AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche, qui est recevable :
Vu l'article 3, alinéa 1er, de la loi du 5 juillet 1985 ;
Attendu que seule est inexcusable au sens de ce texte la faute volontaire d'une exceptionnelle gravité exposant sans raison valable son auteur à un danger dont il aurait dû avoir conscience ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Farid X..., qui marchait sur une route départementale non éclairée, de nuit, a été mortellement blessé par un véhicule conduit par M. Y... ; que ce dernier, relaxé des fins de la poursuite pénale engagée contre lui du chef d'homicide involontaire, ainsi que son assureur, la MACIF, ont été assignés en responsabilité et indemnisation devant le tribunal de grande instance par les parents de la victime, M. et Mme Lamri X..., agissant tant en leur nom personnel qu'au nom de leur fille mineure, ainsi que par ses autres frères et soeurs (les consorts X...) ;
Attendu que, pour débouter les consorts X... de leurs demandes, l'arrêt énonce qu'il appartient aux juges du fond de caractériser tous les éléments de la faute inexcusable, l'absence d'une de ces circonstances et, a fortiori de plusieurs, excluant en général le caractère inexcusable de la faute du piéton victime ; qu'en l'espèce, Farid X... circulait au milieu de la voie de gauche sur une route départementale, hors agglomération, à 4 heures 20 du matin, par temps de pluie, en un lieu dépourvu d'éclairage public, et a été heurté de plein fouet par le véhicule piloté par M. Y... ; que le prélèvement sanguin pratiqué sur la victime a révélé qu'elle était dans un état d'ivresse caractérisé par la présence dans le sang d'une teneur en alcool de 2,10 grammes pour mille ; qu'ainsi, la faute commise par Farid X... était d'une exceptionnelle gravité ;
Qu'en l'état de ces énonciations, d'où il ne résulte pas l'existence d'une faute inexcusable, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 mars 2003, entre les parties, par la cour d'appel de Metz ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nancy ;
Condamne M. Y... et la société La MACIF aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de M. Christophe Y... et de la société La MACIF ; les condamne à payer aux consorts X... la somme de 2 000 euros ;
Dit que sur les diligences du Procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente juin deux mille cinq.