La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/02/2007 | FRANCE | N°05-13051

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 20 février 2007, 05-13051


Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 15 décembre 2004), que la société SEPM est titulaire d'un brevet 78/00840 portant sur "un dispositif de retenue d'une tige ou d'un câble par serrage à blocage élastique pouvant constituer notamment une borne électrique", ainsi que d'un brevet 87/16574 portant sur "une prise de courant à contacts à pression", dont elle a confié l'exploitation sous licence à la société Maréchal ; qu'estimant que des produits mis sur le marché par la société Proconect, sous une appellation proche de la marque utilisée par la société Maréchal, mettaient

en oeuvre l'invention couverte par ces brevets, et copiaient, hors to...

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 15 décembre 2004), que la société SEPM est titulaire d'un brevet 78/00840 portant sur "un dispositif de retenue d'une tige ou d'un câble par serrage à blocage élastique pouvant constituer notamment une borne électrique", ainsi que d'un brevet 87/16574 portant sur "une prise de courant à contacts à pression", dont elle a confié l'exploitation sous licence à la société Maréchal ; qu'estimant que des produits mis sur le marché par la société Proconect, sous une appellation proche de la marque utilisée par la société Maréchal, mettaient en oeuvre l'invention couverte par ces brevets, et copiaient, hors toute nécessité technique, les caractéristiques de leurs propres produits, les sociétés Maréchal et SEPM ont agi à son encontre en contrefaçon de brevet et concurrence déloyale ;
Sur le premier moyen :
Attendu que ces sociétés font grief à l'arrêt d'avoir déclaré irrecevable leur action en contrefaçon sur le fondement de la revendication n° 5 du brevet 87/16574, alors, selon le moyen, que ne sont pas nouvelles les prétentions qui tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent ; que l'action des sociétés SEPM et Maréchal avait devant la cour d'appel la même finalité que devant le tribunal de grande instance, à savoir voir sanctionner la contrefaçon du brevet 87/16574 ; qu'en déclarant cette demande irrecevable, en ce qu'elle était fondée sur la violation de la revendication n° 5, qui n'avait pas été invoquée devant les premiers juges, la cour d'appel a violé l'article 565 du nouveau code de procédure civile ;
Mais attendu que les prétentions fondées sur des revendications différentes d'un même brevet ne tendant pas aux mêmes fins, dès lors que chacune de ces revendications définit l'étendue de la protection qui lui est attachée, la cour d'appel a exactement décidé que, faute d'avoir été formulée devant le premier juge, la demande fondée sur la revendication n° 5 du brevet n° 87/16574 ne pouvait lui être soumise ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que les sociétés SEPM et Maréchal font encore grief à l'arrêt d'avoir rejeté leur action en concurrence déloyale et annulé la marque "Décontacteur", alors, selon le moyen, que l'utilisation d'une dénomination commerciale évoquant celle d'un concurrent, peut, en l'absence même de droit privatif résultant d'un enregistrement en tant que marque, constituer un acte de parasitisme, sanctionné sur le fondement des articles 1382 et 1383 du code civil ; que les sociétés Maréchal et SEPM faisaient valoir que l'utilisation par la société Proconect de la dénomination commerciale "Décontactor", quand elles-mêmes s'étaient fait connaître depuis 1960 sous la dénomination "Décontacteur", pour désigner des produits similaires, constituait un acte de concurrence déloyale ; que pour débouter les sociétés Maréchal et SEPM de leur demande, la cour d'appel a énoncé que le terme "Décontacteur" était générique et descriptif ; qu'en se prononçant ainsi par des motifs, tirés du droit des marques, inopérants au regard de la concurrence déloyale invoquée, la cour d'appel, qui n'a pas recherché s'il résultait de l'utilisation par la société Proconect de la dénomination "Décontactor" un risque de confusion avec les produits des sociétés Maréchal et SEPM, a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382 et 1383 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant écarté la thèse selon laquelle "la profession identifie sous le terme de décontacteur les prises de la société Maréchal", pour retenir au contraire que ce terme était nécessaire à la désignation du produit, la cour d'appel, qui, sans se fonder sur le