Donne acte au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie de sa renonciation à défendre au pourvoi et de son désistement de sa demande fondée sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 31 janvier 2006), rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 12 juillet 2005, Bull. n° 163), que la société Messageries lyonnaises de presse (les MLP) a saisi le Conseil de la concurrence (le Conseil) de pratiques mises en oeuvre par la société Nouvelles messageries de la presse parisienne (les NMPP) et la Société auxiliaire pour l'exploitation des messageries transports de presse (la SAEM-TP) qui abuseraient de la position dominante conjointe qu'elles détiendraient sur le marché de la distribution de la presse au numéro, d'une part en lui refusant un accès direct au tronc commun du logiciel Presse 2000 mis en place par les NMPP, logiciel qui sert aux dépositaires pour le suivi de la distribution de la presse par les marchands de journaux et dont le tronc commun est utilisé par les trois messageries de presse, d'autre part en pratiquant certaines conditions tarifaires ; que les MLP ont sollicité le prononcé de mesures conservatoires ; que par décision n° 03-MC-04 du 22 décembre 2003, le Conseil a, dans l'attente de la décision au fond, notamment, fait injonction aux NMPP "d'accorder aux MLP un accès direct au tronc commun du logiciel Presse 2000 dans des conditions économiques équitables en mettant en place - pour chaque dépôt qui le souhaiterait et selon des modalités qui devront faire l'objet d'un accord entre les parties concernées - un transfert automatique de fichiers entre le système informatique des MLP, TID ou équivalent, et Presse 2000" ; que les NMPP ont saisi la cour d'appel d'un recours en annulation ou en réformation ;
Attendu que la société MLP fait grief à l'arrêt d'avoir annulé la décision du Conseil en ce qu'elle a enjoint aux NMPP de leur accorder un accès direct au tronc commun du logiciel Presse 2000, alors, selon le moyen :
1°/ que des mesures conservatoires peuvent être décidées par le Conseil dans les limites de ce qui est justifié par l'urgence en cas d'atteinte grave et immédiate à l'économie générale, à celle du secteur intéressé, à l'intérêt des consommateurs ou à l'entreprise plaignante, dès lors que les faits dénoncés et visés par l'instruction dans la procédure au fond, apparaissent susceptibles en l'état des éléments produits aux débats de constituer une pratique contraire aux articles L. 420-1 et L. 420-2 du code de commerce, pratique à l'origine directe et certaine de l'atteinte relevée ; qu'il s'ensuit que le prononcé de mesures conservatoires n'est subordonné ni à la constatation préalable d'une infraction, ni même à celle d'une présomption d'infraction ; qu'en exigeant de la société MLP qu'elle démontre au stade des mesures conservatoires que le refus exprimé par les NMPP constituerait un abus de position dominante et que le tronc commun du logiciel Presse 2000 serait une infrastructure essentielle indispensable à son activité, la cour de renvoi qui a subordonné le prononcé d'une mesure conservatoire à la constatation d'un abus de position dominante a violé l'article L. 464-1 du code de commerce ;
2°/ que devant la cour d'appel de renvoi, le Conseil a fait valoir qu'en l'état de la procédure, seule l'instruction au fond de l'affaire permettra de trancher la question du caractère d'infrastructure essentielle ou non du tronc commun du logiciel Presse 2000 ; qu'en subordonnant le prononcé d'une mesure conservatoire à la preuve de l'existence d'une infrastructure essentielle de nature à démontrer que le refus d'accès au tronc commun du logiciel Presse 2000 exprimé par les NMPP constituerait un abus de position dominante, la cour d'appel a derechef violé l'article L. 464-1 du code de commerce ;
3°/ que des mesures conservatoires peuvent être décidées par le Conseil en cas d'atteinte grave et immédiate, non seulement à l'entreprise plaignante, mais aussi à l'économie générale, à celle du secteur intéressé ou à l'intérêt des consommateurs ; qu'en se bornant à apprécier le bien-fondé de la mesure conservatoire en cause d'après la situation de la seule entreprise plaignante, sans examiner comme elle y avait été invitée, si la pratique mise en oeuvre par la société NMPP ne portait pas une atteinte grave et immédiate à l'ensemble du secteur intéressé, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 464-1 du code de commerce ;
4°/ que les décisions rendues par le Conseil sont des décisions administratives dont la légalité s'apprécie par rapport aux éléments de fait et de droit prévalant à la date à laquelle elle a été prise ; que dès lors, en se fondant, pour annuler partiellement la décision du 22 décembre 2003 du Conseil ayant prononcé des mesures conservatoires à l'encontre de la société NMPP sur des éléments de fait postérieurs à celle-ci, la cour d'appel a violé les articles L. 464-1 et L. 464-7 du code de commerce ;
5°/ que la société MLP avait subsidiairement fait valoir qu'à supposer même que la cour de Paris considère que le tronc commun du logiciel Presse 2000 ne constitue pas une infrastructure essentielle, la société NMPP avait néanmoins commis un abus de position dominante sur un marché distinct mais connexe de celui de la vente de presse au numéro, à savoir celui des outils informatiques de gestion des flux destinés aux dépositaires de presse en refusant à la société MLP d'accéder au logiciel Presse 2000, afin de limiter sa compétitivité sur le marché de la distribution de la presse au numéro ; qu'en se bornant à déduire que le refus de contracter des NMPP ne saurait constituer un abus de position dominante des seuls motifs l'ayant conduit à exclure que le tronc commun du logiciel Presse 2000 puisse être qualifié d'infrastructure essentielle, sans répondre aux écritures susvisées établissant que le refus de contracter pouvait constituer un abus de position dominante indépendamment de toute appréciation portée sur l'existence d'une infrastructure essentielle, la cour de renvoi a violé l'article 455 du nouveau code de procédure civile ;
Mais attendu que, pour annuler la décision du Conseil en ce qu'elle a enjoint aux NMPP à titre conservatoire d'accorder aux MLP un accès direct au tronc commun du logiciel Presse 2000, l'arrêt relève que les MLP, qui avaient admis devant le Conseil être en mesure matériellement et financièrement de concevoir un logiciel équivalent à Presse 2000, ne justifient pas du fait que les dépositaires seraient opposés à la réalisation d'un logiciel dédié aux MLP, le président du syndicat national des dépositaires de presse ayant, au contraire, précisé le 8 janvier 2004 que les dépositaires travaillaient au sein d'une commission spéciale à la mise en place d'un nouvel outil informatique par les MLP ; qu'il retient que les MLP ne sont pas actuellement confrontées à des "difficultés déraisonnables" pour exercer leurs activités car les saisies manuelles auxquelles procèdent les dépositaires permettent d'assurer le transfert de données entre les logiciels MLP et le tronc commun du logiciel Presse 2000 ; qu'il ajoute que, contrairement à ce qui est soutenu, le défaut d'accès direct au tronc commun de ce logiciel ne compromet pas la situation des MLP dont les produits d'exploitation n'ont subi aucune dégradation au cours des dernières années ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel, qui a, à juste titre, tenu compte de l'ensemble des éléments de preuve qui lui étaient soumis, fussent-ils postérieurs à la décision du Conseil, et qui a fait ressortir qu'en l'absence actuelle d'un logiciel dédié aux MLP, le refus d'accès direct au tronc commun du logiciel Presse 2000 opposé par les NMPP aux MLP n'était pas à l'origine directe et certaine d'une atteinte grave et immédiate à l'intérêt des MLP ou au secteur intéressé, a pu statuer comme elle a fait et a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Messageries lyonnaises de presse aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt février deux mille sept.