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24/05/2006 | FRANCE | N°05-17091

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 24 mai 2006, 05-17091


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à l'Etablissement français du sang de ce qu'il s'est désisté de son pourvoi, en tant que dirigé contre la Mutuelle du Mans assurances et Mme X... ;

Sur le moyen unique :

Vu les articles 102 de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002, 1251 et 1382 du code civil ;

Attendu, selon le premier de ces textes, que la présomption d'imputabilité d'une contamination à une transfusion sanguine est opposable à toute partie tenue à la réparation du dommage c

ausé par cette contamination ; que selon les deux autres, l'action récursoire d'un cooblig...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à l'Etablissement français du sang de ce qu'il s'est désisté de son pourvoi, en tant que dirigé contre la Mutuelle du Mans assurances et Mme X... ;

Sur le moyen unique :

Vu les articles 102 de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002, 1251 et 1382 du code civil ;

Attendu, selon le premier de ces textes, que la présomption d'imputabilité d'une contamination à une transfusion sanguine est opposable à toute partie tenue à la réparation du dommage causé par cette contamination ; que selon les deux autres, l'action récursoire d'un coobligé fautif contre le conducteur impliqué dans un accident de la circulation ne peut s'exercer que dans les conditions prévues par ces textes, la contribution à la dette ayant lieu en proportion des fautes respectives ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 11 juillet 1987, Mme X... a été victime d'un accident de la circulation, alors qu'elle était passagère d'un véhicule conduit par Mme Y..., assurée auprès de la société Mutuelle assurance des instituteurs de France (la MAIF) ;

que Mme X... a été hospitalisée au centre hospitalier du Mans, où elle a reçu, entre le 11 juillet et le 5 août 1987, plusieurs transfusions de produits sanguins fournis par le Centre régional de transfusion sanguine Maine Normandie (le CRTS), aux droits duquel est venu l'Etablissement français du sang (l'EFS), assuré auprès de la société Mutuelle du Mans assurances IARD (MMA) ; que la MAIF, assureur de la conductrice, a indemnisé Mme X... du préjudice lié à l'accident, en exécution d'une transaction en date du 17 avril 1989, mais qu'à l'occasion d'un dépistage, réalisé en 1997, Mme X... a appris qu'elle était atteinte du virus de l'hépatite C ; qu'imputant sa contamination aux transfusions de produits sanguins reçues aux mois de juillet et août 1987, le 10 février 2003, Mme X... a assigné en responsabilité et indemnisation, devant le tribunal de grande instance, le CRTS ; que celui-ci a appelé en garantie la MAIF, assureur du véhicule ; que la MMA est intervenue à l'instance, en sa qualité d'assureur de responsabilité civile du CRTS ;

Attendu que pour débouter l'EFS de son action récursoire dirigée contre la MAIF, l'arrêt retient qu'il ressort des dispositions dérogatoires de l'article 102 de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de soins, qu'en cas de contestation relative à l'imputabilité d'une contamination par le virus de l'hépatite C antérieure à la date de l'entrée en vigueur de ladite loi, seule la victime bénéficie d'une présomption de causalité entre la transfusion et la contamination ; que dans leurs rapports avec la MAIF, il appartient à l'EFS de rapporter la preuve que les transfusions sanguines qui ont été nécessitées par l'accident sont à l'origine de la contamination ; que, sur ce plan, il résulte clairement du rapport d'expertise que, si la transfusion s'avère un facteur de risque scientifiquement et potentiellement réel, il n'existe en l'espèce "aucune preuve formelle et certaine" que le virus qui a été présent chez Mme X... a été d'origine transfusionnelle, sa transmission ayant notamment pu se faire lors des extractions dentaires subies par l'intéressée avant 1987 ;

Qu'en statuant ainsi, alors que les transfusions sanguines, à l'origine de la contamination de Mme X... par le virus de l'hépatite C, avaient été rendues nécessaires par l'accident de la circulation imputable à Mme Y..., assurée auprès de la MAIF, et en retenant, pour débouter l'EFS de son recours contre la MAIF, que le lien de causalité entre la contamination et les transfusions sanguines n'était pas établi, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté l'EFS et la MMA IARD de leur action à l'encontre de la MAIF, l'arrêt rendu le 30 mars 2005, entre les parties, par la cour d'appel d'Angers ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans ;

Condamne la MAIF aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la MAIF ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre mai deux mille six.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 05-17091
Date de la décision : 24/05/2006
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

1° PREUVE (règles générales) - Charge - Applications diverses - Santé publique - Transfusions sanguines - Contamination par le virus de l'hépatite C - Présomption d'imputabilité - Portée.

