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31/03/2005 | FRANCE | N°05-81260

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 31 mars 2005, 05-81260


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le trente et un mars deux mille cinq, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller KOERING-JOULIN et les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LAUNAY ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X...
Y... Unai,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PAU, en date du 18 février 2005, qui

a autorisé sa remise aux autorités judiciaires espagnoles en exécution d'un mandat d'arr...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le trente et un mars deux mille cinq, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller KOERING-JOULIN et les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LAUNAY ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X...
Y... Unai,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PAU, en date du 18 février 2005, qui a autorisé sa remise aux autorités judiciaires espagnoles en exécution d'un mandat d'arrêt européen ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 695-13, 695-23, 593 du Code de procédure pénale, 421-1, 421-2, 421-2-1 du Code pénal, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a ordonné la remise de Unai X...
Y... aux autorités espagnoles en exécution d'un mandat d'arrêt européen délivré pour une infraction de participation à une organisation terroriste ;

"aux motifs que les faits pour lesquels le mandat d'arrêt européen a été admis, qualifiés par l'Etat d'émission de participation à une organisation terroriste, entrent dans l'une des catégories d'infractions prévues par l'article 695-23 2 du Code de procédure pénale, pour lesquelles le mandat d'arrêt européen est exécuté sans contrôle de la double incrimination ;

"alors, d'une part, que la liste des infractions énumérées à l'article 695-23 2 du Code de procédure pénale, pour lesquelles est exclu le contrôle de la double incrimination, doit s'interpréter restrictivement ; que, si y figurent respectivement la "participation à une organisation criminelle" et le "terrorisme", en revanche, la participation à une organisation terroriste n'y figure pas ; que, dès lors, la chambre de l'instruction devait s'assurer qu'il existait en France une incrimination semblable ; que, faute de l'avoir fait, elle a méconnu l'étendue de ses pouvoirs ;

"alors, d'autre part, qu'en droit pénal français la participation à un groupement ne s'assimile à un acte de terrorisme que si cette participation est caractérisée par des actes matériels, en vue de commettre des actes de terrorisme, au sens des articles 421-1 et 421-2 du Code pénal ; que le mandat d'arrêt ne faisait aucun état d'actes de terrorisme au sens des textes précités -se bornant à faire état de la préparation d'une journée d'action contre les entreprises de travail temporaire, avec graffitis et "pressions" sur les sièges des partis et les sièges patronaux-, ni de faits matériels imputables à la personne recherchée ; que, en octroyant sa remise aux autorités espagnoles, la chambre de l'instruction a violé la loi" ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 695-13, 695-23, 593 du Code de procédure pénale, 421-1, 421-2, 421-2-1 du Code pénal, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a ordonné la remise d'Unai X...
Y... aux autorités espagnoles en exécution d'un mandat d'arrêt européen délivré pour une infraction de participation à une organisation terroriste ;

"aux motifs que les énonciations d'un document complémentaire au mandat, daté du 3 février 2005, satisfont aux prescriptions posées par l'article 695-13 du Code de procédure pénale en ce qu'elle précisait les dates, les lieux et les circonstances de la commission de l'infraction, ainsi que le degré d'implication de l'intéressé ;

"alors, d'une part, que ne répond pas aux exigences de l'article 695-13 précité, et notamment à l'obligation pour le mandat de contenir "la date, le lieu et les circonstances dans lesquels l'infraction a été commise ainsi que le désir de participation de la personne recherchée", le mandat qui ne comporte rien d'autre qu'une description des structures de recrutement et d'information de l'ETA, sans aucune allusion à la personne recherchée autre que l'on aurait découvert à son domicile des "documents" "contenant les données de cette organisation" et faisant allusion à la préparation de journées de lutte et de mobilisation pour "réaliser des graffitis et faire pression sur les sièges des partis politiques et les sièges patronaux" ; que ces énonciations ne caractérisent aucune infraction et en toute hypothèse aucune participation de la personne recherchée à ces hypothétiques infractions ;

"alors, d'autre part, que le mandat d'arrêt européen doit se suffire à lui-même et que sa régularité ne peut pas être complétée par des pièces parvenues ultérieurement dans le but de combler ses éventuelles lacunes ; que la chambre de l'instruction a ainsi excédé ses pouvoirs et dépassé le champ de sa saisine en examinant la validité formelle du mandat au vu de pièces produites postérieurement à son début d'exécution, le 28 janvier 2005 ;

