N° 2198
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le trois avril deux mille sept, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller GUIRIMAND, les observations de Me JACOUPY, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LAUNAY ;
CASSATION SANS RENVOI sur le pourvoi formé par Y... Jean-Claude, contre l'arrêt de la cour d'appel de Toulouse, chambre correctionnelle, en date du 19 juin 2006 qui, pour entrave à l'exercice du droit syndical, l'a condamné à 800 euros d'amende et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu le mémoire et les observations complémentaires produits ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 5,591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception d'irrecevabilité de l'action de Bernard X... fondée sur l'article 5 du code de procédure pénale ;
" aux motifs que Jean-Claude Y... soutient qu'avant de saisir la juridiction pénale, Bernard X... avait saisi, le 2 juin 2004, le conseil de prud'hommes de Toulouse, d'une action à fin indemnitaire pour entrave aux fonctions syndicales et harcèlement moral ; que les deux actions ayant le même objet, la même cause et opposant les mêmes parties, le juge pénal, saisi en second, doit déclarer l'action publique irrecevable ; pour écarter cette argumentation, il suffira de relever que les deux actions n'opposent pas les mêmes parties ; qu'en effet devant le conseil de prud'hommes de Toulouse, Bernard X... a dirigé son action contre son employeur, la société Groupe Y..., alors que devant la juridiction répressive il a dirigé son action contre Jean-Claude Y... personnellement ;
" alors que Jean-Claude Y..., poursuivi pour délit d'entrave, avait été nécessairement cité en sa qualité de président-directeur général de la société Groupe Y..., et non personnellement, de sorte qu'il y avait bien identité de parties entre l'instance civile et l'instance pénale " ;
Vu l'article 5 du code de procédure pénale ;
Attendu que, selon les dispositions de ce texte, la partie qui a exercé son action devant la juridiction civile compétente, ne peut la porter devant la juridiction répressive ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que, par acte en date du 23 juillet 2004, Bernard X..., qui avait été désigné délégué syndical de la société Groupe Y... au mois de février 2004, a fait citer devant le tribunal correctionnel Jean-Claude Y..., président de la société, des chefs d'entraves, de discrimination syndicale et d'harcèlement moral ;
Attendu que le prévenu, avant tout débat au fond, a fait valoir que l'action pénale engagée était irrecevable au regard des dispositions de l'article 5 du code de procédure pénale, la partie civile ayant, le 2 juin 2004, saisi le conseil de prud'hommes d'une demande indemnitaire pour les mêmes faits d'entrave, de discrimination syndicale et d'harcèlement moral ; que, pour rejeter cette exception, l'arrêt énonce que les deux actions n'opposent pas les mêmes parties en relevant que Bernard X... a dirigé son action prud'homale contre la société Groupe Y..., son employeur, et que, par ailleurs, il a poursuivi Jean-Claude Y..., personnellement, devant la juridiction répressive ;
Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, alors que les deux actions avaient le même objet et la même cause et visaient les mêmes parties, Jean-Claude Y... étant poursuivi devant la juridiction répressive en sa qualité de président de la société Groupe Y..., la cour d'appel a méconnu le sens et la portée du texte susvisé ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu d'examiner le second moyen de cassation proposé :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt de la cour d'appel de Toulouse, en date du 19 juin 2006 ;
Et attendu que ni l'action publique ni l'action civile ne pouvant être exercées en raison de l'irrecevabilité de la constitution de partie civile, il ne reste rien à juger ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Toulouse, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Joly conseiller doyen, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, Mme Guirimand conseiller rapporteur, Mme Anzani, M. Beyer, Mme Palisse, MM. Beauvais, Guérin, Bayet conseillers de la chambre, M. Valat, Mmes Ménotti, Lazerges conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Launay ;
Greffier de chambre : Mme Daudé ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;