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19/10/2005 | FRANCE | N°05-81799

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 19 octobre 2005, 05-81799


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-neuf octobre deux mille cinq, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire LABROUSSE, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général FINIELZ ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Antoine,

contre l'arrêt de la cour d'appel de TOULOUSE, chambre correctionnelle, en date du 6 janvier 2005, qui, po

ur escroquerie, tentative d'escroquerie et abus de biens sociaux, l'a condamné à 2 ans ...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-neuf octobre deux mille cinq, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire LABROUSSE, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général FINIELZ ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Antoine,

contre l'arrêt de la cour d'appel de TOULOUSE, chambre correctionnelle, en date du 6 janvier 2005, qui, pour escroquerie, tentative d'escroquerie et abus de biens sociaux, l'a condamné à 2 ans d'emprisonnement, 3 000 euros d'amende, et a prononcé la contrainte par corps ;

Vu le mémoire et les observations complémentaires produits ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 1 et 3 de la Convention européenne des droits de l'homme, 313-1 et 313-3 du Code pénal, préliminaire, 388, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale, violation des droits de la défense, excès de pouvoir, défaut de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Antoine X... coupable d'escroquerie et de tentative d'escroquerie ;

"aux motifs propres que si certains des placements ont été remboursés, ce n'est pas par Antoine X... mais par Guy Y... et Dominique Z..., ce qui - comme l'ont relevé les premiers juges - n'exonère pas le caractère délictueux des agissements d'Antoine X... qui les avait détournés pour faire fonctionner l'Ordre Souverain de Saint Jean de Jérusalem et surtout pour vivre et faire vivre confortablement les fondateurs et animateurs de cet organisme sans réalité juridique ;

"et aux motifs adoptés que deux organismes officiels dénommés l'un "Ordre souverain de Malte", l'autre "Ordre Souverain de Saint Jean de Jérusalem", héritiers de l'Ordre des chevaliers de Malte créé en 1099, ont déposé plainte ; que la création, par Antoine X..., Patrick A... et Eric B...
C..., d'un nouvel Ordre Souverain de Saint Jean de Jérusalem n'ayant aucune légitimité, aucune existence légale puisque ses créateurs ont volontairement choisi de le placer en dehors de tout cadre juridique sous le prétexte de "supra-nationalité", constitue en soi une manoeuvre frauduleuse ; que les explications fournies par les prévenus sur l'objet de l'Ordre Souverain de Saint Jean de Jérusalem sont particulièrement ambiguës et confuses, révélant le caractère fallacieux de l'entreprise : ils font état de la volonté de fédérer les 160 associations se réclamant de l'Ordre Souverain de Saint Jean de Jérusalem dans le monde ; ils affichent un objectif humanitaire mais parlent de mines d'or, de déminage, de création d'une société de transport terrestre, d'une compagnie aérienne que pour Patrick A..., le fonctionnement était basé sur "le nantissement de productivité des pays africains" avec émission de certificats qu'il avait conçus "d'un montant équivalent au résultat prévisionnel sur une période de 10 ans", placé en garantie auprès d'un organisme bancaire ; qu'en fait, en deux années d'activité, aucun programme n'a été réalisé, aucun contrat n'a été signé ; que pourtant l'Ordre Souverain de Saint Jean de Jérusalem a bénéficié de fonds importants ; qu'Antoine X... reconnaît qu'il a réussi à obtenir des financements, extérieurs à l'Ordre Souverain de Saint Jean de Jérusalem pour un montant de 7,3 millions de francs environ correspondant aux prêts faits à titre amical par des personnes faisant confiance à l'Ordre, aux contrats à haut rendement "Performance plus" et aux prêts effectués en vue d'un financement ultérieur ; qu'Eric B...
C... a déclaré qu'il avait lui-même démarché plusieurs personnes qui avaient avancé des fonds à l'Ordre Souverain de Saint Jean de Jérusalem sans aucun contrat ni reconnaissance de dettes pour un montant total d'environ 1 million de

