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25/01/2005 | FRANCE | N°96-19878

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 25 janvier 2005, 96-19878


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu qu'à la suite du décès de René X..., survenu le 20 juin 1994, sa veuve, avec laquelle il était marié depuis le 26 octobre 1959, mais dont il s'était séparé en fait, en 1992, et leurs deux filles ont assigné Mlle Y..., avec laquelle il vivait depuis lors en concubinage, en demandant l'annulation des libéralités consenties à son profit au cours des mois précédant son décès ; que l'arrêt attaqué a fait droit à leurs demandes et condamné Mlle Y... à rappor

ter à la succession de René X... la somme de 500 000 francs correspondant à deux c...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu qu'à la suite du décès de René X..., survenu le 20 juin 1994, sa veuve, avec laquelle il était marié depuis le 26 octobre 1959, mais dont il s'était séparé en fait, en 1992, et leurs deux filles ont assigné Mlle Y..., avec laquelle il vivait depuis lors en concubinage, en demandant l'annulation des libéralités consenties à son profit au cours des mois précédant son décès ; que l'arrêt attaqué a fait droit à leurs demandes et condamné Mlle Y... à rapporter à la succession de René X... la somme de 500 000 francs correspondant à deux contrats "Natio vie décès" souscrits à son profit le 31 mars 1993, la somme de 2 377 069 francs qui lui avait été versée en vertu d'un contrat d'assurance-vie souscrit en 1968 par suite de la substitution le 15 avril 1993 de son nom à celui de Mme X... comme bénéficiaire, ainsi que la somme de 462 273,51 francs, correspondant aux versements effectués sur un compte joint ouvert au nom de M. X... et de Mlle Y... entre le 26 mars 1993 et le 27 avril 1994 ;

Sur le premier moyen pris en sa deuxième branche :

Vu les articles 900, 1131 et 1133 du Code civil ;

Attendu que n'est pas nulle, comme ayant une cause contraire aux bonnes moeurs, la libéralité consentie à l'occasion d'une relation adultère ;

Attendu que, pour prononcer la nullité des deux contrats "Natio vie décès" souscrits par René X... au bénéfice de Mlle Y... et de la substitution du nom de cette dernière à celui de Mme X... comme bénéficiaire du contrat d'assurance-vie souscrit en 1968, et la condamner à rapporter à la succession de René X... la somme de 500 000 francs et à payer à Mme X... celle de 2 377 069 francs, la cour d'appel a retenu que ces donations indirectes n'avaient été consenties que pour poursuivre et maintenir une liaison adultère ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et sur le second moyen :

Vu l'article 223 du Code civil ;

Attendu que chaque époux peut librement disposer de ses gains et salaires après s'être acquitté des charges du mariage ;

Attendu que pour condamner Mlle Y... à rapporter à la succession de René X... l'intégralité des sommes déposées sur le compte joint ouvert à leurs deux noms, l'arrêt attaqué retient que le texte précité ne pouvait recevoir application, les époux X... étant mariés sous le régime légal antérieur à la loi du 13 juillet 1965 ;

Attendu cependant qu'aux termes de l'article 9, deuxième alinéa, de cette loi, les dispositions des articles 214 à 226 du Code civil s'appliquent à tous les époux, sans qu'il y ait lieu de considérer l'époque à laquelle le mariage a été célébré ou les conventions matrimoniales passées ;

Qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé par refus d'application le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur les première et troisième branches du premier moyen :

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 juin 1996, entre les parties, par la cour d'appel de Riom ;

remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;

Condamne les consorts X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande des consorts X... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq janvier deux mille cinq.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 96-19878
Date de la décision : 25/01/2005
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

1° CONTRATS ET OBLIGATIONS CONVENTIONNELLES - Cause - Cause illicite - Contrariété aux bonnes moeurs - Domaine d'application - Exclusion - Libéralité consentie à l'occasion d'une relation adultère.

1° DONATION - Nullité - Cas - Cause illicite - Contrariété aux bonnes moeurs - Domaine d'application - Exclusion - Libéralité consentie à l'occasion d'une relation adultère 1° ASSURANCE DE PERSONNES - Assurance-vie - Bénéficiaires - Modification ou substitution - Révocation du conjoint bénéficiaire au profit d'un tiers - Applications diverses - Conjoint substitué par la concubine.

1° N'est pas nulle, comme ayant une cause contraire aux bonnes moeurs, la libéralité consentie à l'occasion d'une relation adultère. En conséquence, viole les articles 900, 1131 et 1133 du Code civil la cour d'appel qui, pour prononcer la nullité de contrats d'assurance-vie dont le souscripteur a fait bénéficier sa compagne, retient que ces donations indirectes n'ont été consenties que pour poursuivre et maintenir une relation adultère.

2° MARIAGE - Devoirs et droits respectifs des époux - Pouvoirs de chaque époux sur ses gains et salaires - Etendue - Détermination - Portée.

2° LOIS ET REGLEMENTS - Application - Application immédiate - Cas - Loi n° du 13 juillet 1965 - Dispositions relatives aux devoirs et droits respectifs des époux.

2° Viole l'article 223 du Code civil, la cour d'appel qui, pour condamner la compagne du défunt à rapporter à la succession l'intégralité des sommes déposées sur leur compte joint, retient que ce texte ne peut recevoir application, au motif que le défunt et son épouse étaient mariés sous le régime légal antérieur à celui de la loi du 13 juillet 1965, alors qu'il résulte de l'article 9, alinéa 2, de cette loi que les dispositions des articles 214 à 226 du Code civil s'appliquent à tous les époux, sans qu'il y ait lieu de considérer l'époque à laquelle le mariage a été célébré ou les conventions matrimoniales passées.


Références :

1° :
2° :
2° :
Code civil 223, 214 à 226
Code civil 900, 1131, 1133
Loi 65-570 du 13 juillet 1965 art. 9 al. 2

Décision attaquée : Cour d'appel de Riom, 18 juin 1996

Sur le n° 1 : Dans le même sens que : Chambre civile 1, 1999-02-03, Bulletin 1999, I, n° 43, p. 29 (cassation) ; Assemblée plénière, 2004-10-29, Bulletin 2004, Assemblée plénière, n° 12, p. 27 (cassation). Evolution par rapport à : Chambre civile 1, 1982-11-04, Bulletin 1982, I, n° 319, p. 274 (rejet), et les arrêts cités. Sur le n° 2 : A rapprocher : Chambre civile 1, 1984-02-29, Bulletin 1984, I, n° 80, p. 65 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 25 jan. 2005, pourvoi n°96-19878, Bull. civ. 2005 I N° 35 p. 27
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2005 I N° 35 p. 27

Composition du Tribunal
Président : M. Renard-Payen, conseiller doyen faisant fonction.
Rapporteur ?: M. Ta¨y.
Avocat(s) : Me Bouthors, la SCP Masse-Dessen et Thouvenin.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2005:96.19878
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