AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu leur connexité, joint les pourvois n° C 03-45439 et D 03-45440 ;
Sur le moyen unique :
Attendu que, selon les arrêts attaqués (Toulouse, 3 juillet 2003), MM. X... et Y... ont été engagés en qualité de chefs de mission par l'association Comité départemental de la Haute-Garonne de développement économique (CDDE) ; que ladite association ayant été dissoute à compter du 2 janvier 2000, le département de la Haute-Garonne en a repris les activités ; que les salariés ont été licenciés pour motif économique le 21 mars 2000 par le département ;
Attendu qu'il est reproché aux arrêts d'avoir dit que les contrats de travail liant MM. X... et Y... à l'association CDDE ont été de plein droit transférés au département de la Haute-Garonne par le jeu de l'article L. 122-12, alinéa 2, du Code du travail, que la rupture desdits contrats incombe au département de la Haute-Garonne et s'analyse en licenciement sans cause réelle et sérieuse et, partant, d'avoir condamné le département de la Haute-Garonne à payer diverses sommes à MM. X... et Y..., alors, selon le moyen, que seules les juridictions de l'ordre administratif sont compétentes pour statuer sur l'exécution du contrat de travail liant un service public administratif à l'un de ses agents, peu important les conditions de son recrutement ; d'où il suit que les juges d'appel ont épuisé leur compétence en constatant le transfert de plein droit des contrats de travail des intéressés jusqu'alors salariés d'une association dont ils relevaient et dont l'activité avait été reprise sous forme d'un service public administratif par une personne publique ; qu'en statuant néanmoins sur la rupture de ce contrat par le département qu'ils ont condamné au paiement d'indemnités, les juges d'appel ont violé le loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Mais attendu que si les dispositions de l'article L. 122-12, alinéa 2, du Code du travail, interprétées au regard de la directive n° 77/187/CEE du Conseil du 14 février 1977, modifiée par la directive n° 98/50/CE et désormais remplacée par la directive n° 2001/23/CE du Conseil du 12 mars 2001, imposent le maintien des contrats de travail en cours y compris dans le cas où l'entité économique transférée constitue un service public administratif dont la gestion, jusqu'ici assurée par une personne privée, est reprise par une personne morale de droit public normalement liée à son personnel par des rapports de droit public, elles n'ont pas pour effet de transformer la nature juridique des contrats de travail en cause, qui demeurent des contrats de droit privé tant que le nouvel employeur public n'a pas placé les salariés dans un régime de droit public ; qu'il s'ensuit que le juge judiciaire est seul compétent pour statuer sur les litiges nés de la rupture des contrats de travail, prononcée par la personne morale de droit public dès lors que les salariés n'ont jamais été liés à celle-ci par un rapport de droit public, qui ne mettent en cause que des relations de droit privé ;
Et attendu que la cour d'appel, qui a fait ressortir qu'aucun contrat de droit public n'avait été conclu par les intéressés avec le département de la Haute-Garonne, a légalement justifié ses décisions ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les moyens du pourvoi incident de M. Y... qui ne seraient pas de nature à permettre l'admission de celui-ci :
REJETTE les pourvois ;
Condamne le département de la Haute-Garonne aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne le département de la Haute Garonne à payer à M. X... et à M. Y..., chacun, la somme de 1 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois novembre deux mille cinq.