AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à la société Financière du Forum de son désistement envers la société Résidence Prestige ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 511-33 du Code monétaire et financier, ensemble l'article 10 du Code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Résidence Prestige a fait édifier en Martinique, en 1989, un ensemble immobilier qu'elle a commercialisé par appartements en état futur d'achèvement avec une garantie intrinsèque résultant notamment de la participation financière du Crédit Martiniquais aux droits duquel se trouve la société Financière du Forum lequel avait attesté "avoir accordé à sa cliente un crédit confirmé de 13 000 000 francs pour parfaire le financement de l'opération immobilière..." ; que l'opération ayant été abandonnée avant son terme et les acquéreurs ayant été contraints de supporter chacun le paiement d'une somme supplémentaire de 200 000 francs pour achever la construction, les intéressés, alors constitués en Syndicat de copropriété, le Syndicat des copropriétaires "Les Sommets de l'Anse Mitan", ont fait assigner la société Résidence Prestige et le Crédit Martiniquais en paiement de ce surcoût ; qu'ayant vainement invité la banque à lui communiquer les factures et les justificatifs des sommes encaissées et décaissées, le syndicat des Copropriétaires "Les Sommets de l'Anse Mitan" a demandé judiciairement de la condamner sous astreinte à cette production ;
Attendu que pour accueillir cette demande, l'arrêt retient, d'abord, que le Syndicat des copropriétaires "Les Sommets de l'Anse Mitan", qui poursuit l'indemnisation du coût des travaux nécessaires à l'achèvement de la résidence, justifie d'un intérêt légitime à l'obtention des pièces relatives au financement des travaux, qu'elles soient détenues par la société Résidence Prestige ou par le Crédit Martiniquais, celles-ci étant en outre susceptibles de lui permettre d'engager d'autres procédures à l'encontre d'autres personnes distinctes, et, ensuite, que si l'exécution des relations contractuelles entre le banquier et son client sont couvertes par le secret bancaire, ce secret, qui n'est pas absolu, n'est pas opposable par le banquier lorsque la demande est dirigée contre lui ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que s'il était légitime d'exiger de la banque qu'elle démontre avoir délivré le crédit confirmé conformément aux engagements bénéficiant aux acquéreurs, en revanche, en tant qu'ils étaient relatifs au fonctionnement d'un compte bancaire ou susceptibles de comporter des informations dont le Crédit Martiniquais avait eu connaissance dans l'exercice de son activité professionnelle, les documents réclamés pour permettre d'établir la destination donnée aux fonds perçus par le promoteur pour construire la résidence inachevée étaient couverts par le secret bancaire dont le Syndicat des copropriétaires "Les Sommets de l'Anse Mitan" n'était pas bénéficiaire et ce secret constituait un empêchement légitime opposable au juge civil hors les cas, qui n'étaient pas réalisés en l'espèce, prévus par la loi, ce dont il se déduisait que bien qu'ayant la qualité de partie au litige, la banque était fondée à l'opposer pour refuser la communication sollicitée, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 décembre 2002, entre les parties, par la cour d'appel de Fort-de-France ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Basse-Terre ;
Condamne le Syndicat des copropriétaires Les Sommets de l'Anse Mitan aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq janvier deux mille cinq.