AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que Gédéon X... et Noélie Y..., qui se sont mariés le 25 octobre 1927, sous un régime dotal avec clause de paraphernalité, et qui se sont consenti une donation au dernier vivant, ont eu deux fils, Francis et Gratien ; que Francis X... est décédé le 30 octobre 1980, en laissant pour lui succéder son épouse, Mme Z..., et ses trois enfants, Alain, André et Michel ; que Noélie X... est décédée le 13 janvier 1981 ; que Gédéon X... est décédé le 18 février 1983, après avoir institué son fils Gratien légataire universel par testament du 17 février 1981 ;
Sur le second moyen, pris en ses deux branches, tel qu'il figure au mémoire en demande et est reproduit en annexe au présent arrêt :
Attendu que M. Gratien X... fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté sa demande d'attribution préférentielle de la propriété de la Lauze ;
Attendu que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de s'expliquer sur les éléments de preuve qu'elle a décidé d'écarter, a estimé souverainement, par une décision motivée à partir des constatations de l'expert judiciaire, que la propriété de la Lauze ne constituait pas une exploitation agricole ; que le moyen ne peut être accueilli ;
Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu les articles 1351 et 918 du Code civil ;
Attendu que, pour décider que la valeur en pleine propriété des biens vendus le 7 avril 1981 par Gédéon X... à son fils Gratien et à son épouse, à charge notamment d'une rente viagère, devait s'imputer sur la portion disponible et que l'excédent éventuel serait rapporté à la masse, l'arrêt attaqué énonce que le fait que la vente soit consentie à un successible en ligne directe et à son épouse ne faisait pas obstacle à l'application de l'article 918 du Code civil dans la mesure où l'aliénation était intervenue au moins pour partie au bénéfice de ce successible et à fonds perdus ;
Qu'en se déterminant ainsi, après avoir constaté qu'un jugement passé en force de chose jugée du 2 mars 1990 avait débouté Mme Z... et ses enfants de leur demande tendant à voir déclarer l'acte du 7 avril 1981 constitutif d'une donation déguisée, de sorte que la présomption de gratuité édictée par l'article 918 du Code civil devenait dépourvue de fondement, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé le premier texte susvisé, par refus d'application, et le second, par fausse application ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du premier moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a confirmé le jugement du 19 mars 2002 ayant dit que la valeur en pleine propriété des biens vendus le 7 avril 1981, fixée à 96 043 euros, doit s'imputer sur la portion disponible, l'arrêt rendu le 21 août 2003, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier, autrement composée ;
Condamne MM. Michel et André X... et M. A..., ès qualités, aux dépens ;
Vu l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, rejette la demande de la SCP Vier, Barthélemy et Matuchansky, avocat de M. Michel X... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit février deux mille six.