AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que Mme X... a mis au monde, le 18 septembre 1996, Bastien X..., qui a été reconnu le 4 septembre 1998 par son compagnon, M. Y..., puis le 23 novembre 1998 par M. Z... ; qu'un jugement du 14 décembre 2000 a annulé la reconnaissance de M. Y... et s'est déclaré incompétent au profit du juge aux affaires familiales pour statuer sur les autres demandes de M. Z... relatives à la substitution du nom paternel au nom maternel sur le fondement de l'article 334-3 du code civil, à l'attribution d'un droit de visite et d'hébergement et à la fixation du montant de sa contribution à l'éducation et l'entretien de l'enfant ; que le juge aux affaires familiales a ordonné la substitution du nom du père à celui de la mère, constaté que l'autorité parentale était exercée par la mère, fixé la résidence de l'enfant au domicile de la mère, accordé un droit de visite au père et fixé le montant de la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant mise à la charge du père à compter du 1er mars 1999 ;
Sur le premier moyen :
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt attaqué (Amiens, 28 mai 2003) d'avoir dit que Bastien porterait le nom de son père, alors, selon le moyen :
1 / qu'il résulte des constatations du juge aux affaires familiales et de la cour que la naissance et les premières années de vie de l'enfant Bastien, né le 18 septembre 1996, ont été marquées par l'absence du père tant auprès de l'enfant qu'auprès de la mère pendant la grossesse, étant précisé que le père n'a reconnu son fils que le 23 novembre 1998. En l'espèce, pour autoriser la substitution du nom paternel au nom maternel de l'enfant Bastien, âgé de huit ans et dont seule la mère qui l'héberge, a l'exercice de l'autorité parentale, la cour, qui n'a même pas ordonné, au besoin d'office, une enquête sociale, s'est prononcée in abstracto en fonction de considérations de caractère général relatives à l'utilité de redonner force au lien paternel sans cependant établir de lien entre les conditions de vie de Bastien auprès de sa mère et l'intérêt réel de l'enfant, et a violé les articles 334-1, 334-3 du code civil, ensemble les articles 8 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
2 / qu'en vilipendant le comportement de Mme X... et son ressentiment envers le père de Bastien, qui l'avait pourtant abandonné durant toute sa grossesse et les deux premières années de la vie de l'enfant, ne reconnaissant ce dernier, né le 18 septembre 1996, que le 23 novembre 1998, la cour a opéré entre les parents une différence de traitement discriminatoire, violant ainsi les articles 8 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui ne s'est pas déterminée par un motif d'ordre général mais a pris en considération l'ensemble des intérêts en présence et plus particulièrement ceux de l'enfant, a relevé, par motifs propres et adoptés, que la procédure engagée par M. Z... démontrait l'intérêt qu'il portait à son fils, que celui-ci rencontrait des difficultés à établir un lien paternel avec Bastien, qui avait d'abord été reconnu par le compagnon de Mme X..., à la demande de cette dernière, qu'une modification d'état civil ordonnée alors que Bastien n'était pas encore scolarisé ne lui poserait pas de difficulté, et a souverainement estimé, sans encourir les griefs du moyen, qu'il était de l'intérêt de l'enfant d'ordonner la substitution de nom demandée afin de redonner force au lien paternel contesté par la mère ; d'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Mais sur le second moyen :
Vu les articles 203 et 310-1 du code civil ;
Attendu que pour fixer à la date du 25 octobre 2001, date du jugement qui en a fixé le montant, le point de départ de l'obligation de M. Z... à contribuer à l'entretien de son fils Bastien, l'arrêt attaqué énonce, d'une part, que Mme X... n'entendait pas faire supporter au père la charge de l'enfant puisqu'elle l'a fait reconnaître par M. Y..., d'autre part, que celle-ci a refusé tous les chèques ou mandats-cash que lui avait spontanément adressés M. Z... dans l'attente de la décision à intervenir ;
Qu'en statuant ainsi, alors que les aliments étaient accordés en conséquence d'une déclaration judiciaire de paternité dont les effets remontent à la naissance de l'enfant et que Mme X... ne pouvait renoncer au droit de réclamer des aliments pour l'entretien de son fils, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a fixé le point de départ de la contribution de M. Z... à l'entretien de son fils Bastien au 25 octobre 2001, l'arrêt rendu le 28 mai 2003, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens, autrement composée ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette la demande de Mme X... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze juillet deux mille six.