AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le neuf novembre deux mille cinq, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller KOERING-JOULIN, les observations de Me SPINOSI, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général CHEMITHE ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X...
Y... Belkacem,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de CHAMBERY, en date du 1er août 2005, qui, dans la procédure d'extradition suivie contre lui à la demande du Gouvernement algérien, a rejeté sa demande de mise en liberté ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme, 14 de la loi du 10 mars 1927, 214-III de la loi du 9 mars 2004, 199, 696-19, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;
"en ce que la chambre de l'instruction a entendu les parties et prononcé son arrêt en chambre du conseil ;
"alors que l'article 14 de la loi du 10 mars 1927, dont les dispositions diffèrent de celles de l'article 696-19 du Code de procédure pénale, demeure applicable aux demandes de mise en liberté présentées par des personnes ayant fait l'objet d'une demande d'extradition formée avant l'entrée en vigueur de la loi du 9 mars 2004 ; qu'en l'espèce, la demande d'arrestation provisoire sur le fondement de laquelle Belkacem X...
Y... a été placé sous écrou extraditionnel ayant été délivrée, aux termes mêmes de l'arrêt, le 20 février 2004, c'est nécessairement à tort que la chambre de l'instruction n'a pas statué en audience publique" ;
Attendu qu'il résulte des mentions de l'arrêt attaqué que la chambre de l'instruction a statué sur la demande de mise en liberté en chambre du conseil, en application des dispositions de l'article 696-19 du Code de procédure pénale renvoyant sur ce point à l'article 199 dudit Code, dispositions qui, dès lors qu'elles diffèrent de celles de l'article 14 de la loi du 10 mars 1927, s'appliquent en l'espèce en vertu de l'article 214-III de la loi du 9 mars 2004, la demande d'extradition ayant été présentée le 25 novembre 2004, soit postérieurement à la date de leur entrée en vigueur, le 1er octobre 2004 ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 5.1, 6.1 et 6.3 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 137, 199, 696-19, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande de mise en liberté présentée par Belkacem X...
Y... ;
"au motif qu' "en matière d'extradition, la mise en liberté ne peut être accordée que pour des motifs exceptionnels ; que l'intéressé n'en justifie d'aucun en l'espèce ; qu'en outre, en l'état de la procédure, la phase judiciaire actuellement terminée n'a pas dépassé la limite du délai raisonnable ; que, d'autre part, il appartient à la chambre de l'instruction de se référer seulement aux garanties offertes par l'intéressé en vue de satisfaire à la demande de l'Etat requérant ; que, bien que Belkacem X...
Y... offre des garanties de représentation, celles-ci ne sont pas suffisantes pour garantir efficacement sa représentation aux autorités algériennes ; que seule la détention est à même de garantir cette représentation ; qu'il y a lieu de craindre qu'il ne se présente pas devant la justice algérienne qu'il juge "illégitime et où la corruption bat son plein" ; qu'au surplus, il convient de relever que certaines dettes ont été contractées dès avant la détention et ont fait déjà auparavant l'objet de poursuites ; que des délais de paiement ont été demandés au Trésor public démontrant que sa situation financière n'est pas aussi favorable qu'il veut bien l'indiquer ; qu'en refusant de renoncer au délai pour attaquer le décret d'extradition, Belkacem X...
Y... manifeste sa volonté de se soustraire à la justice algérienne" ;
"alors que, d'une part, en retenant qu'en matière d'extradition, la mise en liberté ne peut être accordée que de manière exceptionnelle, la chambre de l'instruction a manifestement ajouté une condition à la loi et, partant, vicié son raisonnement quand elle a apprécié les garanties de représentation qui lui étaient présentées ;
"alors que, d'autre part, l'exercice d'une voie de recours est un droit reconnu à tout justiciable qui, sauf abus, ne saurait en aucune façon s'analyser comme la manifestation d'une volonté de se soustraire à l'exécution de la décision attaquée ; qu'en retenant pour rejeter la demande présentée qu'en refusant de renoncer aux délais pour attaquer le décret d'extradition, Belkacem X...
Y... a manifesté sa volonté de se soustraire à la justice algérienne, la chambre de l'instruction a gravement méconnu, tant le droit à la présomption d'innocence de ce dernier que son droit légitime à l'exercice des voies de recours qui lui étaient offertes" ;
Attendu que, nonobstant un motif erroné mais surabondant selon lequel la personne réclamée aurait manifesté sa volonté de se soustraire à la justice algérienne en refusant de renoncer au délai du recours pour excès de pouvoir ouvert à l'encontre du décret d'extradition, les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la chambre de l'instruction s'est déterminée par référence aux garanties offertes par l'intéressé en vue de satisfaire à la demande d'extradition ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Koering-Joulin conseiller rapporteur, M. Le Gall conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Daudé ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;