AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen, pris en ses quatre branches :
Vu les articles 21-13 du Code civil et 17 du décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;
Attendu qu'il résulte du premier de ces textes que peuvent réclamer la nationalité française par déclaration, les personnes qui ont joui, d'une façon constante, de la possession d'état de Français, pendant les dix années précédant leur déclaration et du second que le déclarant doit fournir notamment tous documents émanant des autorités françaises justifiant qu'il jouit de façon constante de la possession d'état de Français depuis dix ans tels que carte nationale d'identité, passeport français, carte d'électeur, pièces militaires, immatriculation dans les consulats de France ainsi que, le cas échéant, le jugement ou la décision administrative lui opposant son extranéité ;
Attendu que pour infirmer le jugement du tribunal de grande instance ayant décidé que M. X... avait acquis la nationalité française par la possession d'état et constater son extranéité, l'arrêt retient qu'un certificat de nationalité française délivré le 21 février 1986 par le juge du tribunal d'instance de Romans-sur-Isère a été annulé par jugement définitif du 5 mai 1993 signifié régulièrement à l'intéressé, en mairie, le 17 mai 1993, à l'adresse qu'il avait lui-même déclarée, de sorte que depuis cette date, M. X..., réputé avoir eu connaissance de son extranéité, ne peut invoquer la possession d'état de Français de bonne foi ; qu'il ajoute que, depuis la date de ce jugement ayant acquis force de chose jugée, l'Etat français n'a pas reconnu le déclarant comme Français ;
Attendu qu'il résulte cependant des constatations des juges du fond qu'étaient produits un second certificat de nationalité française du 23 février 1988, une carte nationale d'identité du 13 mai 1988, valable jusqu'au 13 mai 1998, un passeport établi le 8 septembre 1993 et des cartes d'électeurs utilisées lors de scrutins en 1995, 1997 et 1998 ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher d'abord si ces éléments n'étaient pas constitutifs d'une possession d'état et ensuite si M. X..., ainsi qu'il le soutenait, n'avait pas connu la décision du 5 mai 1993 tardivement, à une date proche de sa déclaration du 26 juin 1998, la cour d'appel n'a donné de base légale à sa décision ni au regard de l'article 17 du décret du 30 décembre 1993 qui implique que l'intéressé connaisse son extranéité ni à celui de l'article 21-13 du Code civil qui suppose seulement que le réclamant souscrive sa déclaration dans un délai raisonnable à compter de cette connaissance ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 octobre 2002, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Laisse les dépens à la charge du Trésor public ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de M. X... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille cinq.