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01/02/2005 | FRANCE | N°04-86768

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 01 février 2005, 04-86768


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le premier février deux mille cinq, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller ANZANI, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DI GUARDIA ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Maamar,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 1ère section, en date du 8 novembre 2004, qui,

dans l'information suivie contre lui pour infractions à la législation sur les stupéfi...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le premier février deux mille cinq, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller ANZANI, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DI GUARDIA ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Maamar,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 1ère section, en date du 8 novembre 2004, qui, dans l'information suivie contre lui pour infractions à la législation sur les stupéfiants, a, sur renvoi après cassation, confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention le plaçant en détention provisoire ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 5 et 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, préliminaire, 145-1, 171, 172, 174, 186, alinéa 1er, 206, 207, 569, 591, 593 et 802 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale, excès de pouvoir, ensemble violation des droits de la défense ;

"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance de mise en détention du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Créteil, en date du 2 juin 2004 ;

"aux motifs que, si le dossier remis au juge des libertés et de la détention et aux parties le 28 mai 2004 et le 2 juin 2004 ne comportait pas les pièces annulées par l'arrêt rendu par la chambre de l'instruction le 28 mai 2004, pièces qui ont été en effet retirées prématurément du dossier, il est constant que c'est le mis en examen lui-même qui avait préalablement soulevé la nullité desdites pièces ; que ce fait établit que leur retrait prématuré du dossier soumis au juge des libertés et de la détention n'a pu lui faire grief ;

que la mise en examen du 14 mai 2004 sur laquelle repose la saisine du juge des libertés et de la détention est régulière ; que, lorsqu'une ordonnance de placement en détention a été annulée pour vice de forme (en l'espèce, du fait de l'absence de signature du magistrat instructeur sur l'ordonnance de saisine du juge des libertés et de la détention), rien n'interdit au magistrat instructeur d'envisager à nouveau le placement en détention, ni au juge des libertés et de la détention de décider de cette mesure dans la même information et pour les mêmes faits, la seule conséquence de l'irrégularité étant, en effet, l'annulation éventuelle de l'acte visé ; qu'en l'espèce, l'ordonnance du 14 mai 2004 ayant été annulée pour vice de forme, aucune disposition légale n'interdisait la délivrance d'un nouveau titre de détention, même sans élément nouveau, dans la même procédure et à l'égard du même mis en examen après saisine régulière du juge des libertés et de la détention ;

"1 ) alors qu'il résulte des dispositions de l'article 145 du Code de procédure pénale que la saisine du juge des libertés et de la détention résulte, non de la mise en examen de la personne concernée, mais d'une ordonnance spécifique du juge d'instruction tendant au placement en détention de celle-ci ;

"2 ) alors que, l'irrégularité de l'ordonnance de saisine du juge des libertés et de la détention prise par le magistrat-instructeur entraîne nécessairement, par voie de conséquence, l'irrégularité de l'ordonnance de mise en détention ;

qu'en l'espèce, contrairement à ce qu'a énoncé la cour de renvoi et comme le soulignait la personne mise en examen dans son mémoire régulièrement déposé et de ce chef délaissé, la saisine du juge des libertés et de la détention était irrégulière dès lors qu'il résulte de la procédure soumise à la Cour de cassation qu'en l'état d'une décision d'annulation pour vice de forme de l'ordonnance de saisine du juge des libertés et de la détention en date du 14 mai 2004 prononcée par la chambre de l'instruction le 28 mai 2004, qui n'était pas définitive compte tenu de l'effet suspensif du délai de pourvoi, le juge d'instruction a, par un excès de pouvoir caractérisé, pris l'initiative le 28 mai 2004, de signer une nouvelle ordonnance de saisine du juge des libertés et de la détention visant expressément, comme sa précédente ordonnance, les réquisitions du ministère public du 14 mai 2004 et ne faisant état d'aucun fait nouveau, ordonnance au vu de laquelle le juge des libertés et de la détention a signé l'ordonnance entreprise et qu'en cet état la chambre de l'instruction avait l'obligation de relever cet excès de pouvoir à peine de censure de sa décision ;

"3 ) alors que, le retrait de la procédure d'actes annulés ne peut intervenir que dans des conditions strictes définies par la loi, c'est-à-dire en application d'une décision d'annulation définitive de la chambre de l'instruction et que la décision du parquet de procéder prématurément au retrait de pièces de la procédure en méconnaissance de cette règle substantielle porte atteinte au principe de l'intangibilité du dossier et par conséquent atteinte aux intérêts de la défense ;

"4 ) alors que, dans son mémoire régulièrement déposé devant la chambre de l'instruction, Maamar X... démontrait que le retrait prématuré des pièces du dossier de la procédure avait été en l'espèce le préalable nécessaire à la décision, procédant d'un excès de pouvoir caractérisé du juge d'instruction, en date du 28 mai 2004, de substituer une nouvelle ordonnance de saisine du juge des libertés et de la détention à celle qu'il avait prise le 14 mai 2004 et dont il n'ignorait pas le caractère et se trouve donc à l'origine du stratagème qui a abouti à son placement irrégulier en détention provisoire le 2 juin 2004 et qu'en ne s'expliquant pas sur ce chef péremptoire de conclusions, la chambre de l'instruction a privé sa décision de base légale" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que Maamar X..., mis en examen pour infractions à la législation sur les stupéfiants et placé en détention provisoire par ordonnance du juge des libertés et de la détention, en date du 14 mai 2004, a relevé appel de cette décision ; que, devant la chambre de l'instruction, il a excipé de la nullité du titre de détention au motif que l'ordonnance saisissant le juge des libertés et de la détention ne comportait pas la signature du juge d'instruction ; que, par arrêt du 28 mai 2004, les juges, après avoir fait droit à cette argumentation, ont ordonné la mise en liberté immédiate de Maamar X... ; que, le même jour, le juge d'instruction, après avoir délivré un mandat d'amener à l'encontre de l'intéressé, a saisi le juge des libertés et de la détention qui a ordonné sa mise en détention pour les mêmes faits ; que Maamar X... a interjeté appel ;

