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04/07/2006 | FRANCE | N°04-17584

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 04 juillet 2006, 04-17584


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que, Mme X... a été victime d'un viol par M. Y..., condamné pour ces faits à 14 années de réclusion criminelle par arrêt du 16 mars 2001 de la cour d'assises des mineurs du Loiret, dont il a relevé appel ; que par arrêt du 31 mai 2001 la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Orléans a ordonné la mise en liberté de M. Y..., après avoir constaté que le délai sur cette demande qui lui était imparti par le code de procédure pénale pour statuer était e

xpiré ;

que M. Y... s'est soustrait à la justice, de sorte que la condamnation...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que, Mme X... a été victime d'un viol par M. Y..., condamné pour ces faits à 14 années de réclusion criminelle par arrêt du 16 mars 2001 de la cour d'assises des mineurs du Loiret, dont il a relevé appel ; que par arrêt du 31 mai 2001 la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Orléans a ordonné la mise en liberté de M. Y..., après avoir constaté que le délai sur cette demande qui lui était imparti par le code de procédure pénale pour statuer était expiré ;

que M. Y... s'est soustrait à la justice, de sorte que la condamnation prononcée le 16 mars 2001 est devenue définitive, mais non exécutée ; que Mme X... a réclamé réparation à l'Etat de son préjudice moral sur le fondement de l'article L. 781-1 du code de l'organisation judiciaire ;

Sur le premier moyen :

Attendu que l'agent judiciaire du Trésor reproche à l'arrêt (Paris, 14 juin 2004) d'avoir condamné l'Etat au paiement d'une indemnité à Mme X..., alors, selon le moyen :

1 / que , la victime est sans qualité pour critiquer la mise en uvre par l'institution judiciaire des mesures relatives à la détention provisoire qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé les articles 30, 31 et 122 du nouveau code de procédure civile et L. 781-1 du code de l'organisation judiciaire ;

2 / que , la victime est sans qualité pour critiquer les conditions dans lesquelles l'institution judiciaire met à exécution les peines qui sont prononcées , que pour avoir décidé le contraire, l'arrêt encourt la censure pour violation des articles 30, 31 et 122 du nouveau code de procédure civile et L. 781-1 du code de l'organisation judiciaire ;

Mais attendu qu'ayant, à bon droit, retenu que si en droit français la partie civile ne dispose pas d'un droit personnel à l'exécution d'une peine, l'arrêt relève que Mme X... poursuit la réparation du préjudice moral, personnel, directement en relation avec la faute incontestable commise par les juges de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Orléans dans l'exécution du service public de la justice ;

que le moyen n'est donc pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que l'agent judiciaire du Trésor reproche encore à l'arrêt d'avoir condamné l'Etat au paiement d'une indemnité à Mme X..., alors, selon le moyen :

1 / que la seule méconnaissance d'un délai légal ne permet pas à elle seule de caractériser la faute lourde susceptible d'engager la responsabilité de l'Etat au titre du fonctionnement défectueux du service de la justice ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé l'article L. 781-1 du code de l'organisation judiciaire ;

2 / que la faute lourde se déduit de la manière dont l'institution fait face à son obligation, peu important les conséquences de l'inexécution ou de l'exécution défectueuse de cette obligation ; qu'elle est en effet liée au comportement de l'institution, antérieurement ou concomitamment au manquement, indépendamment du préjudice qui peut résulter de ce manquement ; qu'à cet égard l'arrêt a été rendu en violation de l'article L. 781-1 du code de l'organisation judiciaire ;

3 / que la faute lourde peut être écartée, eu égard à la manière dont l'institution a fait face à ses obligations, sans qu'il soit besoin que l'inexécution ou l'exécution défectueuse soit imputable à un événement de force majeure ; que de ce point de vue encore l'arrêt attaqué a été rendu en violation de l'article L. 781-1 du code de l'organisation judiciaire ;

Mais attendu qu'ayant constaté que la juridiction saisie avait laissé s'écouler le délai imparti pour statuer sur la mise en liberté, sans que ce retard, impliquant la mise en liberté d'une personne condamnée à 14 ans de réclusion criminelle, puisse être imputable à une circonstance imprévisible et insurmontable, extérieure au service de la justice, la cour d'appel a pu en déduire que ce fait traduisait l'inaptitude du service de la justice à remplir sa mission, caractérisant ainsi la faute lourde reprochée ;

que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne l'agent judiciaire du Trésor aux dépens ;

Vu les articles 700 du nouveau code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991, condamne l'agent judiciaire du Trésor à payer à la SCP Ghestin la somme de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre juillet deux mille six.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 04-17584
Date de la décision : 04/07/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

ETAT - Responsabilité - Fonctionnement défectueux du service de la justice - Faute lourde - Définition - Fait de laisser s'écouler le délai imparti pour statuer sur une demande de mise en liberté impliquant la mise en liberté d'une personne condamnée.

ETAT - Responsabilité - Fonctionnement défectueux du service de la justice - Faute lourde - Conditions - Fait non imputable à une circonstance imprévisible et insurmontable, extérieure au service de la justice - Applications diverses

Le fait pour une juridiction d'avoir laissé s'écouler le délai imparti pour statuer sur la mise en liberté, sans que ce retard, impliquant la mise en liberté d'une personne condamnée à 14 ans de réclusion criminelle, puisse être imputable à une circonstance imprévisible et insurmontable, extérieure au service de la justice, traduit l'inaptitude du service de la justice à remplir sa mission.


Références :

Code de l'organisation judiciaire L781-1

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 14 juin 2004


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 04 jui. 2006, pourvoi n°04-17584, Bull. civ. 2006 I N° 347 p. 298
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2006 I N° 347 p. 298

Composition du Tribunal
Président : M. Ancel.
Avocat général : M. Sarcelet.
Rapporteur ?: Mme Ingall-Montagnier.
Avocat(s) : Me Foussard, SCP Ghestin.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2006:04.17584
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