1° SANTE PUBLIQUE - Transfusions sanguines - Virus de l'hépatite C - Contamination - Dommage - Réparation - Pluralité de responsables - Action récursoire d'un coobligé - Fondement - Portée 1° SANTE PUBLIQUE - Transfusions sanguines - Virus de l'hépatite C - Contamination - Présomption d'imputabilité - Portée 1° SANTE PUBLIQUE - Transfusions sanguines - Virus de l'hépatite C - Contamination - Doute - Portée.

1° Selon l'article 102 de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002, applicable aux instances en cours n'ayant pas donné lieu à une décision irrévocable, en cas de contestation relative à l'imputabilité d'une contamination par le virus de l'hépatite C antérieure à la date d'entrée en vigueur de cette loi, le demandeur apporte des éléments qui permettent de présumer que cette contamination a pour origine une transfusion de produits sanguins labiles ou une injection de médicaments dérivés du sang. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que cette transfusion ou cette injection n'est pas à l'origine de la contamination, le doute profitant au demandeur.

2° RESPONSABILITE DELICTUELLE OU QUASI DELICTUELLE - Dommage - Réparation - Pluralité de responsables - Accident de la circulation - Action récursoire du coobligé contre l'auteur de l'accident - Fondement juridique.

2° RESPONSABILITE DELICTUELLE OU QUASI DELICTUELLE - Lien de causalité avec le dommage - Dommage - Conséquence ultérieure du dommage originaire - Accident de la circulation - Victime ayant subi une transfusion sanguine - Contamination par le virus de l'hépatite C - Effets - Indemnisation par l'établissement français du sang - Action récursoire contre l'auteur de l'accident - Fondement 2° RESPONSABILITE DELICTUELLE OU QUASI DELICTUELLE - Dommage - Réparation - Pluralité de responsables - Accident de la circulation - Action récursoire du coobligé contre l'auteur de l'accident - Contribution à la dette - Modalités 2° SUBROGATION - Subrogation légale - Cas - Accident de la circulation - Recours subrogatoire du coobligé contre l'auteur de l'accident - Applications diverses.

2° Selon les articles 1251 et 1332 du code civil, l'action récursoire d'un coobligé fautif contre le conducteur impliqué dans un accident de la circulation ne peut s'exercer que dans les conditions prévues par ces textes, la contribution à la dette ayant lieu en proportion des fautes respectives. Dès lors, encourt la cassation, l'arrêt qui méconnaît la portée de la présomption d'imputabilité de la contamination aux transfusions sanguines, laquelle est opposable à toute partie tenue à la réparation du dommage causé par cette contamination, et qui dénie à l'EFS le droit d'exercer contre le conducteur fautif l'action récursoire en contribution à la dette de réparation mise à sa charge au titre des conséquences dommageables d'une transfusion rendue nécessaire par l'accident.


Références :

1° :
2° :
Code civil 1251, 1332
Loi 2002-303 du 04 mars 2002 art. 102

Décision attaquée : Cour d'appel d'Angers, 30 mars 2005

Sur le n° 1 : Sur la portée quant à la charge de la preuve, de la présomption d'imputabilité instituée par l'article 102 de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002, dans le même sens que : Chambre civile 2, 2005-10-20, Bulletin 2005, II, n° 275, p. 244 (cassation partielle), et les arrêts cités. Sur le n° 2 : Sur la portée du fondement juridique de l'action récursoire du coobligé fautif contre le conducteur impliqué dans un accident de la circulation et la détermination des modalités de leur contribution à la dette, dans le même sens que : Chambre civile 2, 2005-10-20, Bulletin 2005, II, n° 275, p. 244 (cassation partielle), et les arrêts cités. Sur la portée, quant à l'exercice de l'action récursoire d'un coobligé fautif contre le condudcteur impliqué dans un accident de la circulation, du lien de causalité entre la contamination par le virus de l'hépatite C consécutive à une transfusion sanguine et l'accident l'ayant rendu nécessaire, dans le même sens que : Chambre civile 2, 2005-10-20, Bulletin 2005, II, n° 275, p. 244 (cassation partielle), et les arrêts cités.


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 24 mai. 2006, pourvoi n°05-17091, Bull. civ. 2006 II N° 134 p. 126
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2006 II N° 134 p. 126

Composition du Tribunal
Président : Mme Favre.
Avocat général : M. Domingo.
Rapporteur ?: M. Lafargue.
Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié, Me Le Prado.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2006:05.17091
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