francs ; qu'Antoine X... explique que les sommes remises par les investisseurs au titre des contrats "Performance Plus" qu'il signait lui-même pour la société Prema Finanz ont été déposées sur le compte de cette société, qu'il les a ensuite retirées par chèques ou transferts de fonds ; qu'il évalue à 3 millions de francs environ les sommes qui ont ainsi été utilisées et qui n'ont pas été remboursées ; qu'il indique que les contrats de prêt signés chez Me Berard ont été signés par MM. Y... et Z... ; qu'aucun n'a abouti mais qu'il a pu utiliser directement les sommes déposées par les emprunteurs qui n'étaient pas encaissées sur un compte ; qu'il a précisé avoir agi ainsi avec la somme de 500 000 francs déposée par M. D... ; que les relations ayant existé entre Guy Y..., Dominique Z..., d'une part, et Antoine X..., d'autre part, ne sont pas parfaitement déterminées ; que, toutefois, les deux premiers ont déclaré qu'ils ont créé la société GLSD pour réaliser les opérations de prêts ; qu'en avril 1998, une séparation s'est produite parce qu'Antoine X... avait prélevé indûment des fonds d'un montant total de 3 millions de francs pour l'Ordre Souverain de Saint Jean de Jérusalem ; qu'il est établi qu'ensuite ils ont pris en charge le remboursement des sommes déposées par certaines personnes notamment M. E..., M. D..., M. F..., M. G..., les consorts H... ce qui explique que peu de personnes aient déposé plainte ; que cependant M. I... a remis 10 000 francs qui ne lui sont pas été restitués ; que par contre deux personnes qui n'avaient pas eu affaire à Guy Y... et Dominique Z... n'ont pas été remboursées ; que Maryline J... (et non K... comme écrit par erreur dans

l'ordonnance de renvoi devant le tribunal) épouse L..., a, le 16 décembre 1996, pour le compte dun de ses amis M. M..., signé un acte aux termes duquel elle devait obtenir un prêt de 8 600 000 USD moyennant le versement de la somme de 1 680 000 francs qui a été virée quelques jours plus tard sur le compte de la société Prema Finanz à Monaco ; que Patrick A... reconnaît qu'il est personnellement intervenu pour inciter cette personne à remettre ces fonds qui étaient, selon Antoine X..., destinés à être investis dans des achats de mines d'or ; qu'une reconnaissance de dette au nom de la société Prema Finanz avec engagement de remboursement au 31 décembre 1998 a été établie ;

que Patrick A... a déclaré que "les mines, qui étaient au Mexique n'avaient pas pu être exploitées" et qu'il n'avait "rien compris à tout ça" ; que Maryline L... affirma avoir seulement obtenu 500 000 francs de remboursement et Antoine X... reconnaît rester redevable envers elle d'une somme de plus d'un million de francs ; que Mireille N... a établi en mai 1997, sans signature d'aucun contrat, un chèque de 500 000 francs à l'ordre de la société Prema Finanz qu'elle a remis à Antoine X... qui lui avait promis 10% d'intérêts au bout de 5 ans ; qu'elle n'a pu récupérer que 150 000 francs ; que tous les fonds dont Antoine X... a pu ainsi disposer, d'un montant supérieur à celui de 6 millions de francs retenu dans l'ordonnance de renvoi devant le tribunal a servi sans doute au fonctionnement de l'Ordre Souverain de Saint Jean de Jérusalem, en particulier à payer partie des frais de voyage en Afrique de Jean-Claude O... et d'une personne ayant exercé une activité pour l'Ordre, Mme P... ainsi que la rémunération d'une salariée, Mme Q... ; mais pour la plus grande part, ils ont été utilisés pour les besoins personnels des dirigeants de l'Ordre ; qu'Antoine X..., Patrick A... et Eric B...
C... ont reconnu que d'un commun accord, le premier prélevait des fonds directement sur les comptes de la société Prema Finanz, essentiellement celui ouvert au Crédit Foncier de Monaco, pour assurer leur subsistance ; qu'ainsi, pendant près de deux ans, ont été payés le loyer de leur logement, la location de trois véhicules, les frais divers, téléphone, électricité, restaurant, hôtel ;

