AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que M. X... a été engagé par les laboratoires Bioharmonyl devenus Vitarmonyl le 1er septembre 1993 en qualité de directeur régional puis de "directeur compte clés "en relation avec les centrales d'achat de la grande distribution , chargé de la responsabilité des négociations avec les enseignes nationales des grandes et moyennes surfaces ; que le 13 juin 2000 il a été remplacé à son poste de "directeur compte clés " et s'est vu proposer le développement de nouveaux segments de distribution hors grandes et moyennes surfaces, proposition qu'il a refusée en invoquant une modification de son contrat ;
qu'après avoir saisi la juridiction prud'homale le 29 septembre 2000 d'une demande de résolution judiciaire de son contrat de travail, il a été licencié le 14 novembre pour faute grave en raison d'un abandon de ses fonctions ; que l'arrêt attaqué a écarté la faute grave mais dit que le licenciement avait une cause réelle et sérieuse ;
Sur le pourvoi incident de l'employeur qui est préalable :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir décidé que le licenciement ne reposait pas sur une faute grave alors, selon le moyen, que la nouvelle définition des fonctions de M. X... ne modifiait nullement sa qualification, sa classification et sa rémunération, qu'elle ne modifiait pas son degré de subordination à la direction générale et sa place dans l'organigramme ,et alors enfin que la circonstance que la tâche donnée à un salarié soit différente de celle qu'il effectuait antérieurement dès l'instant où elle correspond à sa qualification ne caractérise pas une modification du contrat de travail, la cour d'appel qui a considéré qu'il y avait eu modification du contrat n'a pas donné de base légale à sa décision en violation de l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel, après avoir rappelé que le salarié était depuis 1997 "directeur compte clé" chargé de développer la présence et l'implantation des produits Vitarmonyl et Biolane auprès de la grande distribution, a relevé que l'avenant au contrat de travail proposé en septembre 2000 s'il ne modifiait pas effectivement les conditions de rémunération du salarié, transformait néanmoins totalement ses attributions et le niveau de ses responsabilités puisqu'il n'était plus en charge de la grande distribution mais d'enseignes privées ramenant ses responsabilités à un niveau très inférieur ; qu'en l'état de ces constatations, elle a pu décider que l'employeur avait procédé à une modification du contrat de travail ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen du pourvoi principal du salarié :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le premier moyen du pourvoi principal :
Vu l'article L. 122-14-3 du Code du travail ;
Attendu que la cour d'appel, après avoir énoncé à bon droit que M. X... était en droit de refuser la modification de son contrat de travail, a décidé néanmoins que son licenciement avait une cause réelle et sérieuse ;
Attendu, cependant, que le seul refus d'un salarié d'accepter une modification de son contrat de travail ne constitue pas en soi une cause réelle et sérieuse de licenciement; qu'il appartenait dès lors à la cour d'appel de rechercher si la nécessité pour l'employeur de procéder à la modification du contrat de M. X... était justifiée ; que l'arrêt est dès lors dépourvu de base légale ;
Et attendu que la cassation du chef du licenciement entraîne par voie de conséquence la cassation sur le second moyen ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté la demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et pour procédés vexatoires, l'arrêt rendu le 5 décembre 2002, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Condamne la société Laboratoire Vitarmonyl aux dépens ;
Vu les articles 628 et 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit janvier deux mille cinq.