AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 17 août 2005), rendu sur renvoi après cassation (Com, 17 mars 2004, pourvoi n° W 02-15.046) que la Caisse hypothécaire anversoise (ANHYP), aux droits de laquelle indique se trouver la société AXA Bank (la banque), ayant poursuivi la vente sur saisie immobilière d'un immeuble garantissant une ouverture de crédit consentie à M. X... et à la SCI La Louvière (la SCI), les emprunteurs ont invoqué la nullité du prêt et de la saisie au motif que la banque n'avait pas reçu l'agrément prévu par l'article 15 de la loi du 24 janvier 2004 ; qu'un jugement, qui avait écarté ce moyen et autorisé la continuation des poursuites, ayant été réformé par l'arrêt cassé, la cour d'appel saisie sur renvoi a confirmé le jugement en ce qu'il avait autorisé la continuation des poursuites et, ordonnant la réouverture des débats, a enjoint à la banque de produire les justificatifs de sa créance ;
Sur la recevabilité du pourvoi, contestée par la défense :
Attendu que la banque soutient que, par application des articles 606 et 608 du nouveau code de procédure civile, le pourvoi serait irrecevable, la cour d'appel n'ayant pas tranché le principal ;
Mais attendu qu'en confirmant le jugement entrepris en ce qu'il avait autorisé la continuation des poursuites, l'arrêt attaqué a tranché une partie du principal ;
D'où il suit que le pourvoi est recevable ;
Sur le premier moyen, tel que reproduit en annexe :
Attendu que M. X... et la SCI font grief à l'arrêt d'avoir rejeté leur fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir de la banque ;
Mais attendu que sous le couvert de griefs infondés d'insuffisance de motifs et de méconnaissance de l'objet du litige, le moyen ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine par les juges du fond des éléments de preuve justifiant de la qualité à agir de la banque ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen, tel que reproduit en annexe :
Attendu que M. X... et la SCI font grief à l'arrêt d'avoir rejeté leur demande de sursis à statuer jusqu'à l'issue de poursuites pénales engagées contre les dirigeants de l'ANHYP ;
Mais attendu que l'article 4 du code de procédure pénale ne concerne que l'action civile et non la poursuite d'une voie d'exécution ;
que par ce motif de pur droit substitué à ceux critiqués, l'arrêt se trouve légalement justifié ;
Sur le troisième moyen, qui est recevable :
Attendu que M. X... et la SCI font grief à l'arrêt d'avoir ordonné la poursuite de la saisie immobilière, alors, selon le moyen, que le principe de prééminence du droit et la notion de procès équitable consacrés par l'article 6 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales s'opposent, sauf pour d'impérieux motifs d'intérêt général, à l'application immédiate d'une règle nouvelle à une instance en cours, à l'occasion d'un revirement de jurisprudence, spécialement lorsqu'un arrêt de la Cour de cassation a été rendu dans le cadre de cette instance pour faire application de la règle ancienne ; qu'en l'espèce, par un arrêt en date du 17 mars 2004, la Cour de cassation a cassé l'arrêt de la cour d'appel qui avait débouté M. X... et la SCI La Cadière de leur demande de nullité du prêt faute d'agrément de l'ANHYP, au motif explicite que, faute pour l'ANHYP de justifier d'un agrément en France, ses cocontractants étaient fondés à se prévaloir de la nullité des prêts qu'elle avait consentis ; qu'en faisant application à la même instance d'une jurisprudence nouvelle de la Cour de cassation selon laquelle le défaut d'agrément d'un établissement bancaire n'est pas de nature à entraîner la nullité du prêt, et que l'exigence d'un agrément pour l'ANHYP était incompatible avec les dispositions du droit communautaire, la cour d'appel a privé les appelants d'un procès équitable et a violé le texte susvisé ;
Mais attendu que la cour de renvoi, saisie à la suite d'un arrêt de cassation totale n'émanant pas de l'assemblée plénière, était investie de la connaissance du litige dans tous ses aspects de fait et de droit au moment où elle statuait, sans être tenue de se conformer à l'arrêt de cassation l'ayant saisie qui avait adopté une solution au maintien de laquelle les emprunteurs n'avaient pas de droit acquis et qu'aucun principe n'imposait aux juges du fond de conserver ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... et la SCI La Cadière aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette les demandes respectives des parties ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un décembre deux mille six.