AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le second moyen :
Vu l'article 678 du Code civil, ensemble l'article 544 du même Code ;
Attendu que l'on ne peut avoir des vues droites ou fenêtres d'aspect, ni balcons ou autres semblables saillies sur l'héritage clos ou non clos de son voisin, s'il n'y a dix-neuf décimètres de distance entre le mur où on les pratique et ledit héritage, à moins que le fonds ou la partie du fonds sur lequel s'exerce la vue soit déjà grevé, au profit du fonds qui en bénéficie, d'une servitude de passage faisant obstacle à l'édification de constructions ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 27 mai 2003, rectifié le 24 février 2004), que les époux X..., aux droits desquels est la société B2J, ont assigné au possessoire les époux Y... pour qu'ils s'abstiennent de faire stationner leur véhicule à moins de 1,90 mètre d'une vue dont bénéficie la parcelle n° 504 ;
Attendu que, pour interdire aux époux Y... de faire stationner leurs véhicules à une distance inférieure à 1,90 mètre de la fenêtre des époux X..., l'arrêt retient que les époux X... disposent d'un droit acquis par prescription trentenaire à conserver la fenêtre donnant sur la parcelle n° 123 appartenant aux époux Y... ; que le débiteur d'une servitude de vue ne peut édifier de construction dans un rayon de dix neuf décimètres à partir du parement extérieur du mur où l'ouverture est faite, qu'il ne peut davantage stationner de véhicules puisque cette opération doit être assimilée à la création d'une vue ; que le stationnement de véhicules à une distance inférieure à dix neuf décimètres constitue donc un trouble possessoire ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le propriétaire du fonds grevé d'une servitude de vue droite est seulement tenu de ne pas édifier de construction à moins de dix-neuf décimètres du mur où l'ouverture se fait et qu'il ne saurait subir d'autre restriction à son droit de propriété, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le premier moyen, qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a interdit aux époux Y... de faire stationner leurs véhicules à une distance inférieure à 1, 90 mètre de la fenêtre, l'arrêt rendu le 27 mai 2003 rectifié par arrêt du 24 février 2004, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne les époux X... et la société B2J, ensemble, à payer aux époux Y..., la somme de 2 000 euros ; rejette la demande de la société B2J ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé et de l'arrêt rectifié ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize juillet deux mille cinq.