que de plus Antoine X... distribuait à chacun des espèces (ainsi qu'à Luc R... et Mme Q...) pour un montant total mensuel qu'il évalue à 46 000 francs ; qu'il a produit un décompte des sommes dont chacun a bénéficié : 926 669 francs pour Patrick A..., 378 000 pour Eric B...
C... et 228 900 francs pour lui-même ; qu'il est certain qu'il a minimisé son profit puisqu'il avait reconnu conserver en espèces 25 000 francs par mois pour assurer son train de vie, qu'il envoyait 3 à 4 000 francs par semaine à sa compagne vivant en Italie et qu'il avait adressé une somme totale de 238 966 francs à une société située dans ce même pays ; ( ) qu'ainsi, il est établi qu'en signant ou faisant signer par des tiers (Guy Y... et Dominique Z...) des contrats de placements à haut rendement ou des promesses de prêts, en s'engageant, sans remise d'écrit, à réaliser le même type d'opérations, lesquelles n'ont eu aucun commencement d'exécution, et ce, sous couvert de la société Prema Finanz, située au Lichtenstein, qui n'avait aucune activité en matière de placements financiers, Antoine X... s'est fait remettre des fonds pour un montant total qui n'est pas inférieur à 6 millions de francs, qu'il a utilisés pour faire fonctionner l'Ordre Souverain de Saint Jean de Jérusalem, organisme n'ayant aucune réalité juridique, mais surtout pour vivre confortablement et faire vivre les fondateurs et animateurs de cet organisme ; qu'il s'est donc rendu coupable du délit d'escroquerie qui lui est reproché ;

que Guy Y... et Dominique Z... estiment avoir été lésés par Antoine X... qui a utilisé les fonds remis par les investisseurs pour son profit personnel et celui de ses amis ; que le remboursement partiel des sommes remises par les investisseurs qu'ils ont eux-mêmes effectué n'efface pas le caractère délictueux des faits commis par Antoine X... ;

"alors, d'une part, que les juges ne peuvent légalement statuer que sur les faits qui leur sont déférés par l'ordonnance de renvoi ou la citation qui les a saisis sauf acceptation expresse du prévenu, dûment constatée par eux, d'être jugé sur des faits distincts ; qu'il ressort de la procédure qu'Antoine X... a été renvoyé devant le tribunal correctionnel de Toulouse pour avoir trompé ou tenté de tromper des tiers "par la mise en place d'un financement d'un ordre international par de faux placements (certificats, valorisation QSJ, placements Performance Plus)" ; qu'en lui reprochant d'avoir obtenu des prêts ou des promesses de prêt au profit de la société Prema Finanz pour faire fonctionner l'Ordre Souverain de Saint Jean de Jérusalem, la cour d'appel a ajouté aux faits de la prévention, en dehors de toute acceptation du prévenu, des faits que celle-ci ne comportait pas, excédant ainsi ses pouvoirs et privant par là-même le demandeur du procès équitable auquel il avait droit ;

"alors, d'autre part, que le délit d'escroquerie n'est caractérisé que si les manoeuvres frauduleuses imputées au prévenu ont été déterminantes de la remise des fonds ; qu'en affirmant qu'Antoine X... s'est rendu coupable d'escroquerie sans préciser en quoi la création de "l'Ordre Souverain de Saint Jean de Jérusalem" a pu déterminer les tiers à souscrire des contrats de placement "Performance Plus" auprès de la société Prema Finanz, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision" ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, et sans excéder les limites de sa saisine, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, les délits d'escroquerie et tentative d'escroquerie, dont elle a déclaré le prévenu coupable ;

D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 241-3 4 du Code de commerce, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de base légale, contradiction de motifs ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Antoine X... coupable d'abus de biens sociaux ;

"aux motifs propres qu'Antoine X... était le gérant de fait de la société Cerimo à partir de mars 1998 ; qu'il a utilisé les locaux, le matériel, le fax, le téléphone à des fins étrangères à l'objet social de cette société ; qu'il a effectué des prélèvements sur le compte bancaire pour payer la location de véhicules mis à disposition des animateurs de "l'Ordre Sauveur" et l'achat de matériel informatique pour Patrick A..., totalement étranger à la société ;

"et aux motifs adoptés que pour faire fonctionner cet organisme n'ayant aucun statut juridique officiel, n'étant constitué ni en société ni en association ni sous la forme d'une autre personne morale, ses dirigeants ont utilisé la société Cerimo située à Menton dont l'activité de promotion immobilière était en sommeil ;

que son gérant était Miguel S...
T... ; qu'Antoine X... en était le gérant de fait et il détenait le pouvoir d'utiliser ses comptes ; que pour financer l'ordre Antoine X..., Patrick A... et Eric B...
C... ont reçu des prêts personnels d'amis croyant en leur action humanitaire, sans remise d'écrit, sur la base d'une simple promesse verbale de remboursement ;

