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30/05/2007 | FRANCE | N°05-16898

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 30 mai 2007, 05-16898


Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 16 février 2005), que la société Koninklijke Philips electronics NV (la société Philips) a agi en contrefaçon de marques tridimensionnelles dont elle est titulaire, déclinant la forme d'un rasoir électrique à trois têtes circulaires, à l'encontre de la société Remington, devenue la société Rayovac ; qu'elle fait grief à l'arrêt d'avoir annulé la partie française de ces marques internationales, n° 638 663, déposée à l'Organisation mondiale de la propriété industrielle (l'OMPI) le 14 juin 1995, n° R

430 837, déposée à l'OMPI le 14 juin 1977, n° 439 839, déposée à l'OMPI le 14 jui...

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 16 février 2005), que la société Koninklijke Philips electronics NV (la société Philips) a agi en contrefaçon de marques tridimensionnelles dont elle est titulaire, déclinant la forme d'un rasoir électrique à trois têtes circulaires, à l'encontre de la société Remington, devenue la société Rayovac ; qu'elle fait grief à l'arrêt d'avoir annulé la partie française de ces marques internationales, n° 638 663, déposée à l'Organisation mondiale de la propriété industrielle (l'OMPI) le 14 juin 1995, n° R 430 837, déposée à l'OMPI le 14 juin 1977, n° 439 839, déposée à l'OMPI le 14 juin 1997 et renouvelée depuis, n° 430 559, déposée à l'OMPI le 7 août 1978 et renouvelée, n° 430 836, déposée à l'OMPI le 14 juin 1977 et renouvelée, n° 587 254 déposée à l'OMPI le 20 mai 1992, en ce que ces marques désignent les rasoirs, les parties ou accessoires pour les produits précités, y compris les unités de rasage composées de supports avec tête de rasage, les appareils à raser et les tondeuses, et d'avoir en conséquence rejeté son action en contrefaçon, alors, selon le moyen :

1°/ que la Cour de justice des communautés européennes a dit pour droit (arrêt du 18 juin 2002, aff. C 299/99) que, pour être propre à distinguer un produit aux fins de l'article 2 de la Directive 89/104 du Conseil des communautés européennes du 21 décembre 1988, à la lumière de laquelle la loi française doit être appliquée, la forme du produit en considération duquel le signe est enregistré n'exige aucune addition arbitraire, telle qu'une décoration sans but fonctionnel ; qu'en considérant au contraire que les formes constituant les marques de la société Philips ne pouvaient bénéficier de la protection à titre de marque qu'à condition de présenter, outre des éléments fonctionnels, des éléments arbitraires aptes à les distinguer, la cour d'appel a violé l'article L. 711-1 c) du code de la propriété intellectuelle ;

2°/ que la Cour de justice des communautés européennes a dit pour droit, dans la même décision, que l'article 3 1° e) deuxième tiret de la Directive n° 89/104 du Conseil des communautés européennes du 21 décembre 1988, à la lumière de laquelle la loi française doit être appliquée, devait être interprété en ce sens qu'un signe constitué exclusivement par la forme d'un produit n'est pas susceptible d'enregistrement en vertu de cette disposition s'il est démontré que les caractéristiques fonctionnelles et essentielles de cette forme sont attribuables uniquement au résultat technique et que la démonstration de l'existence d'autres formes permettant d'obtenir le même résultat technique n'est pas de nature à écarter le motif de refus ou de nullité d'enregistrement contenu dans ladite disposition ; que pour décider que les formes constituant les marques des sociétés Philips ne pouvaient bénéficier de la protection à titre de marque, la cour d'appel a retenu que les caractéristiques fonctionnelles tenant au choix de trois têtes circulaires, à la configuration triangulaire des trois têtes avec des coins arrondis et à la forme du support des têtes de coupe produisaient un résultat technique ou participaient d'un tel résultat ; qu'en statuant de la sorte sans constater que ces caractéristiques étaient attribuables uniquement au résultat technique, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 711-2 c) du code de la propriété intellectuelle ;

3°/ que pour décider que les formes constituant les marques de la société Philips ne pouvaient bénéficier de la protection à titre de marque, la cour d'appel a considéré que les caractéristiques tenant à la direction vers le bas de la pointe du triangle formé par les trois têtes de rasage, au rebord en relief de la plaque frontale dans les marques n° 430 837 et 430 836, et à la forme trilobée du rebord de la plaque frontale de la marque n° 638 663 étaient exclusivement asservies au résultat technique, à l'exclusion de tout caractère arbitraire et décoratif ; qu'en statuant de la sorte sans rechercher si le choix de ces caractéristiques, fussent-elles assujetties à un résultat technique, ne procédait pas d'autres considérations, de sorte qu'elles ne pouvaient être attribuées uniquement à un résultat technique au sens de l'arrêt de la Cour de justice des communautés européennes, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 711-2 c) du code de la propriété intellectuelle ;