droit de marques, a seulement constaté qu'un tel usage ne pouvait en lui-même constituer une faute, n'était pas tenue de se livrer à d'autres recherches, qui ne lui étaient pas demandées, portant sur les modalités d'usage de ce terme ; que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que les sociétés Maréchal et SEPM font en outre grief à l'arrêt d'avoir rejeté leur demande fondée sur la concurrence déloyale relative aux connecteurs "Proconect 3PS gris", alors, selon le moyen, que l'article 8-2 de la norme 60309-1 prescrit qu'il ne doit pas être possible de connecter entre eux des éléments "ayant des caractéristiques nominales différentes ou comprenant des combinaisons différentes", ceci à d'évidentes fins de sécurité ; que la norme exige ainsi que les fabricants veillent à ce que des produits non compatibles ne puissent pas être assemblés ; qu'en retenant qu'il résultait de la norme que l'ensemble des composants des prises devaient être identiques, la cour d'appel l'a violée ;
Mais attendu que la cour d'appel n'a pas retenu que l'ensemble des composants des prises devait être identiques, mais que l'interchangeabilité des produits supposait que l'ensemble des composants du dispositif, accessoires compris, soient parfaitement compatibles entre eux, et ce d'autant qu'il s'agit d'un système modulaire ; que le moyen pris de la dénaturation de la norme visée au moyen manque en fait ;
Et sur le quatrième moyen :
Attendu que les sociétés Maréchal et SEPM font enfin grief à l'arrêt d'avoir limité à certaines sommes l'évaluation des préjudices causés par les fautes retenues à l'encontre de la société Proconect, alors, selon le moyen, que dans leurs écritures, elles faisaient valoir qu'une importante vente de connecteurs (2 945 socles et fiches et 1 150 boîtiers) à destination de l'Australie devait être prise en compte dans l'appréciation du préjudice ; qu'elles indiquaient que la commande, effectuée le 19 septembre 1994 par la société Clipsal et expédiée le 17 janvier 1995, portait nécessairement sur des connecteurs contrefaisants, bleus avec bossage, dès lors que la société Proconect reconnaissait elle-même n'avoir modifié les connecteurs, en adoptant la couleur grise et en supprimant le bossage, qu'à compter de la réception de l'assignation en contrefaçon, le 21 décembre 1994 ; qu'elles indiquaient qu'il était matériellement impossible, compte tenu des temps de production, que les connecteurs expédiés le 17 janvier 1995 aient été modifiés ; que la vente à l'Australie portait ainsi nécessairement sur des produits non modifiés, contrefaisants, bleus avec bossage, qui devaient de ce fait être pris en compte dans le cadre de l'appréciation du préjudice ; qu'en laissant sans réponse ces écritures, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du nouveau code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel ayant souverainement retenu que la preuve de ventes directes de connecteurs litigieux entre la société Proconect et la société australienne Clipsal n'était pas rapportée, le moyen, qui postule la réalité d'une telle vente, manque par le fait qui lui sert de base ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les sociétés Maréchal et SEPM aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, les condamne à payer à la société Proconect la somme globale de 2 000 euros, et rejette leur demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt février deux mille sept.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 05-13051
Date de la décision : 20/02/2007
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

APPEL CIVIL - Demande nouvelle - Définition - Domaine d'application

Les prétentions fondées sur des revendications différentes d'un même brevet ne tendent pas aux mêmes fins, dès lors que chacune de ces revendications définit l'étendue de la protection qui lui est attachée. En conséquence, une demande fondée sur l'une des revendications d'un brevet ne peut être présentée pour la première fois en cause d'appel


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 15 décembre 2004


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 20 fév. 2007, pourvoi n°05-13051, Bull. civ. 2007, IV, N° 46
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2007, IV, N° 46

Composition du Tribunal
Président : M. Tricot
Avocat général : M. Lafortune
Rapporteur ?: M. Sémériva
Avocat(s) : Me Bertrand, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2007:05.13051
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award