIV), qui a repris l'exploitation d'un plan d'eau portuaire auparavant concédée à la société Méditerranée plaisance, a poursuivi, à compter du 4 novembre 1998, le contrat de travail de M. X..., salarié de cette société, à temps partiel, pour la seule activité de gestion du plan d'eau en rapport avec ses fonctions de maître de port ; que l'intéressé a été licencié par la CCIV le 9 avril 1999 ; que l'activité de construction navale ayant été poursuivie par la société Méditerranée plaisance jusqu'au 10 avril 2000, où l'ensemble des installations portuaires ont été restituées à la chambre de commerce, M. X... a alors vainement demandé à cette dernière de poursuivre le contrat de directeur technique se rapportant à cette activité, puis a saisi le conseil de prud'hommes de demandes en paiement de dommages-intérêts et de salaires ;
Sur le premier moyen du pourvoi de la CCIV qui est préalable :
Attendu que la CCIV fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté l'exception d'incompétence qu'elle avait soulevée au profit de la juridiction administrative alors, selon le moyen, que les personnels non statutaires travaillant pour le compte d'un service public à caractère administratif sont des agents contractuels de droit public, quel que soit leur emploi ; qu'il s'ensuit qu'en l'état du droit applicable antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du 26 juillet 2005, en cas de reprise par une personne publique d'une entité économique, les contrats de travail transférés en application de l'article L. 122-12 du code du travail ne demeurent provisoirement des contrats de droit privé que tant que n'a pas été mis en oeuvre à l'égard des salariés concernés un régime de droit public ; qu'est nécessairement soumis à régime de droit public l'agent d'une personne publique qui, exerçant des fonctions de police, est investi de prérogatives de puissance publique ; que dès lors, M. X..., dont le contrat de travail avait été repris par la CCIV était lié à celle-ci par un contrat de droit public dont il n'appartenait qu'à la juridiction administrative de connaître ; qu'en considérant au contraire, pour retenir la compétence de la juridiction judiciaire, que le seul fait que l'intéressé eût la qualité de maître de port, dont elle n'a pas contesté qu'elle impliquait l'exercice de pouvoirs de police, ne suffisait pas à lui conférer le statut d'agent public, la cour d'appel a violé le principe de la séparation des pouvoirs, ensemble la loi des 16-24 août 1790 qui le consacre ;
Mais attendu que si les dispositions de l'article L. 122-12, alinéa 2, du code du travail, interprétées à la lumière de la Directive n° 98/50/CE, imposent le maintien des contrats de travail en cours y compris dans le cas où l'entité économique transférée constitue un service public administratif dont la gestion, jusqu'ici assurée par une personne privée, est reprise par une personne morale de droit public normalement liée à son personnel par des rapports de droit public, elles n'ont pas pour effet de transformer la nature juridique des contrats de travail en cause, qui demeurent des contrats de droit privé tant que le nouvel employeur public n'a pas placé les salariés dans un régime de droit public ; qu'il s'ensuit que le juge judiciaire est seul compétent pour statuer sur les litiges nés de la rupture des contrats de travail, prononcée par la personne morale de droit public dès lors que les salariés n'ont jamais été liés à celle-ci par un rapport de droit public, qui ne mettent en cause que des relations de droit privé ;
Et attendu que la cour d'appel, qui a constaté que le salarié était lié par un contrat de droit privé à son employeur, concessionnaire sortant, peu important les attributions dans le domaine de la police du port, comportant l'exercice de prérogatives de puissance publique, dévolues en sa qualité de "maître de port", et qu'à la suite de la reprise de la concession par la CCIV aucun contrat de droit public n'avait été conclu entre cette dernière et l'intéressé, a légalement justifié ses décisions ;
Sur le second moyen du pourvoi de la CCIV :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi du salarié :
Vu l'article L. 122-12, alinéa 2, du code du travail, interprété à la lumière de la Directive n° 98/50/CE du 29 juin 1998 ;
Attendu que pour débouter M. X... de sa demande fondée sur la poursuite de son contrat de directeur technique à compter du 11 avril 2000, la cour d'appel a retenu qu'après le départ de la société Méditerranée plaisance le 10 avril 2001, il a demandé à la CCIV la reprise de son contrat pour cette partie de son activité et n'a pas reçu de réponse, mais qu'étant déjà à cette époque licencié pour la partie de l'activité antérieurement reprise, il ne doit pas recevoir un salaire pour la période et le temps d'activité non repris mais être indemnisé de ce qui constitue sur cette partie du contrat de travail un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Attendu, cependant, que s'il survient une modification dans la situation juridique de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification se poursuivent de plein droit avec le nouvel employeur ; qu'il s'ensuit que les salariés relevant de l'entité transférée sont en droit d'exiger la poursuite de leur contrat de travail par le nouvel employeur ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors que M. X... se prévalait des effets de l'article L. 122-12, alinéa 2, du code du travail pour demander à son nouvel employeur le paiement de salaires dus à compter de la reprise de l'entité économique transférée en avril 2000, et alors que le licenciement prononcé en avril 1999 était à cet égard sans portée, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et vu l'article 627 du nouveau code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté M. X... de sa demande tendant à la poursuite de son contrat de travail au sein de la CCIV, l'arrêt rendu le 28 juin 2005, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi sur la poursuite du contrat de travail de directeur technique ;
Dit que le contrat de travail de M. X... s'est poursuivi de plein droit avec la CCIV ;
Renvoie la cause et les parties devant la cour d'appel de Nîmes, mais uniquement pour qu'elle statue sur les points restant en litige ;
Condamne la CCIV aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, condamne la CCIV à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze juin deux mille sept.