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13/06/2006 | FRANCE | N°05-84667

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 13 juin 2006, 05-84667


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le treize juin deux mille six, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller PALISSE, les observations de Me LE PRADO, de la société civile professionnelle BORE et SALVE de BRUNETON et de la société civile professionnelle THOUIN-PALAT, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DI GUARDIA ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- X... Alain,

- LA MAAF, partie intervenante,

contre l'

arrêt de la cour d'appel de DOUAI, 6e chambre, en date du 24 mai 2005, qui, dans la procédur...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le treize juin deux mille six, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller PALISSE, les observations de Me LE PRADO, de la société civile professionnelle BORE et SALVE de BRUNETON et de la société civile professionnelle THOUIN-PALAT, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DI GUARDIA ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- X... Alain,

- LA MAAF, partie intervenante,

contre l'arrêt de la cour d'appel de DOUAI, 6e chambre, en date du 24 mai 2005, qui, dans la procédure suivie contre le premier du chef d'homicide involontaire, a prononcé sur les intérêts civils ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu le mémoire commun aux demandeurs, et les mémoires en défense produits ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 1382 du code civil, 485 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué, confirmant le jugement entrepris, a condamné in solidum Alain X... et la MAAF à payer à Virginie Y... la somme de 664 487,88 euros au titre du préjudice économique ;

"aux motifs adoptés que, attendu que, s'agissant du préjudice économique, en fonction des documents versés par l'Académie de Lille sur le déroulement de la carrière de Pascal Z... qui devait parvenir au 11ème échelon le 12 septembre 2013, le montant global des salaires qu'il aurait perçu jusqu'à sa retraite en 2020 aurait été de 588 338,10 euros ; qu'il aurait touché, en sa qualité de professeur principal, une prime annuelle de 2 444 euros, soit 43 992 euros sur les 18 ans de carrière restant à effectuer ; qu'en conséquence il aurait perçu pour sa retraite jusqu'à 75 ans la somme de 404 950,05 euros, soit une moyenne annuelle de ses traitements et pensions de retraites de 31 432,73 euros ; qu'en retenant une consommation personnelle de 30 %, les 70 % restants auraient été affectés à l'entretien de la famille, soit 22 002,91 euros par an ; qu'il aurait affecté ses revenus pendant 33 ans, soit :

- 72 412 euros pour Virginie Y... pendant 7 ans (pendant les études de ses enfants),

- 22 002,01 euros pendant 26 ans, soit un total de 664 487,88 euros ;

"alors que si la réparation du préjudice doit être intégrale, il ne saurait en résulter pour la victime ni perte ni profit ;

qu'en l'espèce, il n'était contesté par aucune partie que Virginie Y... percevait un revenu annuel de 27 911 euros et que ce revenu, ajouté à celui de Pascal Z..., avait profité au couple ; que, dès lors, statuant sur l'évaluation du préjudice économique de Virginie Y... sans tenir compte, au titre des ressources du ménage, des revenus personnels de celle-ci, ni prendre en considération les ressources perçues par la concubine après l'accident, la cour d'appel a fixé le préjudice économique de Virginie Y... à une somme supérieure au préjudice effectivement subi par la victime" ;

Vu l'article 1382 du code civil ;

Attendu que le préjudice résultant d'une infraction doit être réparé dans son intégralité, sans perte ni profit pour aucune des parties ;

Attendu qu'appelée à statuer sur les conséquences dommageables d'un accident de la circulation, dont Alain X..., déclaré coupable d'homicide involontaire, a été déclaré tenu à réparation intégrale, la juridiction du second degré était saisie de conclusions du prévenu et de son assureur demandant que la somme de 664 487,88 euros, allouée par le tribunal à Virginie Y..., concubine de la victime, Pascal Z..., au titre de son préjudice économique, soit réduite et fixée à 70 762,40 euros, compte tenu de la totalité des revenus du ménage avant l'accident, de la consommation personnelle de l'homme et du revenu résiduel de la femme, tous deux enseignants ;

Attendu que, pour confirmer le jugement, l'arrêt attaqué se borne, par motifs adoptés, à énoncer qu'il convient de retenir que la victime aurait affecté 30% de ses revenus à ses dépenses personnelles et le reste à l'entretien de sa famille ;

Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que le préjudice économique de la partie civile consécutif à la mort de son concubin ne pouvait être établi que par référence aux revenus cumulés antérieurs du couple, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et le principe ci- dessus rappelé ;

D'où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs :

CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Douai, en date du 24 mai 2005, en ses seules dispositions relatives au préjudice économique de Virginie Y..., toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel d'Amiens, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

DIT n'y avoir lieu à application, au profit de Virginie Y... et de Julien Z..., de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Douai et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Cotte président, M. Palisse conseiller rapporteur, MM. Farge, Blondet, Le Corroller, Castagnède, Mmes Ract-Madoux, Radenne conseillers de la chambre, Mme Guihal, M. Delbano conseillers référendaires ;

Avocat général : M. Di Guardia ;

Greffier de chambre : M. Souchon ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 05-84667
Date de la décision : 13/06/2006
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

ACTION CIVILE - Préjudice - Evaluation - Eléments pris en considération - Concubin de la victime décédée - Revenus cumulés antérieurs du couple.

Le préjudice d'une partie civile consécutif à la mort de son concubin doit être établi par référence aux revenus cumulés antérieurs du couple. Méconnaît ce principe la cour d'appel qui détermine les sommes, consacrées par la victime aux dépenses du ménage, en fonction de ses seuls revenus.


Références :

Code civil 1382

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 24 mai 2005

A rapprocher : Chambre criminelle, 1993-12-01, Bulletin criminel 1993, n° 364 (2), p. 909 (cassation partielle).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 13 jui. 2006, pourvoi n°05-84667, Bull. crim. criminel 2006 N° 174 p. 605
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2006 N° 174 p. 605

Composition du Tribunal
Président : M. Cotte
Avocat général : M. Di Guardia.
Rapporteur ?: M. Palisse.
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Thouin-Palat.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2006:05.84667
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