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23/05/2006 | FRANCE | N°06-81705

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 23 mai 2006, 06-81705


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-trois mai deux mille six, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller POMETAN, les observations de Me BOUTHORS, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général FRECHEDE ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- X... Francis,

- Y... Florent,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de BASTIA, en date du 22 février 2006, qui, dans l'information suivie contre

eux pour infractions à la législation sur les stupéfiants, a prononcé sur leur demande d'...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-trois mai deux mille six, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller POMETAN, les observations de Me BOUTHORS, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général FRECHEDE ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- X... Francis,

- Y... Florent,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de BASTIA, en date du 22 février 2006, qui, dans l'information suivie contre eux pour infractions à la législation sur les stupéfiants, a prononcé sur leur demande d'annulation de pièces de la procédure ;

Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle du 31 mars 2006 prescrivant l'examen immédiat des pourvois et ordonnant leur jonction ;

Vu le mémoire commun aux demandeurs ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6, 8 et 13 de la Convention européenne des droits de l'homme, 66 de la Constitution, du décret n° 93-119 du 28 janvier 1993 pris pour l'application de la loi n° 91.646 du 10 juillet 1991, de l'article préliminaire et des articles 60, 77-1, 100 et suivants, 170, 206, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que la chambre de l'instruction a validé les écoutes téléphoniques incriminées et a rejeté en conséquence la requête en annulation de la procédure à compter de la côte D 24 ;

"aux motifs que, selon l'article 100-3 du code de procédure pénale, le juge d'instruction ou l'officier de police judiciaire commis par lui peut requérir tout agent qualifié d'un service ou organisme placé sous l'autorité ou la tutelle du ministre chargé des télécommunications ou tout agent qualifié d'un exploitant de réseau ou fournisseur de services de télécommunications autorisé, en vue de procéder à l'installation d'un dispositif d'interception ; que parmi les conditions d'application de ce texte définies par le décret n° 93.119 du 28 janvier 1993 figure l'établissement d'un écrit indiquant tous les éléments d'identification de la liaison à intercepter, la désignation de l'exploitant lui-même comme responsable s'il s'agit d'un réseau non public autorisé et l'obligation pour lui de désigner un agent techniquement compétent dont le casier judiciaire doit être vierge de toute condamnation pénale ; qu'il peut être vérifié que les documents adressés aux divers exploitants de réseaux par les services de police sont en tous points conformes aux prescriptions des articles 100 à 100-5 du code de procédure pénale ; que, s'il peut être procédé à l'identification des numéros de téléphone à la demande d'un officier de police judiciaire, cette mesure qui ne vise pas à une constatation ou à un examen technique ou scientifique au sens des articles 60 et 77-1 du code de procédure pénale, ne rend pas nécessaire une prestation de serment de l'opérateur concerné ;

que les opérations d'interception et de transcription que seul le juge d'instruction peut décider en déléguant leur exécution à un officier de police judiciaire ne constituent pas davantage des opérations à caractère technique ; que leur exécution ne nécessite donc pas de la part du représentant de l'exploitant du réseau, légalement habilité, une prestation de serment que le législateur lui-même animé en la circonstance d'un large souci de minutie n'a pas prévu ; que la Cour étant ainsi à même de pouvoir s'assurer de la régularité des interceptions critiquées, il conviendra de rejeter le moyen proposé qui n'apparaît pas fondé ;

"1 ) alors que, d'une part, l'ingérence dans la vie privée des citoyens réalisée par la mise en place d'un dispositif d'écoutes téléphoniques, quand elle a été requise par l'autorité judiciaire, ne peut être matériellement exécutée par un personnel qui serait lui-même soustrait au contrôle direct de l'autorité mandante ; qu'en se refusant en principe à exercer le moindre contrôle de légalité des conditions de réalisation des écoutes incriminées, la chambre de l'instruction a méconnu son office ;

"2 ) alors que, d'autre part, les opérations tendant à la mise en oeuvre technique d'une écoute téléphonique ne peuvent être effectuées que par des personnes qualifiées au sens des articles 60 et 77-1 du code de procédure pénale ; qu'en application de ces textes, ces personnes doivent prêter serment d'apporter leur concours à la justice en leur honneur et conscience ;