"et aux motifs adoptés encore qu'Antoine X... reconnaît qu'à compter de mars 1998, date à laquelle Miguel S...
T... a accepté de lui "prêter" la société Cerimo, il s'est comporté comme gérant de fait de cette société qui a été utilisée pour le fonctionnement de l'Ordre Souverain de Saint Jean de Jérusalem ;

qu'ainsi, ont été employés à des fins étrangères à l'objet social de cette société, qui était la gestion immobilière, non seulement les locaux mais également le matériel, fax, téléphone ; que des sommes ont été débitées du compte bancaire sur lequel Antoine X... avait procuration pour payer notamment la location des véhicules mis à la disposition des animateurs de l'Ordre Souverain de Saint Jean de Jérusalem ; que le matériel informatique payé par la société Cerimo a été emporté par Patrick A... ; que les comptes de la société n'ayant été alimentés par l'argent collecté par Antoine X... qu'à hauteur de 200 000 francs, la société s'est trouvée en débit d'une somme de l'ordre de 350 à 400 000 francs ; qu'Antoine X... s'est donc rendu coupable du délit d'abus de biens sociaux au préjudice de la société Cerimo ;

"alors qu'il est conforme à l'intérêt d'une société ayant cessé son commerce de la convertir à une nouvelle activité fût-elle différente de celle prévue par ses statuts ; qu'en reprochant à Antoine X... d'avoir utilisé la société Cerimo pour les activités de "l'Ordre Souverain de Saint Jean de Jérusalem" tout en constatant que cette société était "en sommeil" et qu'elle n'avait donc plus aucune activité conforme à son objet statutaire, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs et violé les textes susvisés" ;

Attendu que, pour déclarer Antoine X... coupable d'abus de biens sociaux au préjudice de la société Cerimo, l'arrêt attaqué relève, par motifs propres et adoptés, qu'afin de permettre le fonctionnement de "l'Ordre Souverain de Saint Jean de Jérusalem", dépourvu de tout statut juridique, le prévenu a utilisé la société Cerimo, dont l'activité de promotion immobilière était "en sommeil" ; que, gérant de fait de cette société, il en a utilisé les locaux, le matériel, le fax, ainsi que le téléphone à des fins étrangères à son objet social ; qu'il a enfin effectué des prélèvements sur le compte bancaire de cette société pour payer la location de véhicules et l'achat de matériel informatique, mis à disposition des animateurs de "l'Ordre" ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, et dès lors que l'utilisation des fonds d'une société, aurait-elle cessé toute activité, à seule fin de permettre le fonctionnement d'une structure dépourvue de la personnalité morale, est nécessairement contraire à l'intérêt social, la cour d'appel a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;

Mais sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 132-19, 133-10, 133-11, 133-12 et 133-16 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a condamné Antoine X... à la peine de deux ans d'emprisonnement ;

"aux motifs que force est de constater que les premiers juges ont parfaitement motivé la peine d'emprisonnement ferme prononcée à l'encontre d'Antoine X... et qu'il suffira d'ajouter, en la confirmant, d'une part, qu'Antoine X... s'est bien enrichi personnellement dans la mesure où les fonds détournés lui ont permis de vivre plus que confortablement pendant deux années, et d'autre part, qu'il avait déjà été condamné en juillet 1981 à deux années d'emprisonnement pour banqueroute simple et frauduleuse et abus de biens sociaux et en novembre 1991, à trois années d'emprisonnement pour escroquerie et qu'il apparaît n'avoir tiré aucun enseignement des peines ainsi prononcées, ce qui exclut de lui infliger pour ces nouveaux délits une peine inférieure à celle prononcée en 1991 pour des faits d'escroquerie d'une gravité moindre ;

"alors que, d'une part, la juridiction ne peut prononcer une peine d'emprisonnement sans sursis qu'après avoir spécialement motivé le choix de cette peine ; qu'en énonçant que les premiers juges ont parfaitement motivé la peine d'emprisonnement ferme tandis que le jugement ne comportait aucun motif spécial relatif au choix de cette peine, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

