AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu que, par lettres du 19 septembre 2005, la Fédération banques assurances et sociétés financières UNSA a procédé à la désignation de M. X... comme délégué syndical central et représentant syndical au comité central d'entreprise de l'unité économique et sociale Assurances France Generali (AFG) constituée entre dix-huit sociétés, de Mme Y... comme représentante syndicale au CHSCT inter établissements, et de huit autres salariés en qualité de délégués syndicaux et représentants syndicaux au sein d'établissements de l'UES ;
Attendu que la Fédération banques assurances et sociétés financière UNSA et les dix salariés concernés font grief au jugement attaqué (tribunal d'instance, Paris 9e arrondissement, 29 décembre 2005) d'avoir annulé les désignations en qualité de délégués syndicaux et représentants syndicaux effectuées par lettres du 19 septembre 2005 alors, selon le moyen :
1 / qu'une décision administrative d'application immédiate s'impose au juge judiciaire tant qu'elle n'a pas été annulée ; que la décision du ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement du 30 juin 2005, prise en vertu des articles L. 133-2 et L. 133-3 du code du travail et qui reconnaissait à la Fédération banques assurances et sociétés financières UNSA une représentativité sur le plan national dans la branche des sociétés d'assurances, s'imposait au tribunal d'instance tant qu'elle n'avait pas été annulée par la juridiction administrative ; qu'en décidant le contraire, le tribunal d'instance a violé le principe de la séparation des pouvoirs issu de la loi des 16 et 24 août 1790 et les articles L. 133-2 et L. 133- 3 du code du travail ;
2 / à titre subsidiaire que la difficulté sérieuse concernant l'interprétation d'un acte administratif individuel est de la compétence exclusive des juridictions administratives et constitue une question préjudicielle jusqu'à la solution de laquelle les tribunaux judiciaires doivent surseoir à statuer ; que l'UES Assurance Generali France, la Fédération des services CFDT et la Fédération de l'assurance CFE/CGC ont contesté la portée de la décision du ministre de l'emploi du 30 juin 2005 en ce qu' elle avait reconnu le caractère représentatif sur le plan national et dans le secteur des sociétés d'assurances, à la Fédération UNSA assurances, faisant valoir que cette décision ministérielle permettait uniquement à la Fédération UNSA assurances de négocier les accords de la seule branche "sociétés d'assurances" et de siéger à la commission négociant les accords de branches ou les accords professionnels ou interprofessionnels susceptibles d'être étendus ; qu'à supposer que la décision ministérielle du 30 juin 2005 ne s'impose pas au juge judiciaire, cette difficulté sérieuse concernant son interprétation obligeait le tribunal d'instance à surseoir à statuer dans l' attente de la décision définitive de la juridiction administrative ; qu'en statuant comme il l'a fait, le tribunal d'instance a, à nouveau, violé la loi des 16 et 24 août 1790 et le décret du 16 Fructidor An III ;
3 / subsidiairement, tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; que les juges du fond ne peuvent se déterminer par le seul visa des documents de la cause n'ayant fait l'objet d'aucune analyse, même sommaire ; qu'en se bornant à affirmer que les pièces fournies par la Fédération UNSA assurances, notamment l'accord d'UES, le jugement du 18 janvier 2005, le jugement du 16 juin 2005 et la décision du ministère de l'emploi du 30 juin 2005, ne permettaient pas de rapporter la preuve des effectifs du syndicat, de ses éventuelles cotisations, ni même de son expérience et de son ancienneté, sans procéder à une analyse, même sommaire de ces pièces, le tribunal d'instance a violé l'article 455 du nouveau code de procédure civile ;
Mais attendu, d'abord, qu'il n'y a pas lieu à question préjudicielle, le litige ne posant pas la question de la légalité de la décision concernée ;
Attendu ensuite, que la décision du ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement reconnaissant la représentativité de la fédération des banques assurances et sociétés financières UNSA dans le champ d'application de la convention collective nationale de branche "sociétés d'assurances" ne permet pas à elle seule à ce syndicat qui ne figure pas sur la liste des organisations syndicales présumées représentatives au niveau national telle qu'elle résulte de l'arrêté du 31 mars 1996 de bénéficier de cette présomption ;
Attendu, enfin, que le tribunal d'instance, qui a relevé que la Fédération n'avait pas produit de pièces ou d'éléments lui permettant de faire la preuve qu'elle était représentative au niveau de l'UES et des établissements concernés au regard des critères définis par l'article L. 133-2 du code du travail, a motivé sa décision ; que le moyen, inopérant en sa deuxième branche, n'est pas fondé en ses deux autres branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit novembre deux mille six.