4°/ que le signe constitué d'éléments imposés par la fonction du produit peut être déposé à titre de marque lorsqu'il réalise une combinaison elle-même dépourvue de caractère fonctionnel et technique et revêtue d'un caractère distinctif ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme elle y était invitée, si les éléments dont elle a considéré qu'ils présentaient tous un caractère fonctionnel et technique ne formaient pas une combinaison qui, elle-même dépourvue de caractère fonctionnel et technique, était protégeable à titre de marque, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 711-2 du code de la propriété intellectuelle ;

Mais attendu, en premier lieu, que la cour d'appel n'a pas retenu que les formes constituant les marques de la société Philips ne pouvaient bénéficier de la protection à titre de marque qu'à condition de présenter, outre des éléments fonctionnels, des éléments arbitraires aptes à les distinguer, mais que, dans le cas où une marque complexe est constituée d'une forme imposée par la nature du produit, ainsi que d'éléments arbitraires, elle ne peut échapper à l'exclusion édictée par l'article L. 711-2 c) du code de la propriété intellectuelle que dans la mesure où ces éléments arbitraires revêtent un caractère distinctif permettant l'identification du produit ;

Et attendu, en second lieu, que la Cour de justice des communautés européennes a dit pour droit (arrêt du 18 juin 2002, Philips) que l'article 3, paragraphe 1, sous e), deuxième tiret, de la Directive 89/104 du conseil des Communautés européennes du 21 décembre 1998 doit être interprété en ce sens qu'un signe constitué exclusivement par la forme d'un produit n'est pas susceptible d'enregistrement en vertu de cette disposition s'il est démontré que les caractéristiques fonctionnelles essentielles de cette forme sont attribuables uniquement au résultat technique ; qu'après avoir en conséquence exactement écarté la thèse de la société Philips, selon laquelle il suffirait que les éléments fonctionnels constituant le signe présentent un aspect esthétique pour que ce signe soit susceptible de constituer une marque valable, l'arrêt constate que toutes les caractéristiques des marques revendiquées produisent un résultat technique ou participent d'un tel résultat, et que les marques contestées, en ce qu'elles désignent des rasoirs électriques, parties et accessoires pour les produits précités, y compris les unités de rasage composées de supports avec tête de rasage, les appareils à raser et les tondeuses, sont donc constituées exclusivement de caractéristiques de forme imposées par la fonction des produits ; qu'en l'état de ces énonciations et appréciations, dont il résulte que les formes déposées en tant que marques étaient attribuables uniquement au résultat technique, peu important que d'autres raisons aient pu intervenir dans le choix qui en a été fait parmi d'autres solutions techniques possibles, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder aux recherches inopérantes visées aux deux dernières branches du moyen, a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en sa première branche, n'est pas fondé en ses autres branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Koninklijke Philips electronics NV aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, la condamne à payer à la société Rayovac la somme de 2 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trente mai deux mille sept.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 05-16898
Date de la décision : 30/05/2007
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

COMMUNAUTE EUROPEENNE - Marque - Directive n° 89/104 - Article 3 § 1 e deuxième tiret - Motifs de refus d'enregistrement - Signes susceptibles de constituer unemarque - Signes constitués exclusivement par la forme d'un produit - Conditions - Détermination

La Cour de justice des Communautés européennes ayant dit pour droit (arrêt du 18 juin 2002, Philips) que l'article 3, paragraphe 1, sous e), deuxième tiret, de la Directive 89/104 CEE doit être interprété en ce sens qu'un signe constitué exclusivement par la forme d'un produit n'est pas susceptible d'enregistrement en vertu de cette disposition s'il est démontré que les caractéristiques fonctionnelles essentielles de cette forme sont attribuables uniquement au résultat technique, la cour d'appel qui constate que toutes les caractéristiques des marques revendiquées produisent un résultat technique ou participent d'un tel résultat, et que les marques contestées sont donc constituées exclusivement de caractéristiques de forme imposées par la fonction des produits, ce dont il suit que les formes déposées en tant que marques étaient attribuables uniquement au résultat technique, peu important que d'autres raisons aient pu intervenir dans le choix qui en a été fait parmi d'autres solutions techniques possibles, justifie ainsi sa décision d'annuler ces marques


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 16 février 2005


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 30 mai. 2007, pourvoi n°05-16898, Bull. civ. 2007, IV, N° 145
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2007, IV, N° 145

Composition du Tribunal
Président : M. Tricot
Avocat général : M. Main
Rapporteur ?: M. Sémériva
Avocat(s) : Me Bertrand, SCP Thomas-Raquin et Bénabent

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2007:05.16898
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