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22/09/2004 | FRANCE | N°03-83222

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 22 septembre 2004, 03-83222


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-deux septembre deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire SOULARD, les observations de Me FOUSSARD, de la société civile professionnelle CELICE, BLANCPAIN et SOLTNER, et de la société civile professionnelle PARMENTIER et DIDIER, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LAUNAY ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- X... Chrétien,

- L'ADMIN

ISTRATION DES DOUANES ET DES DROITS INDIRECTS, partie poursuivante,

contre l'arrêt de la...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-deux septembre deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire SOULARD, les observations de Me FOUSSARD, de la société civile professionnelle CELICE, BLANCPAIN et SOLTNER, et de la société civile professionnelle PARMENTIER et DIDIER, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LAUNAY ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- X... Chrétien,

- L'ADMINISTRATION DES DOUANES ET DES DROITS INDIRECTS, partie poursuivante,

contre l'arrêt de la cour d'appel de COLMAR, chambre correctionnelle, en date du 16 octobre 2002, qui, pour infractions à la réglementation relative à l'organisation et à l'assainissement du marché du vin, a condamné le premier à des amendes et à des pénalités fiscales, a débouté l'administration des Douanes de sa demande tendant à l'arrachage des plantations irrégulières et a prononcé sur les intérêts civils ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

I - Sur le pourvoi de Chrétien X... :

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 36 et 37 du décret n° 53-977 du 30 septembre 1953 et 1er et 2 de l'ordonnance n° 59-125 du 7 janvier 1959, 388 et 593 du Code de procédure pénale, manque de base légale et contradiction de motifs ;

"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé le jugement et considéré que les premiers juges avaient fait une exacte application des textes légaux en prononçant des amendes fiscales pour chacune des parcelles sur lesquelles aurait été constatée une infraction ;

"aux motifs que "vu le jugement, rendu le 3 mai 2001 par le tribunal correctionnel de Colmar qui, sur des poursuites à l'encontre de Chrétien X... pour avoir commis I'infraction d'absence de déclaration conforme de récolte de raisins par producteur de vin, du 16/02/1996 au 20/03/1996, à Heiligenstein-Goxwiller-Obernai, Bern, infraction prévue par l'article 407 du Code général des Impôts, l'article 267-Octies du Code général des impôts, annexe II, I'article 169-bis du Code général des impôts, annexe III, les articles 12 alinéa 1, 15, 18 du Code du vin, l'article 18 1 du règlement de la Communauté européenne 01-1282 du 28/06/2001 et réprimée par les articles 1791, 1794-3 , 1800, 1804-B, 1818 du Code général des Impôts, l'article 21 du Code du vin" ;

"et que c'est, sans insuffisance ni contrariété de motifs et par une juste appréciation des faits et des circonstances de la cause tels qu'ils ont été relatés dans le jugement déféré en un exposé que la Cour adopte, que les premiers juges ont déclaré fondée la prévention à l'encontre de Chrétien X... et qu'ils ont prononcé une relaxe partielle ;

"alors que la cour d'appel n'avait été saisie que des faits visés dans l'assignation à comparaître délivrée le 22 décembre 1999 à Chrétien X..., constitutifs des infractions de défaut de déclaration de plantation de vignes et de plantations sans droits de vignes ; de sorte qu'en condamnant Chrétien X... pour avoir commis l'infraction différente d'absence de déclaration conforme de récolte de raisin, alors que les éléments constitutifs de cette infraction n'étaient pas caractérisés, la cour d'appel a violé l'article 388 du Code pénal ;

"alors, en outre, que le jugement du 3 mai 2001 avait condamné Chrétien X... en raison de la commission des infractions de défaut de déclaration de plantation de vignes et de plantations sans droits de vignes ; qu'en énonçant, pour statuer comme elle l'a fait, que le tribunal avait condamné Chrétien X... pour avoir commis l'infraction (totalement distincte) d'absence de déclaration conforme de récolte de raisins par producteur de vin, tout en déclarant adopter les motifs des premiers juges, la cour d'appel a entaché sa décision de contradiction de motifs, en violation de l'article 593 du Code de procédure pénale ;