"3 ) alors que, en tout état de cause, la réquisition délivrée à un opérateur privé pour la mise en place d'un dispositif d'écoutes téléphoniques ne peut être réalisée que par des agents spécialement habilités à cette fin ; qu'en se bornant à dire que les documents adressés aux opérateurs par les officiers de police judiciaire étaient conformes aux prescriptions des articles 100 à 100-5 du code de procédure pénale, sans vérifier ni que les responsables intimés figuraient bien sur la liste qu'il appartient au ministre de dresser ni que les agents d'exécution aient eux-mêmes également figuré sur la liste devant être adressée au procureur de la République aux fins de contrôle des exigences prévues par l'article 1er du décret n° 93.119 du 28 janvier 1993, la chambre de l'instruction a derechef violé les textes et principes visés au moyen" ;

Attendu que Francis X... et Florent Y..., mis en examen des chefs d'infractions à la législation sur les stupéfiants, ont saisi la chambre de l'instruction, d'une requête excipant de la nullité des réquisitions adressées par l'officier de police judiciaire aux différents exploitants de réseaux de télécommunications, en exécution de commissions rogatoires prescrivant l'interception de communications téléphoniques, au motif qu'en violation des dispositions de l'article 60 du code de procédure pénale, les représentants de ces opérateurs qui avaient exécuté ces réquisitions, n'avaient pas prêté, par écrit, le serment exigé par ce texte ; qu'ils ont soutenu, dans leur mémoire déposé devant la chambre de l'instruction, que les services de télécommunications requis avaient procédé, non seulement à des opérations techniques d'interception mais également "à de véritables constatations techniques par l'analyse et le tri qu'ils ont opérés dans les correspondances pour ne retenir que ce qui est nécessaire à l'accusation" ;

Attendu que, pour refuser de faire droit à la demande d'annulation, l'arrêt attaqué énonce que les opérations d'interception et de transcription que seul le juge d'instruction peut décider, ne constituent pas des opérations à caractère technique, et que leur exécution ne nécessite donc pas de la part du représentant de l'exploitant du réseau, légalement habilité, une prestation de serment que le législateur lui-même n'a pas prévue ;

Attendu qu'en prononçant ainsi, la chambre de l'instruction a justifié sa décision sans méconnaître les dispositions conventionnelles invoquées ;

Que, d'une part, ni l'article 100-3 ni aucune autre disposition du code de procédure pénale n'exigent que l'agent qualifié requis par l'officier de police judiciaire pour procéder à des interceptions de communications téléphoniques prête serment ;

Que, d'autre part, les dispositions de l'article 60 de ce code, qui ont pour seul objet de régir les réquisitions adressées par l'officier de police judiciaire, au cours de l'enquête de flagrance, à une personne qualifiée pour qu'elle procède à des examens techniques ou scientifiques, sont étrangères aux interceptions de communications téléphoniques ordonnées par le juge d'instruction ;

D'où il suit que le moyen qui, en ses première et troisième branches, est nouveau, ne saurait être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE les pourvois ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Pometan conseiller rapporteur, M. Joly conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Lambert ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 06-81705
Date de la décision : 23/05/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

INSTRUCTION - Pouvoirs du juge - Ecoutes téléphoniques - Réquisition d'un agent qualifié en vue de procéder à l'installation d'un dispositif d'interception - Prestation de serment - Nécessité (non).

Ni l'article 100-3 du code de procédure pénale ni aucune autre disposition du code de procédure pénale n'exigent que l'agent qualifié requis par l'officier de police judiciaire pour procéder à des interceptions de communications téléphoniques prête serment. Les dispositions de l'article 60 de ce code, qui ont pour seul objet de régir les réquisitions adressées par l'officier de police judiciaire, au cours de l'enquête de flagrance, à une personne qualifiée pour qu'elle procède à des examens techniques ou scientifiques, sont étrangères aux interceptions de communications téléphoniques ordonnées par le juge d'instruction.


Références :

Code de procédure pénale 60, 100-3

Décision attaquée : Cour d'appel de Bastia (chambre de l'instruction), 22 février 2006


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 23 mai. 2006, pourvoi n°06-81705, Bull. crim. criminel 2006 N° 141 p. 510
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2006 N° 141 p. 510

Composition du Tribunal
Président : M. Cotte
Avocat général : M. Fréchède.
Rapporteur ?: M. Pometan.
Avocat(s) : Me Bouthors.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2006:06.81705
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