Attendu qu'en confirmant l'ordonnance entreprise, par les motifs repris au moyen, la chambre de l'instruction a justifié sa décision ;

Que, d'une part, aucune disposition légale ou conventionnelle n'interdit lorsque, comme en l'espèce, le mandat de dépôt a été annulé pour vice de forme, de placer à nouveau en détention provisoire la personne mise en examen, dans la même information et à raison des mêmes faits ;

Que, d'autre part, lorsque la chambre de l'instruction statue sur l'appel relevé contre une ordonnance du juge des libertés et de la détention en matière de détention provisoire, l'arrêt est immédiatement exécutoire en application de l'article 207 du Code de procédure pénale ;

D'où il suit que le moyen, inopérant en ce qu'il invoque l'article 569 dudit Code, inapplicable en la cause, ne saurait être admis ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles

5 et 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, préliminaire, 186, 211 et suivants et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale, excès de pouvoir ;

"au motif qu'il existe, en dépit de ses dénégations, des indices graves et concordants rendant vraisemblable l'implication de Maamar X... dans les faits pour lesquels il est mis en examen ;

"alors que, la chambre de l'instruction, saisie d'un contentieux en matière de détention provisoire, ne saurait, sans excéder ses pouvoirs et méconnaître, ce faisant, le principe de la présomption d'innocence, se prononcer sur le bien-fondé de la poursuite" ;

Attendu qu'en énonçant, pour confirmer le placement en détention, qu'il existe des indices graves et concordants rendant vraisemblable l'implication de Maamar X... dans les faits pour lesquels il est mis en examen, l'arrêt n'a pas porté atteinte à la présomption d'innocence ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier, tant en la forme qu'au regard des articles 137-3, 143-1 et suivants du Code de procédure pénale ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Cotte président, Mme Anzani conseiller rapporteur, MM. Joly, Le Gall, Mme Chanet, MM. Pelletier, Arnould, Mme Koering-Joulin, MM. Beyer, Corneloup, Pometan, Mmes Palisse, Guirimand conseillers de la chambre, M. Sassoust, Mme Caron, MM. Valat, Lemoine, Mmes Ménotti, Labrousse conseillers référendaires ;

Avocat général : M. Di Guardia ;

Greffier de chambre : Mme Krawiec ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 04-86768
Date de la décision : 01/02/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° CHAMBRE DE L'INSTRUCTION - Détention provisoire - Annulation d'une ordonnance de placement - Mise en liberté - Caractère exécutoire.

1° DETENTION PROVISOIRE - Chambre de l'instruction - Décision de mise en liberté - Caractère exécutoire.

1° Lorsque la chambre de l'instruction, statuant sur l'appel d'une ordonnance du juge des libertés et de la détention provisoire, constate que le titre de détention est nul et ordonne en conséquence la mise en liberté de la personne mise en examen, l'arrêt, en application de l'article 207 du Code de procédure pénale, est immédiatement exécutoire.

2° DETENTION PROVISOIRE - Mandat - Mandat décerné par le juge des libertés et de la détention - Mandat de dépôt - Annulation - Nouveau mandat - Conditions - Détermination.

2° INSTRUCTION - Mandats - Mandat de dépôt - Détention provisoire - Annulation - Nouveau mandat - Conditions - Détermination.

2° Lorsqu'un mandat de dépôt est annulé par la chambre de l'instruction pour vice de forme (absence de signature du juge d'instruction dans l'ordonnance saisissant le juge des libertés et de la détention), aucune disposition du Code de procédure pénale ne fait obstacle à ce que, après exécution de l'arrêt ordonnant la mise en liberté, le juge d'instruction délivre un mandat d'amener contre la personne mise en examen et saisisse le juge des libertés et de la détention aux fins de placement en détention, dans la même information et en raison des mêmes faits, sans qu'il soit besoin de constater l'existence de circonstances nouvelles.


Références :

1° :
2° :
Code de procédure pénale 145
Code de procédure pénale 207, 569

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris (chambre de l'instruction), 08 novembre 2004

Sur le n° 1 : A rapprocher : Chambre criminelle, 2001-05-09, Bulletin criminel, n° 111 (2), p. 342 (cassation sans renvoi). Sur le n° 2 : A rapprocher : Chambre criminelle, 1985-11-14, Bulletin criminel, n° 356, p. 910 (rejet) ; Chambre criminelle, 2003-09-03, Bulletin criminel, n° 152, p. 605 (irrecevabilité et rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 01 fév. 2005, pourvoi n°04-86768, Bull. crim. criminel 2005 N° 33 p. 94
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2005 N° 33 p. 94

Composition du Tribunal
Président : M. Cotte
Avocat général : M. Di Guardia.
Rapporteur ?: Mme Anzani.
Avocat(s) : la SCP Piwnica et Molinié.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2005:04.86768
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