"alors, encore, que le document complémentaire, daté du 3 février 2005, ne figure pas au dossier de la procédure ; que la Cour de cassation n'est donc pas en mesure d'en vérifier la régularité ni les mentions ;

"alors, enfin, et en toute hypothèse, que les termes mêmes du document, tels que rappelés par l'arrêt attaqué, ne comportent aucune indication précise sur les faits reprochés, et aucune indication d'aucune sorte sur la prétendue implication d'Unai X...
Y... dans ces faits ; que le mandat doit donc être annulé" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que, pour autoriser, par application de l'article 695-23, alinéa 2, du Code de procédure pénale, la remise d'Unai X...
Y... aux autorités judiciaires espagnoles en exécution d'un mandat d'arrêt européen émis le 28 janvier 2005 par le tribunal central d'instruction de l'Audiencia nacional de Madrid, complété par un document émanant du juge mandant et daté du 3 février 2005, l'arrêt attaqué relève que l'intéressé est recherché pour des faits de participation à une organisation terroriste, en l'espèce, pour avoir, courant 1996, 1998, 2003 et 2004, à Vizcaya, Ondarroa, Lequito et Marquina, procédé, au profit de l'organisation ETA, au repérage d'activistes et à la collecte d'informations dans le but de commettre des attentats terroristes ;

Attendu qu'en cet état, la cour d'appel a justifié sa décision ;

D'où il suit que les moyens doivent être écartés ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 695-11, 695-13 du Code de procédure pénale, 593 du même Code, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a ordonné la remise d'Unai X...
Y... aux autorités espagnoles en exécution d'un mandat d'arrêt européen délivré pour une infraction de participation à une organisation terroriste ;

"aux motifs que la mention du mandat selon laquelle il est pris sur le fondement d'un arrêt de mise en accusation et mandat d'emprisonnement en date du 30 avril 2004 pris dans une procédure portant en Espagne la référence 20/03-Y est suffisante pour répondre à la disposition de l'article 695-13 du Code de procédure pénale qui exige qu'il soit fait mention de l'indication de l'existence d'un jugement exécutoire, d'un mandat d'arrêt ou de toute autre décision judiciaire ayant la même force ;

"alors, d'une part, que l'intéressé faisait valoir qu'il résultait de réquisitions prises en Espagne le 28 juillet 2004, soit postérieures aux décisions du 30 avril 2004, et produites en France, qu'à l'issue de la procédure espagnole Unai X...
Y... n'avait pas fait l'objet de poursuites et n'était pas renvoyé devant le tribunal ; que, en s'abstenant totalement de s'expliquer sur cet élément et sur un éventuel abandon des poursuites en Espagne, la chambre de l'instruction n'a pas donné de base légale à sa décision ;

"alors, d'autre part, qu'en s'abstenant totalement de répondre au mémoire d'Unai X...
Y... faisant valoir l'existence de risques de torture, rendant impossible l'exécution du mandat, la chambre de l'instruction a privé sa décision de tout motif" ;

Attendu que le moyen, qui soutient que la personne recherchée aurait bénéficié, le 28 juillet 2004, d'un abandon des poursuites de la part du procureur espagnol, alors que le 28 janvier 2005 un mandat d'arrêt européen a été délivré contre elle, est infondé ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt a été rendu par une chambre de l'instruction compétente et régulièrement composée, que la procédure est régulière ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Koering-Joulin conseiller rapporteur, M. Le Gall conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Randouin ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 05-81260
Date de la décision : 31/03/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

MANDAT D'ARRET EUROPEEN - Emission - Conditions d'émission - Mandat - Formes - Mentions nécessaires - Date, lieu, circonstances de commission de l'infraction et degré de participation de la personne recherchée - Mentions complétées ultérieurement par un document du juge mandant

Satisfait aux dispositions de l'article 695-13 du Code de procédure pénale le mandat d'arrêt européen dont les mentions relatives aux faits sont ultérieurement complétées par un document du juge mandant précisant la date, le lieu et les circonstances de l'infraction ainsi que le degré de participation de la personne recherchée


Références :

Code de procédure pénale 695-13, 695-23 al. 2

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Pau, 18 février 2005


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 31 mar. 2005, pourvoi n°05-81260, Bull. crim. criminel 2005, n° 115, p. 401
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2005, n° 115, p. 401

Composition du Tribunal
Président : M. Cotte
Avocat général : M. Launay
Rapporteur ?: Mme Koering-Joulin
Avocat(s) : la SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2005:05.81260
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