"alors que, d'autre part, la réhabilitation est acquise de plein droit à la personne physique condamnée qui n'a pas, dans les dix ans à compter de l'expiration de la peine, subit de nouvelles condamnations à une peine criminelle ou correctionnelle ; que la réhabilitation interdit à toute personne d'en rappeler l'existence sous quelque forme que ce soit ; qu'en se fondant sur des condamnations prononcées respectivement en juillet 1981 et en novembre 1991, nécessairement réhabilitées, pour motiver la peine d'emprisonnement, la cour d'appel a violé les textes susvisés" ;

Vu les articles 133-11 et 133-16 du Code pénal ;

Attendu qu'il résulte de ces textes qu'une condamnation réhabilitée ne peut être prise en considération pour la détermination de la peine ;

Attendu que les juges du second degré, avant de prononcer une peine privative de liberté, relèvent, par motifs propres, qu'Antoine X... "avait déjà été condamné en juillet 1981 à deux années d'emprisonnement pour banqueroute simple et frauduleuse et abus de biens sociaux et, en novembre 1991, à trois années d'emprisonnement pour escroquerie ; qu'il apparaît n'avoir tiré aucun enseignement des peines ainsi prononcées, ce qui exclut de lui infliger pour ces nouveaux délits une peine inférieure à celle prononcée en 1991 pour des faits d'escroquerie d'une gravité moindre" ;

Mais attendu que les pièces de procédure mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer qu'Antoine X... bénéficie de plein droit de la réhabilitation pour les condamnations visées, par application de l'article 133-13, 3 du Code pénal, entré en vigueur le 1er mars 1994 ; qu'en se déterminant pour le prononcé de la peine en fonction d'un élément que la loi lui fait interdiction de prendre en considération, la cour d'appel a méconnu les principes susénoncés et les textes susvisés ;

Que dès lors la cassation est encourue ;

Et sur le moyen relevé d'office pris de l'entrée en vigueur de la loi du 9 mars 2004 relative à la contrainte judiciaire ;

Vu les articles 198 et 207.II de ladite loi ;

Attendu que les textes susvisés interdisent aux juridictions répressives de prononcer la contrainte par corps, postérieurement au 1er janvier 2005, date d'entrée en vigueur de la loi précitée ;

Attendu qu'après avoir condamné Antoine X... à une peine d'amende, la cour d'appel a prononcé la contrainte par corps ;

Mais attendu que cette décision postérieure au 1er janvier 2005 doit être censurée par application du principe susénoncé et des textes susvisés ;

Par ces motifs,

CASSE et ANNULE, en ses seules dispositions relatives à la peine et à la contrainte par corps, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Toulouse, en date du 6 janvier 2005, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel d'Agen, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Toulouse et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Labrousse conseiller rapporteur, M. Challe conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 05-81799
Date de la décision : 19/10/2005
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° SOCIETE (règles générales) - Société en général - Abus de biens sociaux - Eléments constitutifs - Usage des biens ou du crédit contraire à l'intérêt de la société - Applications diverses.

1° L'utilisation des fonds d'une société, aurait-elle cessé toute activité, à seule fin de permettre le fonctionnement d'une structure dépourvue de la personnalité morale, est nécessairement contraire à l'intérêt social.

2° CONTRAINTE PAR CORPS - Domaine d'application - Exclusion - Cas.

2° Les articles 198 et 207.II de la loi du 9 mars 2004 interdisent aux juridictions répressives de prononcer la contrainte par corps, postérieurement au 1er janvier 2005, date d'entrée en vigueur de la loi précitée.


Références :

1° :
2° :
Code de commerce L241-3 4°
Loi 2004-204 du 09 mars 2004 art. 198, art. 207 II

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 06 janvier 2005

Sur le n° 2 : Dans le même sens que : Chambre criminelle, 2005-03-09, Bulletin criminel 2005, n° 82, p. 295 (annulation partielle sans renvoi).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 19 oct. 2005, pourvoi n°05-81799, Bull. crim. criminel 2005 N° 261 p. 910
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2005 N° 261 p. 910

Composition du Tribunal
Président : M. Cotte
Avocat général : M. Finielz.
Rapporteur ?: Mme Labrousse.
Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2005:05.81799
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