AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 19 septembre 2003), que les sociétés Compagnie financière du Crédit mutuel de Bretagne, Fédéral Finance et Fédéral Gestion (les sociétés) ont assigné devant un tribunal de commerce les sociétés Axa Corporate solutions, GAN Assurances et Groupement mutuel titre (les assureurs) en paiement de certaines sommes ; que par jugement du 7 juillet 1998, le Tribunal a sursis à statuer sur la demande, dans l'attente de la décision à intervenir aux Pays-Bas sur des poursuites pénales pour lesquelles les sociétés s'étaient constituées partie civile ; qu'après conclusions de reprise d'instance déposées par les sociétés le 25 janvier 2001, le Tribunal a constaté, par jugement du 29 avril 2002, que la péremption de l'instance était acquise, plus de deux ans s'étant écoulés depuis la décision de classement sans suite de l'enquête pénale prise le 1er décembre 1998 par l'autorité compétente ;
Attendu que les sociétés font grief à l'arrêt d'avoir confirmé le jugement, alors, selon le moyen :
1 / que les sociétés ne pouvaient se voir opposer la péremption de l'instance pour absence de diligences à compter de la décision du procureur de la Reine de classement sans suite de la procédure pénale, laquelle décision avait été rendue à leur insu ; que le délai de péremption n'avait pu commencer à courir qu'à compter de la date à laquelle cette décision leur avait été notifiée ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 392 du nouveau Code de procédure civile et 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
2 / qu'en jugeant que même si l'on devait considérer que le délai de péremption n'avait commencé à courir qu'à compter de la date à laquelle les sociétés avaient eu connaissance de la décision de classement sans suite, soit le 6 octobre 1999, elles avaient disposé d'un délai de plus de treize mois pour accomplir des diligences interruptives de péremption, la cour d'appel a amputé le délai légal de deux ans de près de onze mois ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles 386 et 392 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que l'arrêt retient exactement que, lorsque la suspension du délai de péremption est la conséquence d'une décision de sursis à statuer jusqu'à la survenance d'un événement déterminé, un nouveau délai court à compter de la réalisation de cet événement ;
Et attendu qu'en relevant que les sociétés avaient été informées de la décision pénale dans des conditions qui leur auraient permis d'effectuer des diligences interruptives de péremption, la cour d'appel a, sans méconnaître la durée du délai de péremption, caractérisé l'absence d'atteinte effective au droit d'accès à un tribunal dont elles bénéficiaient ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les sociétés Compagnie financière du Crédit mutuel de Bretagne, Fédéral Finance et Fédéral Gestion aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande des sociétés Compagnie financière du Crédit mutuel de Bretagne, Fédéral Finance et Fédéral Gestion ; les condamne, in solidum, à payer aux sociétés Axa Corporate solutions assurances et GAN Assurances, chacune, la somme de 2 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze septembre deux mille cinq.