AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, qu'à la suite de la saisine d'une commission de surendettement des particuliers, un juge de l'exécution a rééchelonné la créance de la caisse régionale de Crédit agricole mutuel du Pas-de-Calais, aux droits de laquelle intervient la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Nord de la France (la Caisse) envers Mme X... et résultant de deux prêts consentis par la Caisse à celle-ci et à son ancien époux pour l'acquisition d'un immeuble d'habitation ; que la Caisse a ultérieurement fait délivrer à l'ancien époux de Mme X... un commandement aux fins de saisie de l'immeuble qui avait été attribué à Mme X... à la suite des opérations de liquidation-partage de la communauté ; qu'un tribunal de grande instance a validé les effets du commandement et prononcé l'adjudication de l'immeuble par un jugement qui a été cassé par un arrêt de la Cour de Cassation (2ème civ, 13 janvier 2000, pourvoi n° 97-22.251) ; qu'aucune des parties n'ayant ensuite saisi la juridiction de renvoi, Mme X... a assigné la Caisse afin d'obtenir sa condamnation à lui payer des dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de l'irrégularité de la saisie immobilière pratiquée à son encontre ;
Sur la recevabilité du moyen, contestée par la défense :
Attendu que la Caisse fait valoir que Mme X... ne s'est pas prévalue devant la cour d'appel des dispositions de l'article 1413 du Code civil et que, dès lors, le moyen fondé sur une méconnaissance de ce texte est nouveau et partant irrecevable ;
Mais attendu que ce moyen a été implicitement invoqué par Mme X... qui contestait dans ses écritures le droit de la Caisse de poursuivre le recouvrement d'une dette de son ancien époux sur un bien qui, par suite des opérations de liquidation partage, n'était plus commun ;
que, dès lors, le moyen, qui n'est pas nouveau, est recevable ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 331-9 du Code de la consommation ;
Attendu que pour rejeter la demande de Mme X..., la cour d'appel retient que la Caisse, qui n'invoquait pas une créance contre Mme X..., était fondée, en sa qualité de créancier hypothécaire de l'ancien époux de Mme X..., à saisir l'immeuble en vertu de son droit de suite, dès lors que celle-ci, en sa qualité de tiers détenteur, ne pouvait se prévaloir des dispositions de l'article L. 331-9 du Code de la consommation et lui opposer le plan de surendettement dont elle bénéficiait ;
Qu'en statuant ainsi alors que la Caisse, qui poursuivait le recouvrement d'une créance commune à Mme X... et à son ancien époux, ne pouvait exercer une procédure d'exécution à l'encontre des biens de Mme X... pendant la durée de la mesure de rééchelonnement dont celle-ci bénéficiait, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 mai 2003, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai, autrement composée ;
Condamne la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Nord de France aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes respectives de Mme X... et de la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Nord de France ;
Dit que sur les diligences du Procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix février deux mille cinq.