"alors, enfin, qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 36 et 37 du décret du 30 septembre 1953 et 1er et 2 de l'ordonnance du 7 janvier 1959" ;

Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que Chrétien X... n'a été déclaré coupable que des chefs de défaut de déclaration de plantation de vignes et de plantation sans droit de vignes ;

Qu'ainsi le moyen manque en fait ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 36 et 37 du décret du 30 septembre 1953 et 1 et 2 de l'ordonnance du 7 janvier 1959, 593 du Code de procédure pénale, manque de base légale et défaut de motifs ;

"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé le jugement entrepris sur la culpabilité de Chrétien X... et condamné celui-ci à un total d'amendes fiscales de 44 819,98 euros et à 25 amendes de 750 euros ;

"aux motifs que c'est sans insuffisance ni contrariété de motifs et par une juste appréciation des faits et des circonstances de la cause tels qu'ils ont été relatés dans le jugement déféré en un exposé que la Cour adopte, que les premiers juges ont déclaré fondée la prévention à l'encontre de Chrétien X... et qu'ils ont prononcé une relaxe partielle ; il ressort du dossier, des débats et plus particulièrement des constatations claires et précises du rédacteur du procès-verbal du 6 janvier 1997 que le prévenu, propriétaire d'un domaine viticole important, a méconnu les dispositions impératives en matière de plantation et d'arrachage des vignes dans une zone d'appellation contrôlée ; qu'il n'a pas jugé utile d'assister ni aux opérations de contrôle, ni à la rédaction du procès-verbal ; Chrétien X... n'a jamais contesté sérieusement la matérialité des infractions ; il soutient pour l'essentiel qu'il a respecté ses obligations déclaratives et surtout qu'il a vendu son domaine à la Safer qui a redistribué les terres à d'autres exploitants, qui à présent récoltent les fruits de son propre travail ; il convient d'observer que les contestations actuelles du prévenu sont inopérantes alors qu'il avait accepté de transiger avec l'administration des Douanes sans respecter ses engagements pour des motifs purement financiers, qu'il demeure muet sur l'emploi des fonds qu'il a pu percevoir lors de la vente de son entreprise ; en conséquence, le jugement déféré doit être confirmé sur la culpabilité, le tribunal ayant tenu compte des explications de la partie poursuivante ;

"alors que Chrétien X... justifiait du caractère exploitable d'un grand nombre de parcelles visées par la prévention ; qu'il faisait ainsi par exemple valoir que les parcelles 7 et 260 situés sur la commune d'Obernai figuraient dans le casier viticole de 1993 ; de sorte qu'en se bornant pour déclarer Chrétien X... coupable des infractions qui lui étaient reprochées à estimer qu'il n'avait jamais contesté sérieusement la matérialité des infractions, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 36 et 37 du décret du 30 septembre 1953 ;

"alors, en outre, que la transaction acceptée par Chrétien X... avait pour objet d'éteindre globalement les poursuites initiées par l'assignation du 22 décembre 1998, et pour contrepartie l'engagement de l'administration des Douanes de ne pas le poursuivre aux fins de le voir condamner à des peines plus importantes ; qu'elle ne valait en aucune manière renoncement à contester la matérialité de l'infraction devant la même juridiction pénale si les poursuites n'étaient pas abandonnées par l'Administration, de sorte, qu'en considérant que les contestations du prévenu étaient inopérantes dès lors qu'il avait accepté de transiger avec l'administration des Douanes, la cour d'appel a derechef privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés" ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu'intentionnel, les délits dont elle a déclaré le prévenu coupable ;

D'où il suit que le moyen qui se borne a remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;

II - Sur le pourvoi de l'administration des Douanes ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de l'article 2 de l'ordonnance n° 59-125 du 7 janvier 1959 ensemble les articles 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs ;

"en ce que, après avoir constaté des défauts de déclaration de plantation de vignes et des plantations de vignes sans droit, et infligé à Chrétien X... des amendes fiscales, l'arrêt attaqué a refusé d'ordonner l'arrachage des vignes irrégulièrement plantées ;

