AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique qui est recevable comme étant de pur droit :
Vu la loi des 16-24 août 1790, ensemble la loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Crédit d'Equipement des Petites et Moyennes Entreprises (CEPME) a accordé le 19 octobre 1976 un prêt à M. X... ; que, certaines échéances de ce prêt n'ayant pas été réglées, le CEPME a délivré, le 17 juillet 1981, un commandement aux fins de saisie immobilière de parcelles de terrain appartenant au débiteur ; que le tribunal de grande instance de Tulle, par jugement du 4 mai 1983 a déclaré Mme Y..., adjudicataire de ces biens qu'elle a vendus le 5 janvier 1988 à l'Etat (ministère des postes et télécommunications), aux droits duquel est venue par la suite La Poste ;
que, par arrêt du 21 février 1995, la cour d'appel de Nîmes a prononcé la nullité de la vente sur adjudication ; que, par arrêt du 15 janvier 2001, la cour d'appel de Toulouse a déclaré le CEPME responsable du préjudice subi par M. X... du fait de la vente de l'immeuble et l'a condamné à indemniser ce dernier ; que M. X... ayant, en mars 1998, assigné la Poste et la Caisse régionale de garantie des notaires, devant la juridiction judiciaire aux fins de voir constater qu'il était propriétaire des parcelles litigieuses, de condamner La Poste à lui payer une indemnité d'occupation depuis le 5 janvier 1988 jusqu'à la remise en état du terrain libre de toute construction, d'ordonner la suppression des constructions, sous astreinte, aux frais de La Poste et de la Caisse régionale de garantie des notaires et de prononcer une condamnation solidaire à l'égard de cette dernière pour toutes condamnations prononcées ;
Attendu que, pour décider de surseoir à statuer jusqu'à ce que la juridiction administrative se soit prononcée sur le point de savoir si les constructions réalisées sur les parcelles précitées faisaient partie du domaine public et si la règle de l'inaliénabilité du domaine public pouvait être opposée à la demande de M. X..., l'arrêt attaqué énonce que La Poste fait valoir que le bâtiment est partie intégrante du domaine public et que, l'acquisition des parcelles par l'Etat est antérieure à la loi du 2 juillet 1990 dont l'article 22 dispose que l'ensemble des biens immobiliers du domaine public de l'Etat attachés aux services relevant de la direction générale de La Poste sont transférés de plein droit en pleine propriété à La Poste ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'aux termes de l'article 23 de la loi du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de La Poste et des télécommunications, modifié par la loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001, "les biens immobiliers de La Poste relevant de son domaine public sont déclassés. Ils peuvent être librement gérés et aliénés dans les conditions du droit commun", ce dont résultait l'absence de caractère sérieux de la contestation soulevée par La Poste, la cour d'appel, qui n'avait à prendre en considération que la situation des biens litigieux au regard de cette disposition applicable au moment où elle statuait, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 août 2002, entre les parties, par la cour d'appel de Limoges ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Riom ;
Condamne La Poste aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la Caisse régionale de garantie des notaires de la cour d'appel de Limoges et condamne La Poste à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit février deux mille cinq.