AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quinze septembre deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller KOERING-JOULIN, les observations de la société civile professionnelle MASSE-DESSEN et THOUVENIN, et de Me RICARD, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général CHEMITHE ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Richard,
contre l'arrêt de la cour d'appel de DIJON, chambre correctionnelle, en date du 26 septembre 2003, qui, pour agression et exhibition sexuelles, l'a condamné à 15 mois d'emprisonnement avec sursis et mise à l'épreuve, et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 49 du Code de procédure pénale, 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme, 591 et 593 du Code de procédure pénale, contradiction et défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que la cour d'appel était présidée par M. A, assisté lors des débats et du délibéré, par M. Y ainsi que par M. Z, ce dernier magistrat ayant siégé à la chambre de l'instruction qui, par arrêt du 30 octobre 2002, avait confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue dans le cadre de l'information ouverte sur la plainte du prévenu du chef d'établissement d'attestations faisant état de faits matériellement inexacts ;
"alors que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal impartial et indépendant ; que la chambre correctionnelle, qui, au vu des déclarations de la partie civile et d'autres infirmières, a confirmé le jugement déféré sur la déclaration de culpabilité, était composée notamment d'un conseiller qui avait participé à la formation de la chambre de l'instruction s'étant prononcée dans le cadre de l'information ouverte sur plainte du prévenu pour faux témoignage et dénonciation calomnieuse, laquelle avait abouti à une décision de non-lieu au vu, notamment, de l'enquête et des pièces tirées de l'information suivie contre le prévenu ; que, dans le cadre de cette formation, le magistrat avait donc déjà examiné la valeur des charges sur le fondement desquelles le prévenu a été poursuivi puis condamné, en sorte qu'un risque objectif de partialité s'inférait de la composition de la cour d'appel qui, dans sa formation de jugement, n'était donc pas régulière" ;
Vu l'article préliminaire du Code de procédure pénale et l'article 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
Attendu que ne peuvent faire partie de la chambre des appels correctionnels les magistrats qui, dans l'affaire soumise à cette juridiction, ont composé la chambre de l'instruction ayant examiné la valeur probante de déclarations à charge qui servaient de fondement aux poursuites ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que l'un des conseillers figurait parmi les membres de la chambre de l'instruction qui, par arrêt du 30 octobre 2002, a confirmé l'ordonnance de non-lieu intervenue dans le cadre de l'information ouverte, sur la plainte de Richard X..., du chef de faux, à l'encontre de la partie civile et de trois témoins, dont les déclarations à charge constituaient les seuls éléments probatoires des faits poursuivis ;
Mais attendu que ce magistrat ne pouvait, sans méconnaître l'exigence d'impartialité, composer la chambre correctionnelle appelée à juger l'intéressé à raison des faits dénoncés par la partie civile et les trois témoins ;
D'où il suit que l'arrêt rendu par la chambre des appels correctionnels, irrégulièrement composée, encourt la cassation ;
Par ces motifs,
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Dijon, en date du 26 septembre 2003, et, pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Besançon, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Dijon, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Cotte président, Mme Koering-Joulin conseiller rapporteur, MM. Le Gall, Pelletier, Mme Ponroy, MM. Arnould, Corneloup, Mme Guirimand conseillers de la chambre, M. Sassoust, Mme Caron, M. Lemoine, Mme Degorce conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Chemithe ;
Greffier de chambre : Mme Krawiec ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;