AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que des relations ayant existé entre M. X... et Mme Y... sont nés deux enfants, Johanna le 24 mai 1990 et Loris le 11 juin 1994, reconnus par leurs deux parents ; qu'en avril 2000, alors que le couple était installé aux Philippines, Mme Y... est rentrée en France avec les deux enfants sans l'accord de M. X... ; qu'une ordonnance du juge aux affaires familiales du 20 décembre 2001 a dit que l'autorité parentale sera exercée en commun par les deux parents, fixé la résidence des enfants chez la mère et accordé au père un droit de visite et d'hébergement ; qu'après avoir interjeté appel de cette décision, M. X... a unilatéralement décidé, en avril 2002, de garder Loris auprès de lui à Manille ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 24 octobre 2002) d'avoir dit que la mère exercera seule l'autorité parentale sur les deux enfants mineurs et que leur résidence sera fixée à son domicile, alors, selon le moyen :
1 / que seul l'intérêt de l'enfant justifie qu'un de ses parents soit privé de l'exercice de l'autorité parentale à son égard et permet de déterminer sa résidence habituelle ; qu'en se fondant exclusivement sur le manquement passé de M. X..., de telle sorte que la décision apparaisse comme une sanction, sans préciser en quoi il était de l'intérêt des enfants, dont les premiers juges avaient relevé l'attachement à leur père et les qualités éducatives et affectives, de voir exercée par leur mère seule et d'avoir leur résidence habituelle au domicile de cette dernière, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 373-2, 373-2-1, alinéa 1er, du Code civil et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
2 / qu'en fondant exclusivement sa décision sur le non-respect par le père des décisions de justice tout en constatant par ailleurs que la mère ne les respectait pas davantage, la cour d'appel n'a pas déduit de ses propres constatations les conséquences qui s'en évinçaient nécessairement et violé les articles 372-2 et 373-2-1 du Code civil ;
3 / que M. X... faisait valoir que Loris avait trouvé un équilibre et une stabilité au sein de son foyer depuis six mois ; qu'en ne répondant pas à cette argumentation dont il résultait que compte tenu de l'état de fait, l'intérêt de l'enfant Loris était de voir sa résidence habituelle maintenue au domicile du père, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'après avoir relevé que les incidents invoqués par M. X... dans l'exercice de son droit de visite et d'hébergement apparaissaient davantage la conséquence d'une absence de communication entre les parents qu'une volonté délibérée de Mme Y... d'exclure le père de la vie des enfants, que la décision unilatérale de M. X... de garder Loris à Manille en avril 2002 au mépris d'une décision de justice exécutoire avait entraîné la séparation des deux enfants très attachés l'un à l'autre et une rupture radicale de chacun des enfants avec l'autre parent et sa famille, la cour d'appel a, sans se contredire et répondant en les écartant aux conclusions invoquées, souverainement estimé que la détermination du père à imposer sa propre loi ne pouvait qu'être source d'angoisse pour les enfants et permettait de douter de ses capacités à appréhender les besoins essentiels des enfants dont l'intérêt était de normaliser, malgré la séparation, des relations avec chacun des parents dans le strict respect de la loi et des décisions de justice ; qu'elle a ainsi légalement justifié sa décision de confier à la mère l'exercice de l'autorité parentale ;
Sur le second moyen :
Attendu que M. X... fait encore grief à l'arrêt d'avoir dit que le droit de visite et d'hébergement du père sur les deux enfants mineurs s'exercerait sur le territoire français, après remise par ce dernier de son passeport, alors, selon le moyen :
1 / qu'en privant sa décision de tout motif, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
2 / que toute personne a droit au respect de sa vie familiale, ce qui implique le droit pour le parent chez qui l'enfant n'a pas sa résidence habituelle d'exercer son droit d'hébergement à son domicile, sauf motif grave tiré de l'intérêt de l'enfant ; qu'en ne précisant pas en quoi l'intérêt des enfants, dont le premier juge avaient relevé à quel point il était important pour eux, pour le cas où leur résidence habituelle serait fixée chez la mère, de se rendre chez leur père à Manille en vacances, s'opposait à ce que le droit d'hébergement de M. X... puisse s'exercer à son domicile à l'étranger, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 373-2-1, alinéa 2, du Code civil ainsi que l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
Mais attendu qu'après avoir constaté le refus du père de se conformer aux décisions de justice et de laisser Loris rentrer en France à l'issue de ses vacances à Manille, la cour d'appel a souverainement estimé que ces circonstances justifiaient une limitation, dans l'intérêt des enfants, de l'exercice de son droit de visite et d'hébergement au territoire français et a ainsi légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de M. X... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept janvier deux mille six.