"aux motifs que les premiers juges ont refusé de faire droit à cette demande au motif que Chrétien X... n'est plus propriétaire des vignes litigieuses ;

que cette solution est justifiée ; qu'en effet, son application aboutirait à une pénalisation des vignerons qui ont repris les parcelles et que le prévenu ne peut exécuter une mesure sur un bien dont il s'est dessaisi dans des conditions a priori régulières ; que l'Administration lutte pour la sauvegarde du patrimoine vini-viticole, elle ne pourra que se retourner contre le propriétaire actuel des vignes ;

"alors que, mesure de caractère réel destinée à faire disparaître l'illégalité commise, l'arrachage des vignes, en conséquence de plantations irrégulières, doit être prononcée par le juge quel que soit le propriétaire de la parcelle au moment où le juge statue ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé l'article 2 de l'ordonnance n° 59-125 du 7 janvier 1959" ;

Vu l'article 2 de l'ordonnance du 7 janvier 1959 ;

Attendu que, selon ce texte, en cas d'infraction aux dispositions relatives aux plantations ou aux déclarations de plantation de vignes, le juge est tenu d'ordonner l'arrachage des plantations irrégulières, quel qu'en soit le propriétaire ;

Attendu qu'après avoir déclaré Chrétien X... coupable de défaut de déclaration de plantation de vignes et de plantation sans droit de vignes, la cour d'appel a rejeté la demande de l'administration des Douanes tendant à ce que soit ordonné l'arrachage des vignes, au motif que celles-ci n'étaient plus la propriété du prévenu ;

Mais attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée du texte susvisé ;

D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;

Par ces motifs,

CASSE ET ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Colmar, en date du 16 octobre 2002, mais en ses seules dispositions ayant condamné Chrétien X... à des amendes et pénalités fiscales et ayant rejeté la demande de l'administration des Douanes tendant à l'arrachage des vignes, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée ;

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Reims, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Colmar et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

CONDAMNE Chrétien X... à verser à l'Institut national des appelations d'origine la somme de 2 000 euros au titre de l'article 618-1 du Code de procédure pénale ;

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du Code de procédure pénale au profit de Chrétien X... ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Cotte président, M. Soulard conseiller rapporteur, MM. Pibouleau, Challe, Roger, Dulin, Mmes Thin, Desgrange, MM. Rognon, Chanut conseillers de la chambre, Mmes de la Lance, Salmeron, Guihal conseillers référendaires ;

Avocat général : M. Launay ;

Greffier de chambre : Mme Lambert ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 03-83222
Date de la décision : 22/09/2004
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

IMPOTS ET TAXES - Impôts indirects et droits d'enregistrement - Dispositions spécifiques à certaines marchandises ou prestations - Vins - Infractions aux dispositions relatives aux plantations ou aux déclarations de plantation de vignes - Arrachage des plantations irrégulières - Obligation.

Il résulte de l'article 2 de l'ordonnance du 7 janvier 1959 qu'en cas d'infraction aux dispositions relatives aux plantations ou aux déclarations de plantation de vignes, le juge est tenu d'ordonner l'arrachage des plantations irrégulières, quel qu'en soit le propriétaire. Méconnaît le sens de ce texte la cour d'appel qui, après avoir déclaré le prévenu coupable de défaut de déclaration de plantation de vignes et de plantation sans droit de vignes, rejette la demande de l'administration des Douanes tendant à ce que soit ordonné l'arrachage des vignes, au motif que celles-ci ne sont plus la propriété du prévenu.


Références :

Ordonnance 59-125 du 07 janvier 1959 art. 2

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 16 octobre 2002

A rapprocher : Chambre criminelle, 1968-01-17, Bulletin criminel, n° 14, p. 29 (cassation partielle).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 22 sep. 2004, pourvoi n°03-83222, Bull. crim. criminel 2004 N° 221 p. 790
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2004 N° 221 p. 790

Composition du Tribunal
Président : M. Cotte
Avocat général : M. Launay.
Rapporteur ?: M. Soulard.
Avocat(s) : Me Foussard, la SCP Célice, Blancpain et Soltner, la SCP Parmentier et Didier.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